𝟥 | 𝖫𝖺 𝗅𝗂𝖻𝖾𝗋𝗍𝖾́ 𝖺 𝗍𝗈𝗎𝗃𝗈𝗎𝗋𝗌 𝗎𝗇 𝗉𝗋𝗂𝗑.
♫ Boulevɑrd of Broken Dreɑms - Green Dɑys
« 𝑆𝑜𝑚𝑒𝑡𝑖𝑚𝑒𝑠 𝐼 𝑤𝑖𝑠𝘩 𝑠𝑜𝑚𝑒𝑜𝑛𝑒 𝑜𝑢𝑡 𝑡𝘩𝑒𝑟𝑒 𝑤𝑖𝑙𝑙 𝑓𝑖𝑛𝑑 𝑚𝑒 »
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ೃ⁀➷ 𝔏es maladies psychiatriques étaient très intéressantes à étudier, je regardais beaucoup de documentaires à leurs sujets. Mais en ce qui concernait les psychopathes eux-mêmes, mieux valait les éviter. Malheureusement pour moi, je venais apparemment d'en croiser un.
L'idée même que mon père puisse travailler pour un taré débordait d'absurdité, aussi conséquente la somme à la clef fût-elle. Et puis, dans quelles circonstances avait-il trouvé ce contrat ?
Les cauchemars infiltraient mes nuits de façon régulière sans me laisser de répit. Ils s'invitaient dans mon esprit, comme si celui-ci leur appartenait. Je mettais des heures à m'endormir, pour finalement me réveiller un peu plus tard en sursaut, tout ça parce que mon cerveau ne savait pas rêver correctement. Le bon côté, c'était que tout cauchemar avait une fin. On ressentait cette satisfaction, lorsque l'on constatait le lendemain matin, que rien ne s'était passé et que tout allait bien.
Tout le contraire de cette réalité dans laquelle je me trouvais depuis quelques heures. Mes poings me faisaient mal à force de tambouriner contre la porte. Personne ne viendrait me chercher, je le savais et pourtant, je déployais mes ultimes réserves d'énergie, tout en sanglotant comme une idiote.
Je jetai un coup d'œil à l'immense horloge accrochée au fond de la pièce. Quatre heures cinq du matin. J'étais enfermée depuis deux heures. Durant les cinq dernières minutes seulement, j'avais pu compter vingt fois le nombre de carreaux gris qui recouvraient le sol. Soixante-quatre. Cent fois le nombre de chaises en cuir noir autour de la grande table de verre. Douze. Sûrement une salle à manger.
J'avais étudié chaque motif écarlate dessiné sur le mur contre lequel j'avais fini par poser mon dos, et je les connaissais maintenant par cœur. J'avais totalisé le nombre de tic et de tac qui rythmait l'horloge ancienne au-dessus de ma tête en une minute. Parce qu'à chaque pas de l'aiguille, le son différait. Trente-six tic, vingt-quatre tac. Je n'aimais pas entendre deux tic se suivre, cela me donnait mal au crâne. Je me demandais pourquoi il y avait deux tic consécutifs, et si un tac ne voudrait pas les séparer.
— Il y a quelqu'un ? retentit une voix de l'autre côté du mur.
Je me précipitai vers la porte et pressai mon oreille contre le verrou.
— Chut ! Ne crie pas, il est quatre heures du mat', t'es pas bien ! Je vais encore me faire engueuler, murmura une femme.
Cette fois-là, j'accueillis le silence comme un vieil ami. Et si ces gens étaient venus pour me tuer ? Un volcan de terreur jaillit dans ma poitrine lorsque le tintement d'une clef résonna dans la pièce. Je bondis sur le côté dans l'espoir d'échapper au pire. La porte coulissa, et deux individus d'une taille impressionnante apparurent devant moi. Parmi eux, je reconnus la femme que j'avais croisée juste avant d'être enfermée.
— C'est pas vrai, il l'a vraiment foutue là-dedans, souffla-t-elle l'air désabusé. Je lui ai déjà dit que ce n'était pas un endroit pour emprisonner des otages.
Tout comme le fou qui m'avait séquestrée, elle paraissait jeune. Ses cheveux noirs couraient le long de son dos jusqu'à la naissance de son jean taille basse et ses deux yeux verts en amande me fixaient depuis six secondes. Un garçon brun l'accompagnait, le visage impassible. Son regard froid m'indiquait qu'il n'hésiterait pas à me tirer dessus si nécessaire.
— T'es vraiment un drôle de spécimen, dit la femme, une main sur la hanche en détaillant ma chemise de nuit. Moi, c'est Lindsay Morgan, et lui, Joshua Griffin, mais on l'appelle Josh. Et toi ? Une nouvelle fan de Jay ?
Je secouai la tête.
— Je suis juste arrivée ici par hasard, lui répondis-je tremblante. Je suivais quelqu'un et...
— Je peux savoir qui c'était ?
Un cliquetis régulier éveilla tous mes sens. Je fis volte-face et croisai son regard glacial qui me pétrifia, alors qu'il jouait avec son briquet doré. Le nuage acide qui émergeait de sa cigarette me brûlait le nez. Ses cheveux blonds retombaient négligemment sur son front, telle une cascade d'eau claire dont le voile cristallin éclate au soleil. Je ne parvenais pas à remonter le courant, happée par les profondeurs bleutées de ses iris déchaînés. Je dus reprendre mon souffle plusieurs fois afin d'atteindre le rivage.
— Que fait-on d'elle ? questionna le dénommé Josh dont la voix me figea sur place.
— Nous allons la faire parler, s'égaya Jay. Griffin, à toi l'honneur.
Le jeune brun s'approcha de moi, le visage dénué de toute expression. Il fouilla ses poches, et une lame éclosit entre ses doigts.
— C'est d'accord, je vais tout vous raconter ! m'exclamai-je haletante. Mais, je... Promettez-moi que vous ne lui ferez rien.
— Parle avant que je m'énerve, il n'hésitera pas à te tuer si je lui demande, trancha Jay en désignant Josh du menton.
Ce dernier posa la pointe de sa lame contre ma gorge et je dus lutter contre une armée d'angoisses afin de réfléchir aux mots qui s'ôteraient de ma bouche.
— Je m'appelle Elizabeth... Evans, affirmai-je, d'un faux air assuré. J'ai suivi mon père, George. Il est sorti en plein milieu de la nuit, ça m'a intriguée alors je me suis cachée dans son coffre et je me suis retrouvée ici, c'est tout.
Jay jeta un regard interrogateur à ses complices puis éclata de rire en me pointant du doigt.
— Tu ne crois quand même pas que je vais gober ça, dit-il en s'approchant de moi. Vous entendez ça les gars ? George a une fille ! Alors celle-là c'est la meilleure.
Josh hocha la tête tandis que Lindsay afficha une expression exaspérée. À vrai dire, j'avais complètement oublié leurs présences, trop absorbée par la lame contre mon cou.
Jay balaya le bras de Josh et vint se poster face à moi. Son aura cruelle m'assaillit de coups de poignard et mon sang ne fit qu'un tour. Son sourire malsain avait disparu, laissant place à ce qui se cachait réellement derrière son masque de politesse : un meurtrier qui prenait un malin plaisir à torturer ses victimes. Voilà ce qu'il était. Un putain de psychopathe tout droit sorti de l'asile.
— Je te remercie pour cette plaisanterie, darling, mais je ne suis pas un grand fan du mensonge, grinça-t-il en enroulant ses doigts autour de mon cou.
Si j'avais pu décider de la façon dont je périrais, j'aurais choisi quelque chose d'original comme une succession de catastrophes ou d'accidents plus improbables les uns que les autres. Sinon, j'aurais opté pour une mort utile, en combattant au front ou encore en sauvant une vie.
Mais la dure réalité m'obligeait à crever en tant que personne faible, dévastée par le fait que j'étais impuissante face à cette situation.
— Comme je ne peux pas lui faire confiance, dit Jay en se relevant sans me lâcher des yeux, elle va devoir rester ici en attendant qu'on ait la preuve que ce qu'elle dit est vrai.
Puis il tourna les talons et sortit de la pièce. On venait de me retirer la hache du cou seulement quelques secondes après l'avoir posée. Toutefois, un désastre en suivait toujours un autre.
— Je vais devoir rester ici ? m'écriai-je hors de moi. Mais j'ai dit la vérité !
Je me ruai vers la porte coulissante, mais le dénommé Josh me retint.
— On va trouver une excuse pour que tes parents ne s'inquiètent pas, mais comme l'a ordonné le Chef, tu ne sortiras pas d'ici tant que tu n'auras pas prouvé ton innocence.
— Vous n'avez pas le droit ! le défiai-je. Je vais appeler la police !
Josh s'esclaffa, me prenant de haut. Pourtant, il n'y avait vraiment rien de drôle.
— Appelle si ça t'amuse, mais ça m'étonnerait qu'elle fasse quoi que ce soit. Elle obéit au Chef, ajouta-t-il avant de partir.
J'ouvris la bouche, hébétée par ses propos. Même dans mes pires cauchemars, je ne pouvais pas songer à un désastre comme celui-ci.
— T'as bien de la chance que Jay ne t'ait pas tuée cette nuit, marmonna Lindsay toujours plantée à côté de moi. À partir de maintenant, tant que tu tiens tranquille, tu n'auras rien à craindre. Enfin, j'espère...
Ses paroles ne me rassuraient absolument pas, mais je me sentais moins en danger avec elle qu'avec les deux hommes. Elle me fit sortir de la pièce et nous traversâmes les couloirs de ce labyrinthe dans le sens inverse. Nous passâmes sous une arche à gauche de la porte d'entrée et descendîmes une unique marche nous menant au salon.
Comme je m'y attendais, celui-ci n'était pas plus chaleureux que le reste de la demeure. Seule différence, il avait été creusé à une quinzaine de centimètres dans le sol. Le centre du parquet cendré était recouvert d'un tapis noir sur lequel on avait installé l'épais plateau d'une table basse en bois vermillon, complété par un service à whisky en cristal.
Une large bibliothèque parcourue d'une lumière rouge s'étalait sur le mur du fond. J'y notais la présence de vases, quelques livres, une horloge numérique, une paire de bougies, plusieurs bouteilles d'alcool ainsi qu'un diffuseur d'odeur électrique, probablement à l'origine du parfum boisé qui régnait dans la maison.
Sur la gauche, un fauteuil en daim gardait la marche en bas de la baie vitrée. Tandis qu'à droite, un canapé d'angle en cuir charbonné reposait contre la cloison sur laquelle une œuvre abstraite dans les mêmes tons était accrochée.
Lindsay m'attira vers le sofa et s'assit à côté de moi. Je pus alors observer son visage dans les moindres détails. Elle possédait une peau blanche et lisse comme on en voyait dans les magazines. Un petit nez en trompette venait se placer au-dessus de ses lèvres rosées, et ses yeux vert émeraude en amande brillaient tant qu'on aurait dit deux étoiles au beau milieu de la nuit. Sa longue et épaisse chevelure noire tombait près de ses genoux, sur le canapé.
— Raconte-moi tout. Il t'est arrivé quoi exactement ?
Devrais-je le lui dire ? Risquait-elle de me tuer ? De toute manière, je n'avais plus rien à perdre, Jay tenait déjà ma vie entre ses mains. Je lui racontais donc en détail ma petite histoire.
— Je ne savais pas que George avait une fille, fit-elle en se pinçant le menton. Qu'est-ce que tu sais à propos de ses anciennes affaires ?
— En fait, mon père ne nous parle pas vraiment de son travail. Je suppose qu'il veut nous protéger ma mère et moi, avouai-je dans un soupir. Il était tellement content quand il nous a annoncé qu'il avait retrouvé du boulot.
— Je vois, dit-elle en se levant. Viens avec moi, tu vas dormir ici. Demain matin, on appellera tes parents. Tu leur diras qu'un de tes amis a eu un problème cette nuit et que tu dois rester l'aider quelque temps.
Le mensonge tomberait à l'eau puisque je n'avais pas d'amis. Toutefois, je me tus et, de retour dans le hall, je suivis Lindsay à travers un passage sous les escaliers de marbre noir qui s'ouvrait sur un espace entouré de gigantesques baies vitrées, séparé du salon par une unique cloison. Seuls un bureau disposé de travers et un divan placé contre le mur, remplissaient le vide environnant. Lindsay me donna un plaid duveteux ainsi qu'un oreiller de plumes.
— Essaye de dormir un peu, Jay te ramènera chez toi demain.
Sa bienveillance illuminait ces lieux sinistres. Elle m'accueillait avec bonté de cœur alors que je m'étais infiltrée comme une idiote sous un toit totalement inconnu.
— Eli, c'est ça ?
Je hochai vivement la tête. Elle me répondit par un petit sourire puis s'en alla.
Je m'installai confortablement sur le divan et poussai un soupir d'aise lorsque mon corps gelé rencontra la chaleur du plaid. Je savais que je n'allais pas fermer l'œil de la nuit, de peur que ce Jay ne me tue dans mon sommeil et je n'avais aucun livre pour penser à autre chose.
Les bouquins représentaient mes seules échappatoires. Ils me permettaient de sortir de mon quotidien, de me laisser aller dans des univers bien plus excitants que la monotonie de mon existence. Je n'avais aucune idée d'où me venait ce goût pour la littérature, mais une chose restait sûre, c'était que les moments durant lesquels je me sentais bien, c'était le nez dans un livre.
Une vraie intello, non ?
Justement. Je ne voulais pas être une simple intello qui ne cessait d'étudier et qui ne connaissait rien à la vie. Une jeune fille de mon âge devrait s'amuser, profiter de l'instant présent comme les personnages de roman.
Au moins, cet incident avait pu me faire changer d'air, j'avais traversé quelque chose d'excitant pour une fois. Et même si la peur me rongeait de l'intérieur, j'avais l'impression de retrouver mes émotions enfouies depuis longtemps. Trop longtemps.
— Je t'autoriserai à sortir seulement quand tu atteindras la majorité, Liz. En attendant, tu dois te concentrer sur ton apprentissage, on doit te trouver un métier dans peu de temps.
— Mais M'man, c'est dans plusieurs années ! Et tu sais bien que je veux devenir professeur !
— Ce n'est pas toi qui décides. Tu dois nous obéir, nous sommes tes parents !
C'était le même discours toutes les semaines. Interdiction de sortir, d'aller à l'école et encore moins de me faire des amis. Agatha, George, vous êtes terriblement têtus.
Heureusement, j'obtiendrais la majorité dans un peu plus de trois mois. En revanche, je n'avais pas l'impression que ma mère allait tenir sa promesse, elle repoussait toujours ce moment et refusait d'aborder le sujet.
Mon père, lui, ne disait pas grand-chose et se contentait de regarder les infos pendant ce temps-là, comme si le reste du monde n'existait pas. En fait, il n'aimait pas se lier aux conflits et préférait ignorer la situation en passant ses journées devant la télévision. Il ne m'avait jamais défendue face à Maman alors que je supposais qu'il adhérait à ses dires.
Je ne pouvais compter sur personne pour me soutenir. En effet, je ne connaissais pas les autres membres de ma famille. Apparemment, j'avais déjà rencontré mes grands-parents quand j'étais enfant, mais mes parents s'étaient disputés avec eux quelque temps après mon accident et avaient donc coupé tout contact. C'était pourquoi, de mon point de vue, nous n'étions que trois dans la famille.
Une fois, j'avais tenté de négocier avec ma mère pour adopter un animal. Je lui avais demandé un chiot, mais elle avait refusé sous prétexte qu'il mettrait le bazar dans la maison. Quant au hamster, il ferait trop de bruit la nuit. En bref, il y avait toujours quelque chose qui n'allait pas. Moi, j'avais juste besoin de compagnie, me sentant souvent seule et n'ayant personne à qui me confier.
Mis à part ce vieux journal intime.
Le sommeil cognait à ma porte, mais je refusais de le laisser entrer, envahie par la peur. Alors je comptais le nombre d'étoiles que j'apercevais au-delà de la baie vitrée.
Beaucoup d'étoiles.
Imagine qu'il arrive en pleine nuit pour te tuer.
Je me demandais si les étoiles ne se sentaient pas trop seules dans l'univers. Elles étaient si distantes les unes des autres.
Reste éveillée, Eli.
Peut-être qu'un jour, un homme rendrait visite à l'une d'elles. Ainsi, l'étoile aurait une petite seconde de compagnie avant de le consumer.
Fais-le, si tu veux rentrer chez toi en vie.
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Hello Angels !
Votre journée s'est-elle bien passée ? La mienne était super puisque je vous ai concocté ce petit chapitre ! Avec beaucoup de café j'avoue.
Le personnage de Lindsay fait partie de ceux que j'aime le plus ! Elle est très décontractée et me fait beaucoup rire. (On marre se ici, vous avez vu ?)
— Lily, pourquoi m'avoir mise dans une situation pareille ?
Je suis désolée Eli, mais je le devais. C'est ton destin.
(Je l'avoue, c'est faux, c'est uniquement pour vous mes chers lecteurs haha)
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Bref, je vous dis à très bientôt pour la suite.
Gros bisous les loustiques !
ℒ𝒾𝓁𝓎 ♡
Instagram et Twitter : @lilygreybooks
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