Simon arriva sur le palier d'une porte, les mains presque moites. Il avait été invité à une soirée seul, et, vivant depuis quelques mois à l'Hôtel DuMort, avait décidé d'y aller en tant que vampire débrouillard qu'il était. Soudainement moins confiant, il épousseta inutilement sa veste en jean et pensa à repartir. Il n'était jamais sorti seul, que ce soit depuis sa transformation ou sa vraie naissance.
Il ne connaissait personne et il n'y avait pas d'humains dans cette maison, de quoi l'inquiéter.

À bien y réfléchir, il n'était absolument pas courageux et songeait sérieusement à s'enfuir en courant tant l'idée de passer seul une soirée dans une maison remplie de Downworlders l'effrayait.
Il fit un pas en arrière, se persuadant que, de cette façon, il ne se ferait pas sermonner par Raphael. C'était sans compter sur un invité qui ouvrit la porte et lui offrit un sourire charmeur en le voyant. Il aurait pu hausser un sourcil s'il n'était pas pétrifié sur place.

"- Allez, entre, on ne mord pas, blagua l'inconnu en lui offrant un clin d'oeil."

Il doutait sérieusement de l'humour des non-terrestres mais esquissa tout de même un léger sourire. Il entra et il lui semblait avoir traversé une sorte de barrière sonore. Soudain, une musique assourdissante lui parvint aux oreilles tandis qu'une odeur de cigarette et d'alcool lui agressait l'odorat. Malin ces fêtards. Le probable vampire lui fit retirer sa veste et partit la poser il ne savait où, tandis que le jeune vampire oubliait de protester. Ils parcoururent ensuite une sorte de couloir à la décoration moderne si on oubliait la présence de peintures impressionnistes assez laides. Il lui sembla que tous les regards se posèrent sur lui lorsqu'il entra dans la salle de danse et de beuverie. Puis, les danseurs dansèrent de nouveau et les dragueurs continuèrent à assomer leurs "proies" de blagues douteuses et de compliments recherchés. Sérieusement, ne faisaient-ils que draguer ?

On le poussa à prendre un Bloody Mary et à boire son verre entièrement. Il n'avait pas dû être clair dans ses intentions puisqu'il ne voulait pas finir saoul. Il continuait à se demander pourquoi il était venu ici alors qu'il sortit son portable pour lire les nombreux messages de menace qu'il recevait de son créateur. Un léger frisson le parcourut avant que quelqu'un ne se saisisse de son portable et ne le cache derrière son dos. Simon se releva brusquement et tenta d'attraper le mobile, frôlant sans le vouloir le bas du dos de la jeune femme qui eut un sourire aguicheur. Elle approcha son corps du sien et nicha soudainement sa tête dans le cou du plus jeune. Il la sentit humer son odeur avant de soupirer de plaisir, le faisant frissonner. Il avait frissonné ? Elle sentit soudainement ses lèvres se poser dans son cou et des crocs caresser sa carotide. Il se recula brusquement, attrapant de la même façon son téléphone et observa la vampire faire une moue attristée.

"- Je ne suis pas assez bien pour toi ? Demanda-t-elle, déçue."

Il n'était pas question qu'il se laisse emporter par une jolie femme ce soir. Il avait compris la leçon avec Camille. Il s'éloigna alors, lui offrant malgré lui un regard désolé qui fit s'étirer les lèvres colorées en un sourire en coin.

Il trouva un canapé plus loin, à l'abris de la piste de danse aménagée et des dragueurs, et s'y assit lourdement. Il soupira d'aise dans ce calme et reposa sa tête contre l'accoudoir, se massant l'arête du nez. Son portable vibra de nouveau et il ouvrit le message, déglutissant. Raphael semblait vraiment très en colère. Il songea à lui répondre mais en fut empêché par deux mains se posant sur ses épaules. Il sursauta et entendit un rire moqueur derrière lui. Le brun se retourna brusquement et croisa le regard d'un homme. Un regard qui le dévisageait et il le surprit à la reluquer de haut en bas. Simon soupira intérieurement. Il n'avait pas fini visiblement.

La soirée passait assez lentement pour Simon qui évitait continuellement des tentatives de drague et des reniflements. Puait-il ? Pourtant il lui semblait que son odeur plaisait, surtout aux vampires dont les crocs s'agrandissaient légèrement. Il avait fini, après maintes tentatives et verres bus à la demande d'invités, par trouver le chemin menant au jardin. Il faisait nuit noire et un lampadaire éclairait de loin l'endroit où il se trouvait. Étrangement, personne ne vint le déranger et il ne s'en plaint pas, appréciant le fait que Raphael s'inquiétait pour lui et le lui montrait en le menaçant de le laisser dormir dehors. Il ne répondait toujours pas et déglutit en voyant que celui-ci l'appelait. Il décrocha donc, étant obligé s'il voulait vivre.

"- Por dios, Simon ! Réponds aux messages !
- J'étais occupé, mentit le plus jeune. Je viens seulement de les lire."

Il entendit un soupir irrité et se demanda si Raphael deviendrait, un jour, patient.

"- Où es-tu ? Demanda finalement le mexicain.
- Avec Clary et les autres, répondit-il.
- Ne me mens pas, gronda-t-il. J'ai contacté ta rouquine, elle ne sait pas où tu es, claqua le plus vieux."

Simon garda le silence. Il ne venait quand même pas de creuser sa propre tombe, si ? Il s'était vraiment mis dans le pétrin et il se maudit pour ça. Pourquoi avait-il soudainement décidé de désobéir une nouvelle fois à son chef ?

"- Rentre immédiatement, ordonna le plus vieux.
- Je rentre dans une ou deux heures, ne t'inquiètes pas.
- Lewis, si tu ne reviens pas immédiatement je te jure que ça va barder."

Simon avala sa salive et entendit la porte derrière lui s'ouvrir. La musique assourdissante lui parvint aux oreilles et il raccrocha brusquement, pourtant trop tard : Raphael avait forcément compris ce qu'il faisait.
Mais il ne faisait rien de mal, pas vrai ? Il avait juste voulu s'amuser un peu en allant ailleurs qu'au DuMort ou au Loup de Jade. Changer de routine ne faisait pas de mal après tout.

Il croisa le regard de celui qui lui avait ouvert la porte d'entrée et on le releva. Il pensa qu'on le forcerait de nouveau à boire mais, en arrivant dans la pièce, il vit tous les danseurs quasiment immobiles et collés à leurs partenaires. Il se demanda sérieusement ce qu'il se passait jusqu'à ce qu'il distingue des crocs allongés et qu'une odeur de sang différente ne lui parvienne. Il constata alors avec horreur ce qu'il se passait et avala sa salive. Ce n'était pas une soirée normale.

Il avait déjà entendu parler de groupes de vampire qui se mordaient entre eux pour tester un autre sang que celui de terrestre. Il n'en avait par contre jamais eu confirmation et encore moins visuellement.

"- Tu veux essayer ? Lui souffla le vampire à l'oreille, ce qui le fit frissonner."

L'idée que quelqu'un le morde de nouveau ne lui plaisait pas vraiment. Certes, étant humain, il avait apprécié, mais avait fini par mourir et renaître. Simon refusa d'un simple mouvement de tête et le vampire posa fermement une main sur le ventre du plus jeune, le plaquant contre lui.

"- Tu n'aimes pas les hommes, c'est ça ? Tu sais, vivre l'éternité en suivant l'orientation sexuelle originelle, ce n'est que mortellement ennuyeux, souffla le vampire en descendant lentement sa tête vers le cou du vampire."

Simon ne sut que faire et faillit se mettre à trembler tant il avait peur de la situation. Il n'avait absolument pas considéré que ce genre de chose arriverait, et voilà qu'il était seul face à eux.

-

"LILY, hurla Raphael en descendant les marches de l'escalier principal."

Il vit la vampire apparaître devant lui une seconde plus tard en fronçant les sourcils. Pourquoi criait-il lorsque Simon n'était pas là ? C'était inhabituel.

"- Qu'y a-t-il ? Demanda-t-elle doucement, pour ne pas plus irriter son chef qui tournait en rond.
- Simon est parti à une fête seul.
- Et ? Il peut se débrouiller non ? Répliqua-t-elle."

Après tout, Simon était là depuis quelques mois et pouvait sortir seul sans se faire tuer. Il était encore jeune contrairement aux autres membres du clan, mais il pouvait jouir d'une certaine indépendance.

"- Ses amis les Shadowhunters sont en mission. Il n'a plus contact avec ses terrestres. Il est donc à une soirée organisée par quelqu'un qu'il ne connait pas.
- Ne me dis pas.."

La jeune femme était stupéfaite. Simon ne pouvait pas avoir été aussi inconscient pas vrai ?

"- Si. Il est à cette soirée là."

Ils se fixèrent alors dans le blanc des yeux jusqu'à ce que Raphael claque sa langue contre son palais. Il ne pouvait jamais être au calme. Pas depuis que Simon vivait ici.

Le vent claquait contre son visage nu tandis qu'il se dirigeait assurément vers sa destination. Le moteur de sa moto accompagnait ses pensées agacées. Il ne pensait pas que Simon l'empêcherait d'être tranquille à ce point. Il le savait agité, bavard, mais ne le pensait pas du genre à aller seul à une soirée de "créatures démoniaques". Par dessus tout, il avait fallu que ce gamin choisisse la soirée spéciale du mois. Il le désespérait monstrueusement.
Il claqua sa langue en voyant de nombreuses voitures à l'arrêt et les dépassa, ignorant les klaxon bruyants qui agressaient son ouïe fine. Il avait un bébé à aller aider.

Il reconnut immédiatemement la maison à l'aspect calme. C'était celle d'un jeune vampire d'une autre ville proche qui avait souhaité déménager, momentanément. Les fenêtres ne laissaient pas passer de lumière et aucun son ne parvenait à ses oreilles. Cependant, il pouvait sentir l'odeur d'alcool, de cigarette, et par dessus tout; de sang. L'irritation l'envahit alors qu'il sonnait à la porte. Miraculeusement, quelqu'un lui ouvrit, un sorcier probablement. Raphael ne lui laissa pas le temps de répliquer qu'il fit luire ses crocs en sifflant, faisant déglutir l'homme qui le laissa passer docilement. Il avait certainement dû le reconnaître, Raphael n'était pas un inconnu aux yeux de la communauté des ténèbres.
Il ignora la musique qui aurait pu le rendre sourd tant elle était forte, et entra dans une salle faiblement éclairée. Son regard se posa immédiatement sur son protégé qui était collé contre un blond. Un blond dont les crocs se trouvaient plantés dans la chair du cou du plus jeune. Une colère sourde le fit s'approcher rapidement des deux et retirer violemment la tête du blond du cou de Simon qui rouvrit les yeux et le regarda, perdu mais soulagé. Les regards se posèrent sur eux alors que Raphael leur lançait un regard noir.

"- Depuis quand invitez-vous un jeune de mon clan ? Claqua-t-il en faisant luire ses crocs. Il me semble que nous avions discuté de ça il y a peu de temps."

Le blond baissa les yeux, coupable et se recula. Il ne pouvait pas grand chose face au plus vieux. Personne ne pouvait.

-
"- Je t'ai pourtant ordonné de rester au DuMort ! Dios mio, tu es tellement désobéissant, Lewis.
- Je pensais avoir le droit de sortir un peu, pour une fois. À force je risque d'étouffer sous tant d'amour, cracha Simon en se grattant inconsciemment la peau de son cou."

Raphael suivit l'action de la main de Simon avant de lui attraper brusquement le bras et de lui pencher la tête, ignorant le couinement désapprobateur qui brisa le faible silence établi plus tôt.
Il fixa avec attention la marque de morsure et l'effleura, faisant frissonner le plus jeune. Un sourire en coin se forma sur ses lèvres alors qu'il plongea de nouveau son regard dans celui de son interlocuteur.

"- Je trouve ça fascinant, cette sensibilité de ta peau à cet endroit.
- C'est normal.."

Il l'avait mordu ici après tout. Il devait vraiment être idiot pour ignorer que la marque était sensible dans les premières années de renaissance. Il avait forcément fallu que le vampire inconnu le morde à cet endroit précis. Quel imbécile .

"- Et tu as ressenti quoi ? Demanda soudainement le plus vieux.
- À propos de quoi ?
- Quand il t'a mordu idiota, soupira-t-il."

Il ne pouvait pas avouer qu'il avait mêlé, à un certain désespoir, ressenti un infime plaisir qui l'avait rendu hors de contrôle. Tout comme lorsqu'il avait été mordu une première fois en tant qu'humain. Il détourna le regard, gêné. Raphael était particulièrement opressant quand il le fixait longuement de cette façon et il ne put s'empêcher de déglutir. Il crut avoir mit fin à la discussion et fit un pas en arrière avant que Raphael ne lui attrape brusquement la taille. Il replongea son regard dans le sien, légèrement brillant, avant de sentir des crocs transpercer lentement la chair de son cou.