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Chapitre 10 - Écho cristallin

— J'avais demandé une bière sanglante, maugréa un homme en renvoyant son verre sur le comptoir, ça c'est du panaché sanglant...

De la boisson se renversa sur le bois, s'insinuant dans ses grossières rainures déjà incrustées de saletés. Les poings serrés, Kristal foudroya l'ivrogne du regard. Il empestait à plein nez une espèce de mélange d'alcool et de sang. Ses cheveux blonds tirant sur le gris semblaient avoir servi à dégraisser une poêle, et ses dents à récurer du caramel. La petite rousse retint un haut-le-coeur.

— C'est la même chose, répliqua-t-elle en croisant les bras sur sa poitrine. Si vous n'êtes pas content, vous n'avez qu'à aller voir ailleurs, personne ne vous regrettera.

Ce soir-là, le Rocher du Vieux Ben, misérable taverne du territoire du clan Tanner, ne désemplissait pas. Des dizaines de vampires enchaînaient verre sur verre, dans de grands éclats de rire insupportables. Comme l'alcool ne pouvait rendre soûls les immortels, ils se permettaient d'en boire à volonté, sans oublier d'y rajouter de l'hémoglobine.

Cela faisait bien l'affaire d'Enrica, la jeune tenancière des lieux. Elle naviguait de table en table avec entrain, ses bras chargés de plateaux garnis de boissons. Depuis le comptoir où elle était censée servir d'autres clients, Kristal observait avec mépris sa longue chevelure noire onduler au gré de ses revirements. Chacun de ses gestes était sûr, et dès qu'une main passait trop près de la bourse où elle conservait ses précieuses pièces d'argent et de cuivre, elle n'hésitait pas à lui tordre les doigts. Quelle sauvage !

— Regarde-moi dans les yeux, sale gamine ! l'interpella l'homme qui restait campé devant son verre de bière, obligeant ainsi Kristal à se désintéresser d'Enrica. Pour qui te prends-tu ? D'ailleurs, qu'est-ce que tu fiches dans un trou pareil ? Tes parents ne voulaient plus de toi ? Vu ton sale caractère, ça ne m'étonnerait pas !

Même s'il venait d'appuyer là où cela faisait mal, elle ne répondit rien. Malgré ses soixante années d'existence, son apparence de gamine de douze ans lui portait toujours préjudice. C'était un miracle si elle avait réussi à trouver du travail, d'autant plus en tant que serveuse dans une taverne mal fréquentée. Enfin, si seulement on pouvait qualifier de "miracle" le fait de servir des panachés à des vieux bougres mal léchés...

Celui qui se tenait face à elle finit par céder devant sa détermination à l'ignorer. Il saisit sa chope, puis rejoignit ses camarades de beuverie à une table brinquebalante.

La petite rousse aurait dû passer un coup de torchon là où la boisson avait été renversée, mais elle n'en fit rien. Elle trouvait déjà bien assez dégradant de servir ces imbéciles, elle n'allait certainement pas faire le ménage derrière eux. Puisqu'elle se donnait tant de mal pour s'agiter dans tous les sens, cette rustre d'Enrica n'aurait qu'à le faire.

— Christelle, si tu tiens à conserver ton poste, tu ferais mieux de venir m'aider à servir en salle, lança justement la brune en passant devant le comptoir. La réunion ne pourra pas commencer tant qu'ils n'auront pas tous un verre entre les mains.

— C'est Kristal, répliqua la petite vampire avec dédain. Et tu m'as demandé de m'occuper du service ici. Si ces abrutis ont si soif que ça, ils n'ont qu'à lever leur arrière-train de leur chaise et venir jusqu'à moi.

Que cela lui faisait de belles jambes que cette réunion commence ou non !

— À ce que je vois, tu n'as jamais appris à obéir aux ordres, constata sa patronne avec exaspération. Cela fait seulement deux jours que je t'ai embauchée et tu as déjà le comportement d'une vieille morue aigrie. Je te laisse jusqu'à la fin de la nuit pour te ressaisir, sinon je te mets à la porte.

Croyait-elle vraiment pouvoir l'impressionner, avec son apparence de maximum dix-sept étés et sa robe de vulgaire paysanne ?

— Effectivement, je ne supporte pas qu'on me donne des ordres. Encore plus lorsqu'ils proviennent d'une brute sans aucune forme d'élégance telle que toi.

On pouvait difficilement reprocher à Kristal son impolitesse... Même si elle vivait depuis soixante ans, jusque-là, elle n'avait jamais occupé le moindre emploi. Dame Miranda, la femme l'ayant transformée en immortelle, l'avait toujours conservée auprès d'elle et avait subvenu à ses besoins. Sauf que désormais, la vieille mégère ne voulait plus s'encombrer de sa présence. Comme sa place au sein d'un clan avait été assurée par cette mièvre d'Alisée, la petite fille ne représentait pour elle qu'une charge inutile.

Même le plaisir de la voir dans son corps de gamine pour l'éternité ne lui faisait plus le moindre effet.

Dans son malheur, Kristal avait au moins eu la "chance" d'être attribuée à un clan. Un toit pour couvrir sa tête lui était donc garanti, mais en échange, il lui fallait contribuer à la prospérité de son groupe... ce qui signifiait travailler.

Elle n'avait eu que quelques jours pour se choisir un travail, et comme ses compétences étaient plus que limitées, ce poste de serveuse était la seule chose à sa portée. Si seulement cela avait pu être dans un restaurant raffiné, rempli de grandes dames et de beaux jeunes hommes en quête d'une épouse ! L'un d'eux, également transformé à un âge précoce, serait sans aucun doute tombé sous son charme et l'aurait demandée en mariage la nuit suivante ! Quelle belle vie de riche femme mariée aurait-elle eu alors...

Mais non, voilà qu'elle se retrouvait à servir des bières dans une taverne miteuse, au milieu de vieux rustres laids et désargentés. Quelle idée avait-elle eu de quitter la Terre des Loups ?

— Écoute-moi bien, commença Enrica en plissant ses yeux bleus, j'en ai maté des plus impressionnants que toi, donc ce n'est pas une ga...

Avant qu'elle ne prononce le mot que Kristal abhorrait le plus au monde, un sifflement retentit dans la salle. Tous les bavardages et grossiers éclats de rire cessèrent, tandis que les visages se tournaient vers une femme blonde qui venait de monter sur une table. Elle devait avoir le même âge physique que Dame Miranda — soit une cinquantaine d'années — et un éclat farouche brillait dans son regard marron. À sa manière peu distinguée d'attirer l'attention, ainsi qu'à ses jupons noirs effilochés, la petite rousse eut tôt fait de la considérer comme vulgaire et peu fréquentable. Le raffinement et l'élégance sont-ils donc bannis de cette misérable contrée ? se désola-t-elle intérieurement.

— Tout d'abord, je tiens à vous remercier d'être venus jusqu'ici, commença la femme d'une voix forte. Nous pourrons parler librement dans cette taverne insignifiante du clan Tanner, bien plus que sur notre propre territoire.

Enrica, qui avait rejoint Kristal de l'autre côté du comptoir, poussa un grondement sourd. Sa voisine se demanda comment elle pouvait s'offusquer qu'on insulte ce trou à rats...

— Ce soir, nous ne sommes que quelques dizaines, reprit l'effrontée juchée sur sa table. Mais d'ici un ou deux mois, je peux vous assurer que nous serons des milliers. Voire des millions.

Des murmures s'élevèrent parmi la foule, peu convaincus. À bien y regarder, tous ne paraissaient pas si pauvres que cela. Certains étaient mieux coiffés et habillés que d'autres, mais pas assez pour tromper la petite rousse. Aucune grâce, aucun signe d'appartenance à une classe digne d'intérêt ne transparaissait dans leurs gestes. Au mieux, ils devaient travailler en tant que gérants d'une petite boutique de village, mais pas plus.

— Je comprends que vous soyez sceptiques. Nous ne sommes que quelques pauvres fous obligés de nous cacher sur un autre territoire afin de nous réunir. Or nous sommes tous ici pour une même raison. Parce que nous ne supportons plus l'injustice.

De bruyantes approbations se firent entendre. Kristal se laissa aller contre le bar derrière elle en soupirant. Encore d'énièmes prétendus révolutionnaires qui au final, reprendraient leur vie sans se plaindre deux semaines plus tard, une fois leurs espoirs retombés. Dans le pire des cas, ils se feraient tous décapiter, ce qui aurait au moins le mérite de donner un gros titre aux gazettes.

— Nous venons tous d'un même clan ! s'exclama la femme pour exciter son auditoire. Et bientôt, nous viendrons de chacun des dix clans de la Terre des Vampires. Peut-être que nous comptons déjà parmi nous certains membres du clan Tanner.

La petite fille ne put s'empêcher de jeter un regard oblique à Dame Miranda. Parce que oui, elle se trouvait bien ici. Son éternel visage à l'expression pincée était tourné vers l'oratrice, sans témoigner d'un grand intérêt. Lorsque Kristal l'avait vue pénétrer dans la taverne avec ses irremplaçables gants de dentelle noire et sa robe sombre, elle s'était interrogée sur la raison de sa présence en un tel lieu.

D'après ce qu'elle savait, la vieille vampire avait réussi à outrepasser l'obligation de travailler pour son clan, en versant une généreuse somme au secrétaire du chef. Elle occupait même un charmant appartement situé à la capitale du clan Tanner. Restait à savoir ce qu'elle faisait dans ce petit village, d'autant plus qu'elle n'avait pas adressé le moindre regard à son ancienne "protégée".

— Mais dans l'immédiat, ce sont notre situation et nos intérêts qui nous préoccupent. Même si nous sommes censés faire partie de l'un des clans les plus riches du royaume, nous ne voyons pas la couleur de ce prétendu argent. Et pourquoi ? Parce que notre dirigeante préfère le dépenser en tenues d'apparat pour parader à la Cour des Vampires !

Cette fois, de très fortes clameurs retentirent, comme si la femme venait enfin de prononcer ce que tout le monde attendait. La petite rousse ignorait de quel clan venaient tous ces gens et faillit le demander à Enrica. Cependant, elle se rappela que tout compte fait, elle s'en fichait bien.

— Ce sont des membres du clan Blackfire, lui murmura pourtant sa patronne en se penchant légèrement vers elle. Ils savent qu'ils risquent gros en tenant ce genre de discours sur leur territoire, alors ils viennent ici.

Effectivement, les clans Tanner et Blackfire étaient voisins. Le premier se situait juste à l'est du second, et la taverne se trouvait dans un village tout près de cette frontière. Kristal ne connaissait absolument rien à toutes ces histoires de clans, ignorant jusqu'à leur nombre et leurs noms. Et loin d'elle l'intention d'y porter le plus petit intérêt.

— Cela fait quatre cents ans que Beatricia Blackfire est la cheffe de notre clan, clama la vampire depuis le sommet de sa table. En quatre siècles, savez-vous combien de fois elle s'est rendue sur son territoire ? Uniquement vingt.

Une marée de huées résonna.

— Si seulement elle consacrait ce temps passé au château de Mendoza à oeuvrer pour son clan ! Mais non, pendant que nous autres périssons dans la misère, elle joue les catins auprès de Sa Majesté !

Elle proféra ensuite un joli lot d'insanités qui heurta les chastes oreilles de Kristal. À l'entendre, cette Beatricia incarnait la dépravation et le déshonneur le plus complet pour les Blackfire. Même si elle ne connaissait pas son chef de clan, un certain Benjamin Tanner apparemment transformé à un âge avancé, elle fut reconnaissante de ne pas être tombée sous la responsabilité de cette débauchée...

— Bon nombre d'entre nous ont écrit à notre monarque pour lui faire part de notre situation. Sauf que comme il s'est laissé prendre dans les filets de cette petite garce, il ne fera rien ! On raconte que la princesse des vampires hait notre cheffe autant que nous, mais Son Altesse ne semble pas non plus décidée à se débarrasser d'elle. Nous sommes les seuls à pouvoir agir pour prendre notre destin en main !

Elle continua à débiter de grandes paroles pleines d'ambition et de détermination, qui lassèrent bien vite la petite fille. Si en plus de servir des boissons à l'odeur nauséabonde, elle devait également supporter des énergumènes de la sorte, elle n'y survivrait pas.

En à peine deux jours, le bas de sa robe rose préférée s'était déjà effiloché, son fin satin n'étant pas destiné à supporter l'agitation d'un quelconque travail. Dans la chambre qu'elle occupait juste au-dessus de la taverne, quelques autres robes achetées sur la Terre des Loups attendaient à l'intérieur de sa malle, mais que ferait-elle une fois qu'elles seraient toutes usées ? Hors de question de s'habiller aussi vulgairement qu'Enrica, qui ne portait qu'une jupe sombre et un haut blanc surmonté d'un corset noir. Et dire que pendant ce temps-là, cette ennuyante Alisée vivait la belle vie au palais royal...

Même si elle aurait préféré couper ses magnifiques cheveux flamboyants plutôt que de l'avouer, une part de Kristal s'inquiétait pour la belle vampire qu'elle avait presque toujours connue. Cette indifférence, teintée d'une espèce d'impatience, avec laquelle elle s'était laissée offrir au roi, l'intriguait. Nul ne savait vraiment ce qu'il advenait des cadeaux du souverain. Peut-être l'avait-il déjà tuée, ou contrainte à faire des choses que cette Beatricia semblait parfaitement maîtriser... Elle se surprit à espérer le contraire.

La stupide réunion prit bientôt fin, après qu'une date eut été fixée pour la prochaine. Quelques vampires s'attardèrent afin de discuter avec la blonde qui devait être la meneuse du mouvement, tandis que d'autres quittaient la taverne après l'avoir simplement félicitée. Dame Miranda faisait partie de ces derniers, mais elle se dispensa de tout compliment. Elle quitta les lieux sans un mot, ni un regard pour Kristal, comme si elles ne venaient pas de partager cinquante ans de vie dans le même manoir.

Ce manque de considération ne blessa pas la petite fille. Au contraire, elle avait beau avoir vécu à ses dépens durant des décennies, elle haïssait cette femme plus que n'importe qui en ce monde. Et pourtant, ce n'était pas faute de haïr presque toute la terre entière... Mais l'origine de cette haine ne provenait que de la vieille vampire : si elle ne l'avait pas transformée à un âge aussi jeune, alors Kristal ne serait pas obligée de détester toutes les personnes ayant grandi au-delà de douze ans.

— Maintenant, il va falloir nettoyer tous ces verres, annonça Enrica en se détachant du bar. Je te conseille de te trouver autre chose que ces manches bouffantes si tu ne veux pas qu'elles trempent dans l'eau de vaisselle...

Elle laissa échapper un ricanement, qui lui valut un regard noir de sa serveuse. Par principe et fierté, cette dernière attendit quelques minutes avant de gagner la salle pour y récupérer les chopes vides. L'idée de toucher les mêmes objets que tous ces rustres la dégoutait, et elle se nota mentalement de dénicher des gants.

À un moment, elle passa près de la femme ayant discouru avec tant de véhémence. Elle et quelques autres idiots discutaient d'un nouveau nom pour leur organisation, qui apparemment, ne datait pas de la veille.

— Les partisans du Feu Nouveau ! proposa l'un avec conviction.

Kristal retint un petit rire.

Peu importait la manière dont ils s'appelaient, toutes leurs têtes finiraient bientôt coupées.

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