Palier 8
Les paroles de la soirée qui s'était déroulée quelques jours plus tôt me restèrent en mémoire les jours durant. Nous étions le 10 Décembre, soit une semaine complète s'était écoulée où je trouvais que le temps ne passait que pour jouer avec mes nerfs, la nuit comprise. Je dormais moins, je mangeais moins. Ça ne me ressemblait pas. J'avais eus un ridicule cours d'une heure avec Jacob avant-hier, faisant mine de rien mais tout m'étais resté en mémoire. Il avait été distant, gêné et agissait bizarrement. D'une part je m'en voulais car je savais pertinemment que cette attitude provenait de ce fameux jours, celui du cinéma. Intérieurement je soupirais et j'avais écourté la séance car elle ne nous menait à rien. Aussi surprenant que cela puisse paraître, il en avait été plus nerveux et avait bredouillé quelques mots sans queue ni tête et j'étais parti, lui promettant que je lui donnerai son billet d'avion dans les jours à venir en main propre. Sur le chemin, j'avais croisé son petit-ami qui m'avait littéralement assassiné du regard quand il eut compris que je rentrais de chez son canadien.
Je détestais cette situation. Elle me mettait au plus mal. J'avais perdu un ami à cause de cette ridicule situation. Oui, je la trouvais inutile et injustifié. Nous avions été très ami avant. Je connaissais Hyunjae depuis que j'étais arrivé ici, il avait été d'un soutien incroyable. Mais là, il semblait plus vouloir me voir disparaître de la vie de son amant que de ne m'adresser la parole comme nous le faisions en rentrant des cours, à raconter des potins sur tout et n'importe quoi.
Depuis une semaine, Changmin était resté à la maison, dormant dans la chambre de mon colocataire, plus spacieuse que la mienne. Il était patient mais je savais qu'à un moment il ne supportais plus la vue de son meilleur ami partir à la dérive pour une simple histoire de cœur. Encore maintenant il me regardait attentivement, assis tout deux à la table de la cuisine, une assiette remplie suffisamment de pâtes pour que ce ne soit ni trop ni pas assez.
"- Mange, dit-il doucement mais strictement."
Je n'avais pas faim, mon ventre semblait plus vouloir régurgiter ce vide qu'il était juste à la vue de la nourriture que se présentait devant moi et qui n'avait rien demandé pour mériter un tel traitement de rejet. Mais c'était un fait, je n'avais pris qu'une maigre bouchée avant de déposer ma main sur la nappe et de regarder sans aucun appétit le reste qui me semblait insurmontablement trop.
J'entendis le rouquin soupirer bruyamment.
"- Kevin, il faut que tu manges.
- Je n'ai pas faim..., répondis-je dans un chuchotement.
- Faim ou pas tu vas me finir cette assiette. De un parce que je ne veux pas plus gaspiller, deux parce que si tu ne te nourris pas tu ne pourras pas prendre l'avion et tu vas rester à l'hôpital sous perfusion pour te garder en vie. Tu penses que ta famille, que tes amis ou que Jacob veulent te voir comme ça ?
- Il s'en fout.
- Kevin !"
Il avait limite crié, m'obligeant à lever la tête vers lui, vers ce regard inquiet que je n'avais cessé de voir cette semaine. Je ne voulais pas, je n'aimais pas le voir dans cet état à cause de moi. Il n'y pouvait rien. Ce qui était fait est fait.
Il soupira désespérément avant de venir attraper mon menton de sa paume et mes joues de son pouce et de son index.
"- Tu as tellement maigri. J'ai l'impression de toucher un cadavre tellement tu es pâle et maigre, il serra légèrement sa prise sur mon visage, tes joues de bonne santé me manquent."
Changmin était le seul à qui j'autorisais de me pincer les joues.
"- J'ai l'impression de te perdre, et je pense que Jacob pense la même chose. Tu imagines ce qu'il pense à l'heure qu'il est ? S'il apprenait que tu ne t'alimente plus, que tu ne dors plus ?"
Incontrôlable, une larme dévalait ma joue avec la même lenteur que le temps qui était passé ses derniers jours. Je ne voulais pas qu'il l'apprenne, qu'il pense que je suis faible, que je me laisse aller au premier obstacle. Et pourtant, c'est ce que je faisais. Je me sentais démuni, qu'il n'y avait plus d'espoir et que je souffrirai encore et encore juste à la pensée d'eux deux ensemble. Je l'imagine de ce jour, dans ce froid, son bonnet bleu et son long-pedding qui couvrait entièrement son corps et qui le protégeait des aggressions extérieures, à souffler comme un enfant pour créer une petite buée et s'amuser à la regarder disparaître doucement. Mon regard s'abaissant, une nouvelle larme coula.
"- Kevin, s'il te plaît..."
Alors je regardais de nouveau mon ami, triste, désespéré et désemparé de cette situation. Je ne voulais pas le décevoir, le voir encore plus abattu que ses derniers jours alors je replantais ma fourchette dans l'assiette et l'enfourait doucement dans ma bouche, puis une deuxième. Au bout de dix minutes, à la cinquième bouchée, je m'arrêtai et regardait mon ami qui me sourit doucement. Il était content que j'ai fait cet effort, aujourd'hui.
******
Seize heures environ, dans sa rue, son billet dans la poche, j'étais figé devant sa maison. Une bâtisse typiquement simple, en brique rouge, une petite boîte aux lettres en dessous de la sonnette qui ne fonctionnait toujours pas, la porte verte forêt qui donnait du cachet à l'endroit, ce petit escalier en pierre et les quelques fenêtres de la même teintes qui abordaient des rideaux intérieurs. Je n'osais pas franchir la première marche, me retrouver de nouveau devant lui, voir sa mine paniquée et qu'il irradie le stresse. Mais je lui avais promis. Alors je pris mon courage à deux mains montais l'escalier puis toquait fortement sur le bois peint. Puis j'attendis.
Elle s'ouvrit sur le blondinet et mon cœur loupa une battement. Habillé simplement d'un pull gris clair, un jogging noir qui avait l'air des plus confortables et ses cheveux étaient à peine coiffé, il me fit l'effet d'un bulldozer, une magnifique bulldozer. Lorsqu'il posa complètement ses yeux sur moi, une expression de tristesse y passa. Il me demandait comment ça allait mais je ne lui répondis pas, n'y trouvant pas la force. Je me contentais seulement de lui tendre le billet imprimé ce matin. Il le prit, le regardait à peine avant d'essayer de parler mais je ne voulais pas, je ne me sentais pas de le voir le faire. J'étais trop faible face à ça.
"- Le placement est libre."
Il n'avait pas cet air stressé qu'il abordait ses derniers jours mais une d'incompréhension. Ses yeux cherchaient les miens mais je les déviait quand il mimait mon nom sur sa petite bouche qui tremblait et me détournais pour recommencer à fuir. Déterminer à m'éloigner le plus de lui, maintenant que le billet lui était remis. Je ne voulais plus souffrir comme ses dernières putain de longues heures, jours.
Je me sentis tiré en arrière et, avant que je ne comprenne vraiment ce qu'il se passait, je me retrouvais au chaud, mon dos contre la porte, mon frêle corps coincé entre le canadien et l'imposante objet derrière moi. La distance de sécurité qu'il mettait ses derniers jours n'était pas respecté, et j'en fut effectivement chamboulé.
"- Pourquoi tu fais..."
Il posa son index sur sa bouche, m'intimant de me taire sans protesté. J'exécutais. Puis il enchaînait les questions : Pourquoi j'étais dans un tel état ? Pourquoi je le fuyais, encore ? Qu'est-ce qu'il se passait ?
Je ris nerveusement.
"- C'est moi le mec bizarre dans l'histoire ?, il parut choqué que je commence à m'énerver. Tu rigoles des genoux là ?"
Je m'avançai et il reculait comme si j'étais terrifiant.
"- Qu'est-ce qu'il se passe ? Il se passe que tu me hantes Jacob, tu me maintien éveillé la nuit, tu occupes mes pensées à chaque instant. J'ai bien tenté de me persuader que tu n'étais qu'un ami, il tressaillit alors que nos corps agissaient comme des pôles, l'un avançait mais l'autre reculait toujours, puis tu m'as embrassé. De ta propre initiative. Puis trois jours plus tard j'apprends que tu te tapes Hyunjae. Tu t'es joué de moi et tu t'en carre complètement ! Tu n'as pas l'impression de te foutre de ma gueule par hasard ?"
Son fessier buta contre un obstacle, un petit meuble de son entrée où était seulement posé des clés et quelques papiers parfaitement ordonnés.
"- Pourquoi je te fuis ? Parce que ça me rend malade de te voir avec lui, de t'imaginer dans ses bras, parce qu'a chaque fois que je te vois tu parais plus qu'anxieux et que je n'ai pas envie de me sentir de me sentir un fardeau plus que je ne le suis déjà."
Il fut plus que surpris de cette dernière phrase contesta celle-ci en utilisant la simple phrase "tu n'es pas un fardeau Kevin !". Nos visages n'étaient qu'à quelques centimètres à peine l'un de l'autre, je pouvais sentir son souffle sur mes lèvres, voir ses yeux faire d'incalculables aller-retour entre mes pupilles et mes croissants de chair. Il n'imaginait pas à quel point tout mon être me suppliait, me démangeait de poser mes lèvres les siennes, les goûter de nouveau, que mon cœur me faisait incroyablement souffrir, que ma tête fourmillait, que des millions de papillons faisaient la fête dans mon bas-ventre et que mes mains tremblaient sûrement. Pour essayer de les calmer, je les posais sur le bois vernis de son meuble, encerclant ses hanches alors qu'il était assis maladroitement. J'essayais d'attraper ses yeux avant de demander de manière que je voulais convaincante :
"- Pourquoi tu fais ça ? Pourquoi tu as fais ça ? Pourquoi, Jacob ?"
J'avais, sans le vouloir, adoucis ma voix à son nom. J'essayais de sonder une once de réponse dans son regard mais je ne réussissais pas vraiment à comprendre ce qu'il reflétait. Nous restions comme ceci pendant longtemps, mais pas assez à mon goût car il détourna la regard et je sus que c'était cause perdue. Alors je me reculais en soupirant avant de le regarder et de dire :
"- Soyez heureux."
Et je partis finalement de cet endroit, me promettant de ne pas y revenir, claquant la porte derrière moi. Comme si je tournais la page.
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