🌹| 10. JJ's Bar and Grill
« Ah, you took a walk with me
And then you took a hold of my hand
And I knew it was going as planned, yeah, baby »
I Need Your Love - The Ramones
🥀 ● 🥀
Hiver 1990
« Depuis son départ, tout était devenu différent. En quelques secondes, son monde s'était écroulé, plus rien n'avait de sens pour lui. Cette sensation d'être abandonné l'accompagnait chaque jour et ne le quittait jamais.
Ce jour même, il avait perdu son père. Ce qui avait fait naître en lui une rage et une haine sans limites envers le monde. Il était devenu un adolescent sauvage qui tentait de s'exprimer par tous les moyens. Mais personne n'était présent pour l'écouter.
Tout avait changé, lorsqu'il avait croisé la route de celle qui allait faire basculer sa vie et le faire sombrer dans la dépendance. Il savait qu'elle était néfaste. Mais elle était la seule à pouvoir lui faire oublier son chagrin. Ainsi, il s'était accroché à elle. »
🥀 ▪ 🥀
JJ's Bar and Grill était l'un de mes endroits préférés. Je l'appréciais pour de multiples raisons. Les employés qui y travaillaient, offraient un service de qualité. Une ambiance agréable y régnait, grâce aux groupes qui jouaient durant les soirées. Je connaissais très bien le personnel, étant donné que je venais tous les vendredis soir avec Cassie et Francky, après les cours.
- Il y a une place là-bas, fis-je remarquer à Joe.
Je désignai une table située à proximité de la scène, ce qui devrait nous convenir à tous les deux. Cette dernière était vide comme le reste du bar, le service du soir n'ayant pas commencé. Il était midi et demi.
- Allons-y, me répondit-il sur un ton enjoué.
Il me fit passer devant, tel un gentleman ce qui amplifia cette boule que je gardais dans mon estomac. Le voir aussi gentil était déstabilisant. Je m'attendais à ce que le garçon sauvage que j'avais découvert finisse par ressurgir à un moment ou à un autre. Le docteur Jekyll se gardait de conserver Mister Hyde au fin fond de lui pour le laisser surgir telle une bombe à laquelle on ne s'y attendait pas.
Ou mon imagination, guidée par mes craintes, allait trop loin. Je ne savais vraiment pas ce qui allait se passer et sa m'angoissait au plus haut point.
Après s'être installés, nous avions commandé nos boissons. Je ressentais toujours une certaine gêne en sa présence. Mais contrairement à moi, Joe semblait très à l'aise.
- Alors, Sharon Carter, parle-moi un peu de toi, fit-il avec un ton qui démontrait l'intérêt qu'il me portait.
Prise au dépourvue, ma bouche s'ouvrit sans qu'aucun son ne sorte. J'ignorais par quoi commencer et ce que je devais dire. Je craignais qu'il se moque de moi par la suite.
- Comment ça ? C'est vague ce que tu me demandes.
Il eut un rire amusé. Malgré le bruit venant des cuisines, je pus percevoir un son qui sortit de sa bouche. C'était un gloussement léger qui fit battre mon cœur à toute vitesse tant il était adorable.
Il fallait que je me ressaisisse. Je devais être sur mes gardes si la brute venait à réapparaitre. Mais il poursuivit sur un ton qui était tout aussi doux.
- Je vais y aller gentiment. Où vis-tu ?
- Ici, à quelques minutes de l'école.
Joe afficha un regard pour le moins étonné. Il ne semblait pas s'attendre à ce que je vive si proche de l'université.
- Et toi ? répondis-je d'une petite voix nerveuse.
Un sourire se dessina sur son visage. Les yeux fixés sur la table en bois, il s'amusait avec la serviette en papier posée devant lui.
- Je vis de l'autre côté des États-Unis, à Jacksonville, finit-il par répondre.
Ce fut à mon tour d'afficher une expression surprise. Il fallait plus de deux jours pour se rendre à Jacksonville. Qu'est-ce qui l'avait amené à jouer dans cette école ? Lui-même l'ignorait.
- Tu as beaucoup de courage pour faire tous ces trajets.
- Je sais, mais j'aime ça.
Un nouveau silence s'installa. Je le contemplais tandis qu'il buvait dans son verre, lorsqu'il fronça les sourcils avant de me demander :
- Je commence à avoir une petite faim, pas toi ?
Jetant un coup d'œil à l'horloge affichée juste en face de moi, je réalisai qu'une demi-heure s'était écoulée depuis notre arrivée dans le bar. Trente minutes que je me trouvais avec lui. Je sentis mon estomac vide qui n'allait pas tarder à faire du bruit.
- Volontiers.
Je m'apprêtais à demander à l'un des serveurs la carte des mets, mais Joe m'arrêta. Le regard qu'il me lança était malicieux, comme s'il voulait me demander quelque chose de spécial.
- C'est toi l'habituée des lieux, n'est-ce pas ? me murmura-t-il en s'approchant de moi.
Son timbre bas me donna des palpitations qui me donnèrent la chair de poule. Est-ce qu'il était en train de m'accuser ? Je hochai difficilement la tête.
- Quelle bouffe tu me conseilles de prendre ? poursuivit-il avec un sourire amusé se dessina sur son visage.
Il s'avachit sur la chaise, les mains sur son estomac et attendit ma réponse. Sa demande me mit la pression, craignant que mes suggestions le déçoivent.
Sharon, arrête de t'angoisser pour rien ! Il faut juste lui proposer un plat que n'importe qui peut avaler.
- Les hamburgers sont excellents, surtout leur bacon, m'empressai-je de répondre.
- Les frites ?
J'avais cette sensation de me trouver à un interrogatoire. Son regard fermé m'angoissait aussitôt. Mister Hyde était donc de retour, je le savais ! Comment allais-je m'en sortir seule ?
- Une cuisson parfaite et juste assez salée pour le goût.
Puis, il s'esclaffa devant mon air interrogateur. Il déclara que de me voir prendre tout au sérieux l'amusait. Pour me détendre, je décidai de me marrer avec lui, mais d'une façon un peu plus nerveuse.
- C'est bon, j'achète.
Je me sentais si ridicule de tout prendre au premier degré, alors qu'il ne faisait que plaisanter.
Ce Joe était difficile à cerner. Je ne savais comment me comporter avec lui. Devais-je rester sur mes gardes ou arrêter d'avoir peur de tout ? Il semblait avoir deux facettes, ce qui m'avait valu cette comparaison du docteur Jekyll et Mister Hyde.
Mais il était intriguant. Lors de la prise de nos commandes, il était si doux avec l'employée aux cheveux roux parfaitement coiffés. Je m'attendais à ce qu'il l'envoie balader, car cette dernière se faisait insistante avec des questions. Mais il n'en était rien. Il était resté calme et agréable.
Un nouveau silence s'installa et la nervosité prit place petit à petit. Je ne savais pas quoi dire pour entamer une nouvelle conversation. Il devait certainement me trouver ennuyante à mourir. Je savais que lui et moi étions différents.
Mes yeux s'arrondirent lorsque je reconnus un morceau des Ramones, I Need Your Love qui passait à la radio.
- J'aime tellement cette chanson ! m'écriai-je.
Je me mordis la lèvre inférieure, regrettant mes paroles. Je craignais de passer pour une démodée aux yeux de Joe, ce qui était certainement le cas. Mais je vis ce dernier écarquiller les yeux avec un air étonné.
- Tu connais les Ramones ?
Je hochai la tête avec un sourire gêné. Il semblait agréablement surpris que je connaisse ce groupe qui était l'un de mes préférés.
- Je ne pensais pas que tu aimais ce genre de musique. De nos jours, c'est rare.
- Ce n'est pas parce que nous sommes en 2002 et que la nouvelle mode c'est les chanteuses comme Britney Spears et ces autres horreurs, que le rock est considéré comme mort, répondis-je du tac au tac.
Je craignais d'avoir été trop fort dans mes propos, mais le regard admiratif me rassura. Nous venions de nous trouver un point commun : la musique.
La discussion prit un tournant plus vif et plus détendu. On parlait de notre avis sur les artistes de la nouvelle génération, que nous trouvions très mauvais, de nos groupes favoris qui étaient les mêmes.
Je me sentis aussitôt plus à l'aise avec lui, je pouvais parler de tout sans avoir peur d'être jugée.
- J'ai vraiment adoré ta prestation dans notre école, annonçai-je.
Ce compliment fit apparaître un sourire gêné sur le visage de Joe.
- C'était notre premier concert, j'avais un peu de pression, me répondit-il.
- On aurait dit que tu avais fait ça toute ta vie ! Depuis combien de temps tu joues de la guitare ?
Il se mit à réfléchir et il eut un long silence. Avais-je dit quelque chose qu'il ne fallait pas ? Pourtant, je n'en avais pas l'impression. Il poussa un long soupir.
- Je crois que depuis mon enfance, j'en joue. Ou du moins, je faisais semblant.
Il se mit à rire et moi avec. Je n'avais jamais vu un enfant jouer de la guitare. L'instrument était bien trop grand ! Il leva les yeux en l'air, comme s'il était pensif et reprit en frottant délicatement la paume de sa main contre son menton.
- Je pense que l'envie d'en jouer pour de vrai s'est manifestée vers sept ou huit ans.
J'ouvris grands les yeux, surprise qu'il ait appris à en jouer très tôt.
- Les cours n'étaient pas chers ?
- Les cours ? Je n'en ai jamais pris, fit-il amusé.
Je tombai des nues par ce que je venais d'entendre.
- Tu as appris tout seul ?
Il hocha la tête. Je ne parvenais pas à croire qu'un garçon si jeune puisse jouer d'un instrument sans cours pour jouer comme un pro quelques années plus tard.
- Et toi, tu joues d'un instrument ?
Je secouai négativement la tête. Malgré ma forte envie d'en jouer, je n'avais ni le temps, ni l'argent pour me payer des cours de guitare.
- Tu voudrais que je t'apprenne ?
- Qu'est-ce que tu dis ? demandais-je en fronçant les sourcils.
- Je pourrais te donner des leçons.
Mes yeux étaient grands ouverts. Étais-je dans un rêve ? J'en avais bien l'impression, pourtant tout était réel. Je me trouvais au JJ's Bar and Grill, à attendre les burgers, discutant avec Joe. Ce dernier venait de me proposer des cours de guitare.
Sous l'effet de la surprise, il m'était impossiblede répondre.
Hey mes Idiots !
C'est bien, Sharon ! Tu te débrouilles bien !
☆______________________________☆
🌹 Est-ce que le gentil Joe va rester ou l'affreux Joejoe va revenir ?
🌹 Et on sait un poil plus sur notre guitariste préféré (surtout à moi, haha) !
☆______________________________☆
Kisouilles ❤
Insta 📸 : wrxtetodream
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro