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63. Ce que vous avez de plus cher


2700 mots (désolé, le chapitre est plus long, ça n'avait aucun sens de le couper en morceaux)


Ceto vous tentera avec ce que vous avez de plus cher.

C'était ce qu'avait dit Nadira-Livenn-Shani, ce qu'ils avaient conclu.

Othon avait soif. Mais c'était là le seul défaut de son rêve. Il marchait sous une lumière éclatante, d'une douceur rassurante comme les bras d'une mère. Il se sentait heureux. Les cauchemars précédents disparaissaient, relégués en arrière-plan de sa mémoire ; ne restait que la certitude d'avoir quitté une situation sans issue, d'avoir enfin retrouvé la paix et la sécurité.

Il marchait sur un chemin de rocaille, entre deux champs en jachère où l'herbe à foin poussait dru, et savoir cette terre nourricière, productive, bienveillante, l'emplit de joie.

Il marcha jusqu'à ce qu'apparaisse, derrière la colline, le sommet d'une petite maison de ferme en bois. Il traversa un champ de fleurs sauvages qui sentaient bon, où butinaient des guénidons gros comme la paume de la main, dans un bourdonnement de stentor. Ces sons et ces odeurs l'apaisaient. Il retrouvait les bienfaits de la contemplation paisible de la nature, attachée au plus profond de l'esprit des solains, car issue de leur héritage génétique humain.

Devant l'entrée de la maison, à l'abri d'un petit éventail de toile, quelqu'un était assis, ou à demi allongé dans une chaise à six pieds. Othon ne vit d'elle qu'une chevelue abondante, des vêtements amples d'été dont l'étoffe retombait sur les accoudoirs, et devina qu'elle n'avait pas de cornes.

Il hésita à avancer encore, car c'est souvent à ce moment-là que le rêve rompt ses promesses et s'effondre en pâle répétition partielle de nos souvenirs, comme si nous n'en méritions pas l'intégralité.

« Othon ? »

C'était bien la voix de Livenn. C'était bien son visage, nimbé de cette clarté irréelle. Elle semblait plus mûre de quelques années.

Les yeux fermés, elle se gorgeait de lumière. Un jeune loup-argent reposait à ses pieds, endormi jusqu'à présent, qui releva à peine la tête lorsqu'Othon s'approcha.

« Qu'est-ce que tu fais ici ? demanda-t-elle.

— Eh bien, j'étais là-bas, dit-il gauchement, désignant le chemin qui menait à la maison, et maintenant... je suis... je suis là. Et toi ? Qu'est-ce que tu fais ici ? Est-ce que nous sommes toujours à Sol Finis ?

— Beaucoup de questions » dit-elle en se levant.

Le loup-argent bondit, fit le tour de la chaise et entreprit de trouver une occupation, comme jouer avec la moindre brindille rencontrant son chemin, ou courser les guénidons, qui s'enfuyaient à son approche avec la grâce de phacochères volants.

Livenn était vêtue de blanc. Cela accentuait la lumière. Othon se prit à espérer que rien ne viendrait troubler ce moment de retrouvailles, que personne ne sortirait de la maison en demandant qui leur rendait visite, ni mari jaloux, ni enfant turbulent. C'était s'avouer qu'il désirait Livenn. Qu'il l'aimait peut-être. Livenn, et non pas la réincarnation de Nadira, ou la magerêve, ou quoi que ce soit qu'elle fût devenue... Livenn, ce qu'elle aurait toujours dû être exclusivement, ce qui lui allait le mieux.

« Je suis heureux de te revoir, avoua-t-il.

— Moi aussi. »

Elle l'invita dans ses bras. Ils s'enlacèrent longuement, leurs mains se joignirent et formèrent un symbole de lien. C'était répondre par l'affirmative à la question qu'il n'avait jamais su formuler.

Othon se sentit effrayé et heureux.

« Mais il faut que je m'en aille, se rendit-il compte.

— Que peux-tu trouver de mieux, là où tu vas ? »

Si difficile de répondre ! Il se souvenait de visages, de noms inconnus. Des solains. Des centaines de solains qu'ils devaient sauver... sauver de quoi ? Tout semblait pour le mieux. La lumière était généreuse, la terre donnait ses fruits ; pourquoi abandonner un monde que les dieux avaient créé pour eux ? Tourner le dos à cette création, n'était-ce pas la pire des vanités ? S'estimer indépendants de leurs pères créateurs, n'était-ce pas la pire manière de les récompenser ? Et quelle rétribution méritaient-ils, ceux qui s'enfonceraient dans les ombres de l'espace, à la recherche d'illusoires mondes lointains ?

« Où vas-tu, d'ailleurs ? » s'impatienta Livenn.

L'étreinte sur son bras se fit puissante, impérieuse, comme s'il s'agissait là de la meilleure manière de le garder près d'elle. Mais Othon avait déjà basculé. Il savait que son avenir se trouvait ailleurs.

« Je n'ai jamais pu te dire au revoir, se souvint-il. Au revoir, Livenn. »

Il arracha son bras, fit quelques pas en arrière. S'écartant du rêve, tout lui semblait faux. Que pouvait-elle faire ici alors que Shani-Livenn se trouvait devant eux, qu'elle leur ouvrait la voie vers les Étoiles ? Et la vérité se fit jour : ce n'était pas Livenn, mais l'ultime création de son désir, la tentative finale de Ceto de le garder ici.

« Je suis désolé. Il est temps que je l'accepte.

— Tu n'y gagneras rien. Tu souffriras plus longtemps. Stella Medius durera une éternité pour vous.

— Je préfère me battre contre la réalité plutôt que de m'enfoncer dans les illusions. »

On a tort de croire que cette décision est naturelle à tous les solains ; ils n'étaient que trois mille à ne pas avoir sombré dans les griffes du Fléau.

« Quand bien même la réalité n'a plus rien à t'apporter ?

— Je nourris l'espoir, et je fais le pari, qu'il y a un monde pour nous, au-delà, dans cet univers dont les dieux nous ont privé.

— Je voulais tous vous sauver, Othon. Je voulais vous libérer.

— Nous n'avons pas besoin de toi. »

Le jeune solain tourna le dos et commença sa marche. Le rêve s'écaillait et Livenn, debout, le regardant fixement, en fut le tout dernier aspect tangible – après elle, il n'y eut plus que l'obscurité.


***


Seryn était étendue contre la pierre.

Son réveil fut abrupt ; elle se redressa en un instant. Sa jambe gauche manqua de la lâcher. Elle appela son bâton de commandement, mais n'eut pas de réponse des Arcs. Encore un rêve dans un rêve, une toile alambiquée sur laquelle son esprit ne trouvait pas de prise.

La terre désolée de la bordure, pierre nue fracturée de crevasses où disparaissait toute l'eau du monde, s'étendait autour d'elle comme une malédiction. Les tours de Téralis surgissaient de la brume lointaine, présageant les Confins. Ruminant sa science, cherchant toujours un moyen de capitaliser sa maîtrise des Arcs, elle boita dans la direction de la cité.

Elle y fut en quelques instants – la lumière n'avait pas changé. Hormis ses portes fracassées par le poing d'un géant, Téralis était vide, comme abandonnée la veille. Le prince Eil avait-il mis ses menaces à exécution ? Avait-il décidé de retirer la garnison ? Était-elle seule, le dernier rempart de Sol Finis ?

Seule, comme elle l'avait toujours craint ?

Seryn secoua le tatouage sur sa paume. Le symbole ne répondait pas. Aucun lieutenant fidèle pour se tenir à ses côtés. Elle sut qu'ils avaient fait leur temps ; accompli leur mission. Pourtant jeune aux standards des solains, trente-cinq années au plus, Seryn se sentait vieillir. Ses tatouages masquaient de profondes cicatrices ; elle boitait de plus en plus, pestant contre sa jambe gauche qu'elle devait traîner à chaque marche.

Ce devait être la dernière épreuve.

Vous ne m'aurez pas, se dit-elle. Vous ne m'avez jamais eu. Chaque fois que vous avez cru m'affaiblir, je suis devenue plus forte. Chaque fois que vous avez cru me repousser, j'ai riposté. Je ne cauchemarde pas des démons ; je suis leur cauchemar. Il y a deux murs à Téralis. L'un est fait de pierre. L'autre, c'est moi.

L'autre, c'est moi, répéta-t-elle à haute voix en montant au sommet d'une des tours-phares.

La forteresse vide, elle serait la seule gardienne du phare.

Puis Seryn baissa le regard en direction du mur bâti par les solains pour fermer le col. Il était éventré. Depuis fort longtemps, Téralis avait été abandonnée et coupée en deux. Seryn avait failli par son absence et revenait sur le lieu de son échec.

Elle tourna la tête vers l'intérieur du royaume. Ceto avait terminé son œuvre. Anéanti, Sol Finis prenait son dernier repos.

« Les solains sont déjà partis. Ils ne t'ont pas attendue. »

Accoudé à la barrière, son frère la regardait. L'armure de guerre qui alourdissait ses épaules contrastait avec son visage juvénile. Une étrange expression, neutre, était peinte sur son visage, comme s'il n'était pas satisfait de la voir, après une longue attente.

Son seul réflexe fut de demander :

« Ceto ?

— Tu sais très bien que ce nom a changé de mains. »

Il ne bougeait pas, comme paralysé, l'invitant tacitement à la même torpeur. Plus rien ne vivait sur Sol Finis. Le balancier des éléments allait et venait en s'affaiblissant sur ce monde minéral, privé de toute source d'énergie.

« Nous avons tout perdu pour eux.

— Qui ça ? Les Sermanéens ?

— Non, Seryn, les solains. Nous nous sommes battus pour leur survie. Nous avons protégé le royaume plus longtemps qu'il ne le méritait. Ils ne nous ont jamais récompensé pour cela. Ils n'ont pas élevé de statue à nos morts. Nous étions loin de la Capitale ; ils nous oubliaient. Et lorsque le mal est venu frapper à leurs portes, ils sont partis – en nous laissant derrière. »

C'est impossible, se dit-elle.

« Tu étais à leur tête, Seryn, et l'instant d'après, tu n'étais plus rien pour eux. Ils ne sont pas reconnaissants. Ce sont des enfants gâtés, sans courage et sans cœur pour ceux qui les ont défendus. Ils se défont de nous, car nous incarnons le souvenir de leurs temps difficiles. Ils préfèrent les chansons de geste, avec des héros fictifs pour qui l'histoire se termine bien. Ils nous détestent pour notre réalité.

— Je suis désolée. Pour toi. Pour les autres.

— Ce n'est rien. Tu n'étais pas encore primagister lorsque ce démon m'a pris mon nom. Il valait mieux disparaître tout à fait que survivre comme Nadira a tenté de le faire, comme une ombre... »

Comme si ce prénom était un appel, son frère s'effaça et sa sœur vint le remplacer. Elle souriait, avec ses beaux cheveux noirs et ce bandeau coquet qui masquait ses yeux morts.

« Il est parti, dit-elle. Ils sont tous partis. Mais nous avons un monde à reconstruire, toi et moi.

— Crois-tu ?

— On peut rebâtir quelque chose sur Sol Finis. Tout ce qui avait fait ce monde est encore là.

— Sauf la lumière.

— On peut très bien vivre sans lumière. Regarde-moi. »

Nadira marchait le long de la balustrade ; Seryn se sentit obligée de la suivre. Elle avait peu échangé avec sa sœur. Après le choc de la disparition de son frère, elle avait bien tenté de se rapprocher de la magerêve... pour apprendre quelques semaines plus tard, par maître Wei, l'échec de sa tentative de traversée de la Noosphère.

« Tout a été pris pour être redistribué. Il suffit que quelqu'un aie la volonté de replanter ces graines.

— Je veux partir, Nadira.

— Si tu pars, tu me laisseras en arrière.

— Je m'y suis déjà décidée.

— Pas seulement moi. Tous tes souvenirs de ce monde finiront par s'envoler. Tous les endroits où tu as vécu. Toutes les âmes que tu as croisées. Ils sont encore là, quelque part, en sommeil dans la panse de Ceto. Pourquoi ne pas leur donner une deuxième chance ?

— Plus rien de tout ceci n'est réel. C'est un non-monde qui nous détruira petit à petit, en se nourrissant de nous pour exister.

— Rien de mieux ne vous attend.

— Tu n'en sais rien. Je suis désolée, Nadira. »

Elle tendit la main, hésitante, mais referma le poing et ramena son bras à elle. Seryn avait tranché. Ses responsabilités la guidaient ailleurs.


***


Néa avait perdu son bras quelques minutes à peine avant le début du voyage. Elle ne fut pas surprise de le retrouver.

Un plafond de verre, une immense coupole de vitraux, s'étendait au-dessus d'elle. Un dallage de marbre lui répondait, qu'elle foulait avec des souliers de vair, traînant derrière elle une robe longue de cérémonie. Néa passa une main dans ses cheveux.

Une marée de solains avait formé un demi-cercle devant elle. La primagister Seryn, vieillie de quelques années, appuyée sur une canne, en émergea. Elle la regardait en souriant.

Qu'ai-je fait ? Se demanda-t-elle. Sommes-nous enfin arrivés ?

« Merci, Néa » dit Seryn.

Les deux ou trois cent solains se joignirent à elle en un seul geste. Mains jointes, croisées, les paumes collées. L'honneur. Ils la remerciaient.

Pourquoi ?

« Vous avez sauvé la race des solains » dit Seryn.

Les solains firent des symboles affirmatifs.

« Je... »

Néa promena son regard sur cette assemblée. Ils semblaient si sûrs d'eux. Même pour quelqu'un qui ne désire pas les honneurs, il est parfois difficile de les accepter.

« Vous nous avez sauvé » répétèrent les figures en chœur.

Ils avaient l'air joyeux et bien portant, sans commune mesure avec ces êtres inquiets, amaigris, au regard fuyant, rassemblés comme du bétail sur la cour des annonces... et leurs hurlements lorsque le bouclier des maîtres d'Arcs s'était brisé, les démons se déversant sur eux en une pluie mortelle...

« Je n'avais rien pu prévoir. Je n'ai rien pu faire. Je n'ai fait que suivre...

— Merci, Néa, répéta Seryn.

— Arrêtez ! Arrêtez ! » cria-t-elle en fermant les yeux et en écrasant ses mains contre ses oreilles.

Elle entendit un souffle. Tout s'était envolé, il n'y eut plus rien qu'elle et une silhouette noire sur cette terre dévastée des Confins.

« Je me suis peut-être trompé sur ton compte, dit Ceto. Difficile de savoir ce que tu désires vraiment. Mais je comprends désormais : tu désires que ton œuvre ait un sens. C'est précisément ce qu'ils te donnent, ces trois mille solains. Ce sont ta nouvelle boussole. Tu t'en trouves une de temps à autre, et tant qu'il y a un chemin clair à suivre, tu y vas sans te poser de question.

— Ce royaume était mauvais. Ce monde flétri. Ses dieux fous. J'ai essayé de le défendre, je n'y suis pas parvenue, mais ma mission demeure. Voilà ce qui m'est cher. Je ne le cache pas.

— Une mission. C'est donc ça. Tu sais, Néa, parmi ceux qui se donnent une mission, la plupart s'imaginent plus grands qu'ils ne sont en réalité. Tu te crois peut-être l'héroïne de ton histoire, mais tu n'es qu'une parmi d'autres, et tu disparaîtras tantôt, sans avoir accompli ce chemin que tu crois tracé d'avance.

— Tant mieux. Ainsi je ne craindrai pas d'échouer.

— Bien dit. Je ne te retiens pas. Je n'ai rien à faire de toi. »


***


Lorsque Maître Wei ouvrit les yeux, il était adossé à un arbre centenaire.

Une brise légère agitait les blés mûrs comme les cheveux d'un enfant. Le vieux solain descendit la colline. Il se sentait au meilleur de sa forme, nulle trace de rhumatisme.

Car nous sommes arrivés, se dit-il.

Oui, ils étaient arrivés aux Étoiles lointaines !

Il foulait la terre d'un nouveau monde. Traversé de bonheur, comme frappé par la foudre, il s'arrêta sur place. Le vent, le bourdonnement des insectes, l'odeur du pré mouillé par une ondée printanière, il s'emplissait de ces sensations, s'en nourrissait de nouveau.

Notre race vivra. Notre civilisation perdurera. Nous avons vaincu la folie des Sermanéens.

Les étoiles formaient dans le ciel de grands disques lumineux, des billes de tailles diverses en déplacement constant. Tels étaient leurs nouveaux dieux.

« Maître Wei ! »

Une ribambelle d'anciens élèves du monastère, heureux, riants, transfigurés, allait vers lui. Il reconnut Nadira, Livenn, Seryn, Othon, Ikar, tant d'autres morts à Téralis, et dont Seryn lui avait envoyé la liste. Certes, il s'agissait en grande partie de fantômes, mais Wei ne s'était jamais fait à leur départ. Sage entre les sages, plus il vieillissait, plus la mort lui apparaissait comme une chose floue, une frontière incapable d'arrêter un vrai maître d'Arcs, une tyrannie déliquescente qui serait bientôt renversée. Ces solains revenus à leur prime jeunesse n'éveillaient plus sa suspicion ; il participait volontairement à son rêve en le nourrissant de vieilles lubies.

Nous avons réussi, se répétait-il, car le voyage avait été déjà fort long pour lui, fort difficile, et c'était maintenant tout ce qu'il voulait entendre ; et c'était ce que Ceto lui donnait. Car tel était le rôle du deuxième Fléau, sa seule manière d'agir : révéler les désirs les plus profonds des solains récalcitrants, leur donner corps, et les prendre dans sa toile.

Maître Wei se joignit à la ronde, prit part aux chansons. Il félicita longuement ses élèves, qui lui répondaient toujours en riant.

Wei ne rejoindrait jamais les Étoiles. Il venait de trouver ce qu'il recherchait.

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