𝟥𝟤 | 𝖳𝗁𝖾 𝖱𝗎𝗌𝗍𝗒 𝖱𝗒𝖾.
🎵 Snɑp Out Of It - Arctic Monkeys
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ೃ⁀➷ 𝒥e sortis de la maison en douce en prenant soin de ne pas claquer la porte derrière moi. J'avais déjà garé Medusa derrière le garage pour ne pas avoir à la sortir. Je montais dessus et démarrais le plus vite possible.
La route pour atteindre le centre de Philadelphie n'était pas longue. Je me retrouvais très vite entourée de buildings brillants sous le soleil printanier. L'odeur des fleurs n'était pas vraiment au rendez-vous, mais le temps était tout de même agréable. Je n'avais pas vu une seule fois Jayden en trois jours, c'est-à-dire depuis une conversation que nous avions eu dans la cuisine. Je m'étais inquiétée pour ses bleus et ses blessures et lui avais posé quelques questions.
— Comment c'est possible de revenir comme ça du sport ? Tes adversaires doivent être forts. A moins que ce soit ton équipe qui soit excessivement nulle ? avais-je dit sarcastiquement.
— Mon équipe ? Quelle équipe ?
Je l'avais regardé avec des yeux ronds, ne comprenant pas sa question.
— Le hockey est un sport d'équipe, non ?
— Je joue seul, avait-il répondu sans plus d'explication. »
Depuis, je me demandais toujours ce que cela signifiait. Jouer seul au hockey. Comment était-ce possible ?
Je m'arrêtais au coin d'une rue et fouillais mes poches afin de trouver le petit papier sur lequel j'avais noté l'adresse du Rusty Rye. J'avais promis à Petit Gil de venir les voir lui, Palmer et Emerson au bar. Merde, j'ai dû le perdre.
Je poussai un soupir d'exaspération et descendis de Medusa. J'allais terminer le trajet à pied car je ne devais pas être bien loin. Jayden me tuerait probablement s'il apprenait que j'étais seule en plein milieu de Philadelphie et c'était pour cela que je considérais qu'il valait mieux n'appeler personne au cas où il intercepterait l'appel.
Je n'étais définitivement pas dans les quartiers favorisés de la ville, bien au contraire. Les rues que je traversais étaient étroites et sombres, et empestaient les détritus. Je croisais quelques chats errants à la recherche de nourriture au fond des poubelles débordantes de déchets. Le calme qui y régnait était oppressant. Je passais devant quelques boutiques dans un état de dégradation avancée, mais toujours ouvertes aux clients. L'une d'elle s'avéra être une librairie. Le libraire qui la possédait me fit un signe de la main à travers la vitrine et m'adressa un sourire étrange qui laissa apparaître ses dents grisâtres.
J'accélérais le pas, ne faisant absolument pas confiance à cet endroit lugubre. Les pavés humides reflétaient les bâtiments délabrés en briques rouges qui s'élevaient difficilement au-dessus de ma tête. Quelques personnes passaient de temps à autre à côté de moi, me lançant des regards mauvais.
Cet endroit me disait pourtant bien quelque chose et mes pensées se confirmèrent à la vue de la vieille pancarte en bois « Chez Fitch ».
J'entrai dans la boutique d'armes qui ressemblait plutôt à un vieux magasin de déco antique. Une clochette retentit et le petit vieillard sortit de l'arrière-boutique.
— Oh ! s'exclama-t-il en recoiffant ses cheveux blancs. Je vous reconnais !
— Je ne pensais pas que vous vous souviendriez de moi, avouai-je confuse.
— Je me rappelle de chaque personne qui a passé le pas de cette vieille porte grinçante, dit Fitch de sa voix fluette. Et surtout de vous, jeune demoiselle.
— Il faut dire que j'étais accompagnée de Josh et Lindsay, répondis-je en jetant un coup d'œil aux objets situés autour de moi.
— D'ailleurs, que faites-vous ici Elizabeth ? questionna-t-il en trébuchant jusqu'à moi.
— Le Rusty Rye, ça vous dit quelque chose ?
— Bien sûr ! s'enquit-il tout excité. Continuez tout droit lorsque vous sortirez d'ici et au coin de la rue, tournez à gauche. Vous rejoindrez l'avenue principale et verrez le bar de loin.
— Merci beaucoup Fitch, dis-je en lui serrant la main.
— Au plaisir de vous revoir Elizabeth !
Je fis à nouveau tinter la clochette et fermai la porte derrière moi. Je me retournai pour repartir et aperçus un homme, attendant contre le mur, les cheveux couverts par une casquette et les yeux protégés par une paire de lunettes de soleil. Malgré cela, je le reconnus.
— Ray ?
La couleur de sa peau était d'un tout autre aspect que ce que j'avais en tête. En effet, lorsque je l'avais vu, c'était sous la faible lumière des néons de l'Euphoria, alors je n'avais pas complètement observé son visage en détail.
— Qu'est-ce que tu fais ici ? me demanda-t-il alors que ce aurait plutôt été à moi de lui poser la question.
— Je devais rejoindre des amis dans un bar et je me suis retrouvée ici.
— Je peux t'y emmener si tu veux, me proposa-t-il avec un sourire chaleureux.
Je ne savais pas s'il était sincère car je ne pouvais voir ses yeux. J'avais pris l'habitude d'observer le regard des personnes autour de moi pour y déceler le mensonge ou bien une émotion. Jayden était à l'heure actuelle la personne que j'avais le plus de mal à lire. Toutefois, j'acceptais sa proposition.
Sur le chemin, Ray me posa quelques questions sur ma vie, mon goût pour la lecture, et on en vint forcément à parler de la mort de mes parents. Je ne lui racontais pas tout, comme pourquoi et comment j'étais arrivée chez Jayden ou encore ce qu'il s'était passé avec les Rebels. Je ne lui faisais pas assez confiance pour déballer mon sac même si ce n'était pas l'envie qui me manquait.
Quelques dizaines de mètres avant l'entrée du bar, Ray s'arrêta.
— Je vais te laisser ici, dit-il d'une voix neutre. Je ne suis pas vraiment le bienvenu alors tu vas devoir finir seule. C'est juste en face, tu vois ?
Je hochai la tête et le remerciai vivement.
— A bientôt, Elizabeth, me lança-t-il avec un petit sourire charmeur.
Je me dirigeais alors vers le bar. Une chance que Ray m'ait trouvée sur la route sinon je ne savais pas comment j'aurais pu faire.
Le Rusty Rye se situait dans l'angle d'une rue très passante. La devanture était assez vieillotte et recouverte d'une peinture noire écaillée. L'emblème du Club, la tête de mort ailée, trônait juste au-dessus de la porte d'entrée. Au premier abord, le bar paraissait sinistre et l'on n'avait certainement pas envie d'entrer à l'intérieur. Mais le son agréable qui émanait de l'intérieur ainsi que les cris joviaux qui atteignirent mes tympans, me firent poser la main sur la poignée de la porte. Je mis alors un pied à l'intérieur, faisant tinter une clochette.
L'ambiance Rock'n'roll rendait l'atmosphère légère et je pris plaisir à jeter un coup d'œil autour de moi. Sur les murs recouverts de lattes de bois, plusieurs photos du Club étaient accrochées entre quelques cadres représentant des marques de motos. Des bouteilles de vin et de bière étaient disposées sur le bar, lui aussi en bois, et des verres étaient suspendus juste au-dessus.
Derrière, j'aperçus un distributeur de boissons décoré du symbole des Hell's Angels. Quelques chaises vides en faux cuir rouge étaient placées devant le comptoir tandis que les tables rondes étaient entourées de clients. Certains d'entre eux jouaient au poker autour d'un verre de bière artisanale. Je m'approchais prudemment du comptoir lorsque le visage de Palmer apparut derrière une porte.
— Evans ! s'exclama-t-il. Quelle bonne surprise !
Il se jeta dans mes bras avant que je ne puisse lui répondre quoi que ce soit. Il appela Petit Gil et Emerson qui firent leur apparition quelques instants plus tard.
— Eli ! Je suis trop content de te voir ! s'exclama le jeune rouquin.
Je le pris dans mes bras et déposai un baiser sur ses boucles rousses.
— Content de te voir là, Evans, dit Emerson.
— Alors, comment tu trouves mon bar ? me demanda Palmer en faisant de grands gestes avec les bras, sautillant presque sur place.
— Il est génial, répondis-je sincèrement. Je n'étais encore jamais allée dans un endroit pareil.
Je jetais un rapide coup d'œil aux clients qui m'observaient, le regard inquisiteur. Je comprenais qu'il ne devait pas y avoir beaucoup de femmes qui passaient par là et encore moins des amies des Hell's.
— Tu devrais nous aider, tu sais, suggéra Palmer tout sourire. Je suis sûr que ça boosterait la clientèle.
— Oui et puis je porterais une mini-jupe et des bas en dentelle, tant qu'on y est, maugréai-je à moitié agacée.
— Très bonne idée !
— Au pire, tu essayes et ensuite tu te décides, proposa Emerson plus sérieusement. Les clients savent se tenir ici et au pire si y en a un qui ose te faire du mal, je lui éclate la gueule dans la réserve.
Emerson me rassurait un peu mais je ne souhaitais tout de même pas en arriver là.
— Ça marche, je m'occupe du service, déclarai-je en prenant un plateau sur le bar. Peut-être que je me découvrirais un talent.
— Génial, j'ai trop hâte de bosser avec toi, Eli ! cria Petit Gil si fort que tous les clients se retournèrent.
En vérité, j'avais une autre idée derrière la tête. Si je travaillais au Rusty, je pourrais établir un contact avec l'extérieur, tout en me tenant à distance du danger. Cela me permettrait d'écouter les conversations, de récupérer des infos, et d'enquêter sans attirer l'attention. Je souhaitais retrouver les meurtriers de mes parents sans mettre le Club et ma vie en péril.
Ainsi, Palmer m'offrit fièrement un tablier sur lequel était brodé une femme brune en sous-vêtements.
— C'est un honneur de porter... cette chose. Je ne m'y attendais pas, je croyais que t'étais gay, répliquai-je malicieusement.
— Ne dis plus jamais ça ! s'affola-t-il en plaquant une main sur ma bouche. Tu veux que je finisse le mois avec les couilles bleues ?
Je m'étouffai en entendant cette phrase. Le bar était rempli d'hommes, il n'y avait aucune chance pour qu'une femme l'ait entendu. Ou peut-être craignait-il que cette nouvelle se retrouve en première page du Daily.
— Ben tu sais, t'es tellement sexiste que ça porte à confusion, rétorquai-je en emportant mon plateau rempli de boissons.
— J'aime les nibards, OK ? s'écria-t-il alors que Petit Gil et Emerson se retenaient d'exploser de rire.
Je distribuais les bières et les verres de whisky sur les tables, manquant plusieurs fois de tout renverser sur le sol. Petit Gil m'aida à me souvenir des tables et me présenta à quelques hommes. La plupart d'entre eux étaient des motards, mais ne faisaient pas forcément partie d'un gang. Ils aimaient tout simplement les sensations et le rock. Les filles, aussi.
— Cette pizza est pour la table quatre, m'indiqua Palmer. Au fait, fais-moi signe si tu veux boire quelque chose, même s'il te faut dix verres.
— Merci, comme ça je viderais les réserves de bière avant que tu te transformes de nouveau en ivrogne, le taquinai-je avec un clin d'œil.
Je fis à nouveau le tour des tables, répétant sans cesse les mêmes phrases. Ce travail de serveuse s'avérait beaucoup plus fatiguant que je ne le pensais et surtout répétitif. Heureusement que mes amis étaient là pour me raconter des bêtises sinon j'aurais très vite abandonné.
D'ailleurs, je leurs fis promettre de ne rien dire à ce propos. Si Jayden ou même Lindsay apprenaient que je bossais au Rusty, ils me tueraient tous les deux.
Je m'approchai d'une table avec trois hommes en blouson gris qui jouaient au poker.
— Je l'ai entendu, dit l'un d'eux. Les Eagles vont prendre le contrôle de New York.
— Connerie, les Hell's sont là-bas aussi, ne crois pas qu'ils vont se laisser faire, répondit le plus jeune.
Aucune idée de quoi ils parlaient, mais je gardais l'information en tête au cas où elle me serait utile.
☆
La nuit tomba très vite et je n'avais pas vu le temps passer. On ferma le bar vers 20h, c'est-à-dire beaucoup plus tôt que d'habitude. De retour à la villa, je me jetai sur le canapé afin de me reposer de ma journée épuisante. Greene s'occupait d'Owens à l'étage, celui-ci ne voulant toujours pas me dire quoi que ce soit. J'espérais un jour lui soutirer des informations concernant ce qu'il s'était passé dans le hangar lors de la bataille contre les Rebels.
Tout à coup, j'entendis le claquement de la porte d'entrée. Mes yeux s'écarquillèrent à la vue de Josh et Lindsay. Je me jetai dans les bras de mes amis et Lindsay me serra fort contre elle.
— Tu m'as manqué, Eli, me confia-t-elle. Comment tu vas ? Tu ne t'ennuies pas trop ici ?
— Tout va bien. Et vous ? Comment s'est passée votre mission ? demandai-je en me tournant vers Josh.
Celui-ci arborait un air anxieux et je le vis jeter quelques coups d'œil à Lindsay.
— Oui... Oui ça s'est bien passé, bafouilla-t-il. Je... Enfin... Nous avons fait de notre mieux.
— Ah oui ? En quoi ça consistait d'ailleurs ?
— Eli, nous avons besoin de nous reposer, déclara Lindsay. On se revoit pour le dîner.
Qu'est-ce qu'il lui prend tout à coup ?
Josh et Lindsay prirent la direction des escaliers et j'entendis la porte de chacune de leur chambre se fermer à clef.
J'en étais sûre désormais. Ils me cachaient des choses que j'avais besoin de savoir.
— Bien Evans, tu veux faire un tour ? proposa Emerson en me voyant seule dans le hall.
— Avec plaisir.
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