Si m'endormir dans les bras de Taehyung avait été agréable, me réveiller seul dans notre grand lit froid l'était beaucoup moins.

J'avais beau me douter qu'il serait déjà parti travailler à mon réveil, ça n'enlevait en rien le petit pincement au cœur qui vint me nouer la gorge, et c'est avec un grand effort que je me levais finalement. Si ça ne tenait qu'à moi, je serais bien resté toute la journée prostré sous la couette à attendre son retour. Cette perspective me semblait mille fois plus attirante que celle d'errer à nouveau seul dans notre grand appartement.

C'était quelque chose qui m'avait frappé seulement récemment, ça. La taille démesurée de l'endroit où nous vivions. Quand il était là, sa présence comblait les lieux et leur donnait vie, mais plus je passais du temps seul ici, plus un drôle de vertige me prenait. J'avais parfois l'impression que l'immense salon allait m'aspirer, comme s'il devenait soudain semblable à un trou noir, ou à tout autre phénomène cosmique terrifiant. C'était idiot. J'étais en plein Séoul, pas dans l'espace. D'autres fois, c'était la hauteur des longs murs blancs qui me donnaient le tournis. S'il n'y avait pas eu les grands posters de cinéma pour en recouvrir une partie, je crois que j'aurais fini par craquer et par y dessiner moi-même n'importe quel petit gribouillis pour les habiller. Leur blancheur immaculée ne faisait que renforcer la sensation de grandeur de la pièce.

Et si l'appartement était globalement très agréable à plusieurs, il devenait presque froid lorsque la solitude le frappait.

Au même moment où ces pensées fusèrent dans mon esprit, un petit jappement retentit à mes pieds, et je baissai la tête pour observer le petit chien qui était sagement assis devant moi. On aurait dit qu'il voulait me contredire et me lancer « Eh, mais non, je suis là moi aussi. » L'idée me fit sourire. Mais c'était stupide aussi, Yeontan n'avait aucun fichu moyen de lire dans mes pensées, un peu trop mornes à mon goût ce matin. Il devait sûrement juste avoir faim ou quelque chose du genre.

« Hey toi. » souris-je néanmoins en m'accroupissant pour lui donner une petite caresse sur le front. « Tu viens me tenir compagnie ? »

Il y répondit par un drôle d'aboiement excité, puis tourna trois fois sur lui-même avant de descendre en courant les escaliers. C'était d'ailleurs un miracle qu'il arrive à les parcourir aussi vite avec ses toutes petites pattes.

Je m'engageai à sa suite, et le trouvais sans surprise posté dignement devant son bol de croquettes – vide, évidement. Voir que j'avais eu raison et qu'il n'en avait rien à faire de moi m'arracha un petit soupir, mais je passais outre, même si l'envie de bouder ce chien était forte. Je me voyais mal dire à Taehyung lorsqu'il rentrerait ce soir « J'ai pas nourri Yeontan de la journée parce qu'il m'a pris uniquement pour un distributeur de croquettes et que ça m'a vexé. ». Il me ferait la gueule à coup sûr, ce clébard était la prunelle de ses yeux.

À moitié à contre cœur, je saisissais donc le paquet de croquettes du petit démon qui coûtait la peau du cul, et en versai une part raisonnable dans son bol. Il se précipita dessus pour les manger sans même me remercier, et je marmonnais dans ma barbe inexistante :

« Dis pas merci surtout, petit ingrat... »

Évidemment, il m'ignora royalement.

Évidemment.

Un nouveau soupir glissa d'entre mes lèvres, et je traînais des pieds jusqu'au canapé dans la pièce d'à côté avant de me laisser lourdement tomber dessus. Bon, désormais, opération trouver quoi faire tout seul dans un gigantesque appartement de 120 mètres carrés. En soi, dis comme ça, il y en avait des options différentes.

Je pouvais par exemple faire de la gymnastique, l'espace derrière le canapé étant largement assez grand pour me permettre de faire des roues et des roulades dans tous les sens.

Ou alors, plus drôle encore, de l'acrosport.

Je me ravisais. De l'acrosport tout seul c'était vraiment la mort du fun.

L'idée fugace de créer une tyrolienne qui irait de l'étage du haut jusqu'au canapé me traversa l'esprit, mais je la fis taire rapidement, pour des raisons évidentes. Même si l'idée de transformer cet appartement en accrobranche était tentante, je doutais que Taehyung serait très heureux s'il rentrait et qu'il me voyait mort stupidement pour avoir sauté de l'étage-mezzanine sur une malheureuse tyrolienne fait maison.

Non, il fallait que je trouve un truc plus simple. Plus classique surtout.

Je pouvais regarder un film ou une série. Le problème, c'est que Taehyung étant un grand passionné de cinéma, en plus d'avoir l'impression d'avoir déjà tout vu, j'avais parfois un peu envie de faire autre chose.

Dans le même genre, je pouvais regarder la télé. Sauf que comme je n'avais pas envie de tomber sur des trucs anxiogènes ou complètement cons, cette idée passait à la trappe tout de suite.

Ou alors, je pouvais faire quelque chose de productif. Me lancer dans l'apprentissage de la musique. Profiter une énième fois de la superbe vue de notre appartement pour prendre des jolies photos. Apprendre à dessiner une casserole, pourquoi pas. Ou débuter l'écriture d'un roman dystopique. Pourquoi pas même me mettre au taekwondo pour postuler au NIS et devenir un agent secret.

En soi, ce n'étaient pas les options qui manquaient. Je crois que c'était surtout le moral.

J'avais envie que Taehyung soit là.

Et je me sentais seul.

Affreusement seul.

Allongé de tout mon long sur le canapé, le regard rivé sur le plafond excessivement haut, je laissai mes pensées dériver à la recherche de quelqu'un qui pourrait venir me tenir compagnie, là, maintenant, et combler un peu le vide de cette trop grande pièce. Minhyunk et Seojoon étant des adultes responsables, ils devaient sûrement travailler à cette heure-ci. Namjoon aussi, sans aucun doute. Mina avait profité de l'obtention de son diplôme pour rendre visite à sa famille, je n'allais pas la déranger inutilement. À cette remarque, mes pensées se tournèrent vers mon père. Il faudrait que je passe le voir à l'occasion. Mais là, en pleine semaine, il était probablement aussi au boulot, en train de se tuer à la tâche dans une grande entreprise qui le sous-payait.

Continuant ma recherche mentale, je songeais à Yeonjun. Yeonjun, c'était un type plus jeune de deux ans que j'avais rencontré au lycée, et avec qui j'avais étonnement gardé contact. On se voyait rarement, mais on s'entendait bien. Il était devenu mannequin pour des petites marques de vêtements peu connues par-ci par-là, et il m'arrivait parfois de tomber sur sa tête dans deux trois magazines. Ça me faisait toujours drôle. Avec mon entourage, il aurait presque été facile de penser qu'au final ce n'était pas si difficile que ça de devenir célèbre. Je pouvais peut-être en profiter de ma solitude pour l'inviter et le revoir un peu. Ça commençait à remonter, depuis la dernière fois.

L'espoir plein au cœur à cette idée, je lui envoyais donc un SMS rapide pour lui demander comment il allait et si ça lui disait qu'on sorte ensemble dans la journée.

Ce qui était cool avec lui, c'est qu'en tant que jeune connecté, il répondait toujours super vite.

Ce qui était moins cool, c'était qu'il était toujours super occupé.

Aussi je n'eus pas à attendre plus de deux minutes pour recevoir une réponse négative qui me disait qu'il aurait « trop trop aimé », mais qu'il était à Daegu en shooting et que c'était un peu relou de prendre le train d'aussi loin. Mon sourire s'évapora aussi vite qu'il était apparu.

Et à nouveau, je me retrouvais seul.

Le regard dans le vide, complètement désœuvré, je tentais de ravaler les larmes qui essayaient de se frayer un passage jusqu'à mes yeux. Ça ne me servirait à rien, de pleurer. Et puis, c'était ridicule. J'étais un grand garçon, je pouvais bien supporter quelques mois avec un copain très absent. Je savais parfaitement que ce n'était pas de sa faute, en plus : toute l'équipe du tournage était en période de rush pour terminer le film avant les échéances imposées par le producteur, et j'étais intimement persuadé qu'il préférerait largement passer plus de temps avec moi.

Du moins, j'espérais.

S'il n'avait pas rencontré quelqu'un d'autre de formidable sur le tournage entre temps.

Je laissai échapper un grognement de mécontentement à mes propres pensées, et pour les faire taire, attrapai machinalement la télécommande pour lancer une chaîne quelconque et combler un peu le silence étouffant de l'appartement. Celui-ci fut bientôt remplacé par la voix nasillarde d'une héroïne de série sans intérêt, et je fermais les yeux dans un soupir fébrile.

Les émotions montaient trop vite en moi, ces derniers temps.

Je me sentais à fleur de peau sans même savoir réellement pourquoi, et cette fâcheuse manie que les larmes avaient à me monter aux yeux aussi rapidement que la colère me prenait la gorge de temps en temps commençait sérieusement à devenir fatigante.

Que c'était épuisant, de devenir un adulte.

Parfois, quand je me perdais un peu trop longtemps dans mes pensées, je me disais que j'aimerais bien remonter le temps. Revenir avant quoi, je ne sais pas, mais à l'époque où les problèmes qui me pourrissaient la tête étaient encore supportables, et où ils ne s'accumulaient pas l'un sur l'autre vicieusement pour tous éclater d'un coup.

Très souvent aussi, sur les bancs de la fac, je me surprenais à rêvasser du lycée. Pourtant, j'avais tanné mon père pendant ces trois années en lui disant combien j'en avais marre, combien j'avais hâte de le quitter et de faire autre chose. Il me semblait désormais que ce Jeon Jungkook là lycéen n'avait pas eu conscience de la position confortable dans laquelle il se trouvait. Le lycée, c'était peut-être chiant, ça paraissait peut-être vain, mais au moins j'y allais et je ne me posais pas de question. Je me levais le matin, je prenais les transports en commun, je me rendais en cours, mangeait le midi avec Namjoon et Jimin, terminait mon après-midi, puis rentrait chez moi le soir et fonçait glander dans ma chambre. Point barre. Et si la farfelue idée de sécher les cours me prenait, mon père me donnait un bon coup de pied au cul et je m'y rendais en traînant des pieds.

Ça paraissait si simple, comparé à ces trois années de fac que je m'étais enfilé. Je ne comptais plus le nombre de fois où j'avais été à la limite d'abandonner mes études, de tout envoyer balader et de partir me lancer dans le premier petit job qui me passerait sous la main. Heureusement, Namjoon avait été là. Lui-même avait décidé de quitter sa superbe école d'ingénieur après seulement trois mois, et il enchaînait maintenant les petits boulots ingrats pour payer son petit studio de 20 mètres carrés en périphérie du centre de Séoul. Il m'avait énormément soutenu moralement.

Au même moment où ces pensées fusèrent dans mon esprit, mon téléphone vibra contre mon ventre. Je le redressais face à mes yeux sans grand espoir, avant de sentir mon coeur se réchauffer doucement en lisant le SMS qui apparaissait sur l'écran d'accueil.

namjoon : Hey Kook, j'ai mon aprem de libre ! Ça te dit une petite soirée tranquille chez moi ?

Parfois, je me disais sérieusement que Namjoon devait avoir un sixième sens pour toujours être là quand j'en avais besoin.

__________

Le studio de Namjoon était rudimentaire : deux pièces, dont une qui faisait office de cuisine-bureau-chambre-salon, et une qui contenait salle de bain et toilettes. Les murs de sa résidence étaient tous tristement gris, et le faux carrelage n'en menait pas large non plus.

Et pourtant. Chaque fois que je mettais un pied chez lui, je me sentais bien, à mon aise. Ce n'était pas particulièrement bien rangé – c'était même le contraire : si j'avais appris à être un minimum ordonné avec l'âge, Namjoon semblait avoir appris à devenir bordélique –, mais ça respirait la vie. C'était chaleureux. J'adorais me poser sur son canapé-lit qu'il dépliait à chaque fois que je venais pour discuter de tout et de rien.

Cette fois-ci ne fit pas exception à la règle.

Tantôt allongés, tantôt assis, on parlait depuis déjà deux bonnes heures. Je lui avais raconté mon désastreux entretien d'embauche, ce à quoi il m'avait répondu en posant une main compatissante sur mon épaule. Lui venait de terminer un CDD qui n'avait pas été renouvelé, et allait donc devoir se retrouver à bosser à McDo pour quelques mois.

On formait une belle équipe, tient.

« Je passerais manger dans ton McDo tous les jours.

- Pour me voir ou pour m'embêter ?

- Les deux, voyons. J'ai toujours rêvé de jouer les clients relous.

- Tu vas surtout finir avec le diabète au bout d'une semaine, si tu veux mon avis. »

Factuel. Je ne me risquerais pas à manger à McDo quotidiennement.

Je lâchai un petit rire, puis haussai sommairement les épaules et tendant le bras pour aller chercher le paquet de chips qu'on avait ouvert un peu plus tôt. Il piocha dedans à son tour.

« Et sinon, » reprit-il en mâchonnant sa chips. « Ça s'est bien passé hier ?

Je relevai un regard confus vers lui.

« Hier quoi ?

- C'était ton anniversaire de couple avec Taehyung, non ? »

Ah.

Namjoon et sa mémoire d'éléphant.

J'aurais dû m'en douter. Et dire qu'il avait eu la mention très bien au bac, pour se retrouver finalement seulement quatre ans plus tard à signer un contrat avec McDo. Comme quoi, ces bouts de papier pour lesquels on nous foutait la pression pendant toute notre scolarité ne voulait rien dire. Jimin ne l'avait pas eu, lui, et ça ne l'empêchait pas de réussir plus brillamment que nous trois.

Penser à lui devant Namjoon me rendit soudain mal à l'aise, et je m'empressai de répondre pour l'éloigner de mes pensées :

« Tu me fais presque peur parfois à tout retenir comme ça. »

Il leva les yeux au ciel, un léger sourire amusé aux lèvres.

« Ça ne répond pas à ma question. »

Je pris un temps avant de dire quoique ce soit en plus. Croquant distraitement dans une chips qui croustilla sous ma dent, je me remémorais la soirée d'hier, et me posais sérieusement la question. Est-ce que ça s'était réellement mal passé juste à cause de notre prise de tête ? Techniquement, ça n'avait été qu'une infime partie de notre anniversaire...

« Ouais, plutôt bien. » répondis-je finalement honnêtement sans parvenir à retenir un léger soupir.

- Ça n'a pas l'air, » fit-il constater face à ça.

- On s'est un peu pris la tête en fin de soirée. Il m'a proposé une ''stratégie'' pour que les médias nous foutent la paix en me disant qu'il pourrait faire semblant d'être en couple avec une amie à lui qui est aussi actrice, et je l'ai mal pris. Mais à part ça, c'était super.

- Oh. »

Oui, oh.

Y repenser me plomba de nouveau le moral.

« Et t'en penses quoi de son idée ? »

Je secouais légèrement la tête.

« Je sais pas trop. Je n'ai pas réellement pris le temps d'y réfléchir, avouai-je simplement. Au fond, j'imagine que ce n'est pas si bête...

- Mais tu n'as pas envie.

- Évidemment que j'ai pas envie, moi j'aimerais juste qu'on nous fiche la paix et qu'on puisse s'aimer tranquillement. Rien que l'idée de voir ces foutus médias compter son histoire d'amour avec une illustre inconnue me laisse un goût amer dans la gorge. »

Namjoon ne répondit pas tout de suite, l'air concerné, comme s'il avait compris qu'il y avait un « mais » qui allait venir. Il posa silencieusement sa main sur la mienne pour me faire signe qu'il m'écoutait, et je le remerciai mentalement de me laisser le temps de poser mes pensées. Puis, finalement, je laissai échapper du bout des lèvres :

« Mais je n'ai pas non plus envie qu'on continue éternellement à devoir éviter le moindre geste dès qu'on est en dehors de chez nous à cause de ces fichues rumeurs qui nous pourrissent la vie. Si son idée peut nous permettre de nous aimer un peu plus librement, alors... Pourquoi pas, j'imagine. »

Avouer cela me brûla les lèvres, mais c'est vrai que si je prenais du recul cinq secondes, je me rendais bien compte que la proposition de Taehyung tenait la route. Elle pourrait même avoir un effet franchement positif sur notre couple.

Namjoon m'adressa un petit sourire compatissant, avant de me frotter amicalement l'épaule.

« Tu devrais en reparler avec lui. Et peut-être lui demander de rencontrer cette actrice avec qui il voudrait simuler ce faux couple, si ça peut te rassurer.

- Je sais pas si j'ai envie de voir la tête de la personne qui pourra se pavaner fièrement au bras de mon mec à ma place... »

Il pouffa gentiment devant mon ton excessivement grinçant. Je puais le seum, et ça, j'en étais parfaitement conscient. Mieux valait en rire qu'en pleurer.

J'enfournais une nouvelle poignée de chips dans ma bouche, puis, désireux de changer de sujet, dégotai rapidement une manette de Switch perdue dans les draps pour lui proposer sans transition :

« On joue un peu ? »

Il hocha la tête d'un air compréhensif. Sourire aux lèvres, il passa bien cinq minutes à chercher la seconde manette que les draps avaient engloutie, avant de tenter d'ajuster bancalement le petit écran de la console qui peinait à tenir debout sur son tas de vielles BD et de romans en tous genres. Après 10 bonnes minutes de galère, on parvint finalement à lancer la partie, et on commença à jouer en se chamaillant comme des grands gamins.

Qu'est-ce que j'aimais ces moments-là.

Namjoon était indiscutablement ce qui se rapprochait le plus d'une ''safe place'' pour moi, et je ne pouvais qu'être plus qu'heureux de l'avoir dans ma vie.

La soirée se déroula encore ainsi un long moment, puis vint l'heure de partir. Mon ami devait se lever tôt le lendemain, et je n'avais pas envie de lui faire perdre trop d'heures de sommeil. En plus, vu l'heure, Taehyung ne devrait pas tarder à rentrer, si ce n'était pas déjà le cas. Peut-être que ce soir serait un des rares soirs où ce serait à lui de m'attendre dans l'appartement, songeais-je avec une pointe d'ironie.

Debout sur le pas de la porte, il m'offrit une accolade que j'acceptais avec grand plaisir, avant de s'éloigner pour me sourire doucement.

« Bon, bah à un de ces quatre Kook. »

Il mima un téléphone avec sa main, puis rajouta :

« Surtout, oublie pas. Si t'as un problème, besoin de parler ou quoique ce soit, appelle-moi !

- J'y penserai. Et je te retourne la phrase. »

Son léger rire presque un peu timide résonna sur le palier, et je lui adressai un dernier geste de main avant tourner les talons. Je n'eus cependant pas le temps de faire un pas qu'il m'interpellait déjà :

« Au fait, Kook ! Je voulais te demander... »

Je me retournais vers lui, et fronçai légèrement les sourcils face à son air hésitant. Il avait l'air un peu mal à l'aise, dansant d'un pied sur l'autre tout en jouant avec ses doigts. Les seules fois où il prenait cet air, c'était toujours pour me parler de la même chose. Je sentais ce qui allait venir et je n'aimais pas ça.

« T'aurais pas des nouvelles de Jimin ? »

Et voilà.

Namjoon était le seul type que je connaissais à continuer de s'inquiéter pour les gens qui lui ont pourtant fait énormément de mal.

Un soupir désapprobateur s'échappa de mes lèvres. Je me retournai plus franchement vers lui avant de rétorquer sans parvenir à cacher mon désaccord dans ma voix :

« Sérieux, Nam, arrête de te préoccuper de lui. Je dois te rappeler toutes les crasses qu'il t'a faites ?

- Je me demande juste s'il va bien. »

Il avait rétorqué cette phrase du bout des lèvres, comme s'il avait eu du mal à la faire sortir, et le voir ainsi me peina.

Jimin.

Ça avait été mon meilleur ami pendant une longue période de ma vie. Tout le collège, et tout le lycée. Parfois, je resongeais à ce passé là et je sentais mon cœur se serrer en me remémorant notre amitié passée. J'avais beau, contrairement à Namjoon, avoir gardé contact avec lui et lui parler encore de temps en temps, je n'étais même plus sûr de pouvoir le considérer comme un ami.

Beaucoup de choses avait changés. Lui, il était parti vivre aux États-Unis, où sa carrière d'acteur se portait à merveille. Sa volonté de partir à l'international avait même fini par lui donner plus de renommée que Taehyung, et ça me faisait toujours bizarre de le voir à l'affiche des films à grand budget de Hollywood. Forcément, avec la distance, les choses s'étaient un peu compliquées.

Et puis, surtout, il y avait eu l'histoire avec Namjoon.

Les deux s'étaient mis en couple à la fin du lycée, mais leur relation s'était très mal terminée. Entre les tromperies et les mensonges, je devais avouer que cela m'avait aussi un peu éloigné de Jimin.

Je soupirai.

Je n'avais pas envie de me replonger dans ces souvenirs désagréables maintenant.

J'avais juste envie que Namjoon réussisse à tourner la page, et soit pleinement heureux à nouveau.

Mais je me doutais bien que c'était dur. Et puis, Namjoon était comme il était : il avait toujours eu cette fâcheuse manie à se préoccuper des autres avant lui, à se mettre au second plan et à tout pardonner trop facilement. Je savais bien qu'il n'oublierait pas Jimin comme ça, d'un claquement de doigts.

Alors, simplement, je finis par lâcher dans un petit soupir :

« Je ne sais pas, ça va faire un petit moment que je ne lui ai pas parlé. Je lui demanderai, si tu veux.

- Merci. »

Il ne rajouta rien de plus.

Et, sur le trajet du retour, je sortis mon téléphone pour ouvrir le contact de Jimin. Un mois depuis les derniers messages échangés. Et dire qu'avant, on se parlait tous les jours... Mon coeur se serra à nouveau désagréablement dans ma poitrine, mais je fis taire la sensation avant de taper un rapide message pour lui demander quand est-ce qu'il serait dispo pour un appel. Je le rangeais ensuite dans ma poche, et reportais mon regard sur les rues éclairées de Séoul qui défilaient à travers la vitre du bus du soir.

De toute façon, avec le décalage horaire et son emploi du temps sûrement aussi chargé que celui de Taehyung, il ne risquait pas de répondre tout de suite.

__________

Quand j'avais finalement reposé un pied dans notre appartement, il était 22h passées. Taehyung était déjà rentré, et avait commandé du poulet frit dans un petit restaurant ouvert toute la nuit en bas de chez nous, qu'il avait déjà mangé.

Je le remerciai avant de réchauffer le mien pour me remplir l'estomac à mon tour.

On ne parla pas de grand-chose. Ou alors, j'étais trop fatigué et je ne m'en souvenais pas.

La seule chose dont je me souvenais distinctement le lendemain matin en me réveillant à nouveau seul dans notre grand lit, c'est de la question qu'il m'avait posé juste avant que l'on monte se coucher :

« Et du coup, pour ce que je t'ai dis hier soir, t'y a réfléchi... ?

- ... Ouais.

- Alors ?

- ... Ce n'est pas une mauvaise idée, finalement. Tu peux y aller. »

_____oOo_____

Et voilà la suite !

L'update prochaine sera encore peut-être mercredi, mais après ça, on devrait reprendre le rythme de publication sur les dimanches ! ;)

En attendant, j'espère que ce chapitre vous aura plu !

Vous aviez été pas mal à remarquer son absence dans les chapitres précédents, et maintenant vous avez quelques éléments sur Jimin ! Vous en pensez quoi ? De son rapport avec Jungkook et de son histoire avec Namjoon ? 👀

On aura plus d'éléments au fur et à mesure de l'histoire hehe, je me tâte même à faire quelques chapitres bonus centrés sur Namjoon et lui, je verrais bien :')

Sinon, Jungkook se sent seul :'(

Je sais que le ton global de cette histoire est bien moins léger que celui d'Actor, mais j'espère que ça vous plaît quand même :3 

Sur ce, je vous dis à la semaine prochaine, et merci de me lire ;DD

( Un grand merci à __un_cafe_ et Anevy_de_Girondif pour la correction de ce chapitre ! )