T4 - Chapitre 9
Watson sortit de la cellule en essuyant distraitement le sang sur ses lèvres.
Si Moriarty ne l'obligeait pas à venir chaque jour, il aurait depuis longtemps arrêté. Il n'aimait pas boire le sang de Holmes. Il avait quelque chose de différent. Il se sentait étrange, après.
— Watson ! Appela quelqu'un.
Il se retourna. C'était Lord Fox, un comparse.
— Tu as déjà mangé ? S'inquiéta le nouveau venu. Parce qu'on a un de ces arrivages... Une bande de touristes françaises ! Dix adolescentes belles et fraîches, à croquer ! Je préviens tous le monde !
— J'arrive ! Répondit Watson avec un sourire.
Les vampires étaient debout, en rond, autour des pauvres jeunes filles qui pleuraient, assises par terre, terrifiées.
— Tous le monde est là ? Lança Fox. C'est partit !
Et, tel une meute d'animaux sauvages, les vampires se jetèrent sur leurs victimes, qui hurlèrent.
Watson allait faire de même, quand quelque chose d'étrange le retint. Une sorte de répugnance.
Les cris des jeunes filles, qui excitaient ses comparses, le mettait mal à l'aise, lui donnait envie de faire quelque chose... Mais pas de les mordre. Pas de les faire crier plus. Il voulait... il ne voulait pas boire leur sang. Ça le répugnait, soudain.
Mais qu'est-ce qui clochait avec lui ?
Soudain extrêmement mal, il chercha des yeux une sortie, un échappatoire, quelque chose...
Et son regard tomba sur un homme, en face de lui, qui le fixait sans ciller.
Un Américain aux yeux aussi noirs que ses cheveux, habillé d'un long trench-coat beige.
Voyant qu'il ne bougeait pas, l'inconnu franchit la distance qui les séparait, attrapa d'une main un Watson désemparé, et le força à s'agenouiller avec les autres. Puis il passa sa main sur le cou ouvert d'une des jeunes filles, et, ignorant le mouvement de recul de Watson, lui barbouilla le visage de sang, avant de faire pareil avec lui.
— Rejoins-moi ce matin, à six heures, derrière la chapelle, lui souffla-t-il à l'oreille avant de s'écarter.
Aussitôt, il afficha un sourire repus, et repoussa un des corps comme s'il venait de s'en délecter.
Un peu confus, Watson prit exemple sur lui, en se demandant, encore, ce qui clochait.
~
Watson – ou celui qui avait le visage de Watson – avait réfléchis. S'il n'avait pas eu envie de boire le sang des jeunes filles, c'est simplement parce qu'il n'avait plus faim.
C'est tout.
Il en était persuadé.
Alors qu'est-ce qu'il faisait là ? Pourquoi était-il venu au rendez-vous, derrière la chapelle ?
Dissimulé dans l'ombre d'une statue mortuaire, il regarda le soleil poser sur le monde ses premiers rayons. Une étrange tristesse envahis soudain son esprit.
Le soleil lui manquait.
Une main, posée sur son épaule, le fit sursauter. Il fit volte face, prêt à en découdre au besoin.
C'était le vampire au trench-coat beige, qui le fixait d'un regard sombre, insondable.
— Je me demandais si tu allais venir, lança-t-il enfin.
— Je ne suis là que pour enquêter sur toi, répondit agressivement Watson. Au cas où tu présenterais une menace pour la communauté.
— Ben voyons, lâcha l'autre avec un regard triste.
Il y eut un instant de silence.
— J'en ai assez, dit soudain l'homme au trench-coat beige. Cette double vie... Si tu n'es pas ce que je crois... Eh bien tue-moi. Mais j'ai raison, n'est-ce pas ? Tu as commencé à retrouver ta personnalité d'avant.
Watson ne répondit rien.
— Contrairement à ce qu'on pense, reprit l'inconnu, l'état vampirique – je veux dire l'état vampirique violent – n'est pas irréversible. Il faut un empoisonnement régulier par du sang plein de peur. J'ai déjà vu ça plusieurs fois, un vampire qui trouve un humain régulier, qui accepte de lui donner du sang. Qui n'a pas peur de lui. Et le vampire retrouve progressivement sa personnalité...
— Holmes, comprit Watson. Ce saligaud c'est arrangé pour ne pas avoir peur de moi lorsque je buvais son sang.
Il eut un sourire carnassier.
— Mais je vais arranger ça. Je peux vous assurer que la prochaine fois, il aura peur de moi...
L'autre lui jeta un regard triste.
— Quoi ? Cracha Watson. Tu pensais que j'étais déjà redevenu un pauvre petit humain ? Mais je n'en veux pas, moi, de l'humanité ! Je veux être puissant, je veux pouvoir me nourrir sans contrainte ! J'irais vais Holmes. Dans l'heure.
— Holmes ? Tiqua soudain l'inconnu. Sherlock Holmes ? Tu es le docteur Watson !
— En effet.
— Écoute... Si jamais... Si jamais tu renonçais à le tuer, si tu décidais de fuir... Prends la grande route et va au Nord de Londres. À une vingtaine de kilomètres, tu tomberas sur un bois. Au cœur de ce bois, il y a une petite cabane, un refuge de chasseur. Nul ne connait son existence à part moi. Vas-y.
— Tu as conscience que lorsque j'aurais tué l'autre détective, la première chose que je ferais sera de te dénoncer ?
— Je m'en fous. Je joue le tout pour le tout.
— Alors dit moi ton nom.
— On m'appelle Castiel.
L'ancien docteur fronça les sourcils.
— Castiel ! Se rappela-t-il enfin. Oui, j'ai entendu parler de toi !
— De moi ?
— Sam et Dean Winchester sont à ta recherche.
L'homme au trench-coat tituba sous l'effet d'une émotion violente.
— Dean et Sam... murmura-t-il. Ils vont bien ? Ils sont en Angleterre ?
— Oui. En pleine forme. La dernière fois que je les ai vu, ils ont essayé de me tuer.
— Ils ne l'ont pas fait ?
— Non, Holmes les as persuadés que j'étais un gentil vampire. Ils ont eu tort, d'ailleurs.
— Alors... murmura Castiel. Il y a encore de l'espoir...
— Rêve pas trop, le coupa Watson. Ils étaient bien décidés à t'étriper. Tu as tué leur père, si j'ai bien compris.
— Pas véritablement tué. Il a été blessé en couvrant la fuite de ses fils, et fait prisonnier. Moriarty m'a dit de me nourrir de lui, comme toi avec Holmes. Mais comme Holmes, John avait comprit que le sang donné librement n'empoisonna pas les vampires. Jusqu'au jour de sa mort, il s'est appliqué à me rendre ma personnalité. Depuis, je me nourris à droite à gauche, comme je peux, je reste au plus près de Moriarty, et j'informe les chasseurs des plans que je peux découvrir. J'étais l'informateur de Van Helsing.
Sept heures sonnèrent à l'horloge de la tour.
— Tu as signé ton arrêt de mort, Castiel.
— Peut-être... murmura l'homme. Mais quelque chose me dit que tout n'est pas encore joué...
Watson haussa les épaules et fit volte-face, bien décidé à aller éliminer une bonne fois pour toutes le seul détective consultant chasseur de vampire de Londres.
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