P̶a̶g̶e̶ ̶3̶
Des talons claquaient contre le plancher à chaque pas, résonnant contre les murs d'un couloir infini. Rapide et sec, ce son ne présageait rien de bon. Plus doucement, de petits piétinements luttaient pour ne pas se faire avaler par les échos, trébuchant parfois. Mais personne ne se souciait d'elle, et encore moins l'individu qui la traînait brusquement par le bras.
Éclairées par la faible lumière provenant de l'extérieur depuis une fenêtre, deux silhouettes firent brièvement leur apparition. La première s'agissait d'une femme plutôt grande à la chevelure coupée en un carré long, s'entremêlant à cause de l'allure pressée, et dont le visage fermé ne laissait rien traduire de ses émotions. La deuxième silhouette, quant à elle, semblait appartenir à une enfant possédant deux oreilles de félin plaquées contre son crâne ainsi qu'une fine queue traînant au sol, certainement le fruit d'un Alter de type mutation. De longs cheveux blonds décoiffés se balançaient tout le long du chemin, alors que la petite cherchait à se cramponner vainement au mur, ce qui ne fit qu'accroître la cadence.
La femme atteignit une porte, qui menait à un sous-sol, et la franchit sans prêter attention à l'enfant manquant de trébucher à chacune des marches. Toujours avec le même silence pesant, elle arriva dans une pièce close dédiée au bricolage, pourvue d'un strict minimum de meubles et dont l'unique source de lumière provenait d'une ampoule accrochée au plafond.
D'un mouvement brusque, l'ébène lâcha le bras de l'enfant qui se réceptionna contre le sol à quatre pattes, la queue entre les jambes.
« Même lorsque tu es dans un état pitoyable, tu continues à résister, lâcha l'adulte avec dégoût. Pathétique. »
Restant silencieuse, la petite fille fixa le sol, ramenant ses jambes vers son corps. Le silence et la soumission étaient la règle d'or si elle espérait s'en sortir indemne.
« Aujourd'hui, l'institutrice m'a interrogée concernant les cicatrices de ton dos, reprit-elle. Je vais devoir songer à te changer d'établissement avant que l'on m'accuse de maltraitance. »
L'interlocutrice, tout en parlant, longeait lentement les murs de la pièce en inspectant parfois la propreté du mobilier.
« Tout ceci ne serait pas arrivé si tu avais décidé de mettre du tien dès le début, Mayuri. »
À ses mots, la dite Mayuri serra l'extrémité de son haut et se mordit la lèvre inférieure, comme pour retenir une voix d'hurler son innocence.
« Cela ne me fait pas plaisir de devoir te faire subir ce genre d'exercice, j'ai autre chose à faire que de devoir t'apprendre à utiliser ton autre Alter. »
Une petite barre métallique glissa jusqu'à ses pieds, avec pour seule indication de son usage :
« Réessaye et fais plaisir à ta mère, pour une fois. »
Déglutissant difficilement, l'hybride saisit avec hésitation l'objet, puis le serra entre ses mains tout en fermant fortement les yeux sous l'effort. Sa mère l'observa attentivement depuis un coin de la pièce, le regard dur. Au fur et à mesure que les secondes défilèrent, la blonde augmentait sa poigne jusqu'à trembler sous le coup de l'effort.
Mais, comme les essais précédents, rien ne se manifesta.
La barre de métal glissa de ses mains et percuta le sol dans un cliquetis qui résonna dans les oreilles des deux personnes. À ce bruit, le visage de la femme aux cheveux corbeau se crispa. Après un bref instant de silence, elle s'avança d'un pas lent vers sa fille qui attrapa sa queue frémissante, traduisant son inquiétude.
« Mayuri, cela te plaît donc tant que ça de me décevoir, de décevoir ta mère ? questionna-t-elle avec un timbre grave, se tenant devant elle. Je ne te demande qu'une seule chose, et tu échoues à chaque fois... »
Mayuri, prise de panique, tâta nerveusement l'objet de de ses mains tremblantes, mais en vain. Elle implora intérieurement qu'un miracle se produit ou un tout autre événement, peu importe tant qu'elle pouvait éviter les représailles. Soudainement, la petite barre se retrouva projetée au fond de la pièce, et son expéditeur n'était qu'autre que sa mère.
« Alors, pourquoi n'arrives-tu pas à manifester ton Alter ? Tu sais utiliser celui de ton père, alors il n'y a aucune excuse pour que tu n'arrives pas avec le mien. »
La fillette, tétanisée, leva la tête vers sa génitrice. Son regard humide chercha vainement une part de compassion dans celui de la femme, alors que ses oreilles se plaquèrent contre son crâne en même temps que sa queue s'ébouriffa.
« J... Je ne-, laissa-t-elle échapper entre deux hoquettements.
- Tais-toi ! »
Un bruit sourd suivit d'un choc retentit à travers toute la pièce. La main devenue rouge dû à une circulation du sang rapide, l'adulte regarda de haut l'enfant, à terre tant le choc était violent. La seconde serra la main avec laquelle elle l'avait frappé puis s'approcha d'un des seuls meubles.
« Tais-toi, tais-toi... Je ne supporte plus ta voix, combien de fois devrais-je te le répéter ? souffla-t-elle de manière saccadée. À vrai dire, je ne te supporte plus du tout. Mais tu le savais déjà, n'est-ce pas ? Tu fais tout pour me rendre folle, et ça a l'air de te plaire. »
Comme attendu, Mayuri ne répondit pas. Cette dernière cachait son visage derrière ses cheveux, se tenant la joue prenant progressivement une teinte rougeâtre. Immobile, seule sa cage thoracique se soulevait rapidement, retenant ses hoquettements. Elle savait ce qui allait se passer, et rien ne pouvait empêcher cet événement de se produire.
« Mais tu sais quoi ? reprit la femme. Moi aussi, ça me fait plaisir de te remettre à ta place, ta place d'infâme créature. »
Celle-ci saisit une petite boîte en carton dont elle en sortit une poignée de boulons. Concentrés dans le creux de sa main, ils se mirent à fusionner entre eux, formant une pâte modulable. D'un geste précis, l'ébène créa à partir du métal de grossières lames semblables à celles d'un cutter.
Son regard glacial se détourna de ses créations pour se planter sur le corps de la fillette qui, la tête relevée vers les lames, la supplia désespérément du regard, à la recherche d'une once d'humanité en elle. Seulement, le sentiment de dégoût de la femme, aveuglée par sa propre folie, ne fit qu'accroître.
Ses talons claquant le sol à chacun de ses pas, elle s'avança lentement mais dangereusement de la petite, qui se protégea un tant soit peu en croisant ses bras devant elle. Mais rien ne pouvait arrêter une mère furieuse, et encore moins lorsqu'il s'agit de punir son enfant.
« L'heure de la punition a sonné, Mayuri. »
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