« Eclipse »
Auteure : armyourhopeff | Type : OS
© Le texte appartient à l'auteure.
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Première pleine Lune
J'avais rencontré Namjoon une nuit de pleine Lune.
Le printemps venait de laisser sa place à l'été, et le temps restait chaud malgré l'heure tardive. Me promenant dans la petite ville d'Houlgate, je marchai tranquillement sur les planches se trouvant face à la mer. Alors que le vent venait habituellement nous fouetter le visage, il semblait calme pour une fois, comme apaisé. Pourtant, apaisé, moi je ne l'étais pas. Me retrouver seul signifiait me retrouver envahi par mes pensées qui n'étaient pas souvent joyeuses ou réconfortantes.
Ma dernière année de lycée était déjà bien entamée, et j'avais peur. Peur parce que je ne savais pas ce que je voulais faire plus tard, alors que tout le monde semblait déjà décidé. Peur parce que je ne voulais pas grandir et sortir de ce monde encore amusant qu'était celui des adolescents, pour entrer dans celui sérieux, morne des adultes. Peur de partir faire des études loin de chez moi, de ma famille, et de tout ce que j'avais toujours connu. Et, tout simplement, peur de rater – que ce soit mon baccalauréat ou mon choix d'études – et de décevoir mes parents qui croyaient tant en moi.
Alors, en marchant sur cette promenade, mon cœur n'était pas à la fête, comme souvent.
J'avais, après de longues minutes à déambuler, finalement décidé de me poser sur le sable rendu sombre par la nuit, quand j'entendis des pas légers s'approcher de moi. Personne ne venait jamais ici ; pourtant, lui était là.
Un garçon, d'à peu près mon âge, bien qu'il soit plus grand et plus large que moi, s'approchait. Les mains dans les poches, il semblait vouloir se donner l'air confiant, pourtant son sourire crispé sur le côté me murmurait l'inverse. Ses cheveux, coupés courts, étaient de couleur grise, presque de la couleur de la Lune, et semblaient décoiffés, comme s'il avait passé plusieurs fois la main entre ses mèches argentées, probablement dans un tic nerveux et non contrôlé. Il était habillé d'un bermuda crème accordé avec un tee-shirt manches courtes bleu clair. Il portait autour du cou un collier serti d'une pierre dont je ne connaissais pas le nom, mais qui semblait s'accorder au bleu sombre de la mer.
J'aurais pu avoir peur et c'était évidemment la première émotion que j'avais ressentie en le voyant, mais le voir si peu à l'aise, comme si venir parler à un autre garçon était tout sauf habituel pour lui, m'avait immédiatement déridé. Il me ressemblait, avais-je conclu.
S'arrêtant à quelques mètres de moi, il me demanda, les yeux pleins d'espoir :
— Je peux m'asseoir ?
Poussé par un courage soudain, dont j'ignorais encore aujourd'hui la source, je balayai ce reste de peur qui ne semblait pas vouloir quitter ma gorge, la nouant, et lui répondis par l'affirmative sans trembler, sans hésiter.
Ces mots, banals à souhait, furent les premiers que Namjoon et moi avions échangés. J'y repensais souvent, à ces petites phrases, pourtant peu marquantes, qui avaient précédé quelque chose que je n'aurais jamais pu imaginer, même dans mes rêves les plus fous. À vrai dire, il ne m'avait même jamais avoué la raison qui l'avait poussé à venir me parler, lui normalement si timide.
— Je peux savoir ton nom ? avait-il continué en s'asseyant sans me quitter des yeux.
— Jungkook, lui avais-je répondu d'une voix plus claire cette fois. Et toi ?
— Namjoon.
Namjoon. Ce prénom, ces quelques lettres, qui allaient prendre une place immense dans mon cœur, qui allaient le remplir jour après jour.
Je ne me souvenais pas bien du reste de notre conversation. Comme si mon cerveau avait, par un mécanisme que je ne pourrais expliquer, effacé le reste de notre discussion, l'avait relégué au rang de « dérisoire » et n'avait pas pris la peine de le mémoriser. Je me rappelais encore seulement que de ces premières phrases qui avaient scellé notre relation à jamais.
Quand nous nous étions quittés – à regret – tard dans la nuit, nous nous étions promis de nous retrouver la nuit suivante au même endroit. Et celle encore d'après. Et la suivante aussi. Ce fut le début de nos rendez-vous nocturnes.
Si les images de cette rencontre restaient un peu floues dans ma tête, j'étais cependant certain d'une chose.
Cette nuit-là, la Lune souriait.
Premier quartier de Lune
Namjoon et moi, ça avait toujours été comme une certitude, une évidence. Dès que l'on avait commencé à parler, à se connaître, j'avais su qu'il était fait pour moi. Que l'on était compatibles. Il avait cette façon de me comprendre, de savoir ce que j'allais dire, ce que j'avais peur de confier.
Parfois, ça m'effrayait presque. De savoir que quelqu'un me connaissait si bien, presque mieux que je ne me connaissais moi-même. S'il l'avait voulu, il aurait pu me détruire grâce à de simples mots bien choisis, assez puissants pour me faire flancher, poignardant mes plaies encore en cicatrisation. Mais il ne l'avait pas fait. Jamais.
Et on avait parlé, encore et encore, tous les deux, côte à côte sur cette immense étendue de sable. On ne se connaissait que depuis quelques jours, et pourtant, j'avais l'impression d'être plus proche de lui que je ne l'avais jamais été de quelqu'un d'autre. Peut-être était-ce cela que les gens appellaient « âme-sœur » ?
Je lui avais parlé de moi. De l'angoisse constante qui me planait dessus, pour faire chaque jour encore mieux, pour recevoir chaque jour de meilleures notes, pour ne pas décevoir mes parents qui, plus que n'importe qui, croyaient en moi, en mon avenir. Je lui avais parlé de ma passion : la peinture. Du sentiment de calme qui m'enveloppait quand je commençais à reproduire le monde à ma façon, souvent en des couleurs plus vives et joyeuses qu'elles ne l'étaient vraiment, simplement pour y ajouter du bonheur. De mon petit-frère, de sept ans mon cadet, qui emplissait ma vie de joie, et de cris aussi, et de cette envie d'être un modèle pour lui, une personne dont il serait fier. Je lui avais parlé de la fascination que j'éprouvais pour la Lune, qui observait notre monde d'en haut sans pouvoir y entrer, sans pouvoir s'y aventurer. Elle, qui semblait connaître tous nos secrets les plus sombres, ceux que l'on cachait profondément au fond de notre cœur en espérant ne jamais avoir à les dévoiler. Tout ce temps, Namjoon m'avait écouté sans m'interrompre, ses yeux doux posés sur moi.
Et il m'avait parlé de lui. Il m'avait parlé de cette peur de grandir que je ressentais aussi, de cette angoisse de laisser derrière nous tous ces moments enfantins qui avaient rythmé notre jeunesse. De cette tristesse qui l'avait empli quand il avait compris que c'était fini, qu'il n'était plus un enfant. De la peur d'être adulte, tout simplement. Les yeux tristes, il m'avait parlé de ses parents, qui ne s'entendaient plus du tout mais qui faisaient de leur mieux pour le lui cacher. De ces disputes qu'il entendait le soir, alors qu'il était supposé dormir depuis longtemps. Il pensait qu'ils allaient bientôt divorcer, m'avait-il avoué d'une voix faible. Son père partirait peut-être travailler à Londres, lui qui en avait toujours rêvé. Toutefois, ça ne le dérangeait pas vraiment, il préférait les voir heureux séparés que malheureux ensemble. Il était comme ça, Namjoon, il voulait le bonheur de tout le monde. Il m'avait parlé de son amour pour la lecture, pour les livres. Des commentaires parfois mesquins auxquels il avait dû faire face parce qu'il aimait lire des romances, un genre que les gens considéraient « pour les filles ». Tout ce temps, je l'avais écouté sans l'interrompre, mes yeux doux posés sur lui.
Et j'étais certain que la Lune, présente qu'à moitié, garderait pour toujours précieusement nos confidences.
Nouvelle Lune
Une nuit où la Lune n'était pas présente, Namjoon m'avait appelé son Soleil. Il disait que c'était parce qu'il me trouvait rayonnant, toujours plein d'espoir et souriant.
Pourtant, c'était faux. Plein d'espoir, rayonnant, je ne l'étais pas vraiment. Chaque jour, quand je me réveillais, j'enfilais le masque que j'avais porté toute ma vie. Le masque du bonheur, c'était comme ça que je l'appelais. Je ne l'enlevais que la nuit, seul dans mon lit. Je laissais les larmes couler, sans bien savoir pourquoi elles le faisaient.
Pourquoi serais-je allé mal ? Je n'avais pas de raison. Je n'étais pas malade, mes parents étaient encore présents, j'étais bon en cours et j'avais des amis. Cependant, mon cœur était vide. Comme s'il attendait quelque chose, quelqu'un. Et ce quelqu'un, c'était Namjoon.
Moi, je ne lui avais jamais dit à haute voix, mais il me faisait penser à la Lune. Physiquement parce que ses cheveux me rappelaient celle-ci, mais mentalement aussi. Pour moi, la Lune était calme, paisible. Et Namjoon était comme ça. Il ne s'énervait jamais, il était toujours doux. Et puis... et puis j'aimais la Lune, aussi. Peut-être était-ce pour ça qu'Elle me faisait tant penser à lui.
Rapidement, au fil des nuits et des heures passées ensemble, notre amitié s'était renforcée. Nous nous retrouvions toujours à la même heure : vingt-et-une heures, quand le Soleil venait de se coucher pour laisser place à la Lune. Lui à droite, moi à gauche, nos places étaient déterminées, dans une habitude qu'aucun de nous deux n'osait briser.
Je me souvenais parfaitement de cette nuit où j'étais fatigué. Ma tête tombait toute seule et, d'un geste doux, Namjoon l'avait posée sur ses cuisses. À ce moment-là, le sommeil avait totalement disparu, j'étais complètement réveillé. Tout ce à quoi je pouvais penser était mon cœur qui battait fort, très fort, si fort que j'avais peur que Namjoon ne l'entende. Je pensais aussi à mes joues que j'avais senties rougir. Heureusement, la lumière était trop faible pour que Namjoon ne les voie.
Je me rappelais de la conversation qui avait suivi.
— À quoi penses-tu quand tu regardes les étoiles ? avais-je demandé, les yeux rivés vers le ciel noir, parsemé de points brillants.
— À tout et à rien, m'avait-il répondu, la voix basse et posée. J'imagine mon futur, ce que je serai et ce que je ferai plus tard. Je trouve ça apaisant, de regarder les étoiles. Maintenant, quand je les regarde, je pense aussi à toi, parce que tu es toujours à mes côtés quand je le fais. Et toi ? avait-il fini, sans se douter que ses mots m'avaient touché en plein cœur.
— Je pense à toi aussi. J'espère que tu seras toutes les nuits à mes côtés, lui avais-je confié. Qu'à chaque fois que je regarderai les étoiles, tu seras à droite et moi à gauche, côte à côte.
Cette nuit-là, quelque chose était devenu différent entre Namjoon et moi. À l'époque, je n'avais pas réussi à trouver ce qui avait changé entre nous deux, mais la Lune, Elle, devait l'avoir compris depuis longtemps, à nous observer tous les soirs.
Aujourd'hui, pourtant, cela me semblait évident.
Quelque chose s'était installé entre nous deux.
C'était l'amour. Et la Lune, Elle, le savait déjà depuis longtemps.
Dernier quartier de Lune
Namjoon m'avait embrassé une nuit où la Lune n'était présente qu'à moitié. Ou peut-être était-ce moi qui l'avais embrassé, je ne savais plus très bien.
J'avais senti que notre relation changeait nuit après nuit, que l'on s'asseyait chaque jour un peu plus près l'un de l'autre, et j'en étais ravi. Pourtant, je ressentais toujours cette peur, que je trouvais maintenant idiote quand j'y repensais, que Namjoon ne ressente pas la même chose que moi. Qu'il me voie seulement comme un ami, mais pas plus. Que je sois simplement « Jungkook, le bon copain », mais un petit-ami, jamais.
Et puis, cette nuit-là, tout avait changé. Avec lui, je pouvais être moi-même, je n'avais pas besoin de faire semblant. C'était certes un peu cliché, mais pourtant vrai. Ce masque, celui que je m'obligeais à enfiler tous les jours, je pouvais l'enlever avec Namjoon. Avec ma Lune.
Le Jungkook toujours souriant disparaissait – ce qui n'empêchait pourtant pas Namjoon de continuer à m'appeler « son Soleil », ce surnom que j'adorais tant – et laissait place à un Jungkook au visage plus neutre, presque fermé. Un Jungkook qui ne s'obligeait pas à être une personne qu'il n'était pas.
Donc, cette soirée-là, alors que les ténèbres avaient envahi notre petite plage, j'avais posé, comme je le faisais souvent, ma tête sur ses cuisses. Les jambes tendues, en une position mi-assise mi-allongée, et prenant appui sur ses mains pour rester droit, il regardait fixement devant lui, comme s'il voulait percer l'horizon de ses yeux. L'une de ses dextres avait doucement commencé à me caresser les cheveux d'un geste tendre, un mouvement qui, il le savait, me détendait énormément. Puis, elle avait lentement dérivé vers mon visage, passant sur mon front, mes tempes, entre mes yeux, pour arriver jusqu'au bout de mon nez, avant de faire le chemin inverse. Son toucher délicat était ensuite descendu jusqu'à mes joues, encore – et plus pour très longtemps – pâles.
J'avais senti ses doigts s'approcher dangereusement de mes lèvres, et mon souffle s'était fait plus rapide, comme paniqué. En entendant cela, il avait rapidement enlevé sa main de mon visage et s'était excusé, croyant m'avoir gêné.
Pourtant, j'en voulais plus.
Je m'étais relevé rapidement et l'avais regardé fixement. Si mon regard avait d'abord accroché le sien, il était ensuite descendu plus bas, vers l'objet de tous mes tourments, tous mes désirs.
D'un geste commun, comme si nous étions connectés – et peut-être l'était-on, d'ailleurs – nos corps s'étaient avancés. Nos bouches à quelques millimètres l'une de l'autre, nous avions fait une pause pour reprendre notre souffle, qui commençait déjà à nous manquer.
Tendrement, nos lèvres se collèrent. Le cœur battant à la chamade, les mains moites, j'avais l'impression de brûler de l'intérieur. Mais j'étais supposé être le Soleil, n'était-ce pas normal, alors ?
Namjoon plaqua sa main dans mon dos, me rapprochant de lui de sorte à ce que nos torses soient collés. J'avais l'impression que nous ne faisions qu'un.
Ma langue lécha sensuellement sa lèvre inférieure, incitant Namjoon à ouvrir la bouche pour pouvoir s'y glisser. En quelques secondes, le baiser rempli de pudeur et d'innocence était devenu charnel. Nos langues se livraient à une bataille. Pourtant, savoir qui allait en sortir vainqueur n'était pas important. Ce n'était pas mon premier baiser, probablement pas le premier de Namjoon non plus, mais celui-ci était différent de tous ceux que j'avais connus. Il semblait plus personnel, plus intime. Comme une douce caresse.
Le souffle me manquant, j'avais brisé notre étreinte, inspirant l'air encore doux à cette période de l'année dans de grandes respirations.
— Waw, avais-je soufflé, encore ébahi par notre baiser passionnel.
— Waw, avait-il répété, les yeux brillants et un sourire tendre au coin des lèvres.
Nos yeux, pendant ce cours laps de temps, ne s'étaient pourtant pas quittés, comme hypnotisés. Et puis, au même moment, nous avions éclaté de rire.
C'était une chose que j'aimais chez Namjoon. Nous n'avions pas besoin d'être tout le temps sérieux. À ce moment-là, alors que je riais, je savais pourtant que notre relation avait évolué, et savoir que je pouvais rire juste après l'avoir embrassé était l'une des preuves de mon entière confiance en lui. Qui semblait réciproque, d'ailleurs.
La pression était complètement redescendue, et je me sentais plus léger que je ne l'avais été depuis des semaines. Namjoon ne m'avait pas repoussé, et je n'aurais pu être plus heureux.
Le sourire aux lèvres, j'avais de nouveau posé ma tête sur les genoux de Namjoon, cette fois-ci en le fixant. Les coins de sa bouche étaient aussi relevés, et ne semblaient pas avoir envie de redescendre – et je n'allais pas m'en plaindre, voir ses fossettes apparaître à ce mouvement était un régal pour mes yeux.
Puis Namjoon avait chuchoté d'une voix si basse que, pendant quelques secondes, j'avais cru avoir rêvé.
— Je t'aime, Jungkook.
La panique avait déferlé dans mon corps. Puis le calme. Il m'aimait. Moi. Il m'aimait vraiment. J'aurais pu penser que c'était tôt pour lui retourner sa phrase. Je pense que les mots « je t'aime » avaient, de nos jours, tellement de signification que l'on osait que très peu les dire. Dans une sorte de pudeur, on attendait encore et encore, peut-être pour savoir si nos sentiments étaient réels et sérieux. Mais, j'étais certain des miens. Oui, je ne connaissais Namjoon que depuis quelques semaines, mais ça ne rendait pas mes sentiments moins valables.
— Je t'aime aussi, Namjoon.
Et cette nuit-là, la Lune aussi semblait amoureuse.
Pleine Lune
Namjoon m'avait fait l'amour une nuit de pleine Lune. Tendrement, doucement, sensuellement.
Depuis notre premier baiser, Namjoon et moi avions ce que l'on pourrait appeler une routine. Quand il arrivait, il venait tendrement déposer un baiser sur mes lèvres, avant de s'asseoir dans sa position favorite. Je déposais ensuite ma tête sur ses cuisses, et sa main venait me caresser doucement le visage.
Pourtant, cette fois, j'en voulais plus. Enroulant ma main dans son dos, j'avais approfondi notre baiser, qui restait généralement très chaste. Très rapidement, nous avions dérapé, Namjoon au-dessus de moi alors que j'étais allongé sur le dos.
J'avais certes peur de la suite, mais j'en avais envie. Ce n'était pas une décision soudaine, mais de longues heures de réflexion, à me demander si j'étais vraiment prêt. Et je savais que je l'étais. Une première fois était toujours difficile à donner, par peur qu'elle soit ratée, décevante et tant d'autres raisons. Il y avait aussi évidemment la peur de la nouveauté, de faire quelque chose qu'on ne connaissait pas, que les choses ne se passent pas comme prévu. Pourtant, cette nuit-là, je savais que c'était la bonne nuit. J'étais relaxé, mais surtout, j'avais confiance en Namjoon. S'il voulait le faire aussi, je savais qu'il ferait tout ce qui était en son pouvoir pour que la douleur soit la plus invisible possible et que, si je changeais d'avis pendant l'action, il me serrait simplement dans ses bras, me chuchotant que ce n'était pas grave, que j'avais le droit.
Alors oui, j'étais prêt. Plus que prêt, même.
Bien que peu confiant, j'avais voulu prendre les devants et avais passé mes mains sous son tee-shirt bleu marine.
— Je peux ? l'avais-je questionné en le regardant droit dans les yeux.
Un hochement de tête certain, vigoureux, avait répondu à ma question.
J'avais alors fait passer son tee-shirt par-dessus sa tête, avant de le déposer à droite de moi, sur le sable chaud.
En le regardant, les yeux brillants, j'avais compris la chance que j'avais de l'avoir. La Lune, pleine cette nuit, me permettait de voir un minimum son torse. En tous cas, je voyais bien ses abdominaux. En plus d'être adorablement gentil, très affectueux et extrêmement intelligent, Namjoon était aussi taillé comme un dieu. À côté de lui, j'avais peur de faire pâle figure.
Ayant reçu mon accord, Namjoon m'avait, lui aussi, débarrassé de mon tee-shirt. Gêné, j'avais essayé de cacher de mes mains mon torse et mon ventre, tout à sa vue. En voyant cela, ses mains avaient attrapé les miennes, les déposant sur le côté pour que j'arrête de me dissimuler. De sa voix douce, toujours réconfortante, il m'avait murmuré à l'oreille : « Ne te cache pas. Jamais. Tu es magnifique. » Et moi, comme souvent en sa présence, j'avais rougi. Namjoon ne me mentait jamais. Alors, plus rassuré que quelques minutes avant, j'avais laissé tomber mes bras sur les côtés, dévoilant le haut de mon corps à son regard déjà enflammé.
Rapidement, nos jeans étaient, eux aussi, tombés au sol, avant que nos derniers sous-vêtements ne les rejoignent. Maintenant nus, Namjoon s'était mis à embrasser tout mon corps, commençant par mes chevilles, remontant vers mes mollets puis mes cuisses. Il avait ensuite volontairement évité mon sexe, embrassant plutôt mes hanches. Il désirait faire monter le plaisir pas à pas, avais-je supposé. Il était ensuite remonté vers mon torse, baisotant pendant de longues minutes mon ventre, avant de s'attarder sur mes tétons déjà durcis. Sa langue s'était alors jointe à la danse, me faisant lâcher mon premier gémissement. À ce son, Namjoon avait rapidement levé la tête, et s'était empressé de déposer un baiser sur mes lèvres.
En voulant toujours plus, j'avais supplié Namjoon d'accélérer.
— Tu as un préservatif ? m'avait-il demandé, les yeux pleins d'espoir.
Rapidement, j'avais roulé sur le côté, attrapant mon pantalon posé sur le sable. J'avais sorti fièrement de la poche arrière un préservatif pris spécialement pour l'occasion – j'avais préféré prendre toutes mes précautions pour que tout se passe parfaitement.
— Je vois qu'on avait tout prévu, avait-il rigolé tendrement, en prenant le sachet entre ses doigts tout en déposant un tendre baiser sur mes lèvres. Je demande au cas où, alors, mais j'imagine que tu n'as pas de lubrifiant sur toi ?
— Non, avais-je ri en retour, je n'avais pas la place d'en prendre sur moi.
— Je vais devoir faire avec de la salive, alors. Ça ne te dérange pas ? Je ne veux pas que tu aies mal, avait-il fini, ses sourcils se fronçant sous l'inquiétude qu'il ressentait.
— Tu peux faire comme ça, ça me va. Juste...
— Oui ?
— Fais attention à moi, s'il te plait. C'est ma première fois, avais-je avoué timidement bien qu'il s'en doutait probablement, et je n'ai pas envie d'en garder une mauvaise expérience.
— On fait comme tu veux, mon Soleil. Je vais faire le plus doucement possible, m'avait-il promis, mais si tu as trop mal, tu me le dis et on arrête, d'accord ?
— D'accord, merci, avais-je répondu, soulagé.
— Ne me remercie pas, c'est normal.
J'avais simplement répliqué d'un sourire et d'un baiser tendre sur sa joue, rassuré par ses propos. En quelques phrases, il avait réussi à faire redescendre entièrement le stress qui avait grimpé au fil des baisers et des vêtements enlevés.
— Ouvre la bouche, avait-il continué, y entrant trois doigts.
Après avoir humidifié ses doigts pendant de longues secondes, ceux-ci avaient fini par descendre et se rapprocher de mon antre.
— Je peux ? avait murmuré Namjoon, s'assurant de mon consentement.
— Oui, avais-je simplement soufflé, incapable de dire plus.
Lentement, son premier doigt était rentré en moi, écartant mes chairs. Namjoon avait attendu un peu que je m'habitue à cette sensation nouvelle, avant d'introduire, à la même vitesse, un deuxième doigt.
La douleur était présente, mais je ne la ressentais que peu pour l'instant. Elle s'était faite plus forte quand il avait commencé à faire des mouvements de ciseaux pour m'étirer, puis, après mon accord, avait inséré un troisième et dernier doigt. Une fois correctement préparé, il avait fini par enlever ses doigts de mon corps gémissant et avait déroulé le préservatif sur son pénis.
S'alignant avec mon antre, il m'avait demandé encore une fois si j'étais sûr que c'était ce que je voulais, ce à quoi j'avais évidemment répondu par l'affirmative – j'avais tellement envie de lui. Précautionneusement, il s'était introduit en moi, fixant toujours mon expression faciale pour savoir si la douleur devenait trop forte. Une fois complètement à l'intérieur, il s'était arrêté pendant de longues minutes, attendant que mon corps, crispé par la douleur, se soit détendu autour de lui.
Les larmes avaient certes coulé, mais je ne regrettais rien. Je savais que cette souffrance était passagère et que le plaisir allait bientôt affluer dans mon corps entier.
— Tu peux y aller, lui avais-je dit, excité par ce qui allait suivre.
Et je n'avais pas été déçu. Si Namjoon avait commencé à un rythme lent, il avait rapidement accéléré sous mes supplications, le plaisir déferlant dans nos deux corps.
Au moment fatidique, quand nos corps étaient arrivés à la jouissance, j'avais eu, pendant quelques secondes, l'impression de me détacher de la Terre. Je n'étais plus sur le sable, non, mais près des étoiles. Et à mes côtés se trouvait la Lune, mon Namjoon.
Une fois cette sensation incroyable, bien qu'étrange, passée, je m'étais collé contre Namjoon, qui m'avait tendrement enlacé, me caressant le dos du bout des doigts et me faisant frissonner. Là, la tête posée contre sa poitrine, son cœur battant rapidement dans mon oreille, je me sentais bien. En sécurité.
Et, cette nuit-là, j'en étais certain, la Lune avait probablement été jalouse.
Premier quartier de Lune
Je pense que faire l'amour nous avait rapprochés, Namjoon et moi. Connaître les moindres recoins du corps de l'autre permettait d'instaurer, il me semblait, une confiance nouvelle et encore plus forte, incassable aurais-je même envie de dire. Cette fois, c'était certain, il me connaissait mieux que je ne me connaissais moi-même. Quand il me regardait dans les yeux, j'avais l'impression qu'il pouvait lire dedans, comme si je devenais, devant son regard, un livre ouvert. Il portait toujours sur moi ce regard doux, que l'on qualifierait d'amoureux si l'on devait le définir.
L'amour, je m'étais souvent demandé ce que c'était, à quoi ça ressemblait réellement. Dans les livres et dans les films, ils en parlaient comme de quelque chose d'incroyable, un sentiment presque féérique. Pourtant, je pense que l'amour était propre à chaque âge, à chaque personne, à chaque relation. Que l'on n'aimerait pas de la même manière à 15 ans, à 30 ans, ou à 70 ans. Je dirais même qu'il y avait plusieurs types d'amour romantique.
D'abord, l'amour d'adolescence. Le premier, celui supposé durer pour toujours. Celui rempli de nouveautés, de surprises, d'apprentissages. Celui que les parents regardaient d'un œil amusé, en repensant à cette époque qu'ils avaient, eux aussi, vécue. Mais c'était aussi l'amour qui faisait souvent souffrir, quand on finissait par se rendre compte que non, cette personne-là n'était pas la bonne. Que notre premier ne serait pas notre dernier.
Il y avait aussi l'amour fougueux, celui des jeunes adultes voulant être libres et le montrer. Celui de ces « presque-adolescents », qui ne voulaient plus vraiment l'être. Alors, on exprimait ses sentiments en faisant l'amour encore et encore, parce que rien ne vaut plus que les actes, comme on le disait souvent. À coup de rencards toujours plus incroyables, de voyages toujours plus loin, on exprimait, à sa manière, ces trois mots que l'on n'osait pas dire, par peur du ridicule, d'être repoussé, peut-être.
Mais l'amour faisait mal aussi, c'était le cas de l'amour non-partagé. Ce « je t'aime » qui était sorti et qui avait tout brisé. Toute la relation, toute l'amitié qui s'était créée après tant de temps, tant d'années, détruite par ces trois petits mots de rien du tout. Pourtant, malgré la douleur, les sentiments ne disparaissaient pas, au contraire. Plus on essayait de les oublier, plus ils grandissaient et prenaient de la place dans ce petit endroit qu'était le cœur.
L'amour tendre était présent aussi. Celui des personnes un peu plus âgées, qui avaient vieilli et s'étaient assagies. Qui, bien qu'elles ne le montraient pas toujours avec des baisers ou des « je t'aime », avaient pourtant des sentiments forts, très forts. Des sentiments que l'on retrouvait dans un café préparé le matin, un dessert surprise le soir, une sortie dans le quartier rien qu'à deux ou un « repose toi bien » murmuré.
Et puis, enfin, il y avait l'amour éternel. Celui qui ne disparaissait pas, même après la mort de l'être-aimé. Qui, au contraire, continuait d'être un peu plus fort chaque jour, malgré toute la douleur. Celui qui criait « je te rejoindrai bientôt, attends-moi », et qui faisait pleurer, quand on se retrouvait seul le soir, dans cet appartement vide et ce lit trop grand pour une seule personne.
Si je devais poser un nom sur l'amour qui nous avait uni, Namjoon et moi, je dirais que c'était un mélange d'un amour fougueux et d'un amour tendre. Si j'avais envie de l'embrasser jusqu'à suffoquer à chaque fois que je le voyais, simplement passer une partie de la nuit la tête sur ses cuisses, à refaire le monde, me convenait très bien aussi.
Quand j'y repense, je me dis que tout était trop beau. Un petit-ami semblant parfait, un endroit que l'on considérait comme le nôtre.
Et cette nuit-là, la Lune voulait me crier que c'était aussi un amour d'adolescence.
Nouvelle Lune
Une nuit sans Lune, Namjoon n'était pas venu. La Lune était absente, ma Lune aussi.
Je me souvenais avoir attendu, encore et encore, qu'il finisse par arriver. Les yeux dans le vague, fixés sur le mouvement de la mer, plutôt calme cette nuit-là, je perdais un peu plus espoir à chaque minute qui passait. À cinq heures du matin, épuisé, j'avais finalement décidé de rentrer chez moi, triste comme je ne l'avais pas été depuis longtemps.
Et puis les jours avaient passé, les nuits aussi, et j'étais revenu chaque soir sur notre petit bout de plage, notre coin de paradis, à attendre qu'il arrive, les yeux désolés, en m'expliquant qu'il n'avait pas eu le choix. Qu'il était parti en vacances. Qu'il avait trop de travail. Que ses parents l'avaient puni de sortie. Que c'était bon, qu'il était de retour. Mais Namjoon ne revenait pas.
Pourtant, mon espoir n'avait pas faibli. Chaque soir, seul sur ce sable qui avait été, pendant un moment, le nôtre, je me disais simplement qu'il reviendrait le jour d'après. Puis celui encore d'après. Et encore. Encore.
Pendant ces longues heures seul à attendre quelqu'un qui n'arrivait pas, j'avais observé la Lune, cette chose fascinante. Je lui avais même parlé, je l'avoue. Je lui avais demandé, presque crié, où était son homologue. S'il revenait bientôt. S'il ne m'avait pas oublié.
Il était ma Lune, j'étais son Soleil. Comme complémentaires, je ne pouvais pas vivre sans lui et inversement – c'était ce que je pensais en tous cas. Son calme, sa sagesse, son empathie, balançaient avec mon empressement, ma précipitation, mon impulsivité, comme si nous ne faisions qu'un. Sans lui, j'avais l'impression d'être incomplet, de ne pas réellement être moi-même.
À vrai dire, je ne comprenais pas vraiment ce qu'il se passait. Mon Namjoon, ma Lune, mon tout, ne m'aurait jamais laissé seul sur cette plage, le cœur rempli d'espoir. S'il avait dû partir, pour une quelconque raison, il m'aurait prévenu, j'en étais certain. Il m'aurait confié, la voix aussi faible qu'un murmure, qu'il ne m'abandonnait pas, simplement qu'il serait absent pendant une durée indéterminée.
J'étais cependant là, encore et toujours à attendre, sans voir le temps passer. Rapidement, le vent s'était levé et j'avais dû arrêter de venir en short. Puis, le temps s'était subitement refroidi et j'avais fini par venir en manteau, une écharpe enroulée autour de mon cou. La chaleur disparut, pourtant mon espérance, ma certitude même, restait elle bien présente. J'attendais toujours.
Les mois avaient défilé, les saisons aussi et puis, un jour, j'avais décidé d'arrêter de venir.
Cette nuit-là, la Lune s'était sentie plus seule qu'elle ne l'avait été depuis longtemps.
Pleine Lune
Une nuit de pleine Lune, j'avais compris que Namjoon ne reviendrait pas.
Seul, assis sur le sable froid que je n'avais pas revu depuis de longs mois, je l'avais regardée, Elle qui avait tout vu. Notre rencontre, nos rapprochements, notre premier baiser, notre première fois, nos soirées passées à rire, mais aussi les larmes qui avaient dévalé mes joues le jour où il était parti, sans un adieu. Non, pas un adieu. Sans un au revoir, plutôt.
Elle, qui nous avait couvert de son regard tendre, presque rêveur. Qui avait vu notre amour grandir, nuit après nuit.
Pourtant, je savais que j'aurais dû m'y attendre.
J'étais le Soleil. Il était la Lune. Entités opposées, nous n'étions pas faits pour être ensemble.
Je ne pouvais, cependant, m'empêcher d'espérer. Je ne savais pas où il était parti, avec qui ; non, il ne m'avait rien dit. Mais, quelque chose au fond de moi me disait que l'on se reverrait un jour. Que cette nuit-là, où l'on avait parlé de nos projets ensemble, de ce que l'on voulait faire plus tard à deux, n'avait pas été la dernière.
Peut-être demain, peut-être la semaine prochaine, peut-être dans un an, peut-être dans dix, je n'en savais rien.
J'étais sûr d'une chose, cependant. Notre histoire n'était pas finie, je recroiserai Namjoon un jour. Peut-être au coin d'une rue, peut-être dans ma librairie préférée, ou peut-être ici, dans cet endroit qui était devenu notre paradis perdu, à Namjoon et moi.
Oui, j'en étais certain.
La Lune et le Soleil n'étaient peut-être pas faits pour vivre ensemble, mais, rarement, il arrivait qu'ils se retrouvent face à face pendant quelques minutes, quelques secondes.
Ce moment-là, nous le vivrons, Namjoon et moi, vous avez ma parole.
On l'aura, notre Eclipse.
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