#70
⌇Waterfall.
4:59 pm.
⌦ ❛ Two friends
avoiding each other ❜
Le reste de l'après-midi s'était déroulé lentement. Très lentement. Après leur baiser, Jisung et Minho s'était à peine adressé la parole et avaient chacun vaqué à différentes activités dans leur coin. L'un était partit nagé, s'était amusé à escalader les rochers tandis que l'autre avait fait une sieste et avait tenté de s'approcher de la cascade pour chercher une grotte. Ils s'étaient échangés quelques regards timides au travers des verres de leurs lunettes et s'étaient à peine approchés pour un quelconque contact.
Les choses étaient devenues tendues, embarassantes même et c'était comme s'ils s'étaient mis à s'éviter. Par gêne suite à leur baiser, peut-être aussi par peur en raison à leurs sentiments. Ni l'un ni l'autre n'avait évoqué la suite à venir, celle où Jisung donnerait le numéro de Jeongeun à Minho. Parce qu'au final, c'était ça leur relation. Un garçon exécutant désespéremment les souhaits du meilleur ami de la fille pour qui il craque. C'était ça, leur contrat, la base de ce « nous » qu'ils avaient posés sur leur têtes.
Et Minho, il angoissait dans son coin. Il voulait mettre des mots sur toutes ces nouvelles sensations qu'il avait ressentit lorsque ses lèvres avaient touché celles de Jisung, il voulait savoir si le brunet avait apprécié le baiser ou s'il avait été nul. Minho voulait que cette gêne qui leur était tombée dessus s'envole pour que tout redevienne comme avant. Il avait l'horrible impression que quelque chose avait changé et qu'ils ne pourraient pas revenir en arrière. Il voulait que Jisung lui assure que tout allait bien, qu'il lui dise un mot ou deux qui lui permettrait de faire redescendre la pression.
Mais Minho ne parvenait pas à produire le moindre son, à former une seule phrase censée dans son esprit. Alors il se terrait dans cet affreux silence, observant son ami du coin de l'oeil qui se divertissait seul comme si l'argenté n'était pas là. Jisung ne lui avait pas adressé la parole depuis qu'il avait rompu leur baiser et Minho faisait à présent face à un mur. Il revoyait le Han Jisung qu'il ne supportait pas d'il y a quelques mois et cette pensée ne lui plaisait absolument pas. C'était la première fois que son ami mettait autant de distance et entretenait une confusion gênée. Fallait dire que c'était assez destabilisant. Ca faisait un sacré moment que Minho ne s'était pas sentit à sa place aux côtés du brunet.
Encore plus lorsque Jisung se mit à ranger la nourriture, les boissons et la nappe dans son sac sans lui demander son avis. Minho le regarda faire, silencieux. Il ne chercha même pas à protester, il avait perdu toutes ses forces et sûrement tout son courage. Le garçon imita le plus jeune, se réchaussa et attrapa son sac à dos qu'il balança par dessus son épaule. Il saisit la sangle de ses deux mains, se recroquevillant sur lui-même en fixant l'herbe séchée par le soleil en se demandant si elle reprendrait de la couleur s'il pissait dessus.
Oui, Minho occupe son cerveau comme il peut.
Un ange passa. Il prit son temps.
Lorsque l'argenté finit par relever les yeux, se demandant si Jisung n'était pas partit sans lui tant il n'y avait aucun bruit (mise à part la chute de la cascade). Le brunet le fixait derrière le verre de ses lunettes, droit comme un "i" et les mains dans les poches. Minho cligna plusieurs fois des yeux et pinça les lèvres en comprenant que Jisung attendait qu'il bouge depuis de longues minutes. Le garçon passa une main moite dans ses mèches argentés et ébourriffa ses cheveux en donnant un petit coup de pied dans le vide.
— On y va ?
Premiers mots depuis une heure et demie. Y'a du progrès.
Minho déglutit et hocha la tête, mordillant l'intérieur de sa joue. Une brise caressa son visage et lorsque Jisung tourna les talons, le garçon traîna des pieds derrière lui. Ils s'enfoncèrent dans la forêt, prenant le même chemin par lequel ils étaient arrivés. L'air s'était allégé, il faisait un peu moins chaud qu'en début d'après-midi. Le trajet du retour était plus ou moins agréable, meilleur qu'à l'aller en tout cas. Il faisait plus frais, c'était moins fatiguant et surtout, ils n'avaient que de la descente ou du plat à parcourir. Un bonheur pour Minho qui avait cru vivre ses derniers jours sur Terre lorsque son cardio inexistant s'était manifesté en force durant une montée assez abrupte. Oui, ils étaient à la campagne mais restaient aussi aux abords de terrain montagneux.
Les oiseaux chantonnaient, la brise enveloppait et Minho, il marchait la tête baissée derrière Jisung. Il mourrait d'envie de lui adresser la parole, de lancer une blague débile qui détendrait l'atmosphère lourde qui persistait entre eux. Quitte à faire comme s'il ne s'était rien passé, Minho préférait forcer le déni plutôt que de continuer sur cette voie. Il ne supportait pas ce malaise, ça ne leur ressemblait pas. Mais Minho, il ne savait pas quoi dire. Si Jisung semblait indifférent, lui continuait de ressasser le moment où leurs bouches s'étaient touchées. Le cerveau de l'argenté rejouait la scène dans son coin, entaînant tous ces ressentis corporels qui avaient donné l'impression au garçon de vriller complètement.
La mâchoire de Minho se contracta et il voulu se claquer le visage pour autant y accorder d'importance. Arrêtes ducon, c'est rien. Y'a rien. Apprécier un baiser ne voulait pas toujours dire quelque chose. Il n'aimait pas la situation actuelle, voilà pourquoi il était aussi bouleversé.
Enfin, ça c'est que lui se force à croire.
Minho donna un coup de pied dans un cailloux, se faisant alors la réflexion que ses amis et lui quitteraient la région le lendemain pour revenir en terre hostile : la ville. Lui qui avait une préférence pour les grands buildings comparé aux champs de rien, fallait avouer que Minho n'avait pas si hâte que ça de les retrouver. A présent, il les associait avec tout ce qui s'apparentait à la réalité et ses difficultés. Ici, le temps s'était arrêté le temps de l'été. Minho voulait y rester pour toujours. Il n'avait aucune envie de revoir ses parents, d'ouvrir ses cours pour travailler ses examens à venir. Il ne voulait pas retourner à cette routine, en fin de compte peu divertissante, dans laquelle il s'était laissé engloutir ces trois dernières années. Minho voulait le changement autant qu'il le craignait. C'était principalement pour cette raison qu'il préférait rester dans son propre monde plutôt que de se tourner vers celui des autres. Aussi qu'il était persuadé qu'il reviendrait automatiquement à ses petites habitudes dès qu'il aurait mis les pieds dans sa chambre.
Y'avait des jours plus que d'autres où Minho se maudissait fortement pour être aussi faible.
— Eh Lino !
Arraché à ses pensées empoisonnées, le dénommé se stoppa net, les muscles tendus et les yeux grands ouverts. Il avait l'impression que ça faisait une éternité que Jisung n'avait pas prononcé son prénom et reprendre sur la douce note de ce surnom fit se gonfler son coeur dans sa poitrine. Les choses allaient mieux si le garçon s'était décidé à lui adresser de nouveau la parole n'est-ce pas ? Ce silence radio qu'il avait imposé n'avait été que passager en fin de compte.
Minho sourit légèrement et se tourna pour apercevoir Jisung un peu plus haut sur le chemin. A quel moment s'était-il retrouvé autant à la traîne ? On aurait dit qu'il avait arrêté de marcher depuis de longues minutes. Voyant l'air sérieux et presque crispé de son ami, Minho perdit son sourire et fronça les sourcils. Pendant un instant, il cru qu'ils s'étaient trompés de route et s'étaient perdus, et une petite panique commença à se répandre dans son corps. Les mains qui serraient les sangles de son sac retombèrent mollement dans le vide et Minho fit quelques pas dans la direction de Jisung.
— Qu'est-ce qu'il y a ? Demanda-t-il en s'arrêtant de nouveau. Ça va pas ?
Le brunet ne répondit pas. Il le fixait comme s'il venait d'ailleurs, comme si lui-même n'était pas réellement parmi eux. Le garçon ne bougeait absolument pas, ses yeux étaient grands ouverts et brillants, ses lèvres étaient entrouvertes et Minho pensa que son ami n'allait pas tarder à tourner de l'oeil. Il n'avait jamais vu Jisung aussi déconnecté, autant coincé dans les méandres de son esprit pour autre chose que les cours. C'était déconcertant, un poil inquiétant pour Minho qui se demanda alors comment il allait pouvoir gérer un Jisung apparemment cassé pour une raison inconnue au bataillon. Pitié, faites qu'on se soit pas perdus et qu'il fasse pas une insolation. Le garçon ne sentait pas capable d'avoir cette double responsabilité sur les épaules.
— Jisung ? L'appela-t-il, soucieux.
L'argenté remonta lentement dans sa direction et soudainement, le brunet fit de grandes enjambées jusqu'à lui. Sans un mot, sans lui laisser le temps d'assimiler ce qu'il se passait ou même de lui demander son avis.
Jisung saisit à la volée le visage de Minho et se hissa sur la pointe des pieds pour cogner ses lèvres contre les siennes. L'élan manqua de leur faire perdre l'équilibre et Minho fit quelques pas en arrière pour se stabiliser, serrant ses bras autour de la taille si fine de son ami.
Le garçon ne chercha pas à comprendre, à réaliser qu'il embrassait de nouveau Jisung.
Ses yeux s'étaient fermés dès lors que leurs peaux s'étaient rencontrées, quand son coeur s'était à la fois horriblement et délicieusement tordu à la folie dans sa poitrine. C'était complètement différent de la première fois. Leurs lèvres se caressaient, se chérissaient toujours plus avides de passion. C'était moins doux, moins hésitant. Ils s'enfonçaient dans cette intensité nouvelle, sous cette immense vague de violents sentiments qui gardait un peu de tendresse dans le fond. Jisung s'accrochait encore et encore à Minho, celui-ci serrait toujours plus fort le plus jeune contre lui.
Leurs bouches se découvraient un peu plus, se dévoraient et lorsque leurs langues se frôlèrent pour la toute première fois, ce fut comme si le ciel se brisait au-dessus de leurs têtes. Le dos de Jisung rencontra le tronc d'un arbre bordant le chemin. Il chercha à entremêler ses doigts dans les cheveux de Minho qui caressait sa taille et la chute de ses reins à un rythme effréné. Ils étaient hors d'eux, hors du temps. Plus rien n'existait. Les deux garçons s'embrassaient à en perdre le souffle, la tête dans un jardin secret dont seul eux avaient secret de l'accès.
A ce moment-là, y'avait pas d'explications à pourquoi ils se laissaient fondre l'un contre l'autre. Pourquoi ils se brûlaient avec une ardeur qu'ils ne connaissaient pas. A quoi bon en chercher une ? Un baiser, ça voulait tout comme rien dire.
Un dernier contact appuyé, aussi redemandeur que satisfait, et puis Jisung coupa court à l'échange. Il détourna le visage, laissant le loisir à Minho d'appuyer son front contre sa tempe. Son souffle erratique s'échoua sur le faciès du plus jeune, balayant les mèches qui s'étaient collées de sueur à sa peau. Leurs ongles s'étaient légèrement enfoncés dans l'épiderme de l'autre et quand ils se décrispèrent, se fut presque instinctivement qu'ils passèrent délicatement chacun la pulpe de leurs doigts sur les potentielles marques. Les mains de Jisung glissèrent le long des épaules de Minho et finalement, il le repoussa légèrement. L'argenté se laissa faire, les pensées encore trop prises par la fougue soudaine qu'ils venaient de partager. Il releva des yeux brillants, un peu ailleurs, vers Jisung dont les joues avaient rougies.
Les deux amis se fixèrent, s'observèrent pendant de longues secondes où ils reprenaient lentement un peu de bon sens. Réalisaient-ils seulement d'où ils revenaient ? Ce qu'ils venaient de vivre ? Y'avait pas de mots, non aucun. Y'avait rien à dire pourtant Minho voulait absolument parler. Pour dire il ne savait pas trop quoi. Il voulait peut-être lui demander si Jisung l'avait vécu comme lui l'avait vécu ? Ce qui lui était passé par la tête pour se jeter ainsi contre ses lèvres ? Minho avait des milliers de questions qui s'empilaient sur le bout de sa langue. Il ne voulait pas lâcher Jisung tant qu'il n'avait pas réussi à prononcer un mot. Pourtant encore une fois, sa voix resta coincée dans sa bouche et l'argenté se retrouva à fixer son ami, la bouche entrouverte.
Puis finalement, ce fut Jisung qui parla le premier. Et si Minho pensait pouvoir se sortir de la brume dans laquelle il évoluait constamment depuis quelques heures, il se fourrait le doigt dans l'œil jusqu'au coude. L'univers n'était pas décidé à lui faciliter la vie.
— Merci.
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