Chapitre 23
Une fois de plus, je perds le contrôle de moi-même. La lettre finit en boule dans un coin, les livres de ma bibliothèque atterrissent au sol, je balance un coup de pied dedans pour les éparpiller. Et je continue de hurler. Encore et encore. Aveuglé par la rage et le désespoir. Ma chaise de bureau vole à travers la chambre pour venir s'écraser contre le mur. Mon poing fermé s'élève dans les airs...et s'immobilise brutalement au-dessus d'Erwan. Il ne bouge pas et ne me quitte pas des yeux. Alors, brusquement pris d'effroi, je me détourne et vais appuyer mon front contre la vitre froide de ma fenêtre. Je me souviens avec horreur de la fois où j'avais failli tuer Loris. Lorsqu'il m'avait demandé – ou plutôt ordonné – de montrer mon vrai visage à Erwan. Je suis dangereux et c'est sa faute. Il a fait de moi un monstre, une créature sans cœur, brutale et écumant de rage. J'ai failli m'en prendre à Erwan, ce soir. J'ai failli le frapper comme il m'a frappé lui et je ne comprends pas pourquoi mon copain n'a pas réagi.
-Pourquoi, Erwan ?
-Pourquoi quoi ?
Je ferme les yeux.
-Pourquoi restes-tu avec moi ? J'ai failli m'en prendre à toi. Pourquoi refuses-tu de comprendre que je suis un monstre ?
Je cherche toujours à comprendre la raison de son amour pour moi tout en redoutant sans cesse le jour où il me quittera pour quelqu'un de meilleur que moi.
-Cesse de te poser ces questions, T. Tu ne l'as pas fait et je savais que tu ne le ferais pas. C'est pour cette raison que je n'ai pas bougé. Tu te haïrais si tu me faisais du mal.
Oh oui...C'est sûr. Je me retourne et le regarde.
-Aide-moi, je murmure en tremblant.
Sa réaction est immédiate : il se rapproche, m'enlace et me serre contre lui. Je m'accroche à lui, enfouis mon visage dans son cou.
-J'ai peur, Erwan.
-Je suis là. Je ne te laisserai pas, je te le promets.
J'ignore combien de temps nous restons ainsi enlacés. Lorsqu'il s'écarte doucement de moi, une sensation de froid m'envahit, mais je ne proteste pas. Sa main effleure mon visage, je frissonne.
-Tu n'es pas un monstre. Souviens-toi toujours que c'est Doyen le monstre, pas toi.
Comment parvient-il à continuer de me protéger après tout ce que j'ai fait ?
-Que dit la lettre, T ?me demande-t-il doucement.
Le cœur battant – de peur, de rage et d'amour –, je vais reprendre la feuille mise en boule, la défroisse et la lui donne. Je vois aussitôt ses yeux s'écarquiller d'horreur.
-Non...
Je n'ai pas le temps de respirer que je me retrouve à nouveau serré contre lui.
-Ce n'est pas possible...Il ne peut pas, il n'a pas le droit.
-Si. Il le dit lui-même : il est mon tuteur légal, il a tous les droits sur moi.
Je suis sa chose. Son pantin. Et il se plaît à tirer les ficelles.
-Alors, porte plainte contre lui.
J'écarquille les yeux à ces mots.
-Je ne peux pas. Il me tuera.
-Non, il ne te tuera pas. Tu es majeur, tu as le droit de t'exprimer et ton corps porte les preuves de sa violence. Il ira en prison et il te laissera tranquille.
Je garde le silence : c'est impossible, je ne peux pas faire ça.
-Porte plainte, T, ou c'est moi qui le ferai.
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