4 - Poker face
Un grognement secoua Curt. Il n'avait pas mal, mais se sentait fatigué. À travers ses paupières fermées, il voyait la lumière diffuse d'un néon s'abattre sur son visage. Il sentait que son corps se trouvait sous une sorte de drap, allongé sur une surface plutôt molle.
Un vent lui chatouilla les cheveux à sa gauche, signe que quelqu'un se trouvait juste à côté. Curt n'ouvrit pas les yeux, pour une raison qui lui échappait.
— Ah, mince, il dort encore, murmura une voix féminine. Bah, un bon coup de pied dans les côtes et le problème sera réglé.
À ces mots, Curt se redressa d'un coup en levant les mains en l'air.
— Ok, ok, je suis réveillé.
Un reniflement narquois accueillit sa reddition. Le jeune homme détailla son environnement. Il pouvait établir sans le moindre doute qu'il s'agissait d'une cellule de garde à vue. Les murs en béton nus et les barreaux qui le séparaient d'un couloir terne étaient déjà un indice révélateur, mais les deux policiers qui lui faisaient face complétaient le tableau.
Le premier était grand, son uniforme noir accentuant son apparence intimidante. Une barbe soignée lui mangeait les joues, et ses cheveux attachés en catogan balançaient entre le blond et le blanc, trahissant son âge mûr.
La deuxième, une rousse au regard perçant, était largement plus petite que son collègue mais pas moins menaçante. Elle mâchait un chewing-gum en plissant les yeux, les bras croisés devant la paillasse de Curt. Elle a un long nez, pensa-t-il, émergeant toujours de son sommeil prolongé.
S'asseyant enfin sur son lit de fortune, le rescapé se souvint soudain ce qui lui était arrivé. Le braquage, la course-poursuite, l'accident... Curt se tâta différentes parties du corps. Il n'avait mal nulle part.
— Oui, nous aussi on aimerait savoir, grinça la femme. Bon, commençons par les formalités. Je parle bien à Curtis James Elzed, dix-neuf ans, né à Londres ? C'est ce qu'il y a marqué sur ta carte d'identité.
L'intéressé acquiesça lentement. Il savait qu'il ne devait pas parler plus que nécessaire devant la police. Pourtant, quelque chose dans l'attitude de ses deux interrogateurs clochait. La femme avait l'air complètement blasé, ne croyant qu'à moitié à son discours. Quant à l'autre, il tripotait sa cravate d'un air absent. Curt se dit d'ailleurs que cette cravate ne seyait pas vraiment à un officier de police, car elle était rose striée de violet.
— Moi, c'est... Sculler, continua la policière en se désignant. Et lui, c'est Muldy.
Elle me prend pour un con ? pensa Curt.
Il décida toutefois de jouer la comédie.
— Enchanté, grommela-t-il simplement.
— Je vais te rafraîchir la mémoire, au cas où ta boîte crânienne aurait souffert, déclara l'homme d'une voix suave.
— ... bien que j'en doute, le coupa "Sculler".
Son collègue la fit taire d'un regard impérieux mais calme.
— Hier, vers midi et demi, tu as braqué un petit commerce à Grange Road. Toi et ton petit pote, vous vous êtes enfuis en voiture, sans aucun respect pour la sécurité des habitants, et avez tiré sur la police pendant votre fuite.
— Deux flics sont morts, commenta Sculler. C'est du propre.
Muldy leva les yeux au ciel. Ses traits burinés semblaient tout juste capables de contenir l'irritation qu'il éprouvait envers sa collègue.
— Toujours est-il qu'à l'issue de cette poursuite, vous avez perdu le contrôle de votre véhicule, sur l'autoroute en plus, et êtes partis dans le décor à plus de cent cinquante à l'heure. On a dû ramasser ton complice à la petite cuillère, et ce n'est presque pas une métaphore.
Curt grimaça. L'homme qu'il avait voulu arrêter était un criminel, mais n'avait pas semblé mériter un tel sort.
— Et moi ? demanda le jeune homme.
— Comment as-tu survécu ? compléta le policier. C'est précisément la question que nous sommes venus te poser.
Il farfouilla dans la poche de sa veste pendant quelques secondes, et en sortit son smartphone, qu'il présenta au captif. Une photo illumina ses yeux pas accoutumés à un écran éclairé si fort, et Curt dut plisser les paupières pour distinguer ce qu'elle représentait.
— Ça, c'est votre véhicule de fuite, commenta Muldy. Enfin, ce qu'il en reste. Tu as de la chance, à part ton petit pote, personne n'est mort.
La voiture était encastrée dans la glissière de l'autoroute. Au sol, on devinait des éclats de plastique bleu sur près de cent mètres, et le véhicule en lui-même était retourné sur le toit. Il avait dû faire plusieurs dizaines de tonneaux avant de s'arrêter.
— Comment est-ce que j'ai pu survivre à ça sans ceinture, murmura Curt.
Sculler fit glisser son doigt sur l'écran du téléphone, montrant une nouvelle photographie.
— Comme ça.
Il s'agissait d'un gros plan de l'arrière de la voiture. Le coffre tout cabossé était ouvert, les charnières détruites et la vitre en mille morceaux. Mais ce qui était le plus étonnant, c'était le trou à taille humaine qui perçait le siège arrière du véhicule, et qui continuait sur la porte du coffre. Au vu des bords de chaque trou, on aurait dit qu'un objet avait fusé de l'intérieur vers l'arrière de la voiture, en sortant à une vitesse phénoménale.
— C'est... moi ?
— Affirmatif, fit l'homme avec un sourire narquois. Les gens normaux sont projetés en avant quand ils ont un accident, mais je suppose que tu as voulu faire ton intéressant. Au moment de l'impact, tu t'es fait éjecter en arrière, tu as atterri sur le pare-chocs d'une voiture qui te suivait, en lui démolissant le capot au passage.
Le rescapé baissa les yeux sur ses genoux. Pourtant, il ne sentait rien. Rien du tout.
Rien du tout.
Les yeux de Curt s'écarquillèrent. Non, ce n'était pas possible ! Des larmes lui vinrent aux yeux. Ça ne pouvait pas lui arriver à lui !
Sentant la détresse du jeune homme, la policière s'avança d'un pas.
— Oi, qu'est-ce qui t'arrive, d'un coup ? Une crise de nerfs ?
— Mes jambes, grinça Curt, qui n'avait pas le cœur de formuler des phrases complètes. Définitif ?
L'autre arbora un air perplexe.
— Quoi, tes jambes ? Elles vont très bien, tes jambes.
Afin d'illustrer ses propos, elle décocha un coup de pied fulgurant dans le tibia de Curt. L'éclair de douleur qui lui monta au cerveau lui assura bien qu'il n'était pas devenu paraplégique. Il éructa une injure bien sentie, et saisit sa jambe là où Sculler l'avait frappé.
— Sa mère la... connasse ! Pourquoi t'as fait ça ?
La femme se couvrit la bouche, cachant un rire sadique.
— Je préfère voir des gens qui s'énervent que des minables qui chouinent. Bon, tu vas gentiment nous raconter ce qui t'est arrivé, parce qu'on aimerait bien savoir comment tu as réussi ton petit tour de passe-passe.
Les sourcils de Curt se froncèrent, à mesure que ce dernier comprenait sa situation. Il avait réchappé à un accident mortel en fracassant deux couches de métal et en s'échouant à cent mètres en arrière, et cela sans la moindre égratignure ?
Une pensée sans rapport lui vint à l'esprit.
— Un instant, fit-il. Où sommes-nous, et qui êtes-vous exactement ?
Les deux policiers échangèrent un regard.
— On te l'a dit, fit "Sculler". On est des policiers tout ce qu'il y a de plus honnête, et tu te trouves en garde-à-vue.
Son collègue soupira.
— Il a déjà compris, lança-t-il en retirant son képi. Ça ne sert à rien de jouer la comédie.
La femme s'indigna en posant ses poings sur ses hanches.
— Tu as une idée du temps que j'ai consacré à voler ces uniformes, chef ? Je m'étais même appliquée à reproduire des cartes de police convaincantes...
Les yeux de Curt passèrent de l'un à l'autre. À présent qu'ils avaient abandonné la mascarade, il était clair que les deux personnages qu'il avait devant lui étaient tout sauf des membres des forces de l'ordre. Les chaussettes de la femme étaient dépareillées, et son pantalon trop grand, ce qui laissait entrapercevoir son sous-vêtement. Quant à l'autre, il avait un pistolet très peu réglementaire à la ceinture, sans parler de sa cravate rose.
— Klara, il y a la photo de ton chien sur la carte que tu m'as faite.
La femme grogna et marmonna dans sa barbe à propos d'un échange de dossiers et d'un vétérinaire idiot.
— Ça suffit, trancha-t-elle finalement. Ton petit jeu n'a pas marché, maintenant on va faire ça à ma manière.
Celle qui s'appelait apparemment Klara farfouilla dans sa poche de chemise. Elle en sortit un paquet de cartes à jouer, et se mit à le mélanger devant Curt. Le jeune homme circonspect, commença à évaluer ses chances de survie s'il essayait de s'échapper en les bousculant hors de la cellule.
Un signe de tête éloquent de la part du chef dissuada le captif de tenter le coup. Comment avait-il deviné ses intentions ?
— Première question, énonça Klara. Fais-tu partie de Visage ?
— Un instant, objecta Curt. Si vous n'êtes pas de la police, qui êtes-vous ?
À ces mots, un objet fusa dans sa direction et un choc se fit entendre derrière lui, sur le mur.
— Silence ! C'est moi qui pose les questions, ici, grogna la femme.
Curt tourna lentement la tête pour voir ce qui avait heurté la paroi de béton gris. La main tremblante, il attrapa l'objet, et le retira d'un coup sec. C'était une carte à jouer, le valet de cœur. Sa ravisseuse avait réussi à lancer la carte si fort qu'elle s'était fichée dans le mur. Ce n'était pas possible, elle devait être en titane ?
Et pourtant, rien ne différenciait le morceau de papier d'une carte ordinaire, si ce n'était...
— Je t'ai demandé un truc, l'ami.
Mélangeant furieusement son paquet, Klara plissa les yeux. Si elle avait fracassé du béton avec son arme singulière, Curt n'osait imaginer ce qu'elle pourrait faire subir à son crâne.
— N... non, je ne sais pas ce qu'est Visage, s'empressa-t-il de bafouiller. C'est votre ennemi ?
Un deuxième projectile alla raser ses cheveux pour se planter dans le mur.
— Qu'est-ce que j'ai dit au sujet des questions ? Bon. Comment as-tu fait pour échapper au crash ?
L'autre se gratta la tête. Il n'en avait aucune idée.
— Est-ce que tu as utilisé une anomalie ? C'est obligé, sans quoi tu te serais transformé en viande à kebab. D'où elle venait, du pistolet ? On l'a récupéré sur le corps de ton pote, ne fais pas l'innocent.
Devant ce barrage d'interrogations, Curt resta muet. Il ne savait quoi répondre, et n'avait aucune idée de ce dont Klara parlait. Soudain, une des questions de la femme toucha une corde dans son cerveau. Le pistolet !
— Oui, l'arme du type, s'exclama-t-il. Elle avait un éclat bizarre, un peu comme...
Son regard se posa sur la carte à jouer qu'il triturait dans sa main. Après un examen rapide, Curt réalisa qu'elle arborait le même éclat irisé que l'arme du braqueur, en bien plus ténu.
— Comme ça ! C'est ça, une anomalie ?
Sans qu'il ne puisse déceler le moindre mouvement de la part de Klara, trois autres cartes vinrent se ficher derrière lui. L'une d'elle lui entailla la joue.
— Mais ferme-la ! hurla-t-elle. Arrête de jouer au con et dis-nous, à la fin !
Celui qui se tenait à son côté posa une main sur son épaule. Curt voyait bien qu'il était fatigué.
— Klara, ça ne sert à rien. Ou bien il ne sait véritablement rien, ou bien c'est un bon menteur. Dans un cas comme dans l'autre, ce n'est pas de la torture qui nous en apprendra plus. Viens, allons faire notre rapport à la patronne.
Les yeux de sa collègue s'étrécirent encore plus.
— Très bien, mais s'il en profite pour s'échapper, je lui coupe les jarrets.
— Pas de risque, je lui envoie Dan. Lui pourra nous en dire plus sur l'anomalie qu'il a utilisée.
À ces mots, Klara reprit un air enjoué et gloussa et regardant Curt.
— Dan ? Oh, j'en plaindrais presque le gamin. Après la torture physique, le supplice psychologique ? Ça lui fera les pieds. Tu sais quoi, je vais même rester pour profiter du spectacle.
— À tes aises, fit l'autre en roulant des yeux. La patronne m'attend, amusez-vous bien.
L'homme s'en alla, laissant Curt seul avec Klara. Cette dernière toisa son prisonnier d'un air carnassier.
— Je vais te donner un conseil, fit-elle en triturant ses cheveux dépassant de sa casquette. N'essaye pas de jouer au plus malin avec Dan. Pas parce qu'il est particulièrement intelligent, mais surtout parce que tu en perdrais la raison. Tu comprendras.
Curt ne répondit pas. Il resta assis sur son lit de fortune, les mains entre les jambes, bougeant le moins possible. En face, la femme jouait sur son téléphone et ne prêtait plus du tout attention à lui. Il lorgna sur l'arme qu'elle portait à sa hanche, mais décida qu'il tenait à sa vie.
Au bout de quelques minutes, il commençait à croire qu'on l'avait oublié et que sa geôlière allait terminer son jeu et le laisser sur place, quand il entendit un son provenant du couloir. Il ne s'agissait pas d'un bruit de pas, mais bien d'un roulement continu.
Klara hocha la tête pour elle-même, et rangea son téléphone.
— Dommage, je suis sûre que j'allais avoir une bonne lootbox cette fois. Monseigneur Dan, comment vous portez vous en cette belle journée ?
Un homme entra dans la pièce, sans prendre la peine de la saluer. Il était en fauteuil roulant, et gribouillait sur un magazine, si absorbé dans son œuvre qu'il en manqua de percuter Curt. Avec une grimace d'appréhension, le jeune homme remarqua que le nouvel arrivant était dans un état si négligé qu'il aurait pu passer pour un clochard s'il n'exsudait pas une odeur étrange et fruitée. Barbe négligée, cache-œil mal ajusté, cheveux en bataille, il paraissait dix ans de plus que son âge, qui devait plutôt se trouver autour de la trentaine.
Ne sachant comment entamer la conversation, Curt resta coi. En face, Dan continuait ses gribouillis. Enfin, semblant émerger d'un sommeil éveillé, il battit plusieurs fois de sa paupière valide et prit un air surpris.
— Oh, mais c'est vrai, nous avons un nouveau jouet. Je me présente, on m'appelle Dan. C'est un diminutif de Burden Smudge. Burden Smudge, c'est moi, je suppose. Regarde, c'est Matthew qui me l'a acheté : un livre de jeux authentique, n'est-ce-pas magnifique ? Il ne me reste plus qu'à comprendre comment fonctionne ce "suh-do-kuh"... Donne-moi un chiffre, pour voir ?
Curt ne savait comment se tenir. Il jeta un regard fugace à Klara, qui semblait aux anges devant son malaise. En voyant qu'il demandait son aide, sans se départir de son rictus moqueur, elle lui fit un doigt d'honneur parfaitement exécuté et qui témoignait de décennies d'entraînement. Avec un soupir de fatigue et de résignation, Curt hasarda :
— Euh, huit ?
— Allez.
Dan gribouilla de plus belle sur son carnet. Curt, de plus en plus mal à l'aise, aurait presque préféré se faire rouer de coups par eux plutôt que de continuer à parler à ce grand malade.
— J'ai fini, fit Dan au bout d'une dizaine de secondes. Tiens, regarde.
Curt constata que son interlocuteur n'avait fait que remplir la page de nombres et d'opérations sans queue ni tête. Le jeune homme n'avait pas étudié les mathématiques pendant très longtemps, mais reconnaissait une intégrale et quelques équations différentielles. Il haussa un sourcil, et ne pipa mot.
— Oh, mais j'en oublie les bonnes manières, s'excusa Dan. Je ne me suis pas présenté. On m'appelle Dan. C'est un diminutif de Burden Smudge. Burden Smudge, c'est moi, je suppose.
— Tu viens de le dire, ducon, lança Klara.
Dan resta muet pendant quelques secondes, puis éclata de rire.
— Ah ! Il faut excuser un vieillard tel que moi, ma mémoire n'est plus ce qu'elle n'était.
— Tu as trente ans, Dan.
— Eh bien, tout est relatif. Tu as remarqué ? Lorsque l'on juge la valeur d'une chose, on doit la comparer à une autre. Rien n'est absolu. Il y a toujours une contrepartie, un doppelgänger, un alter. Mais je m'éloigne du sujet. Tu t'appelles Dirt Alzed, c'est ça ?
— Non, Curtis. Curtis Elzed, répliqua l'intéressé.
— Très bien, Fart Elsand. Klara m'a rapporté que tu avais réussi des actions inimaginables, impossibles pour un humain normal. Aurais-tu une... explication à nous fournir ? Et dans le cas contraire, saurais-tu où j'ai fourré mon stylo-plume ?
Curt ne comprenait rien à rien. Il bredouilla quelques mots sans queue ni tête, puis se ravisa.
— N'est-ce pas étrange, Burt Olsen, que, parfois, l'on cherche des explications rationnelles alors qu'il est impossible d'en obtenir ? Les volcans sont la forge d'Héphaïstos, la vie a été créée par Dieu, l'arbre à listine est le fils de Pionn...
Curt ne comprit rien à son dernier exemple mais sentit que ce serait une perte de temps de lui demander d'élaborer.
— Là où je veux en venir, Curl Perlman, c'est que parfois, ça ne sert à rien de chercher à comprendre. Les mots, la raison, notre cerveau, ils défaillent tous face au simple chaos. Le chaos, tu comprends ? Le chaos !
Dan s'était de plus en plus approché de son interlocuteur au fil de son discours, tant et si bien que Curt pouvait apercevoir ses plombages. Le borgne ne souriait même pas, et Curt se demandait s'il était sérieux ou juste fou. Il voulut avancer une réponse peu assurée, mais Dan le coupa de nouveau.
— Non non, ce qui est important, ici ou dans l'autre monde, c'est de ne jamais perdre de vue notre objectif. Tu as un but dans la vie, mon brave ?
Curt haussa les épaules. Il écouta Dan déblatérer des paroles sans queue ni tête pendant au moins deux heures, et ne put placer qu'une dizaine de phrases. À l'issue de ce moment aussi étrange que déplaisant, Dan sembla se souvenir qu'il avait oublié d'éteindre son four et s'en alla sans demander son reste.
Klara, qui avait à moitié écouté les élucubrations de Dan, et à moitié surfé sur son téléphone, se rapprocha de Curt en battant son jeu de cartes.
— Je peux savoir ce que c'était, ça ? s'indigna Curt.
— Te cabre pas comme ça, le mioche, répondit Klara d'un air désinvolte. Il prenait ta température, c'est tout. Avec un peu de chance, il décidera de te laisser en vie.
— Parce qu'en plus, c'est ce dingue qui a le droit de vie ou de mort sur moi ?
L'autre fit un geste vague de la main.
— Si j'en dis plus, j'aurai le droit et le devoir de te couper la langue. Et ça me plairait bien, alors tu vas gentiment rester dans ta cellule jusqu'à ce qu'on aura décidé quoi faire de toi. À bientôt, nullos.
Elle sortit de la chambre, verrouilla la porte, et désigna silencieusement une caméra montée sur le mur, puis agita son doigt de façon dissuasive.
Curt se laissa choir dans son lit de camp. Il était amateur de sensations fortes, certes, mais cela dépassait de loin ce qu'il était capable d'encaisser pour une journée ! Il fouilla dans ses poches à la recherche de son téléphone, ne le trouva bien sûr pas, et se rendit compte qu'il n'avait aucune idée de l'heure. Avec un haussement d'épaule aussi résigné qu'épuisé, il s'allongea et tenta de se réveiller de ce cauchemar de fous.
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