Chapitre 21 - Zoey
Je me suis mise sur la pointe des pieds à l'instant même où la lumière diffuse avait chassé la pénombre se trouvant devant nous. Je me trouvais un peu en retrait, derrière la brune, et j'eus besoin de me faire plus grande pour pouvoir observer ce qui nous attendait. Ma main serrant un peu plus la sienne, sûrement à cause d'un besoin inconscient d'être rassurée, de sentir que je n'étais plus seule, pas complètement. Seulement, je me rendis rapidement compte que je n'avais aucune raison d'être effrayée parce qu'il n'y avait rien. En tous cas, rien de plus que ce à quoi je m'attendais : un petit hall dans un sale état. Heureusement que je n'étais pas à cheval sur les normes sanitaires.
Si nous étions dans un de ces films populaire que l'on trouvait trop souvent avant la Fin, il y aurait eu, à cet instant précis, un " screamer ". J'ai toujours trouvé que ces films étaient d'un mauvais goût sans nom et, maintenant, je pouvais affirmer sans peine qu'ils étaient ridicules et éloignés de la réalité. J'ai toujours détesté ce genre de programmes, et ça, ça fait parti des rares choses qui n'ont pas changées en ce bas monde. Dans ma tête, se profilait déjà le scénario typique : un infecté sortait de la dernière zone non éclairée qui se trouvait devant nous ou pire, derrière. Dans les deux cas, il nous prenait par surprise, nous sautant dessus à l'instant même où il sentait que nous baissions notre garde. En arrière-plan, pour accompagner l'action, il y aurait une musique angoissante, parce que c'était bien connu que c'était la musique qui donnait tout son potentiel à une scène effrayante. Je tentais de me dire que ce serait improbable : une personne infectée nous aurait déjà sautées dessus. Elles n'avaient plus des capacités mentales assez développées pour tendre un piège, c'était un fait. Surtout que leur but n'était pas le mort d'autrui, seulement d'échapper aux démons qui les assaillaient, c'était ça, le plus triste dans cette histoire. Seulement, bien qu'il s'agisse d'un fait avéré, ça ne suffisait pas à me rassurer, bien au contraire : c'est parce qu'ils ne réfléchissaient pas qu'ils étaient dangereux. Même avant c'était véridique. Et c'est, bien évidemment, à cette seconde pensée que mon esprit décida de s'accrocher, à mon plus grand damne. J'entendais clairement la musique qui devait accompagner les scènes comme celle-ci, elle raisonnait dans mes oreilles, assourdissante, à moins que ce ne soit que le tambourinement de mon cœur contre ma poitrine.
Peut-être que Cassiopée avait pensé à la même chose que moi, à moins qu'il s'agisse là seulement d'une certaine prudence de sa part, mais toujours était-il qu'elle ne bougeait pas plus que moi. Nous étions semblables à deux statuts de glace, figée de peur pour ma part. Nos deux regards étaient rivés dans la même direction, celle qui était faiblement éclairée, et nous attendions. Quoi ? Je n'en savais rien, et je n'étais pas sûre que la brune en ait une idée plus nette. Peut-être était-ce justement ça que l'on attendait : rien. Ou alors, au contraire, qu'il se passe quelque chose. Mais à quel moment saurions nous que l'attente était terminée, qu'il ne se passerait, justement, rien ? J'avais l'impression qu'aucune de nous deux n'était plus avancée que l'autre, et je n'osais pas plus qu'elle faire le premier pas, sûrement de peur de briser ce calme qui nous réveillait. Attendre une seconde supplémentaire était mère de sûreté, c'était certain, mais les secondes s'accumulaient, devenant des minutes, et puis, bientôt des heures, alors il faudra bien que l'on s'avance au bout d'un moment. Nous ne pouvions pas rester debout toute la nuit.
Cependant, et sans grande surprise, je devais avouer que la première de ces deux options me semblait bien plus enviable. Celle où rien ne nous attendait, rien d'autre qu'un endroit où passer la nuit à peu près confortablement. Je tentais de me re-concentrer, de diriger mes pensées vers ce qui se trouvait devant moi pour éviter qu'elles ne dérivent vers des scénarios qui seraient tous aussi improbables que macabres et qui ne feraient qu'accélérer la course que semblait avoir entamé mon cœur ; il me donnait l'impression de vouloir percer ma poitrine.
Il se trouvait, devant moi, une illustration parfaite de la définition du mot " ruines ", un immeuble qui, à l'image du reste de la planète, était abandonné, détruit. Ce n'était pas la première fois que je faisais face à ce genre de paysage, bien au contraire, j'évoluais dans ce dernier depuis des semaines, ne voyant presque plus que ça, et je sais aussi qu'on en trouvait déjà avant la Fin. Seulement, je ne parvenais pas à m'y habituer et, à chaque fois, un sentiment de mal aise s'emparait de tout mon être. Comme à chaque fois, je ne pouvais m'empêcher de penser aux personnes qui vivaient là, il n'y a pas si longtemps de ça finalement, alors que ces ruines étaient encore un immeuble moderne, typique de ceux qu'on retrouvait en centre-ville.
Mais, à présent, il ne restait que le fantôme de ce que cet endroit avait été. Les boîtes aux lettres à notre gauche étaient cabossées, leurs noms effacés étaient autant de vie gommées, et je n'aurais pas été surprise de voir des bestioles en sortir ; il était certain qu'il y en avait qui s'étaient installées à l'intérieur de celles aux portes ouvertes. Pourrait-on encore y trouver du courrier ? Les dernières pubs, les derniers journaux avant que tout ne s'écroule ? J'aimerais bien en lire un, de journal, pour satisfaire ma curiosité. Je n'ai jamais lu ni écouté les journaux, je n'ai jamais apprécié les médias, mais je ne pouvais m'empêcher de me demander ce qu'ils pouvaient bien raconter dans leurs pages à l'aube de la fin. Est-ce que certains pressentaient qu'on était à l'aube de la fin ? Ou bien y trouvait-on les bêtises habituelles ? Mais, malgré ma curiosité, je ne me risquerais pas à m'y approcher, toujours paralysée.
Je tournais alors mon regard vers le miroir qui faisait face aux boîtes aux lettres. Lui aussi, il n'était pas en très bon état, et seulement quelques parties restaient fidèlement accrochées à leur pan de mur, le reste avait sûrement été emporté au fil des intempéries. Ces quelques morceaux étaient cependant suffisants pour nous renvoyer notre reflet : celui de deux jeunes filles perdues. Mes yeux s'attardèrent un peu plus sur l'image de la brune, mais je parvenais tout juste à distinguer les traits de son visage entre la faible lumière, les nombreuses fissures qui zébraient le verre et la poussière accumulée sur ce dernier. Je détournais mon regard à l'instant même où celui-ci croisa celui de mon propre reflet.
Même le plafond était dans un sale état, et l'expression disant que le ciel nous tombait sur la tête prenait tout son sens, bien que ce ne soit ici que le plafond. Le sol était couvert de morceaux de plâtre et, ce qui avait dû être un magnifique plafond blanc immaculé n'était à présent plus qu'un morceau de gruyères. Il n'y avait même plus de plafonniers, à leur place, pendait dangereusement des câbles électriques. Bien que je ne sois pas certaine que l'on puisse trouver une once d'électricité dans ce bâtiment, ce n'était pas rassurant.
C'est finalement la brune qui fit le premier pas, nous sortant alors toutes les deux de cette paralysie. Elle s'avançait sans lâcher ma main, m'entraînant à sa suite, et je pus d'ailleurs remarquer qu'elle pressait la mienne, exactement comme je l'avais fait un peu plus tôt. Et, alors que je pensais que nous allions nous diriger vers la cage d'escaliers, elle décida d'aller dans un des angles du hall, celui qui se trouvait être le plus éloigné de la porte. On s'assit alors toutes les deux contre le mur et, l'instant d'après, les secousses reprenaient. Je devais avouer que je n'étais pas très rassurée ; est-ce que le bâtiment tiendrait le coup ?
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