Holmes entendit l'avertissement et se jeta sur le côté, juste à temps. Son adversaire, par contre, fut renversé par le souffle de l'explosion. Le détective l'occis proprement.

Deux vampires se redressèrent, hagards, et filèrent sans demander leur reste.

Qu'ils partent, songea Holmes. Que tous apprennent que je vais les détruire, et qu'on ne blesse pas mes proches impunément.

En parlant de proche...

-Watson ? Souffla t-il.

Aucune réponse. Il promena son regard tout autour de lui.

Des têtes séparées de leurs corps. Du sang. Beaucoup de sang. Des membres déchirés ou brûlés par l'explosion.

De Watson, nulle trace.

Il soupira de soulagement. Il avait dû se rendre au point de rendez-vous.

Pour plus de sécurité, il rassembla les corps au milieu de la petite clairière, dégagea tout ce qui pouvait s'embraser autour d'eux - histoire de ne pas déclencher d'incendie - et mis le feu.

Un mauvais pressentiment lui étreignant le cœur, il se dépêcha de quitter les lieux.

Il ne manquerait plus que la police me trouve couvert de sang, en train de faire disparaître des corps démembrés !

*

Watson courrait à perdre haleine.

Mais ça n'était pas assez.

Il entendait l'autre se rapprocher, il sentait presque son haleine sur son cou...

L'enceinte du parc, déjà !

Il était, littéralement, dos au mur.

-Qui es-tu ? Cracha le vampire, pas même essoufflé, en s'approchant de lui. Comment as-tu osé t'attaquer à nous. Es-tu Sherlock Holmes ?

-C'est bien la première fois qu'on me prend pour lui ! S'exclama Watson, oubliant momentanément sa peur. Non, je suis son acolyte, le docteur John Watson. Pas à votre service, monsieur...

-Lord Wernoy.

-Ah, alors c'est par vous que Holmes a apprit le lieu de la petite réunion de ce soir !

-Pardon ?

-C'est le meilleur détective du monde, vous vous souvenez ? Je suis certain de l'avoir marqué quelque part. Vous devriez lire le Strand Magazine.

Watson chercha des yeux une issue. Il n'y en avait aucune.

-Je laisse ça aux bas peuple, cracha le lord. Comment Holmes a t-il pus connaître le lieu de cette rencontre ?

-Je vous laisse deviner. Ce qui est sûr, c'est que votre patron ne vas pas être rav... AHHHHHHHHH

Watson hurla lorsque le poignard du vampire transperça son bras.

-Vous disiez ? Demanda encore la créature.

-Que le diable... vous... emporte... haleta le docteur.

-Mais j'espère bien, répondit l'autre en réitérant sa manœuvre quelques centimètres plus bas.

Watson hurla de nouveau.

*

Holmes allait passer la grille du parc lorsqu'il entendit le hurlement.

Watson.

Ses jambes se mirent à courir avant même que son cerveau n'en ait donné l'ordre.

Watson ! Bon sang, Watson, où êtes-vous ?

Un nouvel hurlement lui glaça le sang.

Vite !

Vite !

Là. Watson. Et quelqu'un d'autre, penché sur lui.

Sans même ralentir, il percuta le vampire de plein fouet, lui fracassant la tête contre les pierres du mur.

Immobile, une plaie béante au milieu du crâne laissant échapper des bouillons de sang, le vampire s'affaissa, les yeux grands ouverts.

Le détective se précipita vers son ami à genoux.

-Vous êtes blessé, Watson ? Watson ? Dites quelque chose ! Pour l'amour de Dieu, dites-moi que ce n'est rien...

-Ça...va, haleta Watson en serrant son bras contre lui. Ça va aller...

Le détective poussa un énorme soupir de soulagement.

-Et vous, Holmes ? Votre visage ?

Portant sa main à la figure, ce dernier s'aperçut qu'une estafilade courrait le long de son front, baignant sa face dans le sang. Heureusement que je ne suis pas sortit comme ça dans la rue, pensa-t-il en aidant le docteur à se relever.

-Finalement, ironisa le détective en essuyant la plaie, nous nous en sortons plutôt bien...

-Parlez pour vous, grimaça le docteur. La prochaine fois, je propose que nous changions radicalement de tactique !

-J'approuve totalement, répondit Holmes. Moins de muscle, plus de...

Il n'eut pas le temps de finir sa phrase.

Lord Wernoy s'était jeté sur lui.

Leur couper la tête ! Pesta Holmes en son for intérieur. Il faut leur couper la tête, bon sang !

L'autre approcha sa bouche de son cou.

-Lord Machin! Cria Watson en frappant l'épaule du vampire. Eh, le monstre !

Le monstre en question tourna vers lui un regard menaçant.

-Je t'ai menti, lança le docteur, moqueur. Je suis Sherlock Holmes. Tu étais simplement trop stupide pour t'en apercevoir. Maintenant, si tu pouvais reposer mon ami...

-Watson qu'est-ce que... commença Holmes avant que l'autre ne le lance contre un arbre, qu'il heurta avec un craquement lugubre.

Il voulut se remettre debout, mais le monde était flou. Que se passait-il ?

Watson...

Watson était allongé par terre.

Le vampire le surplombait.

-Watson... murmura Holmes en tentant une nouvelle fois de se relever. Watson...

Le docteur hurla lorsque les canines transpercèrent sa peau, crevant sa jugulaire.

-Non... souffla le détective, figé par l'horreur.

Watson agonisait. Des flots de sang jaillissait de son cou.

Son cri se changea en gargouillis.

-Non...

Le vampire jeta un coup d'œil triomphant à celui qu'il prenait pour le docteur. D'un coup de dent, il entailla la peau de son poignet, où perlèrent quelques gouttes d'un sang presque noir. Il eut un petit rire avant de plaquer son poignet entaillé sur la bouche de Watson mourant.

-NON ! Hurla Holmes en se jetant sur son arme.

Le vampire se retourna, mais trop tard.

Le sabre lui trancha la gorge.

Mais Holmes ne s'arrêta pas de frapper. Encore. Et encore. Il laissa crever sa peine, et sa colère, sur celui qui avait osé...

Un gémissement le sortit soudain de sa fureur.

-Holmes...

Le détective s'arrêta net.

Le docteur n'était pas mort.

-Holmes... HOLMES ! Le gémissement se changea en appel au secours tandis que le corps de Watson se cabrait sous l'effet d'une douleur intense, incontrôlable.

Il avait l'impression que des flots de laves coulaient dans ses veines, qu'il allait s'embraser, exploser, et mourir, encore, et encore !

Il lâcha un cri rauque, long, douloureux, qui transperça le cœur du détective.

Holmes compris tout de suite ce qu'il se passait. Il en avait lu la description détaillée dans le carnet du professeur Van Helsing.

La transformation en vampire.

Des coups de sifflets se firent soudains entendre, pressants.

La police !

Ils avaient fini par arriver, alertés par l'explosion et le feu de joie...

Que faire ? Bon Dieu, que faire ?

Avant cet instant, Holmes ne connaissait pas la panique.

Mais il faut dire qu'il n'avait jamais été couvert de sang, responsable d'une vingtaine de corps démembrés, avec sous ses yeux son meilleur ami en train de se tordre de douleur et à ses oreilles la promesse d'une rapide capture par Scotland Yard.

Agissant purement à l'instinct, il chargea son ami gémissant sur son dos et pris la fuite.