Vingt-deux ans auparavant.

Il m'était maintenant impossible de nier que ma sœur avait bon goût. L'homme qui se tenait dans le porche de notre demeure en était la preuve vivante. Mon regard s'attarda sur ses muscles et en abaissant les yeux sur mes maigrichons avants-bras je ne pus que grimacer. Se faisant, une mèche de ma chevelure blonde me tomba en plein devant les yeux. Je soufflai, mais cela ne la fit pas bouger d'un chouia. Ma mère allait probablement me raser le crâne si je ne tentais pas de les discipliner bientôt. Le vent m'effleura et un frisson parcourut mon échine.

— Qu'est-ce que je peux faire pour vous... monsieur ? lui demandai-je en claquant des dents.

La lune était pleine et l'automne s'était bien établi. Je n'osais pas laisser ce type entrer, quelque chose chez lui ne m'inspirait pas confiance. D'ailleurs, ma mère l'aurait aussitôt chassée à coups de pelle en comprenant qui il était. Néanmoins, plus je l'observais et plus il m'était impossible de me détourner. J'avais l'impression d'être en transe.

— William, cria la voix de ma mère en haut de l'escalier, en provenance de sa chambre. Qui est-ce ?

— Personne maman, hurlai-je en retour sans cesser de le fixer. Un simple gamin qui vend des barres de chocolat pour son camp.

Cela fit sourire ce dernier.

— Il est tard, il ne devrait pas se promener dans les rues à cette heure ! Les soldats pourraient l'emprisonner pour cette unique raison.

— Je sais, je sais ! dis-je de manière distraite. Il s'en va !

L'homme recula me faisant signe de sortir à l'extérieur. Malgré le froid, je fis ce qu'il me demandait en refermant la porte d'entrée discrètement derrière moi. Un tremblement parcourut mon corps, puis d'un coup, une douce chaleur m'enveloppa. La brise nocturne fut bien vite secondaire. En observant de plus près, je compris qu'une légère lueur argentée couvrait la totalité mon corps.

— Mais qu'est-ce que... m'exclamai-je déboussolé avant que le prétendant de Cass ne lève une main pour que je me taise.

Simplement, j'étais tout aussi têtu que ma cadette.

— Mais c'est génial ! J'ai l'impression d'être en plein été.

Je me dandinai, pour tester l'efficacité de cette couche protectrice, avant qu'elle ne disparaisse d'un coup. Aussitôt, le froid revint à l'assaut.

— Putain ! criai-je surpris, en tentant de m'envelopper de mes bras.

J'ai besoin de ton attention, fit une voix grave.

Mon sourire s'estompa rapidement. La personne qui me faisait face n'avait pas ouvert la bouche, pourtant je savais que c'était lui qui s'était adressé à moi. Il n'y avait pas un chat dans les environs et cette voix correspondait en tout point à ce dernier. Il y avait une certaine puissance en elle qui se dégageait.

Ta sœur est en danger. Ils l'ont retrouvée.

Mon corps se figea brusquement. Des gens voulaient faire du mal à Cass ? Pourquoi ? Au ton qu'il avait employé, c'était sérieux. Très sérieux. Des milliers de questions voulurent franchir mes lèvres, mais la première fut :

— Pourquoi tu ne peux pas l'aider, toi ? Je ne vois pas ce qu'un gamin de quatorze ans et sa mère retraitée peuvent faire pour l'aider.

Un sourire triste apparu sur son visage sans défaut.

Je me suis malheureusement trop impliqué dans vos affaires. Si je continue ainsi, cela risque davantage de déséquilibrer les choses. J'ai tout fait en mon pouvoir pour la protéger, mais mon temps dans ce monde est écoulé.

Il m'était impossible de comprendre ce qu'il voulait dire. Tout ceci ne faisait aucun sens. Pour qui se prenait-il ? Un dieu ? Il me tendit un bout de papier, avec une des plus jolies écritures que je n'avais jamais observées.

Elle se trouve à cette adresse. J'ignore ce que vous pouvez faire pour la sauver, mais au moins, elle vous aura vu une dernière fois.

Ma bouche s'ouvrit, mais aucun son n'en sortit. Brusquement, la porte derrière moi s'ouvrit et ma mère apparut vêtue d'une robe de nuit bleue. Je me retournai pour faire face à l'inconnu, mais il avait disparu. Mon regard descendit vers le papier que je tenais dans mes mains, preuve que je n'avais pas halluciné.

— Mais que fais-tu dehors Willy ?

Ses yeux gris m'analysaient avec inquiétude. Je ne pus que lui tendre le bout de papier, en état de choc. Elle le saisit et lit à voix haute l'adresse. C'était à environ six heures de routes d'ici. La contournant, je saisis les clés de la voiture, enfilai mon manteau et mes espadrilles. Avant de m'apprêter à dévaler les escaliers du balcon, ma mère me saisit le bras.

— Qu'est-ce qu'il se passe jeune homme ? s'enquit-elle de manière autoritaire. Qui demeure à cette adresse ?

— Cass, dis-je sans oser lui faire face.

Si elle fut surprise, sa voix n'en démontra rien.

— Tu peux attendre à demain avant d'aller la voir. Rien ne presse.

Je me dégageai de sa poigne en me retournant.

— Non, justement ça ne peut pas attendre. Le type qui est venu me porter ce papier a dit qu'elle était en danger.

Elle haussa un sourcil.

— Le vendeur de chocolat ?

Je soupirai en secouant ma crinière.

— Celui qu'elle fréquente... ou plutôt celui qu'elle fréquentait, repris-je en me souvenant la mine de l'individu.

Le visage de ma mère qui s'était détendu se durcit brusquement.

— Je savais qu'il ne s'agissait pas de quelqu'un de fiable.

Je me retins de lui parler des capacités étranges de l'homme. Nous devions partir le plus rapidement possible et il n'était pas l'heure qu'elle commence à m'interroger.

— Laisse-moi quelques minutes, je vais me changer, m'ordonna-t-elle avant de claquer la porte derrière elle.

Je m'effondrai sur le patio en me demandant ce qu'il se passait. Il y avait cependant une chose dont j'étais certain. L'ancien prétendant de ma sœur n'était pas humain et ça me terrifiait.

***

Voici la première partie du chapitre 11 :D  J'ai décidé de le couper en deux, car sinon il faisait près de 3000 mots :') de plus, à cause de mes examens, je voulais absolument avoir quelque chose à publier mardi, j'espère que cela vous va! Je sais que William avait expliqué ce qu'il s'était passé, mais je trouvais important de vous mettre dans sa peau, afin de mieux comprendre. De plus, le chapitre suivant est la continuité de cette soirée et vous comprendrez bien plus de choses. Merci pour tout !

Love -xxx-