Chapitre 14 - Trouver son livre
Une lettre. Si c'était aussi simple que cela, Alisée voulait bien en écrire des centaines.
Dès qu'elle regagna sa chambre, elle la fouilla en toute hâte afin de débusquer une feuille, une plume et de l'encre, puis gribouilla ses mots d'une main tremblante. Elle inscrivit les informations recommandées par le roi, mais ne put préciser le moindre clan pour Damien. Peut-être les archivistes prendraient-ils la peine de lui envoyer plusieurs documents pouvant correspondre à son frère ? Il fallait l'espérer, même si cela paraissait trop beau pour être crédible.
Étant donné qu'elle ignorait comment envoyer du courrier depuis le palais, elle se résolut à attendre l'arrivée de Nessa en début de nuit. Elle n'aurait qu'à lui confier sa lettre, et la domestique saurait sûrement quoi faire pour qu'elle parvienne jusqu'à la capitale.
En attendant, la vampire parvint à peine à fermer l'oeil. Est-ce que cela allait donc être aussi facile ? Une fois la missive envoyée, aurait-elle simplement à patienter sans plus rien avoir à faire ? Voilà qui la rassurait et l'horripilait à la fois. Le temps avant de recevoir les résultats des recherches lui paraîtrait interminable. Mais si elle pouvait enfin obtenir quelque chose, alors elle se montrerait aussi patiente qu'il le faudrait.
Cela ne l'empêcha pas de bondir hors de son lit dès qu'elle entendit le chariot de Nessa rouler dans le couloir. À peine la femme de chambre eut-elle fini de lui prélever son sang qu'Alisée attrapa sa lettre et la lui tendit.
— Serait-il possible d'envoyer ceci à Mendoza ?
La domestique examina l'adresse notée sur l'enveloppe.
— Bien sûr ! confirma-t-elle. Je la déposerai avec le reste du courrier dès que j'aurai terminé ma tournée.
Elle ne posa aucune question supplémentaire. Comme la belle vampire portait toujours sa tenue de repos, elle proposa aussitôt de l'aider à s'habiller, mais la réserviste lui assura que ce n'était pas la peine. Elle se débrouilla toute seule dès que Nessa fut partie, choisissant une robe simple vu qu'elle ne comptait pas quitter sa chambre. Il ne lui restait plus que deux chapitres d'Un jardin pour les loups, et puisqu'elle n'avait de toute façon rien d'autre d'utile à faire, elle ne pouvait plus culpabiliser de passer son temps à lire.
Bien installée dans un petit fauteuil à bascule parfait pour son activité, elle s'apprêtait à ouvrir son livre lorsque quelqu'un lui revint en mémoire : Danila. La veille, elles avaient convenu de se retrouver à la bibliothèque afin de poursuivre leurs recherches. N'étant pas au courant de sa petite virée au milieu de caisses poussiéreuses avec le roi, elle devait certainement l'attendre. Après la nuit qu'elle avait passée à parcourir ces vieux registres sans se plaindre, la réserviste ne pouvait pas la laisser tomber.
Elle mit donc en suspens le destin des pauvres personnages d'Un jardin pour les loups, et prit le chemin de la bibliothèque. La jeune vampire l'y attendait devant les immenses portes, aussi larges que son sourire... qu'elle perdit à l'instant où Alisée lui annonça qu'elles n'avaient plus besoin de perdre leur temps en ces lieux.
— Oh, fit Danila en baissant tristement les yeux. C'est dommage... Enfin, je veux dire, c'est une bonne chose si vous allez pouvoir retrouver votre ami plus facilement, mais...
Elle n'acheva pas sa phrase, puis esquissa un geste de la main comme si ce n'était pas grave.
— Cela ne nous empêche pas de quand même passer du temps ensemble, si vous pouvez encore supporter mon ennuyeuse compagnie, lui proposa Alisée avec un petit sourire. Voudriez-vous bien me faire visiter les différents rayons de la bibliothèque ?
La lumière revint sur le visage de Danila en une fraction de seconde. Elle guida sa nouvelle amie à travers la pièce, tout en commentant avec entrain les multiples endroits qu'elles dépassaient :
— Ici, fit-elle en désignant un pan du mur circulaire qui s'élevait jusqu'au plafond de verre, on retrouve tous les anciens atlas qui représentent l'évolution de la Terre des Vampires. Les territoires des clans ont été répartis de différentes façons au fil des siècles, ce qui donne lieu à des cartes spécifiques pour chaque période.
Elle avança de quelques pas pour arriver vers des étagères chargées d'épais volumes sombres.
— Il y a là les biographies de certains chefs de clan qui se sont succédé au cours des années. Du tout premier choisi par le roi, à ceux que nous connaissons aujourd'hui. Si les grandes décisions politiques prises pendant les périodes de guerres vous passionnent, vous les trouverez dans les livres les plus anciens, qui sont perchés tout en haut. Mais je vous conseille plutôt celui consacré à Beatricia : il ne fait qu'une centaine de pages et se lit en un rien de temps...
Elles éclatèrent de rire, heureuses que personne d'autre qu'elles ne soit présent pour les entendre. Tandis que la plus jeune des vampires poursuivait sa visite, Alisée l'écoutait avec attention, admirative devant la variété d'ouvrages que renfermaient ces lieux. On pouvait aussi bien en apprendre sur l'histoire de la Terre des Vampires que sur celles des Loups, en passant par l'étude des espèces surnaturelles, ou celle des végétaux peuplant le monde. Même si tout cela avait l'air magnifique, un seul endroit intéressait vraiment la buveuse de sang : celui où se trouvaient les romans.
Et cela tombait bien, car c'était ce que l'on y trouvait le plus. Des milliers de fictions s'éparpillaient partout, aussi bien des sombres et terrifiantes que des douces et romantiques comme semblait les affectionner le roi.
Quand elle réfléchissait à son entrevue avec lui, elle avait presque envie de glousser en se remémorant la manière dont il parlait de Lettres à Gabriella. Se pouvait-il vraiment que le plus vieil homme de tous les temps, à la réputation des plus sinistres, puisse se passionner pour ce genre d'histoires mièvres ? Il ne faut jamais juger quelqu'un à ses lectures, avait-elle un jour dit à son frère, alors qu'il se moquait de son penchant pour les romances enflammées pleines de passions interdites et secrètes. Mais tout de même, Sa Majesté le roi des vampires, lire des livres pour adolescentes en manque de sensations...
— Vous avez l'air de connaître cet endroit sur le bout des doigts, s'impressionna-t-elle quand Danila eut achevé une explication au sujet des recueils de poèmes. Vous lisez beaucoup ?
Elle trépignait presque de joie à l'idée de trouver quelqu'un avec qui partager ses lectures. Sur la Terre des Loups, elle pouvait parler des histoires qu'elle découvrait avec les libraires de son village, qui lisaient les livres avant elle. D'ailleurs, de ces discussions avaient souvent découlé d'autres choses, dont les doux souvenirs lui serrèrent le coeur...
— J'ai un peu honte de l'avouer, répondit l'amie de Jae-Sun avant que ses pensées ne s'égarent, mais je n'ai jamais pu terminer aucun de ces bouquins... Même si j'adore les regarder et voir de quoi ils parlent, je n'arrive jamais à en trouver un qui me passionne vraiment.
Voilà un problème auquel il fallait remédier.
— C'est parce que vous n'avez pas encore trouvé votre livre, lui sourit malicieusement Alisée.
Danila fronça les sourcils, sans trop comprendre où elle voulait en venir.
— Nous avons tous du mal à nous plonger dans une histoire, jusqu'au moment où nous trouvons celle qui nous captive tellement qu'elle nous donne envie d'en lire des centaines d'autres. Ce n'est pas forcément pendant notre lecture que nous nous en rendons compte, mais... Une fois la dernière page tournée, vous ne pourrez plus vous souvenir de votre vie quand vous ne connaissiez pas tous ces personnages.
Elle avait beau lire depuis toute petite, il s'agissait exactement de ce qui lui était arrivé avec la Trilogie des Âmes. L'impression de voir certaines choses complètement différemment après l'avoir terminée ne l'avait jamais quittée.
— Et... Vous pensez que vous pourriez m'aider à trouver mon histoire ? s'enquit la jeune vampire, un peu perplexe. Vous avez l'air de vous y connaître...
Alisée ne put retenir un petit rire. Elle se tourna vers les rayonnages et commença à les parcourir du regard. Quelques titres lui étaient familiers, ce qui lui donna envie de se mettre à sautiller sur place, telle une enfant devant ses sucreries préférées. Finalement, elle retrouvait ici une petite part de sa vie sur la Terre des Loups.
— Vous préfèreriez quelque chose de sombre ou de plutôt... joyeux ? demanda-t-elle sans se détourner des étagères.
— Je ne sais pas trop... J'aime bien les romances, mais celles que j'avais commencées me paraissaient assez prévisibles. Au contraire, d'autres mélangeaient tant d'intrigues si compliquées que je me perdais au bout de deux chapitres. Et je préférerais éviter les fins tragiques, j'ai tendance à prendre les choses trop à coeur, il me faudrait deux mois pour m'en remettre !
À l'inverse, la belle vampire affectionnait les dénouements dramatiques, mais elle devait avouer qu'un peu de légèreté de temps à autre ne faisait pas de mal. Des titres pouvant convenir à Danila lui vinrent rapidement en tête, et elle se lança à leur recherche. Les ouvrages ne suivaient pas de classement particulier, ce qui ne lui facilita pas la tâche. Néanmoins, elle adorait se perdre parmi ces rangées colorées. Il ne lui semblait pas pouvoir être plus heureuse qu'entourée de livres.
Lorsque ses yeux croisèrent un titre bien particulier, elle ne put retenir une exclamation de surprise qui fit sursauter son accompagnatrice.
— Oh, ne me dites pas que je rêve, murmura-t-elle en sentant une vague de bonheur incontrôlable l'envahir.
Des dizaines d'éditions différentes de la Trilogie des Âmes s'alignaient devant elle. Chacun des trois volumes se déclinait en plusieurs couleurs, ainsi qu'en formats variés. Elle approcha ses doigts de l'un d'entre eux, puis l'extirpa doucement de l'étagère. Le contact de sa couverture rouge était aussi doux que de la soie. Des arabesques dorées se dessinaient dessus, luisant à la lumière des bougies de la bibliothèque. Quand elle ouvrit le livre, elle découvrit une magnifique illustration soignée juste à côté du premier chapitre.
— C'est tellement beau, s'émerveilla Danila à voix basse, comme si elles contemplaient un petit chiot à peine né qu'il ne fallait pas réveiller. Vous l'avez déjà lu ?
Alisée ne lui répondit pas tout de suite, trop chamboulée par toute cette collection. La même édition que celle qu'elle gardait dans sa chambre se trouvait également ici. À côté des autres si sublimes et raffinées, elle passait presque pour laide.
— Oui, finit-elle par dire après quelques instants. Ce sont les meilleurs livres du monde.
C'était peut-être un peu exagéré, mais elle le pensait réellement. Et tant pis si ses autres bouquins devaient lui en vouloir...
— Eh bien ! s'exclama la jeune vampire avec un petit sourire. Dans ce cas, je n'ai qu'à les lire ! De quoi parlent-ils ?
— Euh... Je ne suis jamais très douée pour résumer une histoire, surtout quand elle est aussi compliquée que celle-ci, mais... Disons que chaque tome suit une génération différente de la même famille. Le premier raconte la vie de Kathryn, une âme oubliée. Elle vit dans la pauvreté la plus complète, tout le monde voudrait qu'elle se taise et morde la poussière, mais son ambition la pousse toujours à se battre pour accéder à un meilleur statut.
Après avoir lu la trilogie dans son entièreté, se remémorer le début du premier volume faisait assez étrange.
— C'est une histoire plutôt sombre, je ne sais pas si ça vous plairait vraiment, ajouta-t-elle, un peu navrée. Si vous n'aimez pas les fins tragiques, je ne pense pas que ce soit le meilleur choix pour vous... Mais la même auteure a écrit un autre livre presque aussi bien et qui pourrait mieux vous convenir !
Elle balaya du regard les étagères environnantes, espérant que d'autres romans d'Amy Melton y soient entreposés. Avec un immense sourire, elle se mit bientôt sur la pointe des pieds et attrapa exactement celui qu'elle cherchait.
— Quatre mariages et un bain de sang, lut Danila après qu'Alisée le lui eut donné. Il y a le mot "mariage" dans le titre, donc vous pouvez être sûre que ça va me plaire !
Elle éclata de rire, puis la réserviste lui expliqua brièvement l'intrigue. Il s'agissait d'une comédie romantique plutôt légère, mais un peu plus travaillée et avec davantage de rebondissements que Lettres à Gabriella. Le "bain de sang" du titre n'était heureusement pas si dramatique qu'il en avait l'air.
— Je le commencerai tout à l'heure, avant de m'endormir, en attendant nous pouvons...
— N'auriez-vous pas vu mon père, par hasard ? l'interrompit une voix légère.
Elles se retournèrent brusquement et retinrent leur souffle.
Son Altesse Royale, la princesse Isabella, se tenait à quelques mètres d'elles. Son regard glaçant détaillait la pièce, sans se poser un seul instant sur les deux vampires. Elle se tenait sur la pointe de ses pieds nus, vêtue d'une robe blanche scandaleusement simple.
— Je... Enfin, nous...
Les balbutiements de Danila ne semblèrent pas parvenir jusqu'aux oreilles de la fille du roi, ou alors elle les ignora. À la regarder de plus près, sa pâleur, si contrastante avec ses cheveux de jais, ainsi que sa maigreur, donnaient à se préoccuper. Le fin tissu de sa tenue retombait sur des clavicules décharnées, et sa jupe trop courte révélait des chevilles à peine plus épaisses que ses fins poignets. Si elle n'était pas une immortelle, elle ne pourrait pas tenir debout, songea Alisée en frissonnant.
— Non, Votre Altesse, lui répondit-elle comme la jeune vampire ne paraissait pas en état de le faire.
La princesse serra ses poings aux jointures saillantes, puis fronça le nez pareil à si ce bel endroit la dégoûtait. Elle repartit d'un pas léger, aussi discrètement qu'elle était venue. Les deux autres eurent à peine le temps de cligner des yeux qu'il n'y avait déjà plus aucune trace de son apparition.
— Quand je vous disais qu'elle était étrange, murmura Danila dès qu'elle fut partie. Elle est si... déstabilisante. J'étais incapable d'aligner deux mots.
La réserviste partageait son trouble, mais pas tout à fait pour la même raison : quelque chose dans le regard océan de la princesse lui rappelait celui d'Adrian.
Pourtant, tout le monde s'accordait à dire qu'il s'agissait de sa fille adoptive... mais était-ce seulement la vérité ? Peut-être le roi l'avait-il eu avant sa transformation ? Dans ce cas, se pouvait-il que la réalité soit devenue une légende ? Et puis surtout, se reprit-elle, depuis quand connais-tu suffisamment le regard de Sa Majesté pour le reconnaître dans celui de la princesse ? Elle devait fabuler, sans aucun doute.
— Savez-vous comment le roi a-t-il rencontré la princesse ? s'enquit-elle cependant en espérant que son amie ne fasse pas cas de sa curiosité.
Or c'était bien s'inquiéter pour rien.
— Personne ne le sait vraiment, déclara Danila sans tergiverser. Certains racontent qu'elle était très malade lorsqu'elle a croisé le chemin de Sa Majesté. Une grave maladie affectant les Neutres, ce qui expliquerait sa maigreur... Mais aucun d'entre nous ne peut connaître la vérité, puisque Isabella serait apparemment la première vampire à avoir été transformée. Même les rumeurs ne peuvent pas vraiment circuler, car nul n'a envie de s'attitrer de problèmes avec elle ou son père...
Plutôt logique, étant donné que le monarque semblait prendre un malin plaisir à rappeler à tout le monde qu'il savait "absolument tout" des tribulations de ce palais... Rien qu'au souvenir de cette exaspérante tentative de... De quoi, au juste ? D'intimidation ? Ou était-ce simplement pour piquer son attention ? Peu importait, Alisée se retenait de lever les yeux au ciel chaque fois qu'elle y pensait.
— Elle n'a pas l'air très impliquée dans la vie de la Cour, observa-t-elle. C'est seulement la deuxième fois que je la vois depuis mon arrivée.
— Le roi et elle agissent plutôt dans l'ombre. Ils laissent les mondanités à leurs chefs de clans. Vous savez, cela fait quatre ans que je vis ici, et les seules paroles que j'ai échangées avec elle sont celles que vous avez entendues tout à l'heure. Et je n'ai jamais touché un mot à son père.
La belle vampire dut faire un effort pour masquer sa stupéfaction. D'accord, Danila semblait plutôt timide, mais son chemin avait déjà bien dû croiser celui d'Adrian, non ? Pourquoi ne l'embêtait-il pas avec ses interpellations mystérieuses ? La beauté d'Alisée ne pouvait rentrer en compte, puisque celle de la protégée de Jae-Sun n'avait quasiment rien à lui envier.
— Enfin, reprit cette dernière en retrouvant son beau sourire, ne cherchons pas à nous poser mille questions sur eux, notre immortalité ne nous suffirait pas... Viendrez-vous aux Jeux de Mendoza organisés dans les jardins, la semaine prochaine ?
Il fallut un instant à la réserviste avant de s'adapter à ce changement de sujet, encore perdue parmi ses pensées royales...
— Des jeux ? répéta-t-elle.
— Environ tous les quatre mois, des divertissements se tiennent aux jardins du palais. Il y a des jeux en tout genre, de balles, de lancer, d'autres où il faut se cacher... Mais le mieux est d'assister aux duels. Personne ne meurt au cours des combats, ce qui...
Elle se lança gaiement dans de grandes explications à propos de ces combats, sous l'écoute perplexe d'Alisée. Les courtisans du palais passaient-ils donc leur temps à s'amuser ou à danser lors de bals ? Lorsque Danila lui proposa de l'accompagner, son premier réflexe fut de refuser. Si c'était pour se pavaner devant le roi ou Branwell et sa soeur, elle préférait largement rester lire dans sa chambre.
— Je vous assure que vous allez vous amuser ! Il y aura même la plupart des domestiques, ils ont en général leur nuit de libre quand c'est comme ça. Vous ne pouvez pas ne pas venir !
Face à l'éclat enjoué qui brillait dans ses yeux émeraude, la réserviste se résolut à accepter. Cela suffit à faire le bonheur de la jeune vampire. Même si sympathiser avec les autres ne représentait pas l'objectif de sa venue au palais, Alisée ne put s'empêcher d'être touchée par l'enthousiasme qu'elle témoignait à l'idée de passer du temps avec elle.
Peut-être assisterait-elle à ces jeux l'esprit plus léger, après avoir enfin reçu des informations sur son frère et sa soeur...
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