16- Sublime&silence
Deux jours plus tard.
Quatrième sortie. 6H05.
Après le fractionné, puis la course lente, Alexandre Bleck privilégiait le foncier. Sa séance serait plus longue mais aussi plus variée avec des passages difficiles dans les sous-bois.
Il n'était pas rare qu'il se retrouve nez à nez avec un chevreuil ou même une biche et son faon, surpris de voir un intrus de si bon matin.
Il adorait.
Pourtant ses muscles n'étaient pas totalement relâchés ce jour-là. Hier soir, tard dans la nuit, il avait tenté de joindre Charlène. Pour la deuxième fois. En vain. Il avait laissé un nouveau message. Plus insistant cette fois.
Il retenterait sa chance ce soir.
*
* *
Le jour commençait à poindre. L'herbe était luisante. Un brouillard léger se levait.
Finalement il ne pleuvrait pas.
Il aimait cette communion avec la nature. Ce rituel répété chaque matin. Il savait qu'au bout de cinq cents mètres il devait bifurquer à gauche, jusqu'à la départementale. Ses pas le mèneraient jusque là, sans effort. Même la brume de ce matin ne l'obligerait pas à ralentir.
Une seule chose l'empêchait de goûter pleinement son bonheur: le silence.
Ce silence lourd, oppressant... Qui démultipliait le moindre craquement de brindilles.
Justement.. Alexandre crut percevoir un léger bruit derrière lui. Un bruit inhabituel.
Il tendit l'oreille. Rien!
Tous ces événements soudains dans sa vie le rendait nerveux.
Il secoua la tête pour en chasser les mauvaises pensées puis accéléra. Il sentit son corps réceptif. Il était étrangement bien. Il flottait. Des images de chevaux sauvages défilaient dans sa tête. Ils galopaient sur une plage de sable fin et, lui, les poursuivait avec une petite moto ridicule.
Il sourit à l'absurdité de la scène.
A présent il était rejoint par de vrais motards. Blousons de cuir, barbes de trois jours. Des loubards au coeur d'or qui dansaient entre eux sur des slows langoureux.
Pfff !!! Décidément, Charlène lui montait à la tête.
*
* *
Un deuxième craquement, plus distinct celui-là, lui fit tourner le regard vers l'arrière.
Ses rêves de chevauchées et de sable blanc s'évanouirent. Définitivement.
Quelque chose ne collait pas. Il n'aurait su dire quoi. Mais quelque chose ne tournait pas rond. Il en était certain.
Pour la première fois de sa vie une angoisse sourde le saisit à la gorge. L'empêchant de respirer. Il se retrouvait seul au milieu de cet environnement hostile, les cinq sens en alerte.
Il s'épongea le front, lui qui ne transpirait jamais. L'air était moite. Il s'aperçut alors que tout son corps était en sueur.
Et soudain il l'a vit.
Cette ombre à ses pieds qui grandissait.Qui s'allongeait à n'en plus finir. Prenait possession de sa propre ombre. La recouvrait entièrement pour n'en former plus qu'une.
Il se mit à trembler.
Il pouvait sentir à présent un souffle chaud sur sa nuque. Un souffle qui contrastait avec son corps glacé. Et une main...
Une main qui lui agrippait l'épaule.
Il se retourna vivement.
-Ah! C'est toi... Tu m'as fait peur.
Il réalisa soudain à qui il avait à faire.
*
* *
Il vit l'arme. Un calibre 22 pointé sur lui.
Il recula. Blême. Dans sa précipitation, il heurta une racine, tomba à la renverse.
A présent il pouvait sentir le canon froid contre sa tempe.
Il se mit à genoux,
joignit les mains,
en signe de prière.
Et ferma les yeux...
"Autour de moi tu danses
Et moi j'oublie
Mais je sais que tu restes
Dans les fleurs que je laisse
Après la nuit
Violence et promesse
C'est tout ce que tu détestes
La mort aussi."
https://youtu.be/I38ea3GoHXQ
Julien Doré
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