Sine MacLaren avait reçu de la nature les dons qu'exigeait notre société actuelle. Sans parler du caractère physique de sa beauté, de ses fines jambes, de ses cheveux cuivre, de sa taille haute, de son visage innocent, de ses yeux perçants, de ses mains délicates, de l'aura puissant qu'elle dégageait, elle possédait une intelligence et une connaissance de la psychologie humaine à un point déconcertant. Anticiper les faits et gestes de n'importe quelle personne de sa connaissance plus ou moins proche, lui procurait une aisance inimaginée à la prendre dans ses griffes. Elle savait ce dont avait besoin n'importe quel homme ou femme auquel elle portait le moindre intérêt, et en complément se renseignait de manière à combler son manque d'information. La psychologie et les informations plus concrètes donnaient à la tueuse ce qu'elle avait besoin pour plaire. Telle ou telle parole prononcée de sa bouche était dite si différemment selon l'identité de son interlocuteur. Elle était inéluctablement populaire et appréciée.

     Quand sa petite voix le lui demandait, elle ne lâchait pas d'une semelle la cible. Si elle pouvait s'occuper d'elle avec aisance, la rencontrer sans problème, elle ne s'attardait pas trop à nouer des liens avec elle. Si, par contre, elle ne pouvait la rencontrer par le biais du hasard, il fallait qu'elle s'en rapproche, souvent dans un cadre professionnel, parfois dans le cadre privé. La police n'était pas au courant qu'elle avait tué bien plus d'hommes et de femmes, qu'ils ne le supposaient. Elle avait une connaissance approfondie sur les poisons presque autant qu'elle en avait que sur les comportements humains. Elle savait comment plaire et déplaire, et savait aussi comment suspendre à ses mots les lecteurs de la presse. Venaient à son esprit des idées qui ne viendraient pas à la plupart des gens. Des façons de procéder, de tromper, de mentir, de tuer...

     Elle était aussi, mais cela vous en doutez bien, bonne comédienne. Même la renommée Andréa Maréchal ne pouvait envisager la double-vie qu'elle menait. Elle avait l'esprit de logique des grands criminels, la volonté d'agir, et les convictions qui allaient avec. Dans son enfance, jamais aucun problème psychologique n'avait été détecté, et pourtant sa voix était déjà apparue. Elle aurait eut une meilleure vie, ou une pire si cette voix criarde et grave ne susurrait pas ces mots tranchants.

     Sine avait très peu de relations amoureuses. Il y avait un espace, peut-être, au fond de son cœur, pour tenir à ses proches, mais pas pour aimer, passionnément. Elle se détachait de tout cela, pourtant ce n'était pas les occasions qui manquaient. Julia la jalousait légèrement en ce point, tout comme elle ne la comprenait pas. Elle pouvait quasiment avoir qui elle voulait, homme, femme, petit, grande, et elle refusait à chaque demande, sauf si elle avait une victime à y gagner.