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62. Ouvrir la voie


Our-Shani, l'arpenteuse de rêves, leur ouvrit la voie.

Caelus, Le Monde Solitaire


Ils avaient cessé de marcher ou de courir. Désormais, tous leurs déplacements se jouaient par torsions d'espace. Cela donnait l'impression que Sol Finis se comprimait, que tout point devenait accessible par la seule force de la pensée, ce qui était à peu près le cas.

Ils sortirent sur un balcon qui surplombait la cour de quelques mètres. Toutes les issues avaient été barricadées. Trois mille solains attendaient ici en silence. Ils formaient une immense toile d'Arcs parcourue de pensées confuses, de doutes et de craintes.

« Maître Wei ! » s'exclama Seryn en fermant la porte derrière eux.

Des maîtres d'Arcs descendirent parmi la foule pour la rassurer. Un seul regard suffisait désormais à embrasser tout leur avenir. Les survivants seraient peu nombreux. La tâche n'en serait pas moins herculéenne.

« Maître Wei ! » répéta-t-elle en apercevant enfin le vieux solain.

Il avait disposé Livenn en tailleur face à lui, sur un banc situé sur le côté du balcon, à l'abri des regards.

« Elle est affaiblie, résuma-t-il sans la quitter des yeux, sans même plisser des paupières. J'ai bien peur qu'il ne lui reste plus beaucoup de temps.

— Avant quoi ? s'exclama Othon.

— Avant qu'elle coupe le cordon qui la retient à son corps physique.

— Vous voulez dire qu'elle va mourir ? »

Les tatouages de Seryn s'agitaient. Son troisième œil suivait l'avancée des ténèbres rampantes au travers de tous les murs et de toutes les portes. Mais le palais du prince Eil était indéfendable.

« Je n'en suis pas sûr, avança Wei. Je pense qu'elle se trouve suffisamment loin. Son esprit prend son envol.

— Est-il possible de survivre en abandonnant son corps ?

— Nous n'avons pas le choix. »

Wei répondait avec une pointe d'inquiétude et de colère, car on touchait là aux limites de son savoir. Avec dix, vingt magerêves dignes de ce nom, Sol Finis aurait pu être évacué sans dommage et sans erreur. Ils n'auraient pas attendu que les dieux sonnent leur glas pour se soustraire à leur malédiction ! Au lieu de cela, seule une poignée de solains pourrait être sauvée... s'ils y parvenaient...

« Soyons bien d'accord, dit la primagister. Tous les trois, nous ne savons pas comment effectuer notre transmigration.

— Je pensais que Livenn pourrait nous guider » murmura Wei.

Ses yeux s'agrandirent alors. Il désigna la jeune fille assise en tailleur, raide, les yeux fermés. Non que son cœur vînt de cesser de battre. Elle était encore avec eux, pour quelques instants ; mais un écho supplémentaire la traversait. Ses lèvres s'entrouvrirent à peine, quelques paroles qui ressemblaient à un message d'outre-tombe.

« Shani vous a tracé le chemin jusqu'à Stella Medius.

— Livenn ? Qui est Shani ?

— Vous n'avez jamais connu Livenn.

— Comment...

— La horde des photosaures est en chemin vers le Cercle de Lumière.

— Qui es-tu ? s'exclama Seryn. Nadira ? Livenn ? Shani ?

— J'ai porté de nombreux noms, sourit-elle. Je n'ai jamais pu être seulement ta sœur. Je suis désolée, Seryn. Nos vies ont été modelées par nos difficultés.

— C'est le cas de tout le monde » nota Othon.

On le regarda comme s'il venait de jurer.

« Il est donc possible d'abandonner son corps pour traverser la Noosphère ? voulut confirmer Seryn.

— Ce sera sans assurance de regagner un véhicule. Les esprits et les formes astrales sont d'une matière très fragile. Vous perdrez beaucoup. Ceto ne vous laissera pas facilement lui échapper. Il vous tentera avec ce que vous avez de plus cher. Aton vous menacera encore. Mais vous pouvez le faire en suivant Shani.

— Et nous ne mourrons pas ?

— La mort est l'achèvement des forces du corps et de l'esprit. Vous vous lancez dans une ascension. Une transmigration. Cela nécessite une confiance immense. Vous n'avez aucune assurance d'arriver à destination. Seul votre espoir pourra vous guider jusque là-bas. Ne vous laissez tenter par aucune illusion. Ne renoncez jamais. Tant que vous n'aurez pas atteint les Étoiles...

— Nadira ?

— Oui, ma sœur ?

— Nous suivras-tu ?

— Adieu. »

Son visage se figea en un dernier sourire. Les pensées des trois maîtres d'Arcs, Seryn, Wei et Othon, se concentrèrent en cet instant autour de Livenn.

Shani, c'était donc son véritable nom, songeait le vieux principal de Khar.

Seryn comprenait qu'elle suivait un chemin déjà tracé.

Quant à Othon, il sut qu'il n'avait pas d'autre choix que de suivre Shani – ou quel que soit son nom – sur ce chemin. Elle venait de quitter Sol Finis. S'ils se revoyaient un jour, ce serait de l'autre côté.

Une torsion d'espace brutale agita leurs environs. Une flèche de feu traversa le mur, perçant la pierre comme une matière malléable. Seryn, la seule à réagir à temps, arrêta ce mouvement d'un geste plus vif encore. Une silhouette solaine encore couverte de fumée noire se suspendit à deux mètres du sol, comme dans un temps arrêté.

C'était une mage d'Arcs de haut rang, aux cheveux clairs. Une longue traînée noire, bitumeuse, avait remonté le long de son bras jusqu'à l'épaule, signe d'un début de contamination. Tétanisée par le coup d'arrêt, elle était parcourue de tremblements. Seryn relâcha la survivante et la déposa devant eux.

« Néa » lut-elle aussitôt.

Il n'était pas besoin de la connaître ; ses pensées se captaient facilement.

« Maître Wei, ordonna la Primagister, brûlez le corps de Livenn. Othon, j'ai besoin que tu maintiennes un bouclier autour de la cour. Néa, vous êtes une grande mage, vous devez m'aider. »

La corruption rampante sur son bras disait tout. Néa avait cru que leur capitale, que leur race, que leur monde étaient perdus. Elle avait relâché son attention, le mal avait cheminé jusqu'à elle, un démon l'avait mordue. Mais une décharge électrique avait repoussé l'apathie ; elle avait aperçu un dernier éclair de lumière, elle avait échappé au pire.

« Je ne peux pas » dit-elle.

Le bras infecté pendait sur le côté, déjà inutilisable ; sa main s'était refermée comme le poing racorni d'une momie, et une pestilence noire en suintait goutte à goutte. Maître Wei avança vers elle, mâchoire serrée. Il claqua des doigts ; une flamme surgit entre ses pouces, qui prit la consistance d'une lame longue comme l'avant-bras.

« Seuls nos esprits pourront réaliser ce voyage, annonça-t-il froidement. Pour rejoindre la prochaine île, il faut se jeter à l'eau. Êtes-vous prête à renoncer au réel, Néa de Méra ?

— Je ne suis pas prête, dit-elle en baissant les yeux vers cette arme enflammée qui oscillait de droite, à gauche, d'avant en arrière.

— C'est vrai. Personne ne l'est. »

Elle se laissa faire. D'un mouvement ample, maître Wei ôta son bras au niveau de l'épaule, sans douleur, tout juste quelques étincelles. Il mit une couture en place et poussa Néa sur les pas de Seryn, qui descendait au milieu de la foule. Elles vivraient toutes les deux.

Il se tourna vers Livenn, posa la main sur cette tête figée, déjà froide. Elle implosa en une pluie de cendres et une explosion de vapeur d'eau. La matière se conserve, songea Wei, mais ses états sont mystérieux.

Un dôme transparent recouvrit bientôt la place, contre lequel venaient se heurter quantité de démons. Jamais satisfaits de leur forme, ils explosaient et se reformaient sans cesse, grossissaient leurs yeux pour mieux voir, leurs griffes pour mieux rayer ce bouclier imperméable. Leurs mâchoires claquaient d'impatience. Des flots de bitume coulaient maintenant au-dessus d'eux, fermant le dernier carré de Sol Finis aux vestiges des lumières célestes. Debout sur le balcon des annonces, bras écartés, Othon était l'ultime Atlas arrêtant Ceto à lui tout seul.

Aussitôt Seryn et Néa descendues dans la foule, un solain se jeta sur elles avec des gestes brusques, indécis. Créature grognante aux yeux sans pupille, il était déjà le siège de plusieurs démons, qui s'affrontaient pour le contrôle de cette marionnette. Seryn l'immobilisa un instant ; il n'y avait plus rien à sauver, et elle trancha dans la chair infectée avec autant de peine que de dégoût.

« Montre-leur, ordonna-t-elle à Néa, l'associant à ses pensées. Shani nous a ouvert la voie. Elle a balisé les rêves.

— Qui est Shani ?

— Notre seul espoir. »

La foule se pressa autour d'elles. On essaya de les toucher, comme d'autres avaient essayé avec Aton, car elles étaient le seul salut des solains.

« Ce ne sont pas des maîtres d'Arcs, protesta Néa. Ils ne sauront pas voyager dans les rêves. »

La foule était noyée dans un étrange silence, qu'interrompaient les exclamations inarticulées des démons, leurs tentatives vaines de franchir la barrière.

« Je te montre la voie, dit Seryn. Porte-les. »

Le bouclier se fendit dans toute sa largeur et l'enfer s'abattit sur les solains. Le temps semblait s'être ralenti – maître Wei, à quelques dizaines de mètres, avait plongé ses mains dans la fabrique de la réalité et maintenait localement l'univers sous son emprise. Othon zigzagua entre les démons qui tombaient, arriva jusqu'à elles.

Seryn jeta une boule de lumière au-dessus d'eux, qui sembla traverser la frontière des ténèbres, mais ce n'était qu'un passage de mondes. Ils entraient dans la Noosphère. Ils rejoignaient Shani sur son chemin.

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