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Chapitre 34

Julius

Je sortis en claquant la porte derrière moi. J'étais furax, pourtant il en fallait beaucoup pour m'énerver. Les paroles de ce professeur m'avaient mis hors de moi. Je ne pouvais pas toujours atteindre la perfection ! J'étais humain après tout...Tellement d'éléments étaient réunis pour me faire craquer...

Alice qui me faisait la tête, juste parce que je ne voulais pas sortir ce week-end, et que j'avais privilégié mon entretien avec un grand violoniste. C'était idiot, mais pourquoi ne pouvait-elle pas comprendre ?

Je longeai le couloir. Le ciel était devenu noir, le tonnerre grondait au loin, et il commençait à pleuvoir. J'étais mal à l'aise, j'avais soudainement l'impression d'être suivi. Un coup de tonnerre éclata et je sursautai, mon cœur accéléra et je me sentis angoissé, des mauvais souvenirs me revinrent en mémoire et j'eus beaucoup de mal à empêcher mes mains de trembler.

Après avoir essayé du mieux que je pouvais de me rassurer, je me remis en marche, j'entendis marcher derrière moi, j'accélérai le pas, je courrais presque, je tournai dans un couloir et me retrouvai dans un cul-de-sac. Je commençai à paniquer, quand Marianna, la sœur de Daemon et la fille de Clade, apparut devant moi. Surpris, je me mis automatiquement en position de défense.

— Allons, allons, mon chou, ne sois pas si... comment dire, commença-t-elle.

— Ne m'appelle pas comme ça.

Elle rigola doucement, et je lui trouvai alors une ressemblance avec son père.

— Ce que tu peux être froid, se plaignit-elle.

Elle s'approcha de moi et me prit le menton entre deux doigts, je lui décochai un coup de poing et elle recula juste à temps pour l'éviter.

— Eh bien, j'espère que tu ne fais pas la même chose avec Alice, sinon ça ne m'étonne pas que vous vous soyez disputés.

Ce fut la goutte d'eau qui fit déborder le vase. Avec la souplesse d'un chat, je me propulsai en avant et essayai de la frapper mais elle me bloqua.

— Tu n'es pas le seul à avoir pris des cours d'auto-défense, me dit-elle.

Je commençai vraiment à paniquer, je sentis une brûlure au niveau de mes abdominaux, là où une cicatrice s'étalait. Comme si elle avait compris, elle me décocha un coup de pied à ce niveau. J'eus le souffle coupé et me penchai en avant pour le reprendre, mais rien n'y fit, je n'y arrivais pas.

— Dommage que tu sois aussi peu ouvert à la discussion, je voulais t'avertir que la reine allait bientôt mourir, rigola-t-elle.

J'écarquillai les yeux devant cette révélation. Je tombai à genoux, ma blessure me faisait mal, Marianna me reprit le menton entre ses fins doigts, ses yeux dégagèrent une drôle de lueur et pour une raison inconnue, je me sentis partir, des tâches noires commencèrent à voiler mon regard, mon corps tomba et plus rien, ce fut le vide totale.

***

Lorsque je me réveillai, j'étais allongé dans un couloir, j'avais mal au ventre. Je ne me souvenais de rien, comme si mes souvenirs avaient disparu. Je me relevai et m'appuyai contre le mur, la blessure me brûlait et de mauvais souvenirs me revinrent en mémoire.

Je pensai alors à Alice qui me faisait la tête pour une histoire débile. Sûrement à cause des tensions accumulées, je fondis en larmes. Et je restai là, je ne sus pas combien de temps. Les cours avaient sûrement repris, car les couloirs étaient déserts. Au bout d'un moment, Kaede apparut. Que faisait-il hors d'une classe ? Il s'approcha de moi et me demanda inquiet :

— Julius, ça va ?

— Non pas vraiment.

— Qu'est-ce qui se passe ? questionna-t-il.

— Il faut que je parle de quelque chose qui me hante depuis sept ans, dis-je la voix tremblante.

Je ne pouvais plus garder ce secret, même mes parents n'étaient pas au courant. Le silence que je m'obligeais à garder m'étouffait, je devais parler avant de retomber dans le cercle vicieux des crises de panique. Je pris une grande inspiration et commençai à parler :

— Quand j'avais neuf ans, je prenais des cours de piano avec un professeur. Je devais aller au village chaque vendredi, je m'y rendais seul. Mais un jour, le cours s'est fini plus tard que d'habitude, et en rentrant, j'avais la désagréable impression d'être suivi. J'avais pressé le pas et je m'étais trompé de rue, j'avais atterri dans un cul-de-sac, j'avais commencé à paniquer, et un homme était apparu devant moi, je n'avais rien pu faire, le gars s'était approché de moi avec un couteau et m'avait agressé, j'avais reçu un coup au ventre. J'avais dû m'évanouir après cela. La blessure n'était que superficielle mais j'avais d'autres contusions ainsi que des plaies. Je suis discrètement rentré, j'ai désinfecté la blessure, j'ai mis un bandage et mes parents n'ont jamais rien su.

Je me tus enfin, mon lourd secret avoué. Les larmes coulaient, mais je me sentais un peu mieux. Kaede me regardait, il ne savait visiblement pas comment réagir, c'était compréhensible après tout.

— Oh merde, je savais pas. Je peux faire quelque chose pour t'aider ?

— Oui, ne le dis à personne.

Kaede approuva et je me demandai :

— Et... avec Alice, qu'est-ce que je vais faire ? Elle doit me détester.

— Le mieux, c'est de ne rien faire, laisse-la réfléchir, et tu verras elle reviendra se jeter dans tes bras !

— Peut-être oui...

Kaede m'aida à me relever, je remis de l'ordre dans mes cheveux, tout en essuyant mes larmes.

— Tu n'as pas cours maintenant ? demandai-je pour changer de sujet.

— Si chimie, tu n'étais pas là alors j'ai demandé pour aller aux toilettes, c'était plus simple pour te chercher.

— J'avais complètement oublié ce cours, murmurai-je.

— Allez viens on y va. On dira au prof que tu étais à l'infirmerie.

***

Les cours de chimie s'avérèrent simples, du moins pour moi.

— Je comprends pas là...marmonna Kaede. Pourquoi tu marques ça comme ça ?

— Mais parce que c'est une liaison covalence polaire, dis-je en retenant un rire.

Je ne connaissais personne d'aussi peu doué pour les études que Kaede. Le seul domaine où il se révélait imbattable était bien le sport. Sans compter la cuisine où il excellait véritablement, un domaine où personnellement j'échouais lamentablement. Il était peut-être temps d'apprendre.

— Vous avez aussi eu un TE de physique ? demanda subitement Kaede.

— Avec Linkeldam ? Oui...

— Ce prof est un malade. Sérieusement un TE sur la première matière, c'est n'importe quoi !

— Tu as obtenu combien ?

— Étonnement une note en dessus de la moyenne.

Son air étonné m'aurait fait rire si je repensais pas à ma propre notre. Un 5, c'était une catastrophe. Mon père allait me tuer. Kaede avait obtenu un 8, et visiblement pour lui c'était un exploit. J'étais content pour lui, mais je me décevais. Comment avais-je pu obtenir une note pareille ? Il ne fallait pas que mes parents le sachent...

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