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Chapitre 20 - Gare aux loups

Une morsure. Voilà ce qui suffirait à résoudre tous les problèmes d'Alisée.

Même si les crocs des loups-garous ne s'enfonçaient que superficiellement dans sa chair, le venin que contenaient leurs dents pointues infecterait tout l'organisme de la vampire à une vitesse folle. Sa peau métisse se teinterait de gris, laissant ressortir tout un enchevêtrement de petites veines sombres. À son lever, le soleil brûlerait ce cadavre répugnant, puis le vent disperserait ses cendres aux quatre coins de la forêt.

Ainsi, tout serait réglé.

Cependant, face aux canines luisantes des quatre lycanthropes qui l'encerclaient, Alisée avait envie de n'importe quoi, sauf de découvrir avec quelle puissance elles pourraient transpercer l'un de ses membres. Au cours de son existence, elle avait déjà eu l'occasion de se retrouver face à un loup-garou transformé. Elle avait beau en être sortie vivante, la manière dont ceux-là la fixaient lui laissait penser que cette fois, elle ne s'en tirerait pas à si bon compte. Une dangereuse lueur brillait dans leurs iris bleu foncé, et leurs pupilles noires étaient dilatées à leur maximum. Cela faisait quelques secondes qu'ils tournaient lentement en cercle autour d'elle, d'une inquiétante démarche féline, tandis qu'elle restait parfaitement immobile, incapable du moindre mouvement.

Si elle souhaitait réellement mourir pour peut-être enfin retrouver sa famille — du moins en majeure partie — alors il lui suffisait d'attendre que les loups se décident à sauter sur elle. Même si beaucoup pouvaient se contrôler face à un vampire, certains ne résistaient pas à leurs pulsions, se laissant dévorer par leur instinct qui les poussait à sauter sur les buveurs de sang. Et à leur attitude menaçante, il ne faisait pas de doute que les quatre animaux appartenaient à la seconde catégorie.

L'un d'eux poussa un nouveau grondement, tétanisant un peu plus la réserviste. Voulait-elle réellement continuer à ne rien faire, se jeter littéralement dans la gueule d'un loup, puis attendre que les morsures fassent leur effet ? Si tu te poses la question, alors ça veut dire que non, lui susurra une voix.

En effet, malgré que sa vie n'ait désormais plus aucun sens ni but, elle ne voulait pas mourir dans cette forêt. Elle doutait que l'avenir puisse encore lui réserver quoi que ce soit, mais elle ne souhaitait finalement pas que tout s'arrête maintenant.

Du moins, il était hors de question de succomber sans avoir tenté de se défendre.

Poussée et animée par cette idée, elle passa en revue les maigres possibilités qui s'offraient à elle. Face à quatre loups, elle n'avait aucune chance de remporter un combat, si tant était qu'elle avait vraiment su se battre. Ne lui restait qu'à adopter une stratégie purement défensive. S'enfuir ? Même en utilisant sa vitesse surnaturelle, les lycanthropes aux pattes puissantes auraient tôt fait de la rattraper. Sans compter qu'elle s'était sûrement complètement perdue dans cette forêt. Réfléchis, réfléchis, réfléchis. La meilleure solution — ou l'une des moins pires — aurait été de grimper à l'un des arbres. Or les branches de celui qui se trouvait juste à côté d'elle étaient beaucoup trop hautes pour qu'elle les atteigne. Mais à quelques mètres, en revanche...

Du coin de l'oeil, elle repéra un arbre sur lequel elle pourrait facilement monter grâce à sa force vampirique.

Mais il se situait au-delà du cercle que les loups dessinaient autour d'elle. Ses assaillants se rapprochaient d'ailleurs imperceptiblement, encerclant leur proie de plus en plus près. Comment faire pour détourner leur attention et se frayer un passage jusqu'à l'arbre ? Réfléchis, réfléchis, réfléchis, se répétait-elle alors que les babines retroussées et les grognements l'empêchaient d'aligner toute pensée. Elle se détourna un court instant de la vision de leurs iris étincelants, pour jeter un bref regard vers le sol et... la lumière se fit enfin.

Alisée releva brièvement la tête en direction des loups, avant de s'agenouiller très lentement en une révérence impeccable, sa grâce pareille à celle d'un cygne en dépit de ses tremblements.

Elle témoigna aux loups un parfait signe de soumission, faisant appel à leurs comportements les plus primaires. Même si elle gardait les yeux baissés, les frottements des pattes contre le sol se firent davantage espacés, lui indiquant que son geste les intriguait...

Sans perdre plus de temps, elle sauta sur l'occasion et attrapa l'énorme pierre qu'elle avait repérée juste à côté de son pied.

Faisant appel à la fois à sa vitesse et sa force surnaturelles, elle expédia son missile en plein dans le museau d'un loup. Ce dernier poussa un glapissement de douleur, tandis que ses trois acolytes bondissaient en arrière sous le coup de la surprise.

Elle en profita pour filer vers l'arbre qu'elle avait repéré.

Par chance, le chemin jusqu'à lui était dégagé de tout branchage, évitant ainsi à ses jupons de s'y empêtrer et de couper sa vitesse. Elle sauta ensuite pour atteindre du bout des doigts la première branche, qui était en fait plus haute que ce qu'elle avait cru. Elle parvint malgré tout à la saisir, puis tenta de se hisser dessus, ignorant les échardes brûlantes qui s'enfonçaient dans sa chair. Maudit bois, fulmina-t-elle intérieurement face à cet ennemi des immortels

Grâce à sa force vampirique, elle avait presque réussi à s'assoir sur cette première branche, lorsqu'elle se sentit brutalement tirée vers le sol. L'un des loups s'était remis de sa stupeur et tenait désormais le bas de ses jupons dans la gueule.

Alisée résista en envoyant des coups de pieds et entendit le tissu se déchirer, juste avant que les autres lycanthropes ne rappliquent. Elle essaya de nouveau de se hisser, mais cette fois, un puissant coup de patte l'atteignit à la cuisse. Elle poussa un cri face à la douleur déchirante, les griffes aiguisées de l'animal ayant transpercé le tissu de sa robe et lacéré sa chair.

Cette blessure faillit la faire lâcher sa prise sur la branche, les fines épines de bois la piquant aussi de plus en plus. Les loups-garous, qui poussaient maintenant des grondements rageurs assourdissants, s'apprêtaient à revenir à l'assaut pour enfin faire céder leur proie, lorsqu'un sifflement les interpella.

— Oh ! Mes toutous chéris ! s'éleva la voix du roi. Venez par ici !

Il émit un claquement de langue provocant, appelant les lycanthropes comme on le ferait de petits chiens bien élevés. Cela eut visiblement l'effet escompté, car les loups —au comble de la colère face à une telle insolence — se détournèrent d'Alisée afin de fuser en direction du monarque. La vampire ne pouvait tourner la tête pour repérer où se trouvait ce dernier, mais de toute façon, monter sur l'arbre constituait son unique priorité. Rassemblant ses toutes dernières forces, elle parvint enfin à se hisser sur la première branche, puis trouva le courage de s'assoir sur la suivante, afin de définitivement écarter tout danger. Restait à espérer que les animaux ne soient pas assez lestes pour monter...

Elle avait beau être adossée au large tronc, elle sentait son équilibre précaire, d'autant plus que sa plaie à la cuisse semblait la consumer. Elle n'osa pas regarder dans quel réel état se trouvait sa blessure, préférant se concentrer sur les inquiétants bruits qu'elle entendait. Grognements rageurs. Craquements d'os. Hurlements bestiaux déchirants. Les feuilles l'empêchaient de voir distinctement ce qui se déroulait sous ses pieds, mais il lui semblait percevoir des... Elle ne savait trop quoi, au juste.

On aurait dit que le vent s'était matérialisé en une forme noire, se déplaçant si rapidement qu'il était impossible de la discerner avec netteté. Autour de cette même forme bondissaient des loups, incapables de la saisir. De temps en temps, celle-ci stoppait brusquement sa course, surprenant un animal en se jetant sur lui pour briser l'un de ses membres. Encore envahie par un millier d'émotions, Alisée peinait à tout suivre, et se demandait même si elle n'hallucinait pas. Il ne peut pas réellement combattre des loups à mains nues, si ? Un glapissement glaçant émit par une bête suffit à lui répondre.

Au bout d'un moment, après un bon nombre de couinements plaintifs dignes de petits chiots, elle entrevit une ombre se rapprocher de l'arbre. En un battement de cils, Adrian se retrouva assis sur la branche, juste à côté d'elle. Cette soudaine apparition la fit sursauter, surtout que le roi n'offrait guère un spectacle réjouissant : sa chemise blanche était entièrement déchirée et maculée de sang, laissant la vue sur de profondes marques de griffures le long de son torse. Visiblement, même s'il n'en avait rien laissé paraître, cet affront lui avait aussi coûté des plumes...

— Vous... Vous allez bien ? s'inquiéta-t-il d'une voix légèrement rauque.

Il baissa immédiatement les yeux vers la jambe blessée d'Alisée. Les lambeaux de tissus imprégnés de sang dissimulaient une bonne partie de sa plaie, mais on devinait que d'impressionnantes entailles se cachaient dessous.

— C'est... C'est juste une griffure, balbutia-t-elle. Que... Où sont les loups ?

Aucun animal ne cherchait à gratter le tronc de leur arbre, et aucun grondement ne parvenait plus à leurs oreilles. Le silence était revenu dans la forêt, étourdissant de calme suite à un tel tumulte.

— Je ne pense pas qu'ils poseront à nouveau problème, répondit-il, en parfait équilibre sur sa branche alors qu'il n'avait rien contre quoi s'appuyer. Mais dans le doute, je crois qu'il serait préférable d'attendre un peu avant de rentrer au château.

Il parlait avec la plus grande des sérénités, comme s'il venait simplement de dompter quatre chatons rebelles. Cependant, malgré ses sens et son esprit toujours chamboulés, la réserviste crut ressentir un certain aura de tension se dégager de lui.

— Mais... Ne faudrait-il pas prévenir les habitants du palais ? murmura-t-elle, confuse. Si les loups attaquaient votre fille, ou des courtisans sans défense comme Danila, ou des domestiques...

Il fronça les sourcils et elle ne saisit pas ce qu'elle avait dit de travers. Elle ne put de toute façon s'interroger bien longtemps, car sa tête se mit à lui tourner affreusement, d'étranges lumières infestant son champ de vision. Sa blessure la grignotait de l'intérieur, la douleur ne s'arrêtant pas seulement à sa cuisse, mais se dispersant dans tout son corps.

Elle se sentit soudain basculer en avant, aussi impuissante qu'une poupée de chiffons. Une main la saisit doucement par le bras. Ce contact glacial l'aida à retrouver une légère emprise sur elle-même, le temps de se réajuster sur sa branche.

— Eh, restez avec moi, lui intima-t-il avec une étrange douceur inhabituelle. Est-ce... Est-ce que cela vous dérange si je regarde l'état de votre marque ?

Trop endolorie pour jouer les farouches, elle souleva délicatement les pans déchirés et sanguinolents de sa robe et révéla une plaie qui lui donna la nausée. Elle lui fit penser au tableau d'un champ de bataille, de l'hémoglobine s'écoulant des sillons creusés par les griffes du loup. Sa cuisse entière se teintait de grisâtre et les fines veines noires qui la parsemaient n'avaient rien de rassurant...

— C'est étrange que vous ne cicatrisiez pas, s'étonna le roi en examinant la blessure avec circonspection. Quand vous êtes-vous nourrie pour la dernière fois ?

Elle réfléchit un moment, se rendant compte qu'elle n'en savait rien. Depuis qu'elle avait obtenu les informations sur son frère et sa soeur, elle n'avait même pas songé à se nourrir, sa souffrance intérieure éclipsant celle de sa faim.

— Cela doit remonter au début de la nuit dernière, finit-elle par présumer.

Il hocha lentement la tête, puis déclara :

— Nous rentrerons d'ici quelques minutes. Il vous faut au plus vite du sang de Neutre afin de vous aider à cicatriser. Les griffures n'ont rien à voir avec les morsures, mais elles font quand même de sacrés dégâts...

Il n'y avait qu'à voir sa chemise réduite en pièces et les plaies qui suintaient toujours sur son torse.

— Et... Et vous ? s'enquit faiblement Alisée. Pourquoi vous ne cicatrisez pas ?

Normalement, grâce à sa condition "d'immortel le plus immortel parmi tous les éternels", ses blessures auraient dû guérir en quelques secondes, même s'il n'avait pris aucune dose de sang au cours des dernières heures. Serait-ce à cause de son régime alimentaire particulier ? parvint à supposer l'esprit embrumé de la réserviste.

— Pour une fois, je devrais également boire du sang de Neutre, confirma-t-il simplement. Celui de vampire me permet de ne pas finir desséché, mais il n'est pas très efficace pour les cicatrisations...

Elle faillit lui demander pourquoi il s'obstinait à se nourrir du sang de son espèce, cependant elle se retint. Dans l'immédiat, elle n'en avait rien à faire. Elle ne ressentait plus que sa douleur, qui heureusement, n'était pas la pire qu'elle avait connue. Néanmoins, il lui semblait faiblir au fil des secondes, son corps réclamant désespérément de l'hémoglobine.

Ses paupières tentaient de se fermer, or elle lutta pour les garder ouvertes. Si elle sombrait dans l'inconscience, non seulement elle risquerait de tomber de l'arbre, mais elle se retrouverait également encore plus à la merci du roi. Rien ne l'empêchait de l'abandonner ici, puis de venir récupérer son tas de cendres dès que le soleil serait levé. Cependant, après tout ce qu'il venait de faire... En se concentrant sur l'une des plaies de son bras droit, elle remarqua une trace non pas de griffure, mais de morsure. Tout autre buveur de sang serait définitivement mort après un tel sévice.

— Pour... Pourquoi m'êtes-vous venu en aide ? osa-t-elle l'interroger après un long moment de silence.

Elle articulait si mal que c'était à se demander comment il pouvait la comprendre. Pourtant, au regard étrange qu'il tourna vers elle, il ne fit aucun doute qu'il avait saisi chacun de ses mots.

— Vous venez littéralement de m'accuser de tous les maux de ce monde, lui lança-t-il d'un faux air dramatique. Vous ne voulez pas non plus que je porte votre mort sur la conscience, si ?

Tout ce qu'elle lui avait envoyé à la figure lui revint aussitôt en mémoire, et elle eut une terrible envie de se laisser tomber de l'arbre. Elle ne regrettait rien de ce qu'elle lui avait dit, loin de là, hormis cette pathétique manière qu'elle avait eu de s'épancher. Qu'elle fonde en larmes seule et loin des regards passait encore, mais devant le roi ! En dépit de tout ce qu'elle pouvait lui reprocher, il n'en restait pas moins le plus vieil homme de tous les temps. Et voilà qu'elle lui avait offert un spectacle digne d'une gamine en crise d'adolescence...

— Je... Je vous présente mes excuses pour mon comportement de tout à l'heure, bredouilla-t-elle, en faisant bien allusion à son attitude et non ses paroles. Je n'aurais pas dû m'emporter de la sorte.

— Je vous avais demandé un "avis extérieur", fit-il en haussant les épaules. Au moins l'ai-je obtenu.

Elle pinça les lèvres, puis il enchaîna :

— Sans vouloir vous offenser, c'est plutôt la présence de ces loups sur notre territoire qui me préoccupe. Nous sommes à des kilomètres de la Frontière, donc cela veut dire que non seulement ils ont réussi à la franchir, mais qu'en plus ils ont échappé aux contrôles des milices.

Des loups-garous sur la Terre des Vampires. Alisée avait été trop engourdie par sa torpeur pour réaliser l'ampleur de la situation. S'ils ne détenaient aucune autorisation spéciale, alors cela signifiait qu'ils étaient entrés illégalement, commettant ainsi un grave délit. La paix entre les deux espèces reposait sur des règles strictes : hormis quelques très rares exceptions, nul lycanthrope ne devait venir dans le royaume.

— Je croyais qu'il n'y avait pas de tensions avec les loups-garous, en ce moment...

— C'est le cas. Hormis le meurtre de l'un de mes chefs de clans, il y a quelques mois, mais cela a été vite réglé. L'actuel Grand Alpha n'est pas du genre à se créer de problèmes inutiles et quant à sa femme... Je crois qu'elle est la seule louve avec laquelle j'aurais consenti à me marier.

Elle fronça les sourcils, peu certaine que convoiter l'épouse du dirigeant de tous les loups soit un bon moyen de maintenir la paix... En dépit de leur situation, il réussit à trouver le courage d'éclater de rire.

— Ne cherchez pas trop à comprendre, lui conseilla-t-il. Pour en revenir au problème, j'écrirai tout de même une lettre au Grand Alpha dès que nous serons rentrés... ce que nous ne devrions plus tarder à faire, d'ailleurs.

En effet, outre l'état préoccupant de la réserviste, le soleil allait bientôt se lever. Le monarque descendit en premier de l'arbre, en prenant soin à ne pas trop faire bouger la branche sur laquelle se tenait toujours Alisée. Cette dernière le rejoignit en prenant toutes les précautions possibles, la tête lui tournant au moindre mouvement. Lorsqu'elle regagna la terre ferme, un violent vertige la saisit, la faisant flancher sur ses jambes. Elle parvint à retrouver son équilibre toute seule, mais son trouble n'échappa pas au roi.

— Nous ne pouvons pas nous permettre de trop traîner, lui indiqua-t-il sans toutefois la brusquer. Vous êtes sûre que vous allez pouvoir utiliser votre vitesse surnaturelle ?

Elle grommela une réponse affirmative, avant d'encore flancher au pas suivant. La plus petite foulée accentuait sa douleur à la cuisse, engendrant ainsi un nouveau vacillement.

— Je peux vous porter, si vous voulez, proposa-t-il. Je vous promets que nous serons arrivés au château en moins d'une minute, ajouta-t-il face au drôle de regard qu'elle lui lançait.

— Je... Je ne cherche pas à remettre en cause votre force, mais votre état n'est pas vraiment meilleur que le mien, rétorqua-t-elle en désignant son torse lacéré et sa morsure.

— Ce sont juste des égratignures, se contenta-t-il de répondre.

Vaincue, elle le laissa s'approcher d'elle. Il passa un bras sous ses genoux et un autre autour de son dos pour la faire délicatement basculer, puis la souleva avec douceur, aussi facilement que s'il portait une plume. Alisée aurait largement préféré rentrer toute seule jusqu'au palais, mais elle savait que si elle ne voulait pas finir carbonisée par le soleil ou dévorée par les loups, elle ne pouvait que mettre sa fierté de côté.

Même si elle se sentait trop épuisée pour s'émouvoir d'une telle proximité entre elle et Adrian, elle fut saisie par le contact glacial de sa peau contre la sienne. Elle ne put réprimer un frisson que le roi dut certainement remarquer, mais dont il ne fit nul commentaire.

— Accrochez-vous, lui conseilla-t-il avec un petit sourire digne d'un enfant sur le point de commettre une bêtise.

Elle n'eut pas le temps de réagir que déjà, il filait à travers les arbres, arrachant un léger cri à la vampire. Le vent cinglait le visage de cette dernière, l'obligeant à fermer les yeux. La vitesse du monarque atteignait au moins le triple de la sienne, tout comme son agilité à voguer entre les obstacles sans jamais les effleurer. Quand il s'arrêta brusquement, la réserviste n'ouvrit pas tout de suite les yeux, ne réalisant pas qu'ils étaient arrivés dans le grand hall du château.

— Vous ne pensez pas que ma chemise est assez déchirée comme ça ? l'interpella-t-il.

Alisée entrouvrit les paupières et se rendit compte qu'elle s'agrippait de toutes ses forces aux pans du tissu déchiqueté. Elle libéra aussitôt sa prise et se remua afin de se dégager des bras du roi. Il la reposa docilement au sol, mais attendit qu'elle soit assez stable sur ses jambes avant de complètement la lâcher.

— Merci, bredouilla-t-elle de manière presque inintelligible.

Ignorant ses remerciements, il tourna la tête de tous les côtés, en quête d'un Neutre pouvant assouvir leur soif de sang. Comme aucun ne traînait dans les parages, ils partirent en direction de l'aile ouest, espérant croiser un domestique sur leur passage. L'immortelle avait beau peiner à suivre, les douces lumières du palais la rassuraient, contrastant avec la pénombre de la forêt. Dès qu'elle chancelait, le roi lui suggérait qu'il pouvait l'aider, mais elle balayait systématiquement sa proposition d'un geste de la main.

Désormais qu'elle pouvait discerner plus clairement leurs blessures respectives, elle prenait conscience de la gravité de celles d'Adrian. Des veines noires se peignaient sur son bras mordu, ainsi que sur son torse qui ne cicatrisait toujours pas. Elle voulait bien croire qu'il lui fallait se nourrir un minimum pour guérir, cependant quelque chose lui paraissait étrange. Que se passerait-il s'il ne s'alimentait pas ? Ses plaies finiraient-elles par disparaître lentement, ou bien...

Et s'il n'était pas si immortel que ça ? se demanda Alisée malgré son esprit troublé. Tout le monde savait qu'absolument rien, pas même le soleil, ni cent morsures de loups-garous ne pouvaient le tuer, mais était-ce la vérité ? Il devait bien exister des conditions pouvant provoquer sa mort et...

— J'espère que nous n'allons pas croiser une autre personne qu'un domestique, lança-t-il, coupant ainsi net le cours de ses pensées.

Comme elle ne comprenait pas où il voulait en venir, il poursuivit :

— Vous avez vu notre état ? On dirait que je sors d'un combat avec la mort, vous êtes couverte de mon sang, vous claudiquez tel un vieux boiteux, votre jupe est déchirée... Et après on se demande d'où vient ma "sinistre réputation" ! Franchement, vous ne m'aidez pas à améliorer mon image...

— Je crains que cette tâche soit trop ardue pour être possible, marmonna-t-elle.

Elle aurait préféré que cette phrase ne franchisse pas ses lèvres, or son état ne lui permettait plus tellement de filtrer ses méditations intérieures. Par chance, le roi lui répondit par une fausse mine vexée, puis retrouva immédiatement son sérieux dès que des bruits de pas leur parvinrent. Un pauvre valet ne tarda pas à montrer son nez, et il fallut quelques secondes à la réserviste avant de reconnaître les cheveux flamboyants de Drew.

— Mademoiselle ? s'alarma-t-il en accourant vers elle, avant de se stopper net en notant la présence du souverain. Euh... Pardonnez-moi, Votre Majesté, bafouilla-t-il en s'inclinant avec maladresse.

— Vous tombez bien, je commençais à croire que ma fille avait encore renvoyé tout le personnel pendant mon absence... Mademoiselle Alisée aurait besoin de votre sang, auriez-vous l'obligeance de lui donner le vôtre ?

La certaine tension dans sa voix laissait clairement entendre qu'il ne s'agissait pas d'une question. Bien qu'il paraissait désireux de poser mille interrogations, le Neutre obtempéra sans broncher. Il tendit son poignet à la belle vampire, qui hésita avant de planter ses canines dedans. Drew l'y encouragea d'un sourire rassurant et ne pouvant plus résister à sa faim, elle finit par s'exécuter.

Cela faisait plus d'un mois qu'elle ne s'était pas abreuvée directement auprès d'un Neutre. Il lui fallait bien admettre que le goût du sang chaud n'avait rien à voir avec celui en bouteille. Au fur et à mesure qu'il s'écoulait dans sa gorge, elle sentait ses bienfaits agir sur son organisme, assouvissant sa soif, contribuant à cicatriser la chair meurtrie de sa cuisse... Elle avait l'impression qu'il pansait même les restes de colère et de désespoir qui gisaient encore au fond de son âme, apaisant chaque peine, chaque tourment, chaque...

— Je crois que ça suffira, intervint le roi, sa voix semblant surgir du fond d'un gouffre.

Alisée relâcha brutalement sa prise sur le valet, dont elle n'avait pas vu le visage devenir de plus en plus blême. Honteuse, elle réalisa qu'elle s'était sans doute nourrie bien plus que nécessaire et balbutia un millier d'excuses.

— Ne... Ne vous inquiétez pas, lui assura Drew, toutefois un peu hébété après un tel prélèvement.

— Si, je suis vraiment désolée, insista-t-elle, j'ai...

— Le principal est que vous vous sentiez mieux, la coupa le monarque. Votre blessure est-elle refermée ?

Elle jeta un coup d'oeil à sa cuisse, dont la peau était miraculeusement redevenue lisse, puis acquiesça.

— Parfait, conclut-il, ses épaules se relâchant de manière presque imperceptible. À présent, je vous conseille d'aller vous reposer. Et vous aussi, ajouta-t-il à l'intention du domestique. Votre nuit est terminée, accompagnez mademoiselle Alisée jusqu'à sa chambre et revenez à la vôtre.

Le Neutre se confondit en remerciements, que son maître ne prit guère la peine d'écouter. Le roi s'éloigna sans plus tarder, après que son regard ait une ultime fois croisé celui de la réserviste. Celle-ci eut soudain envie de lui dire une dernière chose, mais il disparut avant qu'elle ne puisse trouver le moindre mot. Elle fixa un moment le couloir dans lequel il avait disparu, si bien qu'elle faillit sursauter lorsque Drew reprit la parole :

— Mademoiselle, commença-t-il, tout penaud. Que... Que vous est-il arrivé ? Est-ce... Est-ce Sa Majesté qui vous a fait du mal ?

Ce que venait de lui dire Adrian quelques minutes plus tôt lui revint en mémoire. Franchement, vous ne m'aidez pas à améliorer mon image. Elle ne sut trop pourquoi, mais elle réprima un étrange gloussement nerveux.

— Je... Non, finit-elle par répondre. Disons simplement que j'ai rencontré des loups-garous d'un peu trop près...

Le visage du valet se décomposa alors qu'il lui emboîtait le pas pour prendre la direction de sa chambre.

— Des loups ? répéta-t-il incrédule, ses grands yeux bleus écarquillés. Ce n'est pas possible, mademoiselle ! Co... Comment...

Alors, elle lui raconta toute l'histoire. Du moins, en grande partie.

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