Palier 6
Le 30 novembre, toujours en vacances, je commençais à tousser un peu, n'ayant pas prit garde les jours précédents de porter mon écharpe. Je n'avais eus aucun cours avec Jacob Bae, aucun de nous deux ne s'était décidé à envoyer un message. Moi parce que je ne savais que lui dire et que je ne voulais pas créer de désordre dans sa relation avec le brunet, et lui sûrement pour ne pas se sentir insistant et oppressant. J'étais donc là, à regarder par la fenêtre les gens dans la rue, tandis que ma tasse me brûlait presque les mains. J'avais sortit un vieux pull noir qui ne payait pas de mine comme cela mais qui était définitivement chaud, celui brodé avec une petite part de pizza sur me pectoral gauche, sur le cœur.
Lorsque je l'avais redécouvert, je m'étais attardé sur le dessin minutieusement cousu par ma maman, qui voulait que ce triste vêtement ait un peu de vie. Si elle savait. À peine avais-je observé ce motif que les souvenirs du premier jour me revenaient. Ce jour de rentrée où j'étais perdu dans mes pensées et que j'avais dessiné le premier truc qui me venait, manger. Un pizza. Une aux peperoni et fromages coulant. Et il s'était assis à côté de moi, avec son angélique visage, me regardant tout sourire alors que mon attention s'était porté sur lui, lui demandant s'il aimait cette spécialité italienne et qu'il avait acquiescé. Je l'avais trouvé si mignon et agréable à regarder.
Je resserrais ma prise autour de l'objet chaud à cette simple pensée, ce moment où je m'étais senti vivre et pas en trop dans sa vie. J'avais l'impression de constamment broyer du noir ses derniers temps et j'aurais voulu être avec lui, maintenant, soit à apprendre soit pour sortir et s'aérer.
Mon téléphone vibra une forte fois. Un message. Puis une deuxième, à peine deux secondes plus tard. Avec flemme, je me tournai vers l'objet tranquillement posé sur la table, par dessus quelques feuilles et journaux de feuilletons télévisés qui retranscrivaient tous les programmes pour les jours à venir. Lentement, je m'avançai vers le support, y déposait ma tasse et attrapais distraitement mon téléphone avant de le déverrouiller sans même regarder de qui provenait les textos puis cliquais sur la notification comme par réflexe :
Jacob
17:24. Kevin, j'ai vu une bande annonce d'un film qui avait l'air sympa au cinéma, et je me demandais... enfin si tu serais d'accord pour venir avec moi ?
J'avais sûrement piqué un fard puisque je sentis mes joues chauffer.
Jacob
17:25. À 19h ça te va ?
Je me surpris soudainement à sourire malgré moi, et je n'étais pas le seul à l'avoir remarquer :
"- Pourquoi tu souris comme ça ? Tu as une bonne note inespérée ?
- Tu es bête, pouffais-je en me tournant vers l'américain, on me propose de sortir au ciné...
- Oh trop bien ! Tu me préviens avant de sortir ! Je me sens toucher, se moqua-t-il en s'asseyant sur le canapé, une main sur le cœur avant de croquer généreusement dans son sandwich."
Je lui tirais la langue. Ce n'est pas que je le faisait exprès mais on aurait pu dire que mon inconscient me poussait à le tenir ignorant de mes activités extérieures. Aller savoir pourquoi. Je portais de nouveau l'attention sur mon cellulaire avant de ne réfléchir brièvement à un message explicite mais assez neutre.
Moi.
Ça serait avec plaisir , ça fait longtemps que je n'ai pas vu de film sur grand écran.
Puis je reposais l'objet sur la table basse avant de m'assoir sur celle-ci et de reprendre mon chocolat chaud entre les doigts, d'en boire une gorgée et de regarder mon colocataire lorsqu'il me demanda :
"- C'est qui, ce fameux rendez-vous ?
- Ce n'est pas un rendez-vous, tiquais-je après quelques toussotements, et c'est Bae Jacob.
- Tu l'appelles par son nom de famille maintenant ? On dirait une fille amoureuse qui parle de son crush qui l'invite de façon inattendue à sortir et qui essaye de cacher sa joie.
- Toujours plus, râlais-je en levant les yeux et de re boire un coup."
Eric avait quelques fois l'habitude d'exagérer tout ce qu'il se passait, et quand il le faisait, il était assez bon orateur c'est vrai.
"- Tu me diras ce qu'il se passera, sous-entendît il.
- On va juste se mater un film, il ne va rien se passer d'extraordinaire.
- Une salle noir, seulement tout les deux, Kevin, je t'ai connu plus perspicace que ça.
- On a déjà parler de ça, Eric. Ne remet pas un sujet clos sur le tapis.
- Quand est-ce que tu vas arrêter de te voiler la face et enfin t'avouer que tu l'aim...
- Eric ! Ce n'est pas le cas !, m'énervais-je en le regardant avec insistance pour qu'il cesse."
Il ne cilla pas et soutenait mon regard pendant un long moment avant de lever les bras au ciel, de lever ses fesses et de partir du salon en disant :
"- Saches que je serais là pour te ramasser à la petite cuillère si ça se passe mal."
Je soupirais discrètement, contemplant mon breuvage comme pour y trouver des réponses à mes pensées. Je me refusais de me dire que je l'aimais, car ce n'était pas le cas. Jacob était juste un ami, rien de plus.
Mais alors pourquoi l'autre jour j'avais ressenti toutes ses choses. Ce calme en sa présence, comme s'il m'apaisait, mon souffle qui s'était coupé rien qu'en le voyant, et mon cœur qui avait mené sa propre vie de son côté. Je me pinçais les lèvres et fermaient les yeux. Non, ce n'était pas le cas, je n'étais pas amoureux.
•••••••
J'arrivais les mains dans les poches un peu avant l'heure donner par mon ami. Et je ne fus pas si surpris de le trouver juste devant le bâtiment, les mimines dans sa veste, à tenter de faire de beaux nuages de vapeurs avec sa petite bouche. Inconsciemment j'avais ralentis le rythme, observant cet être dans son gros long-pedding noir cordeau, un bonnet bleu clair posé délicatement sur ses boucles blondes rebelles qui s'échappaient de ce piège de laine, son nez rougis par le froid et ses joues rosies par le vent qui venait doucement caresser son visage sans imperfections. Son corps faisait des mini sautillons sur place, comme pour se réchauffer quelque peu. Et, comme si il se sentait observé, il posa son regard innocent sur moi et j'eus cru que le temps s'était arrêté momentanément. Que nos prunelles s'étaient perdues de vue trop longtemps, et que mon monde ne se tournait que vers lui, a cet instant. Je n'arrivais pas à détourner le regard et je n'en ressentais pas la moindre envie. Au bout de quelques instants, il me souriait. Ce fameux sourire qui voulait dire "je suis content de te voir" et je le lui rendis timidement.
Nous entrâmes dans la hall, prit nos billets, quelques cochonneries pour grignoter puis nous nous dirigions vers la salle. La grande pièce rouge seulement meublée de plusieurs dizaines de sièges et d'un grand écran blanc, n'était pas bien rempli. C'est Jacob qui avait décidé des places que nous allions prendre, presque au milieu de la rangée centrale. Après avoir déposé nos effets personnels sur les sièges à côté, il restait encore quelques minutes avant que le film ne commence. Je toussais discrètement, avant de me tourner vers mon ami qui avait les yeux rivés sur son téléphone. Super, j'adore. Je tentais quand même :
"-Jacob ?"
Il tourna sa tête vers moi, tout attentif à mes prochaines paroles mais son regard m'avait fait oublier ce que je voulais lui dire, et le seul truc qui sortit fût :
"- Comment vas-tu ses jours-ci ?"
Je me serais giflé. Mais quelle question ridicule !
Il sourit malgré tout avant de m'expliquer que le froid s'était pas vraiment son truc et qu'il passait ses journées devant le poêle à pétrole facile d'utilisation. Je baissais la tête en rigolant doucement, même ça c'était mignon. Et il posa délicatement ses doigts sur mon poignet pour que je porte mon attention sur lui, me demandant comment j'allais.
"- J'ai sûrement chopé une petite toux, mais je suis un super héros, je vais survivre !"
Je me redressais avant de bomber le torse en faisant le fier, ce qui eut pour effet de le faire silencieusement éclater de rire en se penchant en avant, c'est à dire de mon côté. Et j'étais pas bien, en effet. Puis il relevait la tête après quelques secondes avant de fixer mon pull, sa bouche formant un "o" et que je ne baisse le regard. La part de pizza. Je me mordis la lèvre inférieure avant de lui demander s'il avait faim. Pour toute réponse, il enfourna une poignée de pop-corne sucrée dans sa bouche. Un enfant je vous jure.
Soudainement, la salle s'éteignait et nous nous tournions vers l'écran géant devant nous qui diffusait des images en noir et blanc. Oui, nous allions regarder The Innoncent de Jack Clayton qui promettait d'être angoissant, disait l'affiche. Confortablement installé dans mon siège, je tentais de me concentrer sur le film qui était diffusé.
En pleine action de suspense, nous étions tous suspendus à ce qu'il allait se passer lorsque l'héroïne se cachait derrière le rideau alors qu'elle jouait à cache cache avec les enfants. Elle se retournait et découvrît un homme à l'air dur derrière la fenêtre, qui l'observait. Et Jacob prit peur et vînt se réfugier contre moi, se cachant le visage avec mon pull et je souris doucement. Il m'avait fait peur à sursauter comme ça ! Quand la scène "paniquante" fût terminée, je lui murmurais que c'était finit et qu'il pouvait de nouveau regarder l'écran. Il n'était pas convaincu car il relevait les yeux vers moi, des pupilles interrogatives tandis que je passais une main rassurante dans ses cheveux. Et nos yeux s'accrochèrent spontanément. Je me perdis dans la merveilleuse galaxie qu'était ses prunelles verrons, ne prêtant plus attention aux scènes qui ne s'étaient pas arrêté pour nous. Je ne m'étais pas tout de suite rendue compte mais il s'était rapproché de mon visage et ses yeux s'étaient posé sur mes deux croissants de chair. Wow. Mon cœur s'accélérait, mon souffle se fit court et je crois bien que j'ai piqué un fard. Il était trop proche. Beaucoup trop proche pour du raisonnable.
"- Jacob..., soufflais-je."
Et tout s'arrêta. Le son, le temps, mon souffle et mon palpitant. Il avait posé ses lèvres sur les miennes si délicatement qu'on aurait dit une brise. Pas un papillon puisque apparemment ils avaient pris possession de mon bas-ventre. Je ne bougeais pas, trop choqué par ce qu'il se passait, les yeux ouverts, je ne cessait de regarder le blondinet tandis qu'il s'écartait déjà de moi. J'eus froid tout d'un coup, et je n'arrivais pas à calmer mon cœur qui semblait vouloir transpercer ma poitrine et se frayer un chemin jusqu'à lui. Contrôler par je ne sais quoi, ma main se plaçait toute seule sous son menton pour le relever et le rapproché avant que mon nez ne vienne caresser doucement le sien, mes lèvres souffler délicatement sur ses lèvres, et que je ne les presse enfin pour regoûter à ce qui venait de m'être donné, que mes yeux ne se ferment automatiquement, comme pour ressentir plus intensément ces chamboulantes émotions. Et je retrouvai plus intensément ses sensations d'électricité qui passait dans mes doigts, dans mes veines, cette douce chaleureuse plus bas dans mon ventre.
Alors c'était vrai ? Je l'aimais ? C'était ça l'amour ?
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