Chapitre 20: Je suis un conquistador de la mort.
La pluie avait rendue la chaussée glissante mais Newt s'en fichait, il avait l'impression d'exploser, il voulait hurler, hurler si fort pour extérioriser jusqu'à s'en briser la voix, il était fou de rage contre son père. Pourquoi s'acharnait-il à toujours vouloir diriger sa vie, comme si Newt en était totalement incapable ? Incapable de faire les bons choix. Mais le blond avait envie de se défouler, de détruire toute forme de vie autour de lui, d'enfoncer son poing dans quelque chose de déformable. Son pied s'appuya plus fortement contre la pédale d'accélérateur. Il roulait déjà trop vite, beaucoup trop vite sur ce genre de route. Mais le blond s'en fichait, il avait la rage, sa colère était à son paroxysme, prête à déflagrer autour de lui, emportant toute sorte de chose sur son passage. Il avait l'impression d'être une bombe nucléaire, acharné, avide de chaos. Peut-être que Thomas déteignait sur lui. Le compteur de vitesse passa la barre des 120km/H et Newt craqua. Il se mit à hurler, sa voix rauque déchirait la nuit qui était tombée depuis quelques heures. Le vent froid lui claquait le visage violemment, n'ayant pas fermer le toit de son cabriolet, il s'en foutait, il n'était qu'un ouragan qui déchaîne sa rage sur le paysage, il n'était que cette tornade, dangereuse, toxique et destructrice, cet orage qui abat sa foudre sur le monde.
Puis il y a eu ce virage, celui qui tourne trop court, et Newt roulait trop vite, beaucoup trop vite, la vue embuée de larmes de rage. Sa voiture s'est déportée sur la droite, glissant dans le virage sur la chaussée humide. Deux gros yeux lumineux l'ont éblouis et Newt a appuyé comme un dingue sur le frein. Le chauffeur du camion, en face, pris de stupeur, a klaxonné, ce son grave particulier aux camions, les pneus ont crispé si fort sur la route, les deux véhicules ont tenté du mieux qu'ils pouvaient de ralentir leur allure. Les réflexes de Newt étaient échauffés, il a tiré un grand coup sur son volant vers la droite, le pied toujours appuyé fortement sur la pédale de frein, comme s'il n'y avait que ça. La voiture a pivoté sur le côté, in extremis. Une certaine frénésie de vivre s'est emparée de lui. La furie de sauver sa peau, coûte que coûte. Avec férocité, peut-être, il a laissé son instinct de survie prendre le contrôle de son corps, tentant vainement de sauver les meubles. L'ébranlement de son âme qui se bat pour s'en sortir. Dans une guerre perdue d'avance...
La colère n'est que destruction.
Puis il y a eu l'impact.
Le choc.
Violent.
Brutal.
Âpre.
Brut.
Cynique.
Sadique, aussi.
Accidentel, sans doute.
Barbare.
Meurtrier.
Blessant.
Choquant.
Cruel.
Méchant.
Explosif.
Un grand fracas de toile froissée. Comme un grognement sourd qui craque et qui gémit, un vacarme bruyant, traduisant le choc de deux engins de ferraille qui se rencontrent trop vite, inévitablement.
La voiture de Newt a emplafonné le camion en face d'elle sur le flan gauche, dû au quart de tour qu'avait tenté Newt dans son dernier coup de volant, entraînant écrasant la place du mort comme un vulgaire papier d'alu, la camion l'a littéralement écrasé, comme un moucheron, la réduisant à un engin cabossé, hors d'état, mort, détruit.
Le blond fut éjecté de la voiture, la jambe gauche à moitié déchirée dans l'impact. Son corps atterrit sur le goudron, violemment. Il y avait du verre brisé par terre, incrusté aussi dans sa peau, une odeur de brûlé, d'échauffement de pneus, le goût du sang dans la bouche, une sensation de froid qui parcourait son épiderme, il avait mal, il se laissait tomber sur le côté, le visage tourné vers le ciel, il gémit, sensible à chaque particule de douleur qui l'habitait. Un bourdonnement dans les oreilles, ou peut-être un sifflement, il ne savait plus. Son cœur subissait les tumultes de sa présomption, son orgueil l'avait entraîné à sa perte. Il ne ressentait que la brûlure de sa peau qui se déchire. De la souffrance à l'état pur, mêlée à de la peur, celle qu'avait provoqué ce choc, de voir sa vie s'envoler dans un vulgaire accident de la route...
(PDV Newt Spencer)
J'avais beau inspirer, l'air me manquait automatiquement. Je n'étais plus que douleur, chose inerte étendue sur le bord de la chaussée, les yeux écarquillés sur le vide. J'avais mal. Pourtant, je n'arrivais pas à bouger, je me concentrais sur ma respiration, m'efforçant de garder les yeux ouverts sur ce ciel bleu sombre, vide, avec seulement une première étoile qui brillait . J'avais l'impression que tout ce que mes yeux voyaient était plus vif qu'auparavant, comme si la vie me quittant, laissait une trace moins saturée du monde. Je n'allais sans doute pas survivre, j'en avais conscience. C'est drôle. Quand on arrive au seuil de la mort, on ne s'imagine pas que c'est ainsi. On est effrayé, au début, car on sait qu'il nous reste une tonne de choses à faire, comme faire sa demande pour rentrer à Oxford l'an prochain, s'inscrire aux examens, rapporter le gilet de Teresa qu'elle a oublié en amphi cet après-midi, arroser la plante verte dans la salle de bain, aller chercher le courrier, inviter Thomas à aller boire un verre après, lui faire l'amour aussi, changer la bâche de sa voiture car la toile pour l'hiver ce n'est pas terrible, appeler Minho pour lui raconter les dernières nouvelles. Toute cette futilité qui nous fait prendre conscience que notre vie, c'est de la merde quand on y pense vraiment. Je suis là, moi, étendu sur le goudron froid, humide de la journée pluvieuse qu'il a essuyé, hors de ma voiture, ma voiture d'ailleurs, ressemble à une boite de conserve écrasée. J'entends à peine la voix plaintive et affolée du chauffeur de camion au téléphone avec l'ambulance.
Je pense que je vais mourir, là, sur le goudron sale.Je pensais avoir des regrets, de ne pas vivre assez longtemps pour aller péter la gueule de ce connard là qui veut pourrir mon petit ami, de pouvoir envoyer foutre mon père une nouvelle fois, de ne pas pouvoir aller au Canada, le Canada, c'est le rêve pour moi, pourtant, j'en rêve depuis que je suis gamin. Et je me dis aussi que je voudrais bien une seconde chance. Je me demande comment est la mort. Accueillante peut-être ? Ou sinistre et froide comme dans les histoires ?
Le souffle me manque, je n'entends plus rien désormais. Le bourdonnement a cessé. Mes yeux se ferment peu à peu. Puis il y a le noir complet. L'irrésistible envie de se noyer dans un sommeil profond. À cet instant, j'ai imaginé le long son strident de l'électrocardiogramme qui indiquerait que mon cœur vient de lâcher prise. " Adieu chers amis, je m'en vais le cœur léger ". Mais pourtant non, je le sens vibrer encore dans ma poitrine, tout doucement. Ma jambe gauche me fait terriblement mal, elle surpasse toutes les autres douleurs, comme si une bête sauvage était en train de me la dévorer. Ca prouve que je suis encore vivant, non ? Mais cette douleur, je m'en passerais bien. Je ne souhaite que trouver la paix salvatrice et réconfortante qui me fera oublier le supplice que je vis. Suis-je un martyr ? Ou un pauvre mec en train de crever sur le goudron, la gueule arrachée.
C'est assez drôle à quel point le noir profond et puissant de la mort peut m'attirer.
Je voyage dans les méandres de l'obscurité. Je ne crois pas au paradis, ni même à l'enfer, je ne crois pas à ma réincarnation de l'âme en renard ou en rapace, je ne crois pas que les gens morts deviennent des étoiles dans le ciel, car les étoiles peuvent mourir aussi. Je ne crois pas en tout ça, je pense juste que la mort est la juste continuité de la vie, que les morts ne sont que le résultat d'une expérience ratée, un peu comme ceux qui ont inventés l'aspirine, ils ont fait plusieurs essais avant d'y arriver. Je ne pense pas que c'est Dieu ou quel-qu'autre divinité, puissance spirituelle ,etc qui fait cela. Il y a deux seules vérités : la vie et la mort. Et moi, petit être, voyage entre ces deux mondes, changeant d'état, de vivant à mort. Je ne sais pas si je vais mourir en réalité, je voudrais me convaincre que non, mais mes yeux ne voient plus, mes poumons me brûlent et soulèvent de moins en moins ma cage thoracique. Elle aussi me fait terriblement souffrir, comme si elle était compressée. Qu'est-ce que la vanité face à la mort ? L'amertume de ne pas assouvir ses désirs les plus fous ?
Quand il y a quelque chose qui recommence, je ressens une certaine impression de peur, propice à la crise de panique, plus de trace de colère qui m'habitait tout à l'heure, j'ai peur car je ne veux pas tout perdre, je ne veux pas perdre tout ce que j'ai construis des années durant, mon enfance, mes souvenirs, mes joies, mes rires, mes peines, mon amour, mes amis, même mes parents, je ne veux pas tout quitter. Pas maintenant, je suis trop jeune... Je ne veux pas de ce voyage dans un monde inconnu. Je suis comme tout le monde, j'ai peur de l'inconnu, de cet espace vierge, de sa présence qui s'étend devant lui, lorsque je ne parviens pas à distinguer l'horizon et ça m'effraie.
J'ai l'impression, flottant dans cette immensité noire, aveugle, noyé dans le néant du monde, que la vie se découvre sous de multiples facettes inexplorées, je suis un conquistador, un explorateur de la mort. Et mon cerveau cesse de penser...
***
Le téléphone de Thomas résonne une nouvelle fois dans la chambre du jeune homme. Celui-ci dormait, étendu dans son lit, la tête enfouie dans l'oreiller qui garde l'odeur de Newt, de la nuit dernière. Thomas grognait. Ce foutu téléphone ne voulait pas se taire. Il ouvrait d'abord une paupière, puis une autre. Il attrapa son portable qui sonnait sur la table de nuit et ferma les yeux à cause de la lumière. Il décrocha, portant le combiné à son oreille.
- Oui ? Dit-il d'une voix rauque, traduisant son réveil.
- Thomas... C'est... C'est Minho. La voix du jeune asiatique trahissait son inquiétude, sa peur même, ses larmes qui dévalaient ses joues. Une voix tremblante, une voix inquiète, une voix qui fait peur, une voix porteuse de mauvaise nouvelle. C'est... Newt... Thomas retenait son souffle, sentant son cœur s'arrêter dans sa poitrine. Il a eu un ... accident. Il... il est... Thomas se mordit la main pour s'empêcher de hurler, attendant que Minho annonce la sentence. Il est à l'hôpital... Les dents du brun se plantèrent dans sa main, il poussa une plainte proche d'un gémissement de douleur. Il... Ils vont l'opérer. Je... suis désolé...
Thomas raccrocha quelques instants plus tard, ayant entendu Minho fondre en larmes. Son portable vibra avec un SMS, indiquant les urgences où avaient été envoyé Newt. Le brun s'habilla en vitesse, attrapant ses clés de voiture, claquant la porte derrière lui sans se soucier de l'heure qu'il était et conduisait jusqu'à l'hôpital. Il ne pouvait pas s'empêcher de gémir, se balançant d'avant en arrière sur son siège. Il ne pouvait pas le perdre. Non, cette blessure qui cicatrisait peu à peu grâce à la présence du blond venait de se rouvrir, lui infligeant une douleur accrue, trop forte, trop blessante, trop douloureuse. Un râle s'échappait d'entre ses lèvres, tordu entre la peur, la souffrance et l'inquiétude. Il se gara sur le parvis de l'hôpital, sortant à la hâte, laissant en plan sa vieille voiture et courait jusqu'aux portes coulissantes des urgences, il les traversaient en courant et sa peine s'intensifia quand il détailla un bout de brancard disparaître avec plusieurs ambulanciers et des infirmiers en état d'alerte, dans les méandres de l'hôpital. Il voulait courir pour qu'on lui rende son amour. Mais Minho le rattrapa, l'empêchant de poursuivre son chemin, le tenant contre lui alors que le cri de désespoir de Thomas déchirait le hall de l'Hôpital. Minho ne le lâcha pas, il lutte contre la force de Thomas avant que ce dernier s'effondre dans ses bras, gémissant, tombant à genoux. L'asiatique se laissa tomber contre lui aussi, à genoux avant que les bras de Thomas l'enserrent contre lui et que Minho laisse ses larmes le submerger encore une fois.
- Il... est dans un état critique...
Thomas laissa échapper un râle de douleur avant de sentir son corps le lâcher.
-Ils... Ils... Ont dit qu'il avait peu de chance de s'en sortir...
Thomas ferma les yeux et une larme dévalait sa joue. Il ne pouvait pas survivre.
Pas à ça, pas sans Newt.
Je suis en train de pleurer toute seule devant mon ordi en réalisant que c'est moi qui a écrit ça. Je tiens à vous dire que je suis super stressée face à vos réactions, même ma meilleure amie est au courant de la tension qui me prend et la pression que m'a foutu ce chapitre. Je vous jure, j'ai vraiment eu du mal à l'écrire, parce que je voulais qu'il soit beau, parfait même. Je sais qu'il m'arrache le cœur, je ne sais pas pour vous mais... Désolée... Love, Ali.
NB: Le sens de circulation est inversé en Angleterre, si jamais vous n'arrivez pas à visualiser l'accident.
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