Chapitre 4 : Remors
Nouvelle journée au collège, et une heure de retenue pour bavardage en cours d'allemand ... pour « bavardage », s'ils savaient... Qu'ils me laissent au moins animer un peu leurs cours pendant que je le peux encore, pfff.
En rentrant à la maison, je sus que nous allions avoir une soirée agitée. Ma mère avait l'air sur les nerfs et ma soeur tirait une tête de déterrée dans le plus pur style « j'ai toute la misère du monde sur mes épaules ». Essayant tant bien que mal d'avoir un air enjoué, je saluai tout le monde avec bonne humeur avant d'aller dans ma chambre pour dessiner un peu...
Environ une heure plus tard, je sortis de ma bulle. Depuis ma chambre j'entendais ma mère et ma soeur se disputer dans la cuisine. Me levant de ma chaise, je me dirigeai vers l'origine du bruit...
– Que se passe-t-il ? demandai-je.
– Ta soeur pique une crise car elle n'arrive pas à faire ses exercices de maths.
– Oh d'accord , répondis-je posément, Noé c'est sur quoi tes exos ?
– La proportionnalité, cracha-t-elle – Je vais t'aider alors, dis-je, je ne suis peut-être pas une flèche en maths mais la proportionnalité je maîtrise.
– Laisse tomber, asséna-t- elle, de toute façon t'es nulle et les maths ça sert à rien !
– Mais si les maths c'est utile, contrais-je en faisant semblant de n'avoir pas entendu sa remarque.
– Lâche moi ! Pinçant mes lèvres, je me retins de répondre que je ne la tenais pas et ravalai ma fierté.
– Bon alors débarrasse au moins tes cahiers, on va bientôt manger, faut mettre la table.
– Mais laisse moi j'te dis ! Arrête de faire ta maman !
– Comme tu veux, dis-je d'un ton dédaigneux, de toute façon, vu que tes cahiers sont à ta place, ça n'engage que toi si tu préfères te priver de repas toute seule.
-Aelia ça suffit, m'avertit ma mère
-Mais quoi ça suffit ? C'est elle qui déconne et c'est moi qui prends ?
Je me mettais à parler plus vulgairement, signe de la colère qui montait en moi. À côté de moi Noéline me regardait d'un oeil mauvais, tandis que la mère ne trouvait rien d'autre à dire que de faire attention à mon vocabulaire. Finalement, ma soeur partit s'enfermer dans sa chambre après avoir claqué la porte de la cuisine et moi je dûs faire face seule à une maman en colère qui ne cessait de me reprocher le comportement de ma soeur.
– Si tu n'étais pas intervenue, elle ne serait pas dans cet état ». À quoi je répondis que je n'avais chercher qu'à l'aider et que c'était Noé qui m'avait envoyée sur les roses. Après quelques minutes de discussion stérile, ma mère et moi nous mîmes à table et tandis qu'elle mangeait ses pâtes, je m'injectais tranquillement mon substitut de nourriture par intraveineuse. C'était un automatisme ; sortir la grosse seringue et une cartouche du congélateur, mettre la cartouche dans la seringue puis m'enfoncer la longue aiguille métallique dans le bras. À force, cela ne faisait même plus mal...
Ma mère me jeta un regard puis appela ma soeur pour qu'elle vienne à table, sans succès. Avant même qu'elle ait ouvert la bouche, nous savions que Noéline ne viendrait pas. Celle-ci avait préféré continuer à se morfondre dans sa chambre.
J'avais soupiré, irritée par le comportement puéril de ma soeur. Cela m'énervait d'autant plus que ce genre de scènes arrivaient souvent et toujours pour des motifs quasi inexistants. La dernière fois c'était la souris de l'ordinateur qui ne fonctionnait pas ; plus de piles, ou encore Niwa qui la poursuivait dans la maison pour jouer. Chez elle, tout était un prétexte pour piquer une crise. En allant dans ma chambre, je passai devant celle de ma soeur d'où parvenaient des sanglots étouffés derrière la porte fermée.
Je devrais faire au moins essayer d'arranger les choses me dis-je en soupirant. Je me doutais que ça n'allait pas être une tâche aisée. Poussant la porte, je trouvai Noéline en pleurs, recroquevillée dans un coin. Celle-ci me jeta un regard mauvais avant de me lancer un « dégage » apparemment sans appel. Pourtant, je restai.
Doucement j'avançai vers elle. Essayant tant bien que mal de ne pas me sentir touchée par les charmants petits noms d'oiseaux dont elle m'affublait, je me concentrais sur la marche à suivre pour calmer ma furie de soeur. Par-dessus ses cris, ma mère m'incitait à la laisser tranquille. Finalement, je tentai le tout pour le tout : je m'agenouillai devant ma soeur avant de la prendre dans mes bras. Noé me poussa, m'insultant de tous les noms, me criant de la lâcher. Puis, elle commença à se fatiguer, ses paroles furent plus espacées, ne laissant bientôt plus la place qu'à sa respiration saccadée.
– T'façon j'suis nulle, lâcha-t-elle, je ferais mieux de mourir. Je sers à rien. »
Les paroles de ma soeur me brisèrent le coeur, et je lui caressai le dos en cercles tout en lui répétant qu'elle se trompait, que nous l'aimions, que nous avions besoin d'elle. Petit à petit, sa respiration se calma... J'attendis quelques secondes avant de lui poser cette question : Pourquoi ?
D'abord, Noé ne répondit pas. Puis elle chuchota doucement « Je ne me sens pas bien, vraiment pas bien ». Tout en continuant à lui caresser le dos, je lui demandais « Pourquoi tu ne dis rien Noé ? Je t'aime, tu sais. Et puis, c'est à ça que servent les grandes soeurs non ? »
Ma petite soeur se blottit dans mes bras et me dit d'une toute petite voix: « Tu sais, parfois je n'ai pas l'impression que tu m'aimes ». Ma lèvre inférieure trembla. Étais-je une si mauvaise grande soeur ? Décidant de faire fi de mes interrogations intérieures, je relevai le visage de ma soeur en face du mien pour pouvoir la regarder dans les yeux.
– Pardon, lui dis-je. Pardonne moi Noéline. Je t'aime. Les yeux de ma petite soeur s'humidifièrent un peu et un sourire se dessina sur ses lèvres.
– Merci, dit-elle simplement, merci d'être venue. Tendrement, je lui pris la main pour l'emmener jusqu'à son lit puis lui déposai un baiser sur le front.
– Je reviens.
Après être sortie de la chambre de ma petite soeur, je m'en fus voir la mère pour lui dire que j'avais couché la petite. Ma mère me fit un sourire fatigué puis me remercia et, tandis qu'elle se faisait une bouillotte, je lui fis son lit.
Quand ma mère entrant dans sa chambre, je vis à son air fatigué qu'elle en avait assez. Je la pris tendrement dans mes bras et lui dis que nous allions y arriver, que nous allions nous en sortir. Elle me regarda alors dans les yeux et je vis la douleur qui luisait au fond de ses prunelles. « Je suis désolée » me dit-elle. Sur le moment je ne compris pas mais lorsqu'elle posa délicatement ses doigts sur ma gorge, je pris conscience de la culpabilité qui la hantait. Ma mère se sentait responsable de ma malformation.
« J'aimerais tellement pouvoir prendre ta place, chuchota-t-elle, j'aimerais tellement pouvoir te protéger, au moins encore un peu...
– Tu n'y es pour rien, la contredis-je doucement, ça n'est pas si grave, tu sais ? Et puis regarde, j'ai une famille et des amies formidables, c'est tout ce qui compte. »
Retenant mes larmes, je lui souris doucement avant de la serrer dans mes bras. Nous restèrent ainsi, enlacées, pendant de longues minutes, Nous prodiguant ainsi le réconfort mutuel dont nous avions tant besoin.
« Je peux rester avec Noé cette nuit ? demandai-je à ma mère quand celle-ci s'allongea dans son lit
– Oui tu peux me répondit-elle. »
J'étais sur le pas de sa porte lorsque je l'entendis chuchoter d'une voix ensommeillée « Elle t'aime tellement tu sais ». « Je sais » chuchotai-je en retour, la gorge nouée...
Une fois dans la chambre de ma soeur, je fermai la porte et m'allongeai à ses côtés. Contre moi, je sentais son corps tendu et fatigué, dont la respiration lourde et paisible traduisait le sommeil. J'espérais qu'au coeur de ses songes, elle m'entendrait :
– Pardon. Pardon de t'avoir laissée seule. Pardon de t'avoir laissé te battre de ton côté tandis que je me battais du mien. Pardon de ne pas avoir vu plus tôt tes appels à l'aide. Je te promets que plus jamais tu ne seras seule. Plus jamais. Je serai toujours là pour toi Noé. Aussi longtemps que tu vivras. Je te le promets.
Doucement, je passai mes bras autour de sa taille pour me serrer contre elle. Le contact de son corps chaud m'apaisa et je sentis qu'elle se détendait peu à peu. Alors, je sombrai dans le sommeil, m'endormant paisiblement tandis que nos respirations se calaient sur un rythme uni.
Prenez soin de vous et de ceux que vous aimez ;)
Assassinefangirl
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