Zayn et ses parents sont escortés vers les chambres, quand, subitement, une tornade blonde lui saute dessus. Mais il n'a pas le temps de réagir malgré la surprise, la tornade le relâche aussi vite.

- Je vois que tu t'es déjà fait un ami ! dit l'infirmière en souriant. C'est très bien.

- Coucou Niall, dit la maman. Tu vas bien ?

Niall ne répond pas, comme à son habitude. Ses parents arrivent et l'attrapent, ce qu'il ressent comme quelque chose d'hostile, et il se met à se débattre. Son père la maintient fermement pour éviter qu'il se blesse ou blesse quelqu'un, et sa mère s'excuse auprès des autres personnes. Ils partent dans une chambre, et l'infirmière reprend la marche, tandis que les parents de Zayn chuchotent.

- Pauvre enfant.

- Ca ne doit pas être facile tous les jours.

Zayn ne comprend pas. Il ne comprend pas souvent quand ses parents parlent des autres. Il ne comprend jamais si c'est en positif ou en négatif, et il ne comprend pas non plus pourquoi ils chuchotent. Mais il a compris que ce n'était pas normal de ne pas comprendre tout ça.

- Voici ta chambre ! dit l'infirmière en les faisant entrer

Zayn reste immobile en découvrant la pièce. Il a très envie de dire quelque chose. Mais il est aussi très timide. Une bataille sans merci se joue dans sa tête, et c'est finalement son côté honnête qui prend le dessus.

- Ca ?

- Zayn, gronde sa mère en chuchotant

- Il a raison ! dit l'infirmière en souriant. Mais ne t'inquiète pas mon grand, c'est juste une chambre provisoire. D'ici une petite semaine tu auras ta vraie chambre, et tu pourras apporter tes affaires.

Il acquiesce sans rien dire.

- Est-ce qu'il aura droit au téléphone ? s'empresse de demander sa mère

- C'est à discuter avec le médecin. Mais... Il a un téléphone ? demande l'infirmière étonnée

- Pas encore ! Mais on se demandait si on ne devrait pas lui en acheter un, pour qu'il puisse nous appeler maintenant qu'il est là.

- C'est inutile. Nous avons des cabines téléphoniques, et les visites sont autorisées tous les jours, en dehors des horaires d'activités et de thérapie.

- Oh. D'accord. On verra ça l'année prochaine alors, hein mon grand ?

Son père lui ébouriffe les cheveux. Zayn n'a jamais compris non plus ce geste. Qu'est-ce que ses cheveux ont fait de mal pour subir ça ? Ils n'ont même rien à voir avec cette histoire de téléphone.

Il reste immobile, stoïque, et sa mère lui pince la joue en souriant. Il lui aurait bien dit qu'il n'aime pas ça, mais l'infirmière est toujours là, et tant qu'elle est là, il ne compte pas vraiment parler.

- Je vais vous laisser entre vous, dit-elle. Vous pouvez rester jusqu'à l'heure du repas.

- Bien sûr qu'on reste jusqu'à la fin ! s'empresse la mère en serrant son fils contre elle de toutes ses forces

- Et vous pouvez aller dans la salle commune si vous le désirez. Je crois que Niall y est, si tu veux, dit-elle à Zayn en lui faisant un clin d'œil avant de partir

Zayn ne comprend pas pourquoi elle lui a fait un clin d'œil. Est-ce que c'était un sous-entendu ? Il ne comprend jamais les sous-entendu. Il a souvent l'impression qu'on se moque de lui, et qu'il y a des sous-entendus dans tout ce que les gens dise.

- Tu viens mon chaton ? dit sa mère en le prenant par la main. On va voir ton ami ?

- Mais c'est pas mon ami...

- Ca peut le devenir ! Tu ne veux pas des amis ?

- ...Si... ?

- Tu te feras plein d'amis mon fils, dit son père comme une affirmation plus qu'autre chose

Les parents l'entrainent hors de la chambre, dans la salle commune. Niall y est, en train de jouer par terre avec un avion, et il y a aussi un autre garçon, un châtain bouclé collé à ses parents. Zayn sait que ses parents s'attendent à ce qu'il se fasse des amis, mais il ne voit pas comment. Les autres enfants sont trop jeunes, trop immatures, trop peureux, ou trop étranges pour lui. Et même s'il en trouvait un comme lui, il n'oserait jamais faire le premier pas.

Zayn, il n'est pas autiste comme les autres. Et il sent bien la différence. Ça ne lui plait pas trop d'être ici. Il se faisait une joie d'aller en pensionnat avec d'autres enfants comme lui, et d'être enfin respecté et non plus moqué par les autres. Il était vraiment heureux de quitter son collège. Mais maintenant, il a l'impression qu'on lui a menti. Les enfants ici ne sont pas comme lui. Ils sont tous autistes, et il ne sait pas vraiment ce que c'est, mais ce n'est pas ce qu'il est.

Zayn, il a Asperger, et il le sait depuis quelques mois maintenant. Il a toujours senti qu'il était différent, mais maintenant, ça a été confirmé. Et Monsieur Tomlinson le lui a re-confirmé. Alors il sait ce qu'il est. Un garçon tout à fait normal, mais incapable de décrypter les émotions des gens, de comprendre le sarcasme et les sous-entendus, de dire ce qu'il faut quand il faut et de se taire quand il faut se taire. Et un garçon mortellement timide, et vraiment très sensible.

Selon lui, ça ne fait pas de lui quelqu'un d'autiste. Juste quelqu'un de différent. Il parle, marche, va à l'école et fait ses devoirs. D'apparence il est tout à fait normal. Alors il ne comprend pas pourquoi on veut le faire vivre avec des enfants qui ne font pas tout ça. Et il a l'impression qu'on lui a menti, en lui disant qu'il serait avec des gens comme lui.

Il s'affale lourdement sur un fauteuil, et attrape une BD. Au moins, il y a des Comics ici, c'est la seule bonne nouvelle de la journée. Il se met à lire et se perd complètement dans un autre monde, oubliant tout ce qu'il y a autour, si bien que quand il relève la tête, la pièce est pleine d'enfants qui jouent et qui crient.

Zayn a des difficultés à se concentrer, mais quand il est concentré, il n'a plus conscience de rien autour. Et ça peut lui jouer des tours.

Se sentant soudainement agressé et mis en danger par toute l'agitation autour de lui, il prétexte un besoin d'aller aux toilettes, et sort de la salle. Il retrouve le chemin de sa chambre, et y reste quelques minutes pour se dé-stresser, puis il passe par la case pipi maintenant qu'il y est, et il ressort de sa chambre.

Un garçon un peu plus âgé et visiblement beaucoup plus normal que les autres marche dans le couloir, et s'arrête devant lui quand il le voit.

- Salut ! Moi c'est Louis.

- Euh... Zayn.

- Oh ! Cool, tu parles !

- Euh... Oui.

- J'ai eu peur un instant, j'ai cru que j'allais vivre uniquement avec des muets et des pleurnichards. Euh, je dis pas ça méchamment hein ! Ils ont leurs problèmes et c'est pas leur faute. T'as eu le menu de la cantine ?

Zayn cligne plusieurs fois des yeux, complètement sonné par le débit de parole de Louis. Puis, il se reprend, et répond.

- Non. Et toi ?

- Moi ? Moi j'y ai participé !

- Euh ?

- Je suis Louis Tomlinson ! J'habite ici.

- Tomlinson... Comme...

- Comme les directeurs.

Louis sourit en acquiesçant. Zayn n'est pas sûr de comprendre. Louis va pour l'attraper par le bras, mais il se ravise.

- Je peux te toucher ? demande-t-il

- Euh... Je crois.

Alors Louis l'attrape par le bras, et l'entraine avec lui dans les couloirs. Zayn ne comprend rien à ce qui lui arrive, mais ce n'est pas très différent de d'habitude, alors il se laisse faire.

- Maman ! fait Louis en entrant dans le bureau de l'infirmière. Zayn a pas eu le menu.

- Oh, pardon jeune homme !

Elle lève les yeux en souriant et encore une fois, Zayn ne comprend pas. Est-ce qu'elle est agacée ? Irritée ? Est-ce qu'elle se moque de lui ? Ou au contraire est-ce qu'elle est amusée ?

Elle attrape une feuille et la tend à Louis.

- Personne n'a eu le menu, Louis. Mais je t'en prie, donne-le à ton ami.

- Cool ! Merci.

Louis repart, en tirant Zayn par la main, reprenant le chemin des chambres.

- Tu as quel âge ?

- Je viens d'avoir 12 ans, dit Zayn. Et toi ?

- J'en ai eu 13 y a deux mois ! T'es de février ?

- Non, de janvier.

- Moi je suis de décembre.

Ils arrivent à la chambre, et Zayn a déjà eu le temps de se dire que Louis est un sacré moulin à paroles. Mais ça compensera tous les autres enfants qui ne parlent pas.

Louis montre le menu à Zayn et l'étudie avec lui, puis il le pose sur son meuble de chevet.

- C'est cool, plus qu'un an et tu seras chez les grands !

- Quoi ?

- A 13 ans, tu as une chambre dans l'aile ado. Et c'est beaucoup plus cool, tu peux te coucher plus tard et tu as le droit de lire avant de dormir, tu peux même aller jouer dans la chambre de tes copains.

- Zayn, fait subitement la voix de sa mère

Les parents de Zayn entrent dans la chambre, et comme d'habitude il ne comprend pas l'expression de leur visage. Est-ce qu'ils sont fâchés ? Ou peut-être déçus. Est-ce qu'ils lui en veulent ?

- Mais où tu étais ? Je croyais que tu devais faire pipi.

- Pardon... Je...

- C'est ma faute ! Je m'appelle Louis. Je l'accapare depuis tout à l'heure. Mais je vous le rends ! Je dois retourner faire mes devoirs. Au revoir !

Louis disparait comme une flèche.

- Il est rapide, dit le père un peu sonné de ne pas avoir eu le temps de répondre

- Oui, dit Zayn

Mais Zayn est un peu content que Louis ait ce flot de parole, parce que comme ça, il n'aura pas trop besoin de parler.

- Tu vas bien mon chaton ? demande sa mère en l'attrapant doucement par les joues

- Hmhm.

- Tu aimes bien le centre ?

- Ca va.

- Je suis sûre que tu te feras plein d'amis. Louis a l'air gentil !

Zayn acquiesce. Cette fois il n'a pas envie de la contredire. Louis a l'air cool.

- Tu veux qu'on fasse quelque chose ensemble mon petit cœur ?

- Je voudrais bien aller prendre l'air.

- D'accord.

Sa mère le prend par la main, et ils partent demander à l'infirmière de déverrouiller l'ascenseur pour pouvoir sortir. Une fois dehors, Zayn s'assoit par terre, puis regarde le ciel. Il aime bien regarder les nuages, il trouve que c'est relaxant et apaisant. C'est ce qu'il fait quand il a une montée de stress.

Quand ses parents invitent du monde à la maison, il finit toujours par aller se réfugier dans le jardin et regarder les nuages en essayant d'oublier le reste du monde. Ça l'apaise toujours. Mais il pense qu'il est un peu bizarre. Il sait que les autres adolescents ne font pas ça.

Sa hantise, c'était quand son père a invité son collègue à la maison, et qu'il est venu avec sa famille. Zayn s'est senti mal comme toujours, et avait vraiment peur que Perrie découvre qu'il était bizarre. Il essaie toujours d'avoir l'air normal face à elle. Perrie, elle est tellement mignonne, et gentille. Il est sûr que tous les garçons de son collège sont amoureux d'elle. Mais elle, elle ne voudra jamais d'un garçon comme lui.

C'est en partie pour ça que Zayn a accepté de venir vivre dans ce centre. Il veut devenir normal. C'est son unique but, et c'est ce qu'il a dit à Monsieur Tomlinson quand il lui a demandé pourquoi il s'inscrivait. « Je veux devenir normal ». Et il veut aussi que Perrie l'aime, mais ça, il ne l'a pas dit tout haut.

Il ne sait même pas pourquoi il aime Perrie. Il ne s'attache jamais vraiment aux gens, ou du moins, pas de cette manière-là. Il ne trouve jamais que les autres sont intéressants, et la plupart du temps, il est beaucoup mieux seul à lire des comics. En plus, il n'a aucun ami. Chaque fois qu'il a cru en avoir, les personnes l'ont trouvé trop bizarre et l'ont laissé tomber. Les filles, encore pire, elles se moquent toujours de lui. Parce qu'il s'habille bizarrement, et qu'il parle avec un vocabulaire trop mature. Et les garçons, ils le trouvent tellement bizarre, qu'ils veulent toujours le frapper. Alors il n'aime pas trop les gens, et encore moins les filles, mais Perrie, c'est différent. Peut-être parce qu'elle a toujours été gentille avec lui. En tout cas, il est amoureux d'elle depuis deux ans, et ça ne risque pas de changer.

Il ne sait pas dans combien de temps il sortira d'ici, il ne sait même pas si c'est en mois ou en années, mais s'il y a une chose qu'il espère, c'est que ses parents auront gardé le secret d'ici là, et qu'enfin, normal, beau et fort, il pourra aller avouer ses sentiments à Perrie, et qu'elle craquera pour lui.

Dans l'état actuel des choses, c'est impossible. Il est incapable de décrypter les émotions même s'il fait des efforts, et il ne comprend pas le sarcasme et le mensonge. Il est sûr que si Perrie le repousse, il serait capable de le comprendre de travers, et qu'à l'inverse si elle l'aime bien, il pourrait penser qu'elle se moque de lui. En plus, lui-même ne s'aime pas trop pour le moment, et il veut vraiment changer et devenir normal avant de penser à devenir l'amoureux de quelqu'un.

Et voilà, c'est reparti. Il s'est remis à penser, et penser, et penser. Sa tête ne se vide jamais ; dès que c'est le cas il se remet à penser. Il n'est jamais tranquille. C'est d'ailleurs pour ça qu'on lui dit souvent qu'il a la tête ailleurs. Quand il est dans ses pensées, il n'a plus conscience du monde autour, et si on lui parle, il n'entend pas. Parfois on lui dit même que s'il y avait le feu autour de lui, il ne le remarquerait pas. Et il a tendance à penser que c'est la vérité.

Zayn est très lucide concernant son trouble. Il s'est renseigné, il a toujours été très curieux de savoir ce qu'il avait exactement. Son unique but dans la vie est de devenir normal, alors il fait mieux de savoir contre quoi il se bat exactement.

Parfois, il dit que l'Asperger est un monstre qui vit à l'intérieur de lui et qui ne veut pas partir. D'autres fois, il vit paisiblement avec.

Aujourd'hui, il est partagé.