Chapitre 24
Ashton
J'ai une grande gueule. Je parle sans filtres et ne sais pas la fermer. C'est plus fort que moi. Tout sort sans que je puisse l'empêcher. Je viens de lâcher cette connerie sans m'en rendre compte et Ellyn me fixe. Un tas de questions traversent ses iris et l'incompréhension qui se lit sur ses traits me fout la rage. C'est la faute de ce connard. S'il ne l'avait pas ouvert, on n'en serait pas là.
Tyler sourit. Il trouve ce retournement de situation bandant. Pas moi. Il va falloir que je m'explique. Je monte en pression et j'ai bien envie de lui en coller une bonne. Pour me rapprocher un peu plus de cet enfoiré, les dents serrées à m'en faire péter l'émail, je me presse un peu plus contre le dos de la Diablesse qui n'a pas bougé et qui fait barrage entre nous. Il lève un sourcil pour me provoquer, mais Pitt ne me laisse pas le temps de réagir et avance vers lui.
Il l'empoigne violemment par l'épaule et le repousse. Jusqu'aujourd'hui, j'ai toujours vu mon coloc' très calme. Là, c'est comme si une profonde colère l'animait. Il se contient, mais je devine que c'est limite. Je me demande ce qui s'est passé entre eux. Parce qu'il est clair qu'il y a un passif.
— Tu devrais dégager, lui conseille-t-il sèchement.
Tyler ricane, amusé, et lâche mes yeux pour l'observer.
— Je serais toi, je ferais pas trop faire le malin.
— Et toi tu sembles oublier qui j'étais et que certains gars de l'équipe me considèrent toujours comme leur Quaterback.
Je fronce les sourcils. J'étais pas au courant de ça. Pourquoi est-ce qu'il ne fait plus partie des Hater's ? Plus ça va, plus les interrogations s'accumulent.
L'ex d'Ellyn le toise un sourire en coin et se redresse de toute sa hauteur.
— Si tu savais ce que j'en ai à foutre. Ce qui compte, c'est ce que t'es maintenant. Et t'es plus rien.
OK, ça me soûle.
Je contourne la Diablesse qui tente de me retenir et ignore son regard scrutateur. Elle aimerait déjà avoir des réponses, mais on verra ça plus tard. Je me dégage et fonce sur Tyler. Surpris, il fait un pas en arrière et je saisis le col de son sweat. Je ne vais pas pouvoir le cogner et je suis frustré. Cette mission, le fait de devoir autant prendre sur moi dans ce genre de situation, tout va me faire péter un câble. Je suis pas du genre à faire dans la demi-mesure.
Seulement, rien ne m'empêche de lui foutre le trouillomètre à zéro. Et pour mes soupçons le concernant, je creuserai par la suite.
Mes pupilles enragées plantées dans les siennes, un rictus étire mes lèvres. Juste histoire de lui faire perdre ses moyens. Il retrouve rapidement son sérieux, tandis que je me penche à son oreille.
— Tu devrais te méfier. Tu sais pas de quoi je suis capable. Donc un conseil, ces trois-là, tu les laisses tranquilles. Sinon je te jure que toi et moi on se recroisera. Seul à seul.
Je m'écarte de sa gueule de con pour le prévenir une dernière fois silencieusement de faire gaffe, puis le pousse brusquement. Il recule de quelques pas et jette un coup d'œil à Ellyn.
— Casse-toi, grogné-je.
Qu'il la mate comme ça a le don de me faire bouillir. Ce type ne m'inspire pas confiance. Ou bien c'est aussi parce que j'aimerais l'avoir pour moi seul. Ouais, ça, c'est possible. Pourtant, je suis pas du genre à kiffer l'exclusivité.
L'autre couillon pointe Pitt du doigt, mauvais, et s'éloigne tout en marchant à reculons. Je me sors une clope pour tenter de rester calme. S'il fait un geste, je lui fais bouffer le mur.
— C'est pas fini, le prévient-il.
Je secoue la tête à bout de nerf, tandis qu'il tourne les talons et se casse.
— Si j'le croise, je lui fais sa fête.
Ils doivent me voir comme un fou furieux. C'est ce que je suis. Enfin, ce que j'étais un peu avant d'intégrer la formation. Parfois, je regrette de ne pas pouvoir réagir comme j'en aurai envie. C'est un putain de combat contre le plus primaire de mes instincts. Se défendre, répliquer, montrer qui on est. C'est la base de tout ce que j'ai appris en évoluant dans la rue, en fréquentant les gangs.
Dos à eux, je sens leurs regards sur moi. Ils ont tout un tas d'interrogations. Ellyn plus que les autres, c'est certain. Je me tourne vers eux, tirant une bonne latte de nicotine. Le meilleur moyen va être de tenter de détourner leur attention. C'est pas gagné.
Je lève un sourcil en voyant leurs tronches. OK, apparemment ils se sont ligués contre moi.
— Quoi ? J'vais pas fermer ma gueule devant ce fils de pute.
Pitt soupire et se passe une main sur le visage.
— Qu'est-ce que t'as pas compris dans le fait que l'équipe pourrait bien te tomber dessus ?
Je hausse les épaules. Franchement, je m'en branle. Au pire, je cognerai sur quelques-uns avant qu'ils n'aient le dessus sur moi.
— Rien à foutre. J'vais pas lui manger dans la main.
Ellyn apparaît devant moi et me fusille du regard. Elle est en pétard. J'ai rien fait de mal, putain. Elle me dévisage comme si c'était le cas alors que j'ai juste empêché son connard d'ex de se rincer l'œil. Voire d'espionner. Va savoir ce qu'il foutait là.
— Et toi, on peut savoir pourquoi t'es là ? me questionne-t-elle.
— Il était chez moi, intervient mon coloc'.
— J'étais chez lui.
Je préfère confirmer, on sait jamais. Elle plisse les yeux, nous examine comme des suspects et Pitt et moi échangeons un coup d'œil.
— Je l'ai vu depuis la fenêtre. Il était pas net avec son bandana, ajouté-je.
— Il avait l'air d'observer les ouvriers dans ton jardin en train d'installer tous tes trucs là, précise mon pote.
Elle pose sa main sur son front, au bout de sa vie et je baisse la tête pour fixer mes pompes. Ne te marre pas, mec.
— Vous êtes vraiment graves à vous faire des films.
Je fronce les sourcils et serre les dents. Si elle savait vraiment ce qui se trame, elle saurait que je suis loin de me faire des films. Pourquoi ses vieux s'obstinent à vouloir lui cacher la vérité, merde ? Elle pourrait être plus prudente s'ils lui expliquaient.
— Si t'attends que je m'excuse pour ce que je viens de faire, c'est mort, grogné-je.
Elle avance d'un pas et son parfum me parvient. Bordel, pourquoi je fais attention à ce genre de détails ? J'en ai rien à carrer de son parfum. Je l'observe sans me démonter et elle inspire profondément. Ouais, toi aussi gardes ton calme. Si on est deux à exploser ça risque de faire mal.
— Je te demande rien, Atkins.
Tant mieux.
— Par contre, va falloir que tu m'expliques comment t'as appris que j'avais l'impression d'être suivie.
Elle tourne la tête vers sa meilleure amie, suspicieuse et elle secoue la tête.
— J'ai rien dit, affirme-t-elle.
La seconde qui suit, Ellyn plante ses iris dans les miens et m'attrape par le poignet pour me tirer derrière elle. Elle a de la chance que je résiste pas, sinon elle serait restée sur place. Le truc, c'est que j'ai l'impression que je pourrais la suivre partout où elle va.
— Faut qu'on parle.
Shit, ça pue. Si y a bien une leçon que j'ai retenue de mon pote Keyden, c'est que quand une fille te dit ça, c'est que ça craint.
Je tire sur ma clope pendant que mon regard suit une mèche de ses cheveux qui s'échappe de son chignon. Mes yeux tombent sur sa nuque fine alors qu'elle avance à bon pas sans me lâcher et je m'imagine embrasser et mordiller sa peau. Elle me jette un coup d'œil par-dessus son épaule et je retiens une grimace. Elle est en pétard. Ça m'étonnerait que là tout de suite, elle me laisse lui faire ce genre de truc. Va vite falloir que je trouve quoi lui servir comme excuse.
Finalement, je vois pas ce que j'ai fait de mal. C'est vrai quoi, je suis juste intervenu en voyant un type louche dans la rue. Il aurait très bien pu être un vrai malade. De ce côté, la convaincre ne va pas être compliqué. Ce qui va l'être en revanche, c'est de lui expliquer pourquoi et comment je suis au courant qu'elle se sent suivie.
Lorsque je réalise qu'elle nous conduit vers chez elle, je m'arrête. Dans son élan et ne s'y attendant pas, elle lâche mon poignet et se retourne pour me faire face. Hors de question que je mette les pieds chez elle. Je ne peux pas, tout simplement. Pas alors que je me suis autant rapproché d'elle. Ses vieux sont au courant des termes du contrat et des règles qui me lient à lui. S'ils ont le moindre soupçon sur moi ou la relation que j'entretiens avec leur fille, ils contacteront le centre. Jeff sera en rogne et de mon côté, je pourrai m'en prendre qu'à moi-même pour ne pas avoir respecté les conditions de mon engagement. Deux ans. Je dois tenir deux années comme ça à jouer le toutou obéissant. J'ai horreur de ça. Même si après tout ça, j'aurai le choix entre plusieurs options.
— Qu'est-ce qui te prend ?
La Diablesse me fixe les sourcils froncés et me sort de mes réflexions. Je désigne sa baraque du menton tout en écrasant mon mégot contre le mur en pierre qui borde le trottoir et elle croise ses bras sous sa poitrine. Furtivement, mes pupilles plongent sur son décolleté et je me reprends aussitôt. En moins de quelques secondes, j'oublie tous les avertissements qui traversent mon esprit. Elle aura ma peau.
— Tu m'emmènes où comme ça ?
— Chez moi.
Un rire nerveux m'échappe sans que je puisse y faire quoi que ce soit et elle lève un sourcil. OK, elle doit me prendre pour un taré.
— Pas question.
— Et moi je te dis que tu vas bouger ton cul et me suivre. Tu me dois des explications.
— Je peux te les donner ici.
Cette fois, c'est elle qui rit, mais je ne me démonte pas et harponne son regard.
— Tu veux vraiment parler de ça ici ? Quoi, t'as peur que je te traîne dans ma chambre ?
Je fais un pas vers elle, baisse mes yeux sur son visage et me vois déjà au-dessus d'elle sur son pieu. Si elle savait que c'est le dernier de mes soucis.
— J'ai pas l'intention de rencontrer tes vieux.
Crédible. Elle doit se douter que c'est pas le genre de truc que je kiffe.
Elle soupire, ses iris plantés dans les miens et secoue la tête.
— Parce que tu penses vraiment que je compte le faire ?
Au moins, on est d'accord là-dessus. Pourquoi j'ai l'impression qu'avec elle, tout est histoire de négociation ?
— Je sais pas, peut-être que tu peux déjà plus te passer de moi et que t'espère que j'accepte de les rencontrer.
Pourquoi je lui balance ça, putain ? Il faut toujours que je cherche à la provoquer.
Elle sourit, malicieuse, et hausse les sourcils avant d'approcher ses lèvres de mon oreille.
— Va savoir, ça se pourrait, souffle-t-elle.
Je me fige. Ok, D'accord, victoire par K.O. Sa joue frôle la mienne et déclenche une avalanche de frissons de ma nuque jusque sur le haut de mon dos. J'oublie souvent que je ne suis pas le seul à jouer à ce jeu-là. Elle est très douée. Elle sait très bien l'effet qu'elle a sur moi et elle prend son pied.
— Désolé, mais va falloir que tu penses à quelqu'un d'autre pour ça. C'est pas mon délire.
Elle secoue la tête et le sourire en coin qu'elle affiche me fait vibrer de l'intérieur. J'aimerais pouvoir lui dire de m'emmener dans sa chambre tout de suite. Lui demander de virer ses fringues et de danser pour moi. Bordel, cette mission se révèle être la pire des tortures.
— Ils sont pas là. Ils étaient sur le point de s'absenter quand je suis sortie.
Ça change la donne, en effet. Sauf qu'il y a le personnel, les caméras de surveillance. Si l'un d'eux parle de moi ou s'ils venaient à voir ma tronche sur les écrans, ils sauraient que je suis venu. Va savoir aussi ce qu'ils pourraient voir d'autre.
Je l'observe, pendant qu'un combat entre le pour et le contre ravage mon esprit. Elle fait un pas de plus, sa poitrine entre en contact avec mon torse et je serre instantanément les dents pour ne pas céder. Pourtant, j'ai qu'une envie, fondre sur ses lèvres.
— J'aime braver les interdits, ajoute-t-elle.
Je fronce les sourcils. Comment ça ? Qu'est-ce qui serait interdit de son côté si elle me faisait venir chez elle ?
Silencieusement, je l'encourage à continuer. Ce qu'elle vient de balancer attise ma curiosité.
— Ces derniers temps, mes parents refusent que qui que ce soit à part Mia entre chez nous. Et tu es exactement le genre de mec avec qui ils refusent catégoriquement de me voir.
J'adore braver l'interdit, moi aussi. Seulement, si je représente en plus du reste tout ce qu'ils détestent, ça pourrait vraiment partir en vrille. Tout cumuler, craint plus que ce que je pensais.
— Quoi, tu veux te servir de moi pour les rendre dingues ?
Elle secoue la tête et plisse les lèvres. Elle semble hésiter et je me demande pourquoi. C'est pas le genre de nana à se poser mille questions.
— Je mentirais si je te disais que ça m'a pas traversé l'esprit. Mais je suis pas comme ça. Le truc, c'est qu'en te ramenant chez moi, même s'ils ne sont pas là et qu'on fera attention à ce que personne te voit, ça me donne l'impression de défier ce qu'ils m'imposent. Et j'ai besoin de ça.
Je sonde ses iris. J'ai la sensation qu'un message se cache derrière ce qu'elle me confie. Plus ça va, plus je suis certain qu'elle dissimule qui elle est vraiment et ce qui la tourmente. J'ai mes démons, mais il faut croire qu'elle a les siens.
Doucement, mes bonnes résolutions s'effritent. Même si elle tente de ne rien laisser paraître, cet éclair qui traverse ses billes sombres me supplie presque d'accepter.
— Brad et Mia ? tenté-je.
C'est tout ce que j'arrive à sortir comme excuse. Comme si ça allait changer quoi que ce soit qu'on les ait laissés en plan.
— Je m'en fais pas pour eux. Puis, il est temps qu'elle se lance.
Je me demande une fraction de seconde de quoi elle parle, mais mon cerveau passe vite à autre chose.
— Ok, j'te suis.
Voilà, on y est. Je vais encore merder en beauté. Tout ça parce que j'ai la sensation que la soulager un peu de ce qui pèse sur ses épaules devient prioritaire sur le reste. Je suis clairement dans la merde. Et pas qu'un peu.
Arrivé à proximité du portail, je relève la capuche de mon sweat sur ma tête. Par réflexe, je jette un coup d'œil dans l'allée pour vérifier qu'il n'y a personne, tandis qu'au même moment, Ellyn glisse sa main dans la mienne. Je suis censé lui faire confiance pour traverser le jardin sans qu'on se fasse griller. Le truc, c'est que j'ai un putain de problème pour ce qui est l'accorder. C'est pas nouveau.
Je me rappelle alors la façon qu'elle a eue de faire le mur la fois où j'étais en planque devant chez elle et me dis qu'elle doit avoir l'habitude. S'il y a bien quelqu'un qui connaît cet endroit mieux que personne, c'est elle. Elle se met à courir et sans réfléchir, je l'imite jusqu'à ce qu'elle s'arrête et s'adosse à un mur. J'ai l'impression de filer à travers l'un des terrains hostiles de mon ghetto. En un peu moins craignos, j'avoue.
Ressentir ne serait-ce qu'un soupçon de ce que ça a pu me procurer, c'est grisant. J'adorais progresser à travers les rues et les entrepôts désaffectés, même si ça impliquait parfois de progresser dans l'une des zones d'un gang rival.
La différence, aujourd'hui, c'est qu'au lieu de passer de squat en squat, je passe de villa en villa. Si on m'avait dit que j'en finirais là, je l'aurais jamais cru.
Elle se penche légèrement, scanne les environs et la revoilà partie à tracer, sans me lâcher. Pourquoi le contact de sa paume dans la mienne réussit à me filer des frissons même dans ce genre de situation ?
Elle pousse tout à coup la porte d'entrée et nous surgissons dans le hall. Ça pue le luxe. Encore pire que tout ce que j'ai pu voir jusque-là. Limite, ça me donne la gerbe.
— Maria, je serai dans ma chambre, merci de ne pas me déranger !
C'est la première fois que je l'entends prendre un ton aussi pompeux. Comme si elle entrait dans la peau d'un personnage pour un rôle. Ça me plait pas. Elle s'élance vers les escaliers et je marche dans ses pas comme si j'avais le feu au cul. Putain, dans quoi je me suis embarqué ?
— Bien, mademoiselle. Vous souhaitez que je vous apporte une boisson ? demande l'employé depuis une autre pièce.
— Non, merci, ça ira.
Lorsqu'on arrive à l'étage, je suis un peu moins sur mes gardes. La Diablesse semble se détendre également. Elle me lâche la main, me fait signe de la suivre et je m'exécute.
Au bout du long couloir, elle ouvre une porte et je m'engouffre dans sa chambre. Sur le coup, je suis surpris. Cette pièce n'a rien à voir avec le reste de la maison. Le contraste fait même bizarre. Le seul mot qui me vient quand je l'observe, c'est normalité. Ouais, c'est ça, cette pièce est banale. Des posters de groupes, des livres, un léger bordel sur le bureau, des couleurs un peu plus vives aux murs et des photos d'elle et ses potes. Je me sens tout de suite plus à l'aise.
Ellyn me fixe, silencieuse. Comme si elle attendait mon verdict. Je sais même pas ce que je suis censé lui dire. C'est vrai quoi, je viens d'avoir un aperçu d'elle complètement à l'opposé de ce qu'elle laisse paraître d'habitude.
Comme si elle lisait dans mes pensées, elle soupire.
— C'était l'une des domestiques. Elle est assez... Enfin, avec elle mes parents sont au courant de tout. Si j'ai le malheur d'employer un autre ton, j'en entends parler pendant des jours.
C'est quoi ce délire ? Depuis quand on impose une façon de parler à qui que ce soit ?
J'ai tendance à oublier dans quel monde je suis. La plupart de ces gosses de riches ont des codes à respecter. C'est à chier.
— C'est toujours comme ça ?
Elle hausse les épaules et se donne un air indifférent, mais je suis persuadé qu'au fond, ça la bouffe.
— Non, il y a Daniella. Avec elle, c'est différent.
J'acquiesce et fais quelques pas dans la pièce pour jeter un coup d'œil aux cadres. J'esquisse un sourire en découvrant une photo d'elle petite où elle sourit et qu'il lui manque une dent. Curieux, je mate les autres clichés et me tourne vers elle.
— Et tes parents ?
— On devrait soigner ça.
Ok, elle coupe court à la discussion. C'est bien ce que je pensais. Entre eux, l'entente est merdique. Ça confirme ma première idée, surtout après ce qu'elle m'a confié quand on était dehors.
Elle désigne ma lèvre qui saigne toujours et je lève un sourcil. Si elle savait que j'en ai vu d'autres. Ça, c'est carrément rien.
— C'est bon, ça va.
Elle fronce les sourcils, apparemment pas du même avis et me désigne le lit.
— Assieds-toi, je reviens.
Elle ne me laisse pas le temps d'en placer une et disparaît dans la salle de bain attenante. Je soupire et me laisse tomber sur le lit. Le métal froid de mon flingue toujours coincé dans mon dos me rappelle qu'il est là. Si elle me saute dessus, ça craint. Si en plus du reste, je me retrouve à devoir expliquer pourquoi je suis armé, je vois pas comment je pourrai me sortir de ce merdier.
Je tends l'oreille pour être certain qu'elle n'est pas sur le point de débarquer et l'entend farfouiller dans les placards en râlant. Sans perdre une seconde, je saisis mon Glock et cherche un endroit du regard où le planquer. Une porte du placard claque, des pas approchent et dans la panique, je le glisse sous le matelas. Ok, pour le récupérer, il va falloir que je sois malin.
Mon palpitant bat comme si je venais de taper un sprint afin d'échapper à des lascars qui veulent ma peau et elle se plante devant moi. Ses iris tombent dans les miens et je n'arrive plus à les détourner. Elle saisit mon menton d'un geste doux, mais autoritaire et lève un peu plus mon visage vers elle.
— T'es pas obligée de faire ça.
— La ferme, Atkins.
J'esquisse un sourire en coin. Je peux pas m'en empêcher. Cette nana a du caractère. Ça me plaît autant que ça m'exaspère. Les sourcils froncés, elle pose la compresse sur ma lèvre et je serre les dents sans pour autant broncher.
Je réalise au même moment que c'est la première fois de ma vie que quelqu'un s'occupe de moi de cette façon. Je détaille ses expressions, fasciné et elle s'en aperçoit. Lorsqu'elle se mord la lèvre avec cet air presque gêné, j'approche un peu plus mon visage du sien. Cette envie folle que j'ai de dévorer sa bouche depuis tout à l'heure monte d'un cran.
Elle entre dans mon jeu sans me quitter des yeux, puis alors que je m'apprête à fondre sur elle, elle lève un sourcil.
— Comment t'as su que j'avais l'impression d'être suivie ?
Nous y voilà. De toute façon, je sais déjà ce que je vais lui servir. Pas besoin de mentir finalement. Pourtant, le fait qu'elle veuille à tout prix savoir m'ouvre une porte et je compte bien l'emprunter. Même si ce que je retiens, c'est qu'elle vient de me frustrer puissance dix mille.
— Je répondrai à ta question, si tu réponds à la mienne.
Son regard me transperce. Ça ne lui plaît pas. Seulement, je ne lâcherai rien. Si elle veut savoir, elle n'aura pas le choix que de se plier à ma règle. Donnant donnant. C'est comme ça que j'ai appris et c'est comme ça que je continuerai de fonctionner.
— Qu'est-ce que tu veux savoir ?
Elle me balance ça à contre-cœur. Elle n'a pas envie que je creuse. Pourtant, c'est bien ce que je compte faire. Cette fille m'intrigue. Je veux en savoir plus.
— Pourquoi tu danses en secret ?
Elle se décompose et appuie plus fort la compresse sur ma lèvre. C'est pas volontaire, seulement ses muscles qui se crispent. Ses pupilles me flinguent sur place et j'attends de voir ce qu'elle décide. Elle peut faire marche arrière à tout moment.
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