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1.6

La nuit était tombée depuis un bon moment déjà.

Derrière les vitres du bus, je regardais Séoul défiler, toujours animée malgré l'heure tardive. Il faut dire que la fraîcheur de cette nuit d'été était plus qu'agréable, et ce n'était pas pour rien qu'on l'appelait « la ville qui ne dormait jamais ». Entre les touristes étrangers, les étudiants, et les travailleurs coréens qui décompressaient, le centre-ville était comme en plein jour.

— Il reste encore combien d'arrêts avant le terminus ? demandai-je à Seojoon, qui conduisait le véhicule à côté de moi.

— Une vingtaine. Si tu veux rentrer pas trop tard, je te conseille de descendre là.

— Hm, non. C'était juste pour savoir.

Mon ami me jeta un bref coup d'œil, avant de se reconcentrer sur la route pour s'arrêter à l'arrêt quelques mètres plus loin. Il ouvrit les portes, et je dus me décaler pour laisser rentrer et sortir les voyageurs. Je me repositionnais à ses côtés dès que possible, mais en devant jouer un peu des coudes. Le bus commençait à être chargé. Une odeur désagréable d'alcool prenait peu à peu place, et me faisait plisser le nez. Je vis Seojoon en faire de même.

— Ça pue, marmonnai-je.

— Service de nuit, qu'est-ce que tu veux ?

Il haussa les épaules, puis redémarra.

Nous étions en fin de semaine, et Taehyung venait enfin de terminer de tourner le film qui lui prenait tout son temps. J'avais envie de crier victoire. Je me serais bien blotti dans ses bras de bonheur, tant j'en étais heureux. Mais ce soir, et pour la dernière fois, il n'était pas là ; le producteur du film, un certain Kim Seokjin que j'avais déjà eu le loisir de rencontrer quelques fois, avait organisé une petite soirée pour célébrer la fin du tournage. Et évidemment, je n'y étais pas invité. La question ne s'était même pas posée.

Alors pendant que mon copain faisait la fête avec ses collègues et Hayoon, j'étais là, à tenir compagnie à Seojoon durant son service de nuit. Je n'avais pas eu le cœur à rester seul, donc j'étais venu le coller au travail. Il était chauffeur de bus depuis quelques mois, mais je n'avais jamais eu l'occasion de le voir bosser, et j'avoue que ça me rendait curieux : ce soir était donc l'occasion parfaite.

— Bon, alors, lâcha-t-il, tu me racontes quoi de beau, à part que ton mec est parti faire la fiesta sans toi ?

Je soufflai du nez devant son ton bourré de reproches à la mention de mon copain, mais préférais passer outre.

— Pas grand-chose. Mina m'a appelé pour me proposer de bosser mes rattrapages, et je lui ai dit que je les passerai pas.

— T'abandonnes, alors ?

— ... Ouais. J'abandonne.

Un petit soupir m'échappa à cette réponse. Je rivais mon regard sur la route, le cœur un peu lourd. Cette histoire de fac me prenait la tête depuis un moment, et il fallait bien que je prenne une décision un jour ou l'autre, parce que chaque heure qui passait était une heure de révision en moins. Finalement, j'avais préféré laisser tomber totalement.

Me le dire me libérait d'un poids autant que m'accablait les épaules de déceptions.

Je me sentais comme un incapable.

— Et elle a réagi comment, ta pote ?

— Je crois qu'elle était déçue. Elle pense que c'est une connerie, soupirai-je.

Seojoon fit dériver le véhicule vers la gauche, nous éloignant de Hongdae, avant de rétorquer :

— C'est pas ce qu'elle pense, l'important. C'est ce que toi tu veux.

— Tu ne vas pas me dire que j'aurais dû persévérer et valider ma licence ?

— Non. Sauf si t'en avais vraiment envie, mais corrige-moi si je me trompe, je ne pense pas que ce soit le cas.

Je marquai un court silence. Derrière la vitre, j'admirais les lumières qui défilaient, illuminaient le noir, donnaient vie à la nuit. C'était beau. J'avais envie d'immortaliser le moment.

— Tu ne te trompes pas, confirmai-je finalement. Je veux faire de la photographie.

— Alors t'as bien fait. Concentre toi sur ce qui te plaît et fonce.

Sa réponse m'arracha un sourire, me gonflant le cœur d'une douce chaleur, et je reportais mon attention sur lui.

— Merci. T'es bien le premier à me dire ça. Quand j'en ai parlé à Minhyunk, il m'a dit de me comporter en adulte et de me bouger le cul.

— Minhyunk est au chômage depuis deux mois, alors il peut parler.

— Il n'a toujours rien trouvé ?

— Il ne cherche même pas.

— Ah.

Seojoon me fit un signe de main pour m'indiquer que ce n'était rien, l'autre sur le volant.

— Enfin, en tout cas, c'est loin d'être la personne la mieux placée pour te donner des leçons sur ce genre de sujets. Ne l'écoute pas.

— ... Taehyung me disait la même chose que lui.

— Me parle pas de ton mec, tu sais ce que j'en pense.

— Mh.

Je ne renchéris pas. Le bus s'arrêta à un nouvel arrêt, et je fus soulagé qu'il y ait plus de personnes qui descendent que de personnes qui ne montent. Quand on redémarra, on respirait déjà un peu mieux. Il faut dire qu'on s'éloignait lentement mais sûrement du centre-ville.

Malheureusement, ça n'empêcha pas un type totalement bourré de rentrer au prochain stop, et vraisemblablement, il prit le véhicule pour sa salle de concert ; il n'attendit pas une seconde avant de se mettre à chanter à tue-tête – et très faux – le dernier tube de K-pop du moment. Un autre voyageur lui balança de fermer sa gueule, sans qu'il ne l'écoute. Je craignis l'espace d'un instant que ça ne parte en bagarre, mais le chanteur improvisé quitta le bus quelques minutes plus tard seulement.

Mes oreilles, alléluia.

Je savourais le soudain calme que son départ avait laissé, et lançai à l'intention de Seojoon :

— Dis donc, t'en as souvent des bourrés comme ça ?

— Oh, tout le temps, assura-t-il, et je grimaçai.

— Je sais pas comment tu fais.

— On s'habitue. Et encore, c'était loin d'être le pire.

— Ah ouais ?

— Ouais. L'autre jour y a carrément deux gars qui se sont foutus sur la gueule. J'ai dû arrêter le bus pour les séparer moi-même.

Je blêmis un peu, m'imaginant à sa place, dans la nuit, face à deux types bourrés et agressifs. Courageux comme j'étais, je me serais probablement pissé dessus et j'aurais abandonné le bus comme on abandonne un navire. Note à moi-même : ne pas devenir chauffeur de bus de nuit.

— T'as pas trop galéré ? demandai-je pour plus d'anecdotes.

— Je te rappelle que j'étais garde du corps, avant.

— Ça veut dire non ?

— Ça veut dire non.

Un petit sourire amusé m'échappa. Je m'adossais contre la partie qui séparait les passagers de Seojoon, puis osai demander mine de rien :

— C'était bien ?

— Hm ?

— Ton ancien métier.

— Ah.

Tournant le volant, il haussa les épaules. Il ne m'avait jamais vraiment parlé de cette période là de sa vie, car les seules fois où j'avais tenté de m'y intéresser, je m'étais pris un mur dans la figure. Je supposais qu'elle n'avait pas forcément été évidente. Et, curieux comme j'étais, je ne pouvais pas m'empêcher de me poser trois tonnes de questions. Pourquoi est-ce qu'il semblait si réticent à l'évoquer. Est-ce que c'était de là que venait son aversion pour les célébrités. Et pourquoi ?

Si je n'avais jamais osé insister pour la simple et bonne raison que son mec était ceinture noire de taekwondo et lui monté comme une armoire à glace, je n'en restais pas moins curieux.

— Le métier en soi n'était pas si mal, finit-il par répondre. Les personnes avec qui je travaillais, en revanche... Elles ne me manquent pas.

Il dût accrocher mon regard curieux, puisqu'il soupira et rajouta :

Oui, c'est de là que je tire mon aversion pour les personnes célèbres.

— J'ai rien dit, me dédouanai-je en levant innocemment les mains.

— Tes yeux parlent pour toi.

De nouvelles personnes descendirent, et le bus se vida encore un peu plus. Une fraicheur bienvenue succédait peu à peu à la chaleur suante du centre ville, et je la savourais en envoyant un grand sourire à mon ami pour toute réponse.

— Tu ne veux toujours pas me raconter ta mauvaise expérience ?

Si je lui avais posé la question par SMS, il m'aurait certainement répondu "non.", avec un point bien glacial et désagréable. Là, il allait sûrement juste ignorer ma question.

Mais à mon grand étonnement, cette fois-ci, il n'en fit rien.

Il poussa un nouveau soupir, plus discret, puis il commença simplement en baissant un peu la voix :

— À cette époque là, je bossais pour un gars super connu. Une étoile montante dont on vantait les louanges partout. Il n'était pas franchement méchant, bien que ça n'était pas une crème pour autant. Disons qu'il avait juste un peu pris la grosse tête.

— C'était qui ? demandai-je, ma curiosité décuplée en comprenant qu'il allait finalement me raconter cette histoire.

— Rêve pas non plus, ça je te dirais pas.

— Mais pourquoi... ?

— Parce que, c'est tout. On s'arrête là ou je te raconte la suite ?

— Raconte raconte.

Je cessai de respirer pour lui faire signe que je ne l'interromprai plus, et il leva un instant les yeux au ciel avant de reporter son attention sur la route.

— Et puis, un jour, ce type a découvert que j'étais gay. Il avait croisé mon profil sur un site de rencontre.

Un pli soucieux naquit entre mes sourcils.

— Il t'a pas viré pour ça, quand même ?

— Oh, non. Au contraire. Ça lui a bien plu. S'il ne faisait pas plus que ça attention à moi avant, il a commencé à beaucoup me parler, à chercher mon regard, à me raconter sa vie. En somme, il a commencé à me draguer.

— Oh.

— Je suis rapidement tombé dans ses filets, et on a commencé à sortir ensemble. Bien entendu, c'était une relation cachée, et ce n'était pas toujours facile. Tu dois voir parfaitement de quoi je parle.

La petite pique ne me loupa pas, mais je préférais ne pas l'interrompre, me demandant où allait aller son histoire. Pour l'instant, je ne voyais rien qui justifie le mépris qu'il montrait envers les célébrités depuis qu'on se connaissait.

— Mais je l'aimais, reprit-il en bifurquant dans une rue. Sincèrement. Alors je me disais que je pouvais bien supporter cette situation si c'était pour lui. Puis, il a commencé à être distant, et les rares moments où on pouvait se voir, il n'était pas là, ayant un truc x ou y à faire. Quand il venait, c'était toujours la même chose : il tirait son coup et il repartait. Alors, forcément, j'ai fini par me plaindre, et par lui en parler.

Il lâcha un petit rire jaune.

— Et tu sais ce qu'il m'a sorti, ce crevard ? Que je devais déjà m'estimer heureux de pouvoir être avec quelqu'un comme lui, que plein de personnes rêveraient d'être à ma place, et qu'en gros, je n'avais pas à me plaindre, parce qu'il me faisait déjà un honneur énorme en partageant mon lit.

Je fronçais les sourcils à son annonce.

— Mais c'est un connard.

— À qui le dis tu.

— J'espère que tu l'as quitté.

— Ça n'a pas été aussi rapide, malheureusement, soupira-t-il. Je l'aimais, alors j'ai fermé ma gueule. J'ai commencé à me dire qu'après tout, il avait raison. Il était si formidable, lui, si talentueux, si brillant ; tout le monde l'aimait. À côté, je n'étais qu'un pauvre type qui n'avait pas à me plaindre. Alors j'ai laissé faire.

Il tourna dans une autre ruelle, mais honnêtement, je ne faisais plus du tout attention au paysage qui défilait derrière la fenêtre. Mon attention toute entière était dirigée sur lui et son histoire.

— Plus le temps passait, et moins il me respectait. Il ne se préoccupait que de ses envies, et ce que moi je voulais, il n'en avait rien à faire. Je te passe les détails.

Il fit un signe de main en disant ces mots comme pour éloigner le sujet de lui-même, les sourcils froncés et une légère grimace sur le visage.

— Finalement, il a commencé à voir d'autres gens à côté, et quand je l'ai découvert, il ne s'en est même pas caché. Au contraire. Il m'a ressorti son discours comme quoi je n'étais qu'une merde à côté de lui et que je n'avais pas mon mot à dire. Et je l'ai cru, rajouta-t-il amèrement. J'ai fermé ma gueule, encore une fois. Ça a continué comme ça pendant de longs mois, durant lesquels il ne faisait que me rabaisser - et me baiser, quand il en avait envie - en allant voir à droite à gauche sans le moindre remord.

Sa main se desserra un peu autour du volant en même temps qu'un soupir lui échappait. Il semblait à nouveau détendu, comme il l'avait été depuis le début de la soirée. Moi, je l'écoutais, sans pouvoir m'empêcher de froncer les sourcils à sa place. Seojoon était un ami, et imaginer tout ça... Ça me déplaisait. Vraiment.

Il marqua une courte pause, le temps de s'arrêter à un arrêt et de laisser des passagers descendre, avant de reprendre :

— Pour lui, j'étais acquis. Il n'avait pas à me montrer qu'il m'aimait, puisque tu comprends, formidable comme il était, c'était évident que c'était le cas, ironisa-t-il. Mais un jour, j'en ai eu ma claque. Je souffrais trop, et c'était trop douloureux de voir l'homme que j'aimais partir aux bras d'inconnus dans des soirées où je devais le surveiller, de devoir rester à ses côtés tout le temps à cause de mon métier et de le voir flirter ouvertement avec d'autres gens sans pouvoir rien faire. J'ai voulu le quitter. Et ça, il l'a très mal pris. Il a commencé à me raconter comme quoi je ne pouvais pas, et que si je le faisais, je pouvais dire aurevoir à mon contrat, que je serais sans emploi, et que ce serait bien fait pour ma gueule de misérable. Alors pendant un moment, je n'ai rien dit, une nouvelle fois.

Décidément, chaque nouvelle phrase qu'il prononçait me faisait un peu plus perdre foi en l'humanité. Ça existait vraiment, des connards pareils ? Faire du chantage sur le travail en plus... Je comprenais mieux pourquoi Seojoon avait toujours l'air si réticent à se remémorer cette période de sa vie. Un peu plus et je m'en voudrais presque d'avoir posé la question.

À côté de moi, il ne semblait néanmoins pas me le reprocher, et il conclut simplement :

— Et puis je l'ai envoyé chier. Et je me suis retrouvé au chômage.

Je le regardais, les sourcils froncés.

— Mais quel connard...

Seojoon haussa les épaules, défaitiste.

— C'est comme ça. J'étais jeune, dépendant de lui, amoureux, et il en a profité, c'est tout. Depuis, je suis prudent.

Je marquai un silence. L'histoire qu'il venait de me raconter tournait en boucle et en boucle dans ma tête, sans s'arrêter. J'y lisais quelque chose que je n'étais pas sûr d'avoir envie de voir.

— ... Tu sais, commençai-je après un moment, toutes les célébrités ne sont pas comme lui.

— J'imagine. Mais une fois m'a suffi.

Taehyung n'est pas comme lui.

Il me jeta un regard en coin.

— Je n'ai pas parlé de ton mec, là.

— Tu l'as sous-entendu.

Il soupira, avant de tourner le volant vers la gauche.

— Évidemment que je l'ai sous-entendu. Je ne peux pas m'empêcher de me revoir plus jeune dans ta relation, alors je m'inquiète.

— Tu fais des amalgames. Ma relation avec Tae n'est pas la même.

— Probablement pas, et heureusement d'ailleurs. Mais tu admettras qu'il y a tout de même des points communs. Il est célèbre, il te délaisse souvent, et toi, tu es jeune et aveuglement amoureux de lui ; en plus d'être dépendant financièrement.

Je ne répondis pas immédiatement. Il n'avait pas tellement tort, en soi. Mais il y avait une différence flagrante : le gars dont il m'avait parlé était un connard qui allait voir ailleurs, et qui lui faisait du chantage. Pas Taehyung.

Un petit soupir m'échappa, tandis que je regardais la ville plongée dans la nuit défiler à travers le pare-brise du bus.

— Hm. Peut-être.

Il m'adressa un petit sourire contrit en m'entendant baisser la voix.

— Ne te prends pas trop la tête avec tout ça, ok ? me lança-t-il. Juste, fais attention à toi.

— J'essaye.

J'étais intimement persuadé que s'il n'était pas en train de conduire, il aurait posé sa main sur mon épaule pour la serrer doucement dans une pression réconfortante. À la place, il se contenta de m'envoyer un regard d'encouragement qui me mit du baume au cœur.

Le silence s'installa un instant.

Le bus s'arrêta à un nouvel arrêt, et mon regard s'accrocha à la ruelle adjacente, que je connaissais très bien. Nous n'étions pas très loin de la banlieue où j'avais vécu avec mon père. Sa maison devait être à quoi, deux rues ? Avant, quand j'y rentrais encore régulièrement, je m'arrêtais à l'arrêt d'après. Je n'avais même pas remarqué que le bus que conduisait mon ami suivait la même ligne qui me ramenait chez moi après le lycée.

Je pensais alors à mon père, et soudain, j'eus envie de le voir.

Je me tournai vers Seojoon pour demander :

— Tu peux t'arrêter à l'arrêt suivant ?

— Euh, oui ? fit-il en haussant un sourcil confus. Tu veux descendre ici ?

— Ouais.

— C'est paumé comme endroit.

— Mon père habite dans le coin.

Il hocha la tête pour toute réponse.

Quelques minutes plus tard, il me lâchait donc au petit abribus qui m'avait vu passer de nombreuses fois durant mon adolescence, non sans m'avoir salué et fait promettre de lui envoyer de mes nouvelles bientôt. Je regardais son bus partir au loin, l'air frais de la nuit m'arrachant un frisson. J'avais du mal à mettre des mots sur comment je me sentais à l'instant. Bien, sûrement.

Toute cette discussion avec lui m'avait apaisé, mais je ne comprenais pas vraiment pourquoi. Je paniquais pour rien, et ça aurait dû au contraire me réveiller de nouvelles angoisses, me connaissant. De nouvelles craintes quant à Taehyung.

À la place, j'avais simplement l'impression qu'il était là pour moi, et ça suffisait à me rassurer.

Tout n'avait pas été simple ces derniers jours.

Je m'étirais et pris la route de la maison de mon père, ne tenant pas spécialement à m'attarder plus longtemps dans la nuit. Il était tard, je ne l'avais pas prévenu, et je n'avais même pas d'affaires ; il allait être surpris de me voir débarquer comme ça. J'espérais qu'il ne dorme pas. Enfin, au vu de sa tendance inquiétante à l'insomnie qu'il se traînait depuis quelques années, je ne me faisais malheureusement pas trop de soucis.

Mes pieds me guidèrent par automatisme devant la porte d'entrée, et je frappais après avoir constaté que la lumière du salon était en effet allumé.

Mon père apparut quelques secondes plus tard sur le palier, l'air confus.

— Jungkook ? Qu'est-ce que tu fais là ?

— Je passais dans le coin, je me suis dit que c'était l'occasion de te voir. Ça fait longtemps.

— À cette heure-ci ?

— Je te dérange ?

Presque immédiatement, il secoua négativement la tête, et un petit sourire succéda à son regard perplexe.

— Non non, pas du tout. Au contraire. Rentre, rajouta-t-il en se décalant.

Je ne me fis pas prier. Il me salua d'une pression pudique sur l'épaule, puis me proposa qu'on aille se poser dans le salon pour discuter un peu. Je me trouvais donc là. Dans la maison de mon lycée. Je ne m'en étais pas rendu compte, mais ça faisait un petit bout de temps que je n'y avais pas posé les pieds ; ça m'avait manqué.

Mon père disparu dans la cuisine quelques instants, et revint avec un chocolat chaud. Je le regardai, heureux qu'il se rappelle encore de mes goûts, et étonné quant à la rapidité qu'il avait mis à le faire. S'était-il reconverti en magicien durant mon absence ?

— J'allais me faire une tisane, donc il me restait de l'eau chaude, expliqua-t-il en me le donnant. Tiens.

— T'es le meilleur des papas.

Pour toute réponse, il m'envoya un sourire ravi, et vint s'asseoir sur le canapé à son tour, sa propre tasse entre les mains. Il avait l'air fatigué. Ses problèmes d'insomnies ne se réglaient vraisemblablement pas, et quand bien même ça m'arrangeait dans le sens où comme ça j'avais pu venir le voir ce soir, je préférerais largement le retrouver plus en forme.

— Le médecin ne t'a pas prescrit de nouveaux somnifères ? demandai-je face à ça.

— Pourquoi ?

— Tu devrais dormir à cette heure-ci.

Il fit un signe de main pour éluder la question.

— Ne t'inquiète pas pour moi, va. Parle-moi de toi plutôt. Je suis content de te revoir. Alors, quoi de neuf depuis la dernière fois ?

Je lui adressai un léger sourire, mais le coeur n'y était pas totalement. Je n'allais pas lui raconter tous mes problèmes et lui dire que niveau moral, ce n'était pas le feu. Il avait ses propres soucis, je n'avais pas envie de l'inquiéter plus.

Je haussai donc les épaules, et lâchai simplement :

— Rien de spécial. J'ai revu Yeonjun, et il m'a proposé de le photographier professionnellement pour un futur shooting, donc je suis content.

C'était à moitié un mensonge. Le shooting en question n'arriverait pas tant que mon cadet était encore sous contrat avec Celine ; mais ça, il ne le savait pas, et j'avais envie qu'il soit heureux.

— Oh, bravo. Je suis content pour toi, répondit mon père avec un sourire fier. Yeonjun, c'était ton ami qui était en seconde ?

— C'est ça. Celui qui est devenu mannequin, tu sais.

— Ah oui. Lui.

J'aurais mis ma main à couper qu'il se remémorait les expériences capillaires de mon cadet, et ça me fit doucement sourire. Yeonjun était difficilement oubliable grâce à ça.

Mon père bu rapidement une gorgée de sa tisane avant de s'enthousiasmer :

— Et bien, c'est formidable mon grand, c'est un premier pas dans le monde professionnel de la photographie !

Qu'il paraisse autant réjoui de ça me touchait. Il était le seul à ne pas avoir remis en question mon envie de faire de la photographie quand je lui en avais parlé. Je savais qu'il s'inquiétait malgré tout, parce que ce n'était pas un métier facile, stable, et sécurisé comme les parents voudraient pour leurs enfants ; mais il faisait en sorte de me soutenir et c'était tout ce qui comptait.

Je lui souris une nouvelle fois, et cette fois-ci ce sourire était un peu plus sincère.

— Merci.

— Et avec Taehyung ? Ça se passe bien ?

Oula. Sujet compliqué en vue. Mon père n'étant clairement pas du genre à suivre les magazines people, il n'avait sûrement pas vu toute cette histoire avec Hayoon et Taehyung dans les médias. Et tant mieux. Je préférais ne pas en parler.

— Oui, super, mentis-je. Il vient de terminer de tourner son prochain film.

— Tu le féliciteras de ma part.

— Tu pourrais même le faire de vive voix, si ça te dit. Pourquoi on s'organiserait pas un petit repas, ici où chez Tae' ?

— Ce serait avec plaisir.

Il y eut alors un petit silence. Court, mais je connaissais suffisamment mon père pour savoir qu'il allait me dire un truc qui ne me ferait certainement pas très plaisir... Je le vis hésiter, avant qu'il ne lance finalement :

— J'ai eu ta mère au téléphone, au fait.

Immédiatement, je me crispai.

— Apparemment, tu ignores ses appels et répond rarement aux SMS. Elle s'inquiète, tu sais ?

— Elle est quand même culottée de passer par toi pour ça.

— Jungkook...

— Quoi ? grognai-je. Corrige moi si je me trompe, mais elle t'adresse à peine la parole habituellement.

Mon père lâcha un petit soupir. Il reposa sa tasse sans en avoir bu une gorgée, et contrecarra d'une voix fatiguée :

— Ce n'est pas la question, là. La question, c'est que tu lui fais de la peine à l'ignorer de la sorte.

Ces mots me serrèrent le coeur. J'en étais parfaitement conscient, pourtant. Il ne fallait pas être devin pour deviner que ma tendance à l'éviter et à trouver des excuses pour ne pas la voir risquait de la blesser ; c'était ma mère, après tout. Et ce serait même franchement mentir de dire que je ne souffrais pas de la situation également.

Mais je ne savais pas.

Ma mère n'avait jamais voulu accepter Taehyung. Ni même faire un effort pour essayer de me comprendre. La pillule de mon homosexualité avait du mal à passer, et même maintenant, elle était persuadée que ce n'était qu'une "phase", un moment d'égarement, et que je reprendrai raison un jour où l'autre.

Ça ne me donnait pas franchement envie de la voir.

Je détournai le regard tout en lâchant un petit reniflement dédaigneux, pour tenter de cacher à quel point j'étais affecté. Mon père me connaissait sur le bout des doigts, alors c'était probablement inutile, mais ça ne coûtait rien d'essayer.

— Elle me fait de la peine, elle aussi, rétorquai-je.

Je ne le voyais pas, mais je sentais son regard concerné sur moi.

— Elle ne pense pas à mal... tenta-t-il de modérer.

— Ouais, bah qu'elle pense à mal ou pas, je m'en fiche. Elle refuse de rencontrer Taehyung, d'accepter qui je suis, et même ce que j'ai envie de faire. Je sais pas à quoi elle s'attendait, mais évidemment que je vais pas continuer à lui sauter dans les bras comme si de rien était.

Mon père soupira à nouveau devant mon ton buté. Il y eut un court silence, probablement durant lequel il cherchait ses mots ; il était loin d'être le meilleur avec les discours. C'était quelqu'un de maladroit dans ses paroles et il avait souvent du mal à trouver une formulation juste. Aujourd'hui encore n'échapperait sûrement pas à la règle.

— Laisse lui le temps, essaya-t-il finalement. Elle finira par comprendre, comme moi.

— Toi, il t'a fallu un mois, pas quatre ans... grommelai-je.

— Ce n'est pas si simple, Jungkook, soupira-t-il. Ta mère a grandi dans un environnement plutôt fermé d'esprit, et quand on était jeune, l'homosexualité était... Taboue.

— Parce que tu crois qu'on peut le gueuler sur tous les toits maintenant ?

— Non, mais tu admettras que la parole est quand même plus libérée sur ce sujet là. Notamment dans les médias. Ce n'est certes pas totalement accepté, mais au moins, on en parle, y a des débats, et des manifestations. Enfin, tu vois ce que je veux dire.

J'aurais pu continuer à nier, mais ça aurait été de la mauvaise foi, alors je préférai me taire. Oui, probablement que le sujet était encore plus compliqué à aborder à l'époque de mes parents, je voulais bien l'entendre. Vu le nombre de progrès qu'on avait encore à faire, je n'imaginais même pas à quel point ça devait être compliqué. Mais ça n'excusait pas tout. Ma mère devrait pouvoir faire comme mon père, et finir par passer au-dessus. J'étais son fils, merde. Et ça me blessait qu'après autant de temps, elle soit toujours aussi fermée d'esprit à cet égard.

Je commençais à perdre patience de la voir un jour changer.

— Hm, finis-je par admettre à contre-coeur. Mais quand même. Ça me blesse.

— Je sais. J'ai essayé de lui en parler.

— Et elle a dit quoi ?

— Elle voulait t'inviter à passer un week-end chez elle. Si tu répondais à ses appels, tu le saurais.

— Sans Taehyung, j'imagine, commentai-je amèrement.

— Je ne sais pas.

Il s'éloigna du dossier du canapé pour pouvoir se tourner totalement face à moi, et accrocha mon regard, avant de continuer :

— Parle en avec elle. Tu sais comment c'est, entre elle et moi, et on a pas plus discuté que ça... Alors pose lui la question toi-même, ok ? Mais je t'assure qu'elle avait très envie de se réconcilier avec toi, je pense que les choses peuvent évoluer positivement.

— Si tu le dis...

Moyennement convaincu, je fis tourner mon chocolat chaud dans ma tasse, le cœur morne. J'avais envie d'y croire, évidemment. Mais je n'étais pas sûr de pouvoir supporter une nouvelle déception. Surtout en ce moment, où ma vie privée et sentimentale était déjà bien assez chaotique comme ça.

Mon père sembla remarquer que le sujet me plombait, et il n'insista pas plus. Il me fit simplement promettre d'y penser avant de changer totalement de conversation et de me proposer de regarder avec lui le premier épisode d'une série qui lui faisait de l'oeil. Et comment refuser. Passer du temps avec lui m'avait manqué. Il lança tout ça sur la télé, et revint s'asseoir à côté de moi, avant d'enfin boire sa tisane qui devait avoir franchement commencé à refroidir.

Bon, au final, la série était moisie, et on passa plus de temps à se râler ou à se marrer sur le scénario pourri qu'à réellement la regarder, mais ce n'était pas grave, ça restait un bon moment. Ce n'est à trois heures du matin qu'on décida finalement d'aller se coucher, et je montai dans ma chambre d'ado après l'avoir salué, le coeur plus léger. Je me glissai sous les draps sans prendre la peine de regarder autour de moi de peur d'être frappé par la nostalgie de mon lycée, et puis parce sans mentir, j'étais franchement claqué. Et quelques minutes plus tard seulement, je sombrais dans les bras de Morphée ; plus apaisé que depuis plusieurs semaines.

Après tout, Taehyung avait enfin fini son film, j'avais pu discuter avec Seojoon, prendre une décision par rapport à ma fac, et revoir un peu mon père. Que des raisons d'être heureux.

J'attendrai demain pour me prendre la tête sur le problème avec ma mère et tout le reste.



__________



Le programme « me prendre la tête sur le problème avec ma mère » me prit toute la journée suivante, et celle d'après encore.

Je n'arrêtais pas d'y penser, de peser le pour et le contre sur si oui ou non je devrais l'appeler.

Oui, ça serait cool : mes mauvais rapports avec ma mère me plombaient le moral, ce serait une occasion de se réconcilier, et en plus de voir ma toute petite sœur.

Non, ce ne serait pas cool ; j'avais trop peur d'être blessé. Et j'étais en colère.

Finalement, c'est Taehyung qui termina de me convaincre un soir où le sujet arriva sur la table après un énième appel ignoré. Avachis dans le canapé comme régulièrement, il m'incita à lui laisser une chance, en me disant que sinon, j'allais finir par le regretter.

Et je crois qu'il avait raison.

Je pensais à ma demi-sœur, toute jeune, que ma mère avait eu avec son nouveau compagnon il y a de cela presque quatre ans, et que je n'avais pas vu depuis quasiment un an. Elle devait avoir tellement grandi, déjà. L'idée de ne pas avoir pu y assister et de ne pas avoir été un grand frère présent me fit mal au cœur.

Je regrettais déjà, à vrai dire.

Si ma relation avec ma mère n'était pas au beau fixe en ce moment, je ne pouvais pas la laisser abîmer aussi mes liens avec ma sœur.

Mes épaules s'affaissèrent, et je capitulai finalement. Sans m'éloigner de Taehyung qui m'avait dans ses bras pour rattraper son quota « câlins » qui avait été terriblement vide avec son boulot, je maugréai en tendant la main :

— Passe mon tel...

Il ne se fit pas prier. Mon portable dans mes mains, j'inspirai un grand coup, puis appuyai finalement sur la petite icône appel à côté du contact de ma mère.

La sonnerie retentit trois fois, puis sa voix retentit à l'autre bout du combiné :

— Jungkook ?

— Tu m'as appelé ? demandai-je droit au but.

— Oui, je voulais te parler. Je te dérange pas ?

— Hm, non. Qu'est-ce qu'il y a ?

Taehyung m'incita du regard à être un peu plus tendre dans ma voix, et je retins un soupir. À l'autre bout du fil, ma mère paraissait au contraire faire tous les efforts du monde pour paraître légère et agréable, malgré la tension de ces derniers mois.

— Je voulais te proposer de passer à la maison le week-end prochain. Junghyun sera sur Busan aussi, ce sera une occasion de se retrouver en famille !

Je sentis un poids tomber dans ma poitrine.

Je savais bien qu'elle essayait d'arranger les choses entre nous, mais j'aurais préféré qu'elle le fasse en s'excusant plutôt qu'en faisant mine de rien. Parce que pour le moment, la seule idée de me rendre chez elle me nouait le ventre.

Néanmoins, l'idée de revoir mon grand-frère et ma petite sœur ne me déplaisait pas. Ça faisait très longtemps que je n'avais pas vu Junghyun, et même si nous n'étions pas plus proches que ça, je n'avais rien contre lui.

À part peut-être un peu d'amertume vis à vis du fait qu'il ne m'ait pas soutenu face à ma mère.

Peut-être.

— Mmh.

— Ça veut dire oui ?

Son ton plein d'espoir me serra le cœur. J'échangeais un regard avec Taehyung, puis me décidai finalement :

— C'est d'accord, mais à une seule condition.

— Laquelle ?

— Taehyung vient aussi.

Mon copain me jaugea d'un air surpris, tandis qu'un silence prenait place dans la discussion. Elle ne prononça rien pendant de longues secondes, et je crus bien qu'elle allait à nouveau refuser, et me dire qu'elle ne « voulait pas rencontrer ce garçon qui profitait de mon immaturité pour se mettre en couple avec moi », quand son ton confus me répondit :

— Je... Enfin, pourquoi ?

— Taehyung vient, c'est tout, répétai-je d'un ton sans appel. Sinon ne compte pas sur moi pour être là.

— ... Bon, bafouilla-t-elle légèrement, vraisemblablement pas sûre d'elle. Si tu y tiens, ton, euh... Ton ami peut venir, oui.

Vraiment ?

Je n'étais pas sûr d'avoir bien entendu. Qu'elle ait utilisé le mot « ami » aurait pu me faire soupirer, mais rien que l'idée qu'elle accepte de faire un effort me paraissait déjà tellement inespéré que ça n'avait aucune importance. Je devais avoir rêvé.

— Pour de vrai ?

— Oui. Pour de vrai. Si ça peut me permettre de te voir. Ça fait longtemps que tu n'es pas rentré, tu me manques.

Mon cœur se réchauffa doucement, et je me tournais vers Taehyung, qui me sourit tendrement. Je lui rendis.

J'avais encore bien du mal à y croire ; mais je pourrais enfin l'emmener chez ma mère, et qui sait, peut-être que mes relations avec elle pourraient aussi s'apaiser. Peut-être qu'elle allait comprendre. Peut-être qu'on pourrait de nouveau être une famille unie.

Avec Taehyung.










_____oOo_____

Coucou tout le monde, me voici de retour !!

J'espère que vous allez bien et que vous avez passé un bon mois d'avril ♡♡ Et pour ceux qui, comme moi, arrivent en période d'examens ou de partiels, fighting ᕦ⁠ʕ⁠ ⁠•⁠ᴥ⁠•⁠ʔ⁠ᕤ

En tout cas, j'espère que ce petit chapitre vous aura plu !

Il n'était pas prévu à la base, mais je ne suis pas mécontente de l'avoir rajouté, ça m'a permis de montrer un peu plus le personnage de Seojoon et qu'on revoie papa Jeon :D

D'ailleurs, je suis curieuse : vous en pensez quoi de Seojoon ?

Et de la situation familiale de Jungkook ?

Dans le prochain chapitre, on rencontrera sa mère et son frère, espérons que ça se passe bien 👀

Bref, voilà voilà, à la semaine pro ou celle d'après pour le chapitre suivant ( il est déjà rédigé intégralement hehe :3 ) ;D

Merci beaucoup de me lire et n'hésitez pas à laisser un commentaire pour me donner votre avis ♡♡

( Et merci à Anevy_de_Girondif que j'arrive pas à mentionner pour la correction de ce chapitre ! )

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