D'autres diraient qu'elle commence à écouter sa voix.

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Andrea roula comme une folle tandis que la nuit tombait sur la ville. Ses mains tremblantes sur le volant ainsi que ses yeux grands ouverts lui donnaient un aspect tout nouveau. Elle essayait de réfléchir sans quitter son attention de la route. Elle était vibrante à l'idée de ne pas vraiment se connaître. Qu'est-ce qui l'avait poussée à prendre de telles décisions? Le divorce et toutes ses circonstances, ou quelque chose de plus profond en elle? Elle trouvait son acte idiot, impulsif, sournois, mais extraordinairement logique. La décision de son cœur était plus forte que les résistances de son esprit. Mais que ferait-elle une fois sur place? Qui choisirait-elle ? Ses collègues et amis ou une psychopathe quasiment inconnue? Pourquoi hésitait-elle autant? Pourquoi était-elle effrayée de ce qu'elle allait faire?

Sa voiture se rapprocha de l'entrepôt où tout allait se passer. Sa vie allait changer cette nuit-là, et elle en avait affreusement conscience. Elle vit les sirènes dans le lointain, et décida de les éviter. Elle se gara plus loin au bord d'un trottoir et descendit de sa voiture, toujours agitée, courant presque. Elle vit se dessiner l'entrepôt, qui ressemblait davantage à un bâtiment en construction, évidemment interdit au public comme les panneaux le signalaient. Elle supposa que l'entrepôt se trouvait donc au sous-sol. Mais que faisait Sine MacLaren à cet endroit? Y cherchait-elle du matériel particulier? Avec la précipitation, elle n'avait pas demandé à son collègue et ami ce que contenait cet endroit. Elle entra facilement en passant sous une poutre de bois, puis s'arrêta pour réfléchir. Le sous-sol serait sans doute le premier endroit où ils iraient. Il fallait donc qu'elle attende. Elle savait que Sine MacLaren se trouvait en-dessous, et, résistant à son envie d'avoir une conversation avec elle, elle se dirigea vers le parking où étaient garées les voitures de polices, espérant qu'ils ne soient déjà pas entrés. Renoncer à poser des questions à Sine MacLaren lui donna envie de pleurer. C'était la seule chose qu'elle voulait. Des réponses. Si on arrêtait Sine, elle pourrait lui parler aussi longtemps qu'elle le souhaitait. Mais elle ne voulait pas qu'elle soit arrêtée. Il fallait la protéger. A tout prix.

Elle monta donc à l'étage supérieur, quasiment dépourvu de murs, afin de prendre de la hauteur et d'attendre que la police n'entre. Elle voyait de haut des officiers entrer par la porte principale, arme au poing. Il fallait qu'elle les rejoigne. Ses idées se bousculaient dans sa tête. Elle descendit vers Marc, qui manqua de la viser avec son arme. Heureusement, dans la lumière du crépuscule, il la reconnut immédiatement.

- Andrea?! 

La stupéfaction sur son visage laissa place à de l'inquiétude tandis qu'elle s'expliqua.

- J'ai réfléchi et suis venue aussi vite que possible. Je te laisse mener l'arrestation, évidemment, mais je voulais simplement être là..

- Andrea.. Tu...

- TROISIEME ETAGE! hurla un officier. 

En effet, une ombre venait de passer devant une ouverture. Chacun portait un gilet pare-balles. Ils entrèrent précipitamment dans l'immense bâtiment. Andrea les suivit, bouleversée par le futur qu'elle imaginait. Mais elle devait parler à Sine avant que tout ne se termine. Il fallait doubler ses collègues. Elle quitta le groupe qui se précipitait dans le bâtiment. Andrea s'approcha d'une façade criblée de trous dans les murs qui restaient debout. Elle n'hésita pas une seconde lorsqu'elle vit les sacs de ciment devant elle. Elle grimpa dessus, puis commença une escalade folle en agrippant ses mains aux crevasses des murs. Si elle tombait, elle pourrait se tuer. Mais sa témérité inspirait une confiance aveugle. Elle grimpa le plus vite qu'elle le pouvait, espérant que tout ne soit pas déjà finit pour Sine. Les paumes de ses mains glacées se flétrissaient et se mettaient à saigner, mais rien ne l'arrêta. Quand elle arriva au troisième étage, elle brisa une vieille fenêtre de verre avec son pied, et se laissa tomber sur le sol. Sine se tenait devant elle, s'apprêtant  à s'enfuir.

- Attends ! hurla-t-elle. Je ne veux pas t'arrêter!

Sine s'arrêta. A l'inverse de ses suppositions, elle semblait détruite. Son maquillage coulant et ses lèvres tremblantes le confirmaient. 

- Je  veux simplement savoir, dit Andrea, accroupie. Pourquoi avait-vous faillit?

- Que voulez-vous dire?

- Pourquoi avoir tué Marie-Anne Verneuils de cette façon si... Cela ne vous ressemble pas. Je veux savoir ce qu'il s'est passé. Et pourquoi je continue de vous protéger!

- Je cherche encore à le comprendre... Cette nuit reste un mystère. Peut-être que vous ne m'auriez jamais trouvée sans cela..

- Je savais que quelque chose ne tournait pas rond, mais je n'aurais probablement pas deviné. Je ne veux pas que vous soyez arrêtée. Je veux avoir une conversation avec vous. Venez avec moi. Les policiers arrivent.

- Je ne veux pas venir. Partez! Je vous en supplie.

Elle pleura pour de bon et s'effondra sur le sol. Sine MacLaren était si.. faible... fragile.. et bouleversée...

- Tout va bien, d'accord? Je ne les laisserai pas vous prendre. Nous pouvons descendre en escaladant le mur. Venez.

- NON! hurla Sine. Partez, je vous en prie...

Des pas résonnaient à proximité. Les policiers montaient jusqu'au dernier étage.

- Ils sont là. Partez!

Sine secoua la tête.

- Vous ne me laissez pas le choix.

Andrea attrapa Sine et se cacha derrière un bloc de béton. Les policiers entrèrent en trombe dans la pièce. Marc s'avança et les dépassa, dans un silence incertain. On entendait le vent passer entre les parois. La lumière du jour imprégnait la pièce. Après un instant de concentration, Andrea sortit de sa cachette.

- J'ai cru que c'était elle qui arrivait, dit-elle de la façon la plus naturelle possible. Elle n'est pas là.

Mais Marc ne la croyait plus. Plus autant qu'avant. Son amitié lui fit baisser son arme, mais pas ses gardes.

- Je pense qu'elle est au sous-sol, ajouta Andrea.

Elle s'approcha de lui d'un air amical , et posa sa main sur la sienne.

- Tu ne me crois pas, Marc?

Les autres policiers ne savaient comment réagir. Certains restaient méfiants tandis que d'autres avaient rangé leurs armes. Soudain, Andrea attrapa la main de Marc et tira son arme de toute ses forces. Quand elle la tint enfin, elle la posa sur sa tempe.

- Lâchez vos armes, et sortez. SORTEZ!

Tout le monde posa son arme. Dans la stupeur générale, Sine sortit de sa cachette. Certains frémirent en la voyant. Elle pleurait encore.

- Pars, dit Andrea. Va-t'en immédiatement.

Sine contourna les policiers et sortit.

- Alors, vous travaillez ensemble depuis le début, hein?

- Je suis désolée, Marc. Je te jure que je t'expliquerai.

Mais avant qu'Andrea ne puisse faire quoi que ce soit, trois policiers sortirent en toute hâte de la pièce. Un coup de feu retentit. Sine hurla.