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Chapitre 32 - Danse ou pas danse ?

— Je crois que nous avons de la visite...

Alisée cligna des yeux et se tourna dans la direction vers laquelle regardait Adrian. Cachée derrière son masque nacré assorti aux perles de sa tiare, Beatricia s'avançait vers eux d'une démarche assurée, somptueuse dans sa robe rose pâle. Un petit sourire fendait ses lèvres teintées de fuchsia et il s'élargit quand elle s'arrêta à leur niveau.

— Bonsoir, Votre Majesté, fit-elle sans faire cas de la réserviste. J'espère que vous passez une agréable soirée, Branwell et moi avons tout fait pour la rendre mémorable, comme toujours.

Ainsi, elle et son frère s'étaient chargés de l'organisation ? Si les pensées de la belle vampire n'avaient pas été accaparées par autre chose, elle n'aurait sûrement pu retenir une grimace et une folle envie de s'en aller. Néanmoins, pendant quelques secondes, elle s'était encore imaginé que Sa Majesté l'interpellait afin de lui proposer de danser avec lui. Quand réussirait-elle à se sortir cette idée saugrenue de la tête ?

— Soyez rassurée, la tenue de ma fille est jusque-là la seule ombre au tableau. Mais que voulez-vous, ce n'est pas à son âge que je vais lui dicter sa conduite... Si tant est qu'elle m'ait déjà écouté un jour.

La cheffe de clan partit d'un petit rire absolument insupportable par-dessus la musique dansante.

— Son Altesse sait toujours s'y prendre pour faire forte impression, commenta-t-elle.

— En effet, comme lors des derniers Jeux de Mendoza où elle vous a battue en duel et transpercé le coeur. Un moment inoubliable, d'après ce que j'ai entendu...

Adrian but innocemment une gorgée de sa flasque, tandis que Beatricia restait pantoise face à sa remarque. Alisée se força à ne pas trop se réjouir lorsque son sourire si confiant s'estompa, sans toutefois se faner.

— Inoubliable, c'est le moins que l'on puisse dire, marmonna la Blackfire avant de se reprendre. En tout cas, je ne sais pas vous, mais cette musique me donne une folle envie de danser... N'est-ce pas un air composé par ces fameux... Dorémi Horizons ?

S'il ne s'agissait pas d'une perche pure et dure afin de suggérer au roi de la faire valser, alors la réserviste voulait bien se laisser brûler au soleil. Elle épia la réaction du monarque, qui désigna quelqu'un parmi la foule.

— Regardez, votre cher frère se trouve là-bas. Je suis certain qu'il se fera une joie de remplir votre carnet de bal dès qu'il en aura fini avec sa charmante partenaire...

Effectivement, le chef des McLawrence dansait une vingtaine de mètres plus loin, en compagnie d'une jeune fille brune vêtue d'une belle robe rouge foncé. Cette vision fit naître une moue de dégoût sur les lèvres trop maquillées de Beatricia.

— Oh, je ne l'avais pas vu, prétendit-elle.

Alisée ignorait exactement pourquoi, mais elle sut à l'instant qu'elle mentait.

— J'irai le voir tout à l'heure, reprit-elle en se détournant aussitôt pour sourire de nouveau à Sa Majesté. En attendant, je vous souhaite une agréable soirée.

Elle avait certainement dû comprendre que ses envies d'une valse royale n'aboutiraient pas. Cela la poussa à s'éloigner, après s'être fendue d'une impeccable révérence mettant en valeur son décolleté... Le spectacle ne parut guère intéresser Adrian, qui ne s'accorda même pas le plaisir d'y baisser les yeux.

— Vous ne m'aviez pas dit que votre masque avait le pouvoir de vous rendre invisible, déclara-t-il dès que la cheffe fut partie.

La belle vampire réprima un gloussement.

— Je crois qu'elle s'est dit que m'ignorer lui ferait peut-être augmenter ses chances de vous décrocher une danse...

Elle espéra que ces paroles ne lui donneraient pas trop d'idées, or sa réponse la conforta de manière étonnante :

— Elle sait pourtant que c'est peine perdue. Cela fait vingt ans que je n'ai pas dansé avec qui que ce soit.

Alisée se tourna promptement vers lui et son verre manqua de lui échapper des mains.

— Vingt ans ? répéta-t-elle, abasourdie.

Avait-elle mal entendu ?

— Pourquoi avez-vous l'air si surprise ? s'étonna-t-il à son tour. Rassurez-vous, cela ne fait pas vingt ans que je n'ai pas couch...

— Vous avez bien dansé avec Beatricia lors de son anniversaire, non ? l'interrompit-elle avant qu'il ne bascule dans des détails qui ne l'intéressaient pas.

Impossible d'oublier sa rencontre avec la cheffe de clan, au cours de laquelle elle s'était vantée que le roi lui accorderait sa première danse lors de la soirée donnée en son honneur. Certes, la réserviste n'était pas présente au début du bal, mais...

— C'est elle qui vous a dit ça ? s'enquit-il.

Elle hocha la tête et il s'esclaffa.

— Vous savez, à entendre Beatricia, je l'ai demandée en mariage sous la pluie, me suis secrètement marié avec elle sur la Terre des Loups, ai passé la plus brûlante des nuits de noces dans l'un de mes châteaux secrets... Franchement, elle nous invente tellement de vies que c'est comme si un double de moi les vivait vraiment !

— Et... Cela ne vous embête pas qu'elle raconte toutes ces sottises ? l'interrogea-t-elle, circonspecte.

Il haussa les épaules en rebouchant sa flasque.

— Tant qu'elle affirme ne pas avoir connu meilleur amant que moi, cela me convient tout à fait...

Alisée leva les yeux au ciel, ce qui le fit ricaner. Sa confiance en lui la dépassait.

— En fait, reprit-il, la dernière personne avec laquelle j'ai dansé est la femme de l'actuel Grand Alpha. C'était lors de sa première et ultime visite ici. À côté, le petit numéro d'Isabella et Daniel passerait pour un gentil spectacle d'enfants...

Elle fronça les sourcils. Il s'agissait déjà au moins de la seconde fois qu'il lui parlait de la louve en question. La vampire avait déjà eu l'occasion de l'apercevoir, lors d'un bal donné sur la Terre des Loups. Sa beauté surpassait certes celle de toutes les femmes présentes ce soir-là, mais comme son nom l'indiquait, elle était l'épouse du dirigeant de tous les loups... Autrement dit, pas la meilleure personne à convoiter afin de pérenniser la paix inter-espèces.

— Vous... Vous l'avez connue avant qu'elle ne soit mariée ? eut-elle la naïveté de supposer.

Le sourire malicieux du roi la fit bien vite descendre de son nuage.

— Cela aurait été beaucoup moins drôle, la taquina-t-il avec un clin d'oeil. Je l'ai simplement aidée à rendre son mari un peu jaloux... et le moins que l'on puisse dire, c'est que cela a fonctionné !

Il lui expliqua ensuite que leur danse avait tant marqué les esprits des courtisans qu'il préférait les laisser avec ce souvenir inoubliable en mémoire. Alisée se permit de demeurer perplexe. Elle resta cependant avare de commentaires. 

— Je crois que nous devrions malgré tout avoir une petite pensée pour Beatricia, fit Adrian avec un nouveau vague signe vers la piste de danse. Branwell semble avoir décidé de mettre ses nerfs à rude épreuve...

Le chef de clan dansait toujours avec la demoiselle brune à la robe rouge, tous deux s'esclaffant comme des enfants qui se racontaient des bêtises. La réserviste réalisa qu'il s'agissait de la même jeune fille qui lui tenait la conversation avant l'ouverture du bal.

— Valentine Bel-Iris, la pire ennemie de notre Beatricia chérie, si l'on omet ma fille, indiqua le roi. Elle ne vient à la Cour que lors de cette soirée et celle de l'anniversaire de Branwell. C'est une proche de Madelaine, la cheffe des Bel-Iris que vous avez rencontrée lors du conseil auquel je vous avais invitée... J'imagine que vous vous en souvenez.

Non, voyez-vous j'ai complètement oublié le moment où j'ai appris que vous condamniez vous-même vos propres sujets, manqua-t-elle de répliquer. Elle porta ses lèvres à son verre pour les empêcher d'émettre une remarque de ce genre.

— Leur conversation vole vraiment très haut, elle est en train de lui demander s'il a enfin cédé à mes avances...

Alisée toussa bruyamment, le sang qu'elle buvait ayant tourné de travers. Elle déploya son audition surnaturelle à son maximum, mais la musique et les rires des autres invités lui dissimulèrent tout de même les paroles du chef de clan et de sa cavalière. Par "chance", Sa Majesté parut se faire un devoir de lui colporter la conversation :

— Et là, il lui certifie qu'à mon plus grand dam, jamais il ne consentira à descendre aussi bas ! Si vous voulez mon avis, je pense qu'il devrait revoir la formulation de ses propos, cela lui éviterait de se parjurer de la sorte...

La belle vampire dut retourner plusieurs fois sa phrase dans son esprit afin d'en saisir le sens. Elle remercia le ciel que son verre soit désormais vide.

— Vous... Vous voulez dire que...

Elle n'osa poursuivre et Adrian se tourna lentement vers elle. L'éclat qui brillait au fond de ses yeux bleus surpassait celui de sa couronne et des dorures de son masque.

— Allez-y, mademoiselle Alisée, l'encouragea-t-il malicieusement. Posez-moi la question qui vous démange...

Alors là, plutôt se laisser planter un pieu dans le coeur que de s'y abaisser. Néanmoins, un éclair survint des tréfonds de sa mémoire, lui remémorant sa toute première conversation insensée avec le roi, lors de l'anniversaire de Beatricia. Personnellement, je l'ai toujours trouvé plus attirant que sa soeur, mais que voulez-vous, lui avait-il dit à propos du McLawrence. On ne peut pas tout le temps avoir ce que l'on veut. Se pouvait-il malgré tout qu'ils aient déjà...

— Je ne vois pas du tout ce que vous voulez dire, affirma-t-elle pourtant en posant son verre sur le rebord d'une petite cavité élégamment creusée dans le mur à côté d'eux.

Elle croisa les bras et le monarque gloussa pour la énième fois depuis le début du bal.

— Très bien, feignit-il d'abdiquer. Toutefois, ma grande bonté d'âme m'oblige à mettre un terme à vos tourments en assouvissant votre petite curiosité malsaine... Je sais qu'elle va vous empêcher de fermer l'oeil.

Elle fit mine de se concentrer sur le très élaboré loup en plumes d'une convive, mais il ne se laissa pas berner.

— Ainsi, la réponse à votre question se résume par non, pas directement. 

Incapable de se contrôler, elle pivota sur ses talons pour lui faire face.

— "Pas directement" ? répéta-t-elle, sceptique. Qu'est-ce que cela veut dire, au juste ?

Il haussa les épaules et enfonça les mains dans ses poches.

— Il vous suffit juste d'avoir un peu d'imagination...

— Permettez-moi de ne pas être certaine d'en vouloir, rétorqua-t-elle.

Elle secoua vivement la tête afin de chasser les étranges pensées qui commençaient à l'assaillir. Quelle idée d'être partie sur ce terrain-là ! Surtout qu'Adrian paraissait prendre un malin plaisir à la voir mal à l'aise... Il le faisait exprès, évidemment. Et toi, tu t'y laisses prendre.

Alisée reporta son attention sur les danseurs et son regard fut irrémédiablement attiré vers Branwell. Le petit sous-entendu du roi — si tant était qu'il fut vrai — avait-il un rapport avec le fameux secret qu'il détenait sur lui ? Ses seuls indices étaient qu'il lui suffisait juste "d'ouvrir les yeux" et "faire abstraction d'un minuscule détail". Or en dépit de ses paupières ouvertes et de sa volonté de chercher le "détail" en question, elle ne voyait pas quelle cachoterie compromettante pouvait menacer le chef de clan.

L'idée de quitter Adrian et retrouver Danila l'effleura, mais la lettre de Kristal se rappela à elle. N'aurais-tu pas pu commencer par lui parler de ça, plutôt que de te pencher sur ses futiles histoires ?

— En réalité, je suis venue vous parler de quelque chose d'assez important, commença-t-elle.

— Oh, vous me vexez ! la coupa-t-il en portant une main à son coeur, près d'une rose qui se teignait de sa couleur homonyme. Moi qui croyais que vous désiriez innocemment profiter de ma douce compagnie...

Ignorant ses fausses jérémiades, elle poursuivit d'une voix très basse :

— L'une de mes connaissances, qui est arrivée en même temps que moi sur la Terre des Vampires, m'a récemment écrit une lettre. Elle travaille dans une taverne sur le territoire du clan Tanner, et elle m'a laissé entendre qu'elle connaîtrait les responsables de... l'attaque de loups survenue vous savez quand. D'après ce que j'ai compris, les instigateurs seraient des clients aux idées quelque peu anti-loyalistes...

Le roi était redevenu sérieux au fur et à mesure qu'elle parlait, son masque noir et or tourné vers la piste. Elle attendit patiemment sa réponse, qui ne tarda pas.

— Ce n'est pas pour remettre en cause l'honnêteté de votre amie, mais je doute que ce qu'elle vous dise soit vrai...

Il parut s'assurer un court instant que personne ne les épiait, puis ajouta :

— Les quatre loups-garous responsables de l'attaque ont été retrouvés il y a trois jours par mes soldats, sur le territoire des Manawé. Soit très loin des Tanner.

Alisée s'en retrouva muette de stupéfaction.

— Co... Comment savez-vous qu'il s'agit d'eux ? Certes, je doute que beaucoup de loups se baladent ici, mais...

— Justement, nous ne pouvons pas encore en être certains, admit-il. C'est pour cela qu'ils sont actuellement en train d'être conduits vers le palais. Ils sont censés arriver demain.

Elle ne sut que dire. Kristal aurait-elle alors menti ? Ce n'était pas si étonnant, cependant la réserviste s'était imaginé qu'elle finirait par arrêter ses petites manigances, surtout maintenant qu'elles vivaient sur le royaume de leur espèce...

— Je me demandais d'ailleurs si vous aimeriez assister à l'interrogatoire des loups, lui proposa-t-il, très sérieusement. Je vous préviens tout de suite, cela risque de ne pas être très joli à voir et il vous faudra mettre de côté vos états d'âme... Vous êtes néanmoins concernée d'assez près par cette histoire, donc je crois que votre présence serait légitime. Si vous acceptez de venir, bien sûr.

La belle vampire hésita. Cette attaque de lycanthropes ne l'avait pas autant choquée qu'elle l'aurait dû, la perte quasi irrémédiable de son frère ayant monopolisé tout son chagrin et sa détresse cette nuit-là. En dépit de cela, elle reconnaissait être curieuse de découvrir qui avait sauvagement déchiré sa cuisse et manqué de la tuer. Elle imaginait sans mal qu'avec le roi, cet "interrogatoire" risquait de mal tourner, et qu'elle serait peut-être confrontée à une facette de lui qu'elle s'efforçait d'ignorer... Eh bien, ce sera l'occasion de te remettre les idées en place, s'agaça-t-elle.

Uniquement si celles-ci avaient déjà été désordonnées, évidemment.

— Je viendrai, approuva-t-elle. Où vous retrouverai-je ?

— Un domestique vous préviendra lorsque les loups seront arrivés. Vous n'aurez qu'à me rejoindre dans le hall principal, puis nous descendrons aux... cachots. Un endroit très charmant, vous verrez.

— Je n'en doute pas une seconde, ironisa-t-elle.

Ayant déjà effectué une petite visite dans ceux du château du Grand Alpha, elle pourrait élire les moins pires...

En attendant, bien loin de leurs préoccupations, les invités festoyaient autour d'eux plus gaiement que jamais. Le sang — mélangé à d'autres boissons ou non — coulait à flots, les rires fusaient, les tissus aux couleurs chatoyantes rayonnaient sous les hauts lustres... À mesure que la nuit avançait, des masques tombaient sur le parquet, abandonnés par leurs porteurs qui se lassaient de les sentir sur leur nez. D'autres convives s'éclipsaient afin de faire perdurer la fête ailleurs, des chambres ayant été préparées pour les hôtes les plus importants.

Toutes ces démonstrations de richesses finissaient par étourdir Alisée, révulsée par la quantité de pièces d'or qui avait dû être dépensée. Quand elle pensait à tous ces Sans-Clan laissés à la merci de la rue...

— Oh, regardez qui vient vers nous, lui susurra le roi au bout d'un moment. Il me semble que c'est pour vous, cette fois...

Sur ce, sans lui accorder la possibilité de le retenir, il s'en alla tel un chat se fondant dans l'ombre, la laissant seule avec Branwell qui marchait droit vers elle. Quel traître !

Elle tâcha de se composer une mine un tant soit peu courtoise, tout en détaillant d'un peu plus près le chef de clan. Il portait une sorte de demi-masque argenté qui recouvrait la moitié de son visage, ce qui le rendait encore plus original que les autres.

— Bonsoir, mademoiselle Alisée, sourit-il en passant une main dans ses cheveux bruns. Je suis ravi que vous ayez finalement décidé de nous honorer de votre présence !

— Je pouvais difficilement passer à côté d'un tel engouement. J'ai appris que vous et votre soeur aviez organisé cette soirée, toutes mes félicitations, le complimenta-t-elle avec toute l'hypocrisie dont elle était capable.

Peut-être que flatter son ego le ferait repartir plus vite...

— Certes, mais que serait une fête sans de somptueux invités ? minauda-t-il. Vous avez complètement ébloui Valentine, l'une de mes amies. Elle voulait tout savoir de vous !

Elle parvint à lui grimacer un faux sourire.

— Je crois que votre soeur vous cherchait, tout à l'heure, l'informa-t-elle afin de changer de sujet.

Il tourna brièvement la tête, l'air vaguement agacé. Pendant ce temps, les musiciens choisirent précisément ce moment pour entonner un nouvel air de violoncelle.

— J'avais promis une danse à ma demi-soeur, mais j'imagine qu'elle saura patienter... Me feriez-vous plutôt l'honneur de m'accorder celle-ci ?

Il tendit une main vers elle, parfaitement sûr de lui, un sourire charmeur déformant ses lèvres. Folle aurait été celui ou celle qui aurait eu l'audace de résister à cette envoûtante aura de ténèbres... Le cliché parfait des héros de tes romances. Pas étonnant qu'il plaise à Adrian.

— Je regrette, cependant je n'ai pas prévu de danser cette nuit.

Elle peinait à dissimuler son amusement, quoique Branwell ne perde pas une once de sa confiance.

— Oh vous savez, jouer les inaccessibles fonctionne peut-être avec Sa Majesté, mais pas avec moi, mademoiselle Alisée, insista-t-il, plus exagérément mielleux que jamais. Je devine sans mal qu'il s'agit d'un non qui veut dire oui...

Très bien. Puisqu'il s'y aventurait...

Les mains sagement croisées sur sa jupe, elle s'approcha lentement de lui. Un parfum assez agréable, elle devait l'admettre, envahit ses narines lorsqu'elle se pencha près de son oreille.

— Dites-moi, monsieur McLawrence, lui souffla-t-elle. Lorsque vous prétendez à votre chère Valentine qu'il ne s'est jamais rien passé entre vous et le roi, est-ce aussi un non qui veut dire oui ?

Elle se recula doucement et l'observa. Elle s'attendit à voir la moitié visible de son visage se décomposer, de rage ou de stupeur, or il n'en fut rien.

Au contraire, il éclata d'un rire, qui pour la première fois depuis qu'elle le connaissait, sonna entièrement juste.

— Je dois reconnaître que Sa Majesté et vous formez un duo redoutable ! s'impressionna-t-il en agitant la tête, toutes ses horripilantes manières disparues. Que le royaume tremble si votre séjour parmi nous se prolonge...

Il arrêta un serveur pour se prendre un verre, puis après avoir jeté un clin d'oeil à la réserviste, poursuivit son chemin. Peu certaine de savoir exactement quoi en penser, Alisée resta sonnée quelques secondes. Bien qu'elle ne le vit nulle part, elle aurait juré avoir entendu Adrian glousser.

Elle ne s'attarda pas davantage et contourna la piste de danse, en quête de Danila et Jae-Sun. Si elle ne les trouvait pas dès son premier tour de salle, elle remonterait tranquillement à sa chambre. Sur son chemin, elle aperçut de nouveau Branwell et Beatricia, qui dansaient finalement ensemble, riant à gorge déployée. Elle repéra également le chef du clan Manawé, ainsi que celle des Bel-Iris. Quant à la princesse, elle avait disparu depuis l'ouverture de bal, de même que ses gardes du corps.

Après quelques minutes d'étourdissantes recherches, l'immortelle s'apprêtait à quitter les lieux, lorsqu'une voix bien connue la héla :

— Alisée ! J'ai eu peur, j'ai cru que tu étais partie !

Danila accourut vers elle, bousculant au passage quelques badauds qui ne firent pas attention à elle. Tel un père tenant le manteau de sa petite fille par un après-midi ensoleillé, Jae-Sun gardait entre ses mains le masque de l'ancienne louve, dont elle ne semblait plus vouloir s'encombrer.

— La prochaine fois, j'en prendrai un qui s'attache avec des rubans, comme le tien, indiqua-t-elle. Ceux à tige ne sont pas très commodes.

— Et la prochaine fois, je n'en mettrai pas du tout, marmonna la réserviste. Celui-là me démange le nez et me fait loucher...

Ils s'esclaffèrent tous ensemble, le chef de clan étant bien de son avis.

— Alors, reprit Danila sur le ton de la confidence, le roi ne t'a pas invitée à danser ?

— Non, et c'est très bien comme ça, fit l'intéressée en levant les yeux au ciel. Il m'a raconté je ne sais quelle histoire à propos de la femme du Grand Alpha...

— Ah oui, fit Jae-Sun, j'étais présent ce soir-là ! Un moment mémorable, en effet.

Il n'en raconta pas davantage, car la plus jeune des vampires poussa soudain une exclamation émerveillée.

— C'est ma musique préférée des Dorémi Horizons ! s'écria-t-elle en sautillant. Oh je t'en supplie, Jae-Sun, il faut que tu viennes !

Effectivement, une toute nouvelle mélodie débutait, composée d'entraînants sons de violon, piano, flûte et divers instruments qu'Alisée ne savait identifier. Des invités, visiblement aussi adeptes des Dorémi Horizons que Danila, commencèrent à se presser sur la piste. L'ancienne alpha implora son ami d'être son cavalier, mais rien à faire, il s'obstina à refuser. Des ombres de regrets chargeaient son regard, or il ne changea pas ses positions.

— Je suis désolé, Danila, sincèrement je...

Il ne termina pas sa phrase, néanmoins la jeune vampire hocha lentement la tête, compréhensive. Peinée par le voile qui assombrissait ses yeux verts, Alisée attrapa sa main et l'entraîna vers les danseurs.

— Viens avec moi, l'enjoignit-elle.

Les émeraudes de Danila s'illuminèrent, tout comme les iris marron du chef de clan. Il remercia silencieusement la réserviste, bien qu'elle ne comprenne pas ce qui le retenait.

— Pourquoi refuse-t-il à ce point de danser ? demanda-t-elle à son amie dès qu'elles se retrouvèrent sur la piste. Il a tant peur de se ridiculiser ?

— Ce n'est pas ça, enfin... Il ne m'a jamais vraiment tout expliqué, mais... Je crois qu'il a perdu une personne qu'il aimait, bien avant que je le connaisse. Depuis, il s'interdit de danser avec qui que ce soit.

Surprise et attristée, Alisée ne trouva rien à répondre. Était-ce aussi en raison de cela qu'il s'égarait parfois en un petit air mélancolique ? Pas une seule fois elle ne l'avait entendu se plaindre, et pourtant... Existe-t-il un seul occupant de ce palais qui n'ait pas connu une histoire tragique ?

La musique la fit quitter ses pensées et elle laissa le rythme s'emparer de son corps. Calant ses pas sur ceux des autres danseurs et ceux de Danila, elle commença à osciller d'un pied sur l'autre, tout en tourbillonnant sur elle-même. Les filaments argentés de sa jupe noire se déployèrent autour d'elle, captant la lumière de tous les lustres. La tête rejetée en arrière, elle perdit son regard dans leurs chandelles, jusqu'à en avoir le tournis. L'ancienne louve la rattrapa lorsqu'elle tangua et elles éclatèrent de rire.

Les mains jointes, elles se mirent à tourner ensemble, sans cesser de s'esclaffer. Leur danse ne ressemblait ni de près, ni de loin à une valse, pas plus qu'à autre chose, mais peu importait.

Elles s'abandonnèrent à ces tourbillons de tissus noirs et verts, d'argent et d'or, leur faisant oublier tout ce qui les entourait.

Pour la première fois depuis très longtemps, Alisée put le dire : elle s'amusa. Réellement.

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