
T2 - chapitre 6
Holmes poussa la porte du 221b, un mince espoir au cœur... Un espoir vite déçu.
Bien sûr, Watson n'était pas là.
Il voulait tant le retrouver, lui expliquer, s'excuser...
Que va-t-il faire ? Et s'il se faisait recruter par...
Il chassa aussitôt cette pensée de son esprit. L'idée qu'il puisse un jour combattre son meilleur ami le révulsait. De toute façon, il savait qu'il ne serait pas capable de le tuer. N'en déplaise à Van Helsing, il n'était pas une machine à exterminer. Il était détective consultant, bon sang !
Soudain, il maudit de tout son être le professeur, son carnet, le choix qui l'avait poussé jusqu'au 221b, les vampires, et le monde entier.
Machinalement, il piocha dans la réserve du docteur un rouleau de bandage pour son avant-bras.
Mais la plaie ne saignait plus.
Il cligna des yeux, éberlué. Ce n'était pas logique.
La vampire lui avait infligé une griffure plutôt profonde. Il ne restait sur son bras qu'une ligne rouge, comme si la blessure datait d'avant-hier.
Il était pourtant certain de ne pas être devenu vampire dans l'opération. Alors ?
Réfléchis, Holmes.
Il se laissa tomber au sol, ne prenant même pas la peine de s'asseoir sur son fauteuil.
Le seul événement qui avait pu avoir un impact sur la guérison de sa blessure, c'était l'intervention de Watson. Mais comment la perte de sang avait pu précipiter la cicatrisation ?
À moins que...
Il fouilla dans ses souvenirs.
Watson n'avait pas bu son sang.
Il avait seulement léché le sang qui coulait de la plaie. Il ne l'avait pas drainé hors de son corps.
Préoccupé, il changea de position.
Un bruit de papier froissé lui vint aux oreilles.
La page manquante du carnet.
« Étude sur le sang consentit, par John Winchester ».
Le titre suffit.
Holmes ne put s'empêcher de sourire tandis que les pièces du puzzle se mettait en place.
Il aurait dû y penser.
La clef, c'était la peur.
L'article parlait de John Winchester, un chasseur de vampire américain. Dans le but de mener une étude plus poussée sur la gent vampirique, il avait capturé un vampire tout juste transformé et, pour le maintenir en vie, lui avait donné de son sang.
Le résultat l'avait surpris au-delà de toute mesure.
Le vampire ainsi créé ne ressentait aucune animosité, aucun instant de violence. Mieux, sa personnalité était intacte. De plus, les vampires ainsi obtenus, s'ils étaient physiquement moins fort, développait des instincts de protection envers leur donneur, tandis que leur salive acquérait des propriétés curative extraordinaire. Un commentaire moqueur, certainement de Van Helsing, soulignait le dernier terme.
Le chasseur émettait ensuite une théorie sur le « sang consentit », arrivant à la conclusion que Dieu ne condamnait pas les créatures qui ne se nourrissaient que de sang librement donné.
Holmes écarta cette théorie bigote d'un haussement de sourcil. La clef, c'était la peur, il en était maintenant persuadé. Le docteur lui avait confié qu'en buvant du sang, il « goûtait » en même temps la personnalité du donneur, ainsi que toutes ses émotions immédiates.
Qu'avaient en commun ceux qui se faisaient vider de leur sang au détour d'une ruelle sombre, que n'avait pas ceux qui le donnaient, comme lui, librement ? La peur. C'était elle qui, transmise par le sang, empoisonnait les vampires, transformait leur personnalité, et en faisait des monstres.
Une note de Van Helsing, en bas de page, ironisait en ajoutant le fait que John Winchester, conspué par toute la communauté de chasseur, voulu mettre sa théorie à l'épreuve en capturant un autre vampire, pour le nourrir des mois durant uniquement de sang librement donné.
L'expérience fut un échec. Le clan du vampire le retrouva et le tua.
Le processus ne doit pas être réversible, pensa le détective.
Il fallait qu'il retrouve Watson pour lui montrer ça !
Mon Dieu... Pourvu qu'il ne boive pas de sang contaminé...
Il se redressa d'un bloc, décidé à retourner toute la cité s'il le fallait pour remettre la main sur son ami.
C'est alors que son regard tomba sur son établi.
Son sang ne fit qu'un tour.
Il avait mis au point trois bombes solaires. Il s'était vanté devant son ami de leur nouvelle efficacité, lui proposant quelques paris (acceptés, bien sûr, il connaissait les points faibles du docteur).
Les boites noires n'étaient plus là.
À la place, une lettre, écrite à la vas-vite sur la page arrachée d'un journal.
« Cher Holmes.
Il semblerait que notre collaboration touche à sa fin.
J'en suis infiniment triste, mais peut-être est-ce mieux ainsi. Nous savions tous les deux que cette situation était trop improbable, trop instable... Un jour ou l'autre, je vous aurais fait du mal. Je préfère mourir plutôt que de laisser cela arriver, comme j'aurais déjà dû mourir, un mois plus tôt, avant de devenir le (le mot était écrit en lettre tremblante) monstre que je suis maintenant.
Vous savez à quel point les aventures vous m'avez laissé partager avec vous m'ont rendu heureux, ainsi que l'amitié dont vous m'avez honoré toutes ces années. Ne soyez pas triste. Ne vous en voulez pas. Je ne meurs pas par votre faute, c'était mon choix. Sans vous, ma vie aurait eu tellement moins de sens !
Mais trêve d'apitoiement. Je n'insulterais pas votre brillant esprit en prétendant que vous ne vous doutez pas de mes intentions. J'ai appris le lieu et l'horaire de la réception. Je ferais exploser simultanément les bombes au moment propice. La ville et le monde ne s'en porteront que mieux.
Pour toujours, votre ami, John Watson.
PS : Je sais que nous avions certains paris en cours, mais je doute pouvoir les honorer ! Si vos machines marchent du premier coup, buvez un verre en ma mémoire ! »
La main du détective tremblait comme une feuille.
De tristesse. Puis de peur. Et de fureur.
— Je suis désolé, mon cher Watson, lança-t-il en l'air avant d'enfiler son manteau pour se ruer dehors, mais il n'en est pas question !
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