Une nouvelle cible m'est venue aujourd'hui.

on continue

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          Après être passée en vitesse au poste de police et avoir remis la liste à Andrea Maréchal, je retourne chez moi pour remplir mon sac d'informations sur la vendeuse. Sortant la clé de ma poche, j'entre dans la chambre inutilisée. Pièce carrée. Pas de fenêtre, pas de lit. Seulement un bureau en bois usé et une armoire baroque à la peinture jaunie par le manque de lumière. J'ignore si les anciens locataires utilisaient ou non cette pièce. Peut-être en tant que bazar. L'idée m'est venue de l'utiliser quand la voix dans ma tête m'agressait, et qu'il fallait que j'agisse enfin. Je ne pouvais plus me retenir. C'est de cette façon que mes petits meurtres ont commencé. L'armoire contient la plupart de mes objets, excepté certains relevés ou autres documents contenus dans le bureau. Je possède aussi un petit ordinateur que j'ai acheté d'occasion. C'est avec lui que je fais mes recherches plus ou moins légales.

          J'allume la lumière. J'ai laissé la clé sur la porte fermée au cas où Nathan ou Julia rentrerait en avance, afin qu'il ou elle ne puisse pas entrer. Je laisse la porte du bureau ouverte, et ouvre la fenêtre voisine pour aérer la pièce. Il faut que je sache tout ce qu'il y a à savoir sur sa femme. D'abord les informations communes, disponibles pour la plupart des gens si l'on sait où chercher, plus les données plus personnelles qu'il me faudra dénicher. Je vais en complément éventuellement chercher son nom sur les réseaux sociaux, bien que ce ne soit pas le style d'une femme de la vieille école, mais qui sait? 

          Afin de connaître son emploi du temps, je vais la suivre régulièrement pendant une semaine, et noter sur mon carnet. Car je ne prends pas le risque de noter sur l'ordinateur. Bien qu'il soit ultra-sécurisé, illégalement ici et inconnu des serveurs, on ne sait jamais. Mais je sais de source sûre qu'aucune de mes recherches n'est trouvable malgré tous les efforts du monde. Ce carnet bien épais, je ne le garde pas sur moi. Je suis toujours en train de bouger, il ne faudrait pas qu'on me le vole dans mon sac, ou, plus stupide encore, que je ne le perde. Il reste dans un tiroir du secrétaire que je ferme à double tour, comme l'armoire d'ailleurs. 

Voilà le plus gros de mes recherches:

NOM: Marie-Anne Verneuils

AGE: 52  

DOMICILE: 123, rue des mimosas 

SITUATION: aisée, veuve, deux enfants, future grand-mère.

PASSÉ: née en Bretagne.probablement meurtrière. avait un alibi quand son mari est mort dans dans des circonstances mystérieuses.héritage. enfance difficile >   mère indigne.

CARACTÉRISTIQUES MORALES:mère autoritaire/froide/ambitieuse. 

                                                                   solitaire/bienséante/disciplinée. 

                                             PHYSIQUES: grande, droite, cheveux épais bruns attachés en arrière,                                                                       habits  formels vieillots, yeux perçants noirs, lunettes carrées 

HABITUDES/GOÛTS: s'occupe de son magasin 2J/semaine, sort à 5:00. lit beaucoup. aime voyager, la solitude, le chocolat. bonne géographe. marche à pied, cuisiner,  souvent seule chez elle. femme de ménage qui passe 3J/ semaine, va à la messe les dimanches.

SANTÉ: problèmes de diabète/en bonne forme/ allergique soja

CROYANCES/VALEURS: catholiques, valeurs conservatrices

CASIER JUDICIAIRE: vierge 

FAIBLESSES: allergie au soja

MEILLEURES OPTIONS D'APPROCHE: 

Lunettes indispensables => vue mauvaise => accident domestique envisageable?

Toujours une boite de chocolats jeff de bruges dans sa boutique/ empoisonnement chocolat?

          Mes recherches sont éreintantes. J'approfondirai après. Je vais la suivre une semaine à différentes intervalles et avec différents costumes. Après ça je saurai exactement quoi faire. La solution des chocolats me semble simple et sans faille. Je pourrais glisser un chocolat empoisonné. Quand ce sera fait, je prendrai la boîte, et pour éviter d'y laisser mon ADN,  je la brûlerai. Si mon ADN est quand même trouvé dans le magasin, j'aurai comme excuse ma précédente visite dans le cadre de l'enquête.

          Je regarde mon téléphone: 17h00. Julia et Nathan ne vont pas tarder. Je range mes documents éparpillés de partout dans la pièce, puis je ferme à clé l'armoire, et les tiroirs du bureau. Je passe le reste de la soirée avec Nathan et Julia.

          Le soir suivant, alors que je m'apprête à dormir, j'entends mon téléphone sonner. Mes yeux ne veulent pas s'ouvrir. Mon corps est déjà endormi. Seul mon esprit est conscient, et pourtant je ne rêve pas. Je suis toujours éveillée, sans l'être. Je tire de toutes mes forces et je finis par me retrouver assise dans mon lit, sans pour autant avoir ouvert les yeux. Je cherche à tâtons ma table de nuit, puis mon téléphone qui a cessé de sonner,  qui n'émet pas de lumière. Quand je l'allume, l'écran bleu me force à ouvrir les yeux. Un appel manqué d'Andrea Maréchal. Mais qu'est-ce qu'elle me veut celle-là?

Je décide de l'appeler, même si elle entendra probablement à ma voix déraillée que je sors d'un sommeil profond. 

- Ah! Vous répondez enfin.

- Qu'est-ce qu'il y a...

Punaise. Ma voix m'a fait sursauter. C'est affreusement gênant. J'entends la capitaine qui soupire.

- Vous dormiez.

- Non... 

- Désolée si je vous réveille. On a une nouvelle victime.

- Qui est-ce ? dis-je en faisant semblant de ne pas être surprise.

- Vous la connaissez. Marie-Anne Verneuils. Retrouvée morte dans sa boutique. Nous ne savons pas s'il s'agit d'un meurtre, mais c'est très probable que notre tueuse ait refait un coup.

Je suis abasourdie par ce que je viens d'entendre. Cette femme.... Morte.... Je n'arrive pas à y croire. Je dois.. rêver..

- Sa fille l'a trouvée, ajoute-t-elle. Elles s'étaient données rendez-vous chez elle et sa mère n'est jamais venue. Elle a vite compris que quelque chose clochait.

Je ne dis pas un mot. Mes pensées se bousculent, s'emmêlent, s'entrechoquent. Pourquoi la situation m'échappe à ce point?

- D'après les traces sur sa bouche, on l'aurait évidemment empoisonné. Mais on attend l'expertise.

          Je raccroche. Tout devient flou dans ma tête. Je n'ai pas tué cette femme. Pas encore. Est-ce que ce n'est qu'une coïncidence que la victime que j'avais choisie soit morte dans le même processus que celui que j'avais envisagé? Je ne pense pas. Quelqu'un se moque de moi. Quelqu'un profite de ce que je fais pour s'amuser. Dans mon esprit perdu, le doute et l'incompréhension laissent place à un sentiment plus dur, plus intense, plus grossier. Je ressens la haine. La haine envers cette personne qui m'a devancé. 

          Toujours dans mon lit, je serre la couette de toutes mes forces. Mes lèvres tremblent. J'ai la gorge nouée...Une larme coule sur ma joue. Je claque des dents. Je me sens bouillonnante. Comme si j'allais exploser. Je me retiens de hurler. Il faut que je reste calme. La personne qui a fait ça paiera. Je m'en occuperai moi-même. On verra si elle s'amusera encore. Et je ne l'empoisonnerai pas.... Elle ne mérite pas une mort si douce...