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Chapitre 3

Droit devant, au bout d'une interminable allée de pierres pâles, se tient la grande bâtisse blanche de style victorien aux hautes fenêtres et volets mauves. Entourée par une multitude de haies et de rosiers taillés et décorée de plusieurs colonnes de marbre, j'ai conscience que cette grande maison serait plutôt qualifiée de petit palais par d'autres yeux que les miens. 

Je devine l'immense jardin à la pelouse parfaitement entretenue à l'arrière de la maison et je me demande vaguement si la balançoire y est toujours. 

Chris emprunte l'allée qui mène à l'arrière du domaine et mes yeux semblent vouloir tout avaler en même temps. Mon oncle gare la voiture alors que mon nez est collé à la vitre. Si je pensais que mes yeux d'enfant avaient agrandi l'endroit, je suis détrompée sur le champ. 

La cour est tellement grande que je ne distingue pas les clôtures qui délimitent le terrain. Mon regard parcourt à la vitesse de l'éclair la grande fontaine circulaire toute proche du bâtiment, les hautes haies qui dissimulent la piscine, le gargantuesque garage à voitures de Chris mais mes yeux se sont presque instantanément dirigés vers la droite. 

J'ouvre la portière, bondis hors de la voiture en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire et cours vers le grand pré où une dizaine de chevaux broutent, somnolent, trottent et s'abreuvent. 

J'escalade rapidement la barrière et reste perchée là à observer le spectacle, le cœur battant de joie. Je repère quelques alezans, un grand pommelé, deux pies, un noir avec une étoile sur le front et une Isabelle aux grandes balzanes avec, collé contre son flanc, un minuscule poulain. Je retiens un petit cri de joie qui ne me donnerait pas plus de six ans mais mon expression de gamine comblée ne doit tromper personne parce que j'entends Chris rire à mes côtés. Ce n'est pas vraiment un rire, plutôt un rictus amusé. Je ne l'avais même pas vu s'accouder à la barrière.

- Tu n'as pas tellement changé finalement, dit-il avec ce qui ressemble à une pointe de soulagement.

Je me demande un instant si c'est une bonne chose ou non. C'est toujours difficile de savoir avec lui mais je distingue ce léger plissement de lèvres qui équivaut à un sourire chez Chris et je lui rends mon sourire le plus éclatant. 

Je souris beaucoup moins ces dernières années- je n'ai plus vraiment de raison de le faire- mais mon père me disait souvent que quand je souriais c'était comme si toutes les étoiles du ciel s'étaient allumées. J'adorais quand il disait ça. Chris me regarde un instant en clignant des yeux puis reporte son attention sur les chevaux.

- Ta mère m'a dit que tu vas faire des études de médecine. C'est pour être vétérinaire?

Je suis un peu étonnée que ma mère lui ait parlé. Elle n'était pas du tout enchantée à l'idée que je revienne ici et c'est plus qu'un euphémisme. Je l'ai rarement vue aussi remontée, ma mère est plutôt un modèle de sang-froid. Statue de glace comme je l'appelle dans ma tête quand je suis énervée.

Je hoche la tête :

- Oui, c'est ce que je veux faire.

- Tu ne préfères pas soigner des humains?

- Non, je ne pense pas. Les humains sont...enfin ils ne sont pas... Je préfère m'occuper des animaux, finis-je en haussant les épaules.

Wouah, de qualité l'argumentaire! Je ne vois pas quoi dire d'autre. J'ai passé l'âge de penser qu'aimer les animaux et leur faire des câlins magiques suffit à être vétérinaire mais c'est toujours ce que je veux faire. Quand je regarde ces chevaux, je me souviens pourquoi. Les animaux me rendent heureuse et pourtant, je ne le suis plus beaucoup ces derniers temps.

- Quel âge est-ce qu'il a ? je demande en pointant le poulain du doigt.

Je ne lui donne pas plus de 5 mois.

- Quatre mois et demi.

- Archibald...

- C'était il y a sept ans Lily...ce cheval n'était déjà pas très jeune.

Il me lance un regard désolé. C'est vrai, je suis même bête d'avoir posé la question. Évidemment que mon cheval est mort, c'était une autre vie. Je fais abstraction de la douleur familière qui me vrille la poitrine quand je pense à tout ce que j'ai perdu. Mon cœur était comme une jeune rose au printemps: épanoui et plein d'espoir. Mais les saisons froides arrivent et les pétales se flétrissent et tombent un à un sous l'effet des bourrasques. Reste à savoir s'il y aura un renouvellement des saisons pour moi ou si je suis coincée dans un hiver perpétuel.

Mon oncle me tire de ces pensés mélancoliques:

- Celui-ci, lâche-t-il en indiquant le jeune noir à l'étoile blanche, est issue d'une des saillies de ton cheval. Il a deux ans maintenant.

Cette fois je lâche vraiment un petit couinement de joie qui fait relever l'encolure aux chevaux les plus proches. Maintenant qu'il le dit je reconnais un peu d'Archibald dans ce cheval. La même robe sombre et de longs membres fins et musclés même si le mien n'avait pas d'étoile.

- Je peux entrer dans le pré?

- Les chevaux seront toujours là tout à l'heure, Lily. Pourquoi tu ne montes pas plutôt te rafraîchir et t'installer? Je dois passer quelques appels.

- D'accord, j'acquiesce malgré mon impatience.

Sans plus de politesses, Chris sort son Iphone de la poche de son pantalon et s'éloigne.

Je ne perds pas de temps et m'élance vers la voiture, puis ouvre le coffre pour en sortir ma grosse valise. Si je me dépêche je peux revenir d'ici vingt minutes. 

La maison est immense et il serait facile de s'y perdre pour un inconnu mais je me souviens encore que l'accès le plus rapide vers ma chambre est par l'entrée arrière. La pièce se situe juste au dessus de la salle de repos des employés. Je grimpe les marches du porche le plus rapidement que ma lourde valise le permet et fonce vers la grande porte laquée qui s'ouvre avant même que je ne l'ai touchée. Quoi ?

Je n'ai pas le temps de comprendre, je heurte brutalement un mur qui, d'après mon souvenir, ne devrait pas se trouver là. Sonnée je titube et ma valise dégringole les marches, m'emportant à sa suite. Je n'ai même pas le réflexe de la lâcher et pendant la fraction de fraction de seconde que dure la chute, j'ai le temps d'imaginer mon crâne s'écraser contre une marche. Bien fait le cerveau humain, non ?

Mais je ne heurte rien du tout parce que deux grandes mains dures me retiennent brutalement par les bras et me redressent sans douceur. Je garde les paupières serrées encore un instant jusqu'à ce que mes capacités mentales se remettent en marche et que je comprenne que des mains d'hommes- je les reconnaîtrais les yeux fermés- me tiennent par les bras. 

Je déglutis mais avant que je n'aie le temps de me dégager, elles me relâchent. Je fais aussitôt un pas en arrière en évitant une deuxième dégringolade dans les marches et lève les yeux.

Battement de cœur.

Battement de cœur.

Pause.

Battement de cœur.

Battement de cœur.

Pause.

Battement de cœur.

Battement de cœur.

Il y a des moments comme ceux là où l'on est bien plus conscient du travail de l'organe vital qui habite notre poitrine que le reste du temps.

L'homme qui se tient devant moi- celui que j'ai pris pour un mur- est très grand. C'est la première chose que je remarque. Je dois lever la tête vers le ciel comme une fleur de tournesol pour le voir et je ne suis pourtant pas si petite que ça . Je le regarde donc les yeux plissés pour me protéger du soleil qui fait contre jour et gratifie cet homme d'une sorte d'auréole assez flatteuse.

 Parfois, on peut faire la description la plus précise que l'on veut que l'on ne retranscrira jamais parfaitement le moment où l'on a posé nos yeux sur une chose. On ne peut citer qu'une succession de détails sans liens alors que dans la vraie vie, c'est un tout qui nous saute aux yeux, qui s'impose à nos sens en une fraction de seconde. Mais bon, je n'ai pas d'autres choix.

Un visage comme on n'en voit que sur des statues grecques ou chez les acteurs du vingtième siècle à l'apogée de Hollywood: tout en ombres et en reliefs, avec des traits ciselés semblant taillés dans du roc, un nez parfaitement droit, une bouche ferme et une mâchoire anguleuse qui pourrait servir pour des cours de géométrie sur les différents types d'angles.

La seule imperfection réside dans la petite cicatrice en quart de lune qui barre sa pommette gauche. Une tignasse brune épaisse qui ne semble pas avoir rencontré de peigne depuis des lustres, les mèches aux sommet de son crâne pointent dans tous les sens comme les cheveux d'aviateurs dans les vieux films de guerre que papa aimait tant.

Il porte un T-shirt sombre qui épouse son buste imposant et un enchevêtrement de dessins et de motifs à l'encre noir s'échappent de ses manches courtes pour s'écouler sur ses avant-bras musclés sans que je ne puisse décrypter quoi que ce soit dans ce méli-mélo. Son jean brut est délavé et un peu déchiré au niveau des genoux . Pas le genre de déchirures à la mode et soigneusement découpées par des créateurs de renom mais de vrais trous d'usure. 

C'est étrange comme réflexion mais je n'ai jamais vu de jambes remplir aussi bien un jean, pas même sur les mannequins Abercrombie dont les corps sont exposés aux premières pages des magazines de mode de maman. Les ourlets de son pantalon sont à moitié rentrés dans des bottines en cuir noires aux semelles abîmées et aux lacets défaits. 

Aucun garçon ne portait ce genre de chaussures à Londres. Je ne sais pas pourquoi mais je songe bêtement que les pestes du lycée privé dans lequel j'ai étudié en Angleterre le trouveraient à leur goût. Je n'ai jamais vraiment prêté attention à leurs bavardages d'adolescentes typiques mais je sais que c'est sur ce genre de garçon qu'elles fantasmaient pendant leurs interminables discussions dans les toilettes des filles : "des voyous sexy", elles les appelaient.

Je me rends soudain compte que mes mains me démangent de tenir un crayon et que je l'analyse comme je le ferais avec de beaux paysages que j'ai envie de mémoriser pour les dessiner plus tard. Je remonte aussitôt vers ses yeux, mortifiée, en me demandant depuis combien de temps je le reluque en dessous du visage.

Ce que je vois en croisant son regard me tétanise et j'ignore comment j'ai pu ne pas remarquer ça avant. Des yeux d'un gris acier qui évoquent une lame de couteau- ou n'importe quel objet tranchant- me détaillent sans aucune sympathie. En fait, son visage est recouvert d'un masque d'indifférence et on pourrait facilement penser qu'il n'y a rien à l'intérieur de ce corps si ses épais sourcils froncés ne trahissaient pas un léger agacement. 

Mince, moi aussi je serais énervée si on passait la totalité de mon corps au scanner comme je l'ai fait avec lui. Je sens tout mon sang converger brusquement vers mon visage et me brûler les joues pour me donner- je n'en doute pas une seconde- une charmante teinte de tomates trop mûres.

- Excusez-moi, je lâche sans savoir quoi dire d'autre.

S'excuser évite presque toujours les conflits, quels qu'ils soient. C'est lâche, je le sais, mais je suis la reine quand il s'agit de se dérober. Je suis cette fille qui se bouche les oreilles pendant les disputes et fixe ses genoux en silence quand elle se fait sermonner.

Il tique en m'entendant et je n'ai pas besoin d'être médium pour savoir que c'est à cause de mon accent. J'aurais peut-être dû m'entraîner à parler comme une américaine...J'ai vu que certains acteurs britanniques le font pour jouer dans des films hollywoodiens.

- Pourquoi tu t'excuses ?

Il y a certaines voix qui ne sont pas faites de la même matière que les autres, qui traversent votre corps et vous arrachent des frissons malgré vous, comme lorsque l'on gratte correctement certaines cordes de guitare. La sienne en fait partie. Elle est grave et m'évoque un éboulement de rochers. Pourtant, il parle d'une voix plus basse que la moyenne. Il attend toujours une réponse. Mon dieu je dois passer pour une demeurée.

- Euh...pour courir sans regarder devant moi ?

Je réponds sur l'interrogative. Eurk. Pourquoi est-ce qu'il a fallu que je réponde sur ce ton? Je ne veux plus jouer le rôle de la fille fragile. Personne n'aime cette fille là, et en plus, elle meurt pratiquement à tous les coups dans la première moitié du film. Surtout quand elle est blonde ce qui est mon cas. 

L'homme ne dit rien et pour couper court à ce moment embarrassant, je vais ramasser ma valise qui s'est écrasée en bas des marches du perron. Je vois les sourcils de l'inconnu se hausser quand ses yeux se posent sur mon bagage Charlotte aux fraises et je m'empourpre un peu plus si c'est possible. 

Je peine un peu à la remonter et me demande vaguement ce que maman a mis dedans d'aussi lourd. Je suis prête à refuser poliment s'il me propose son aide mais il n'en fait rien et se contente de me fixer. Je ne m'en offusque pas mais je suis quand même surprise : je viens d'un milieu où la galanterie est de rigueur. Je bloque ma respiration en passant devant lui, à quelques centimètres de son grand corps puisqu'il n'a pas daigné s'écarter.

Je m'engouffre dans la pièce de repos des employés et referme la porte derrière moi. Alors seulement, je m'autorise un petit soupir de soulagement. Mon cœur bat à 200 à l'heure sans aucune raison valable. C'est en balayant la salle du regard que je prends conscience que ce jeune homme était dans la maison. 

Qu'est-ce que cela peut bien vouloir dire ? Je sais que Chris a toujours eu beaucoup d'employés : des cuisiniers, des femmes de chambre, des chauffeurs, des jardiniers et des palefreniers mais cet inconnu n'a le profil pour aucun de ces postes.

Je décolle mes mèches humides de mon front, il fait une chaleur à faire fondre de l'acier. La pièce n'est plus comme dans mon souvenir. Les meubles ont été remplacés: de grands placards en bois vernis longent les murs, des canapés et des fauteuils dans des tons de vert allant du pomme au sapin occupent l'espace avec une grande table rectangulaire. Une porte ouverte donne sur les cuisines. C'est spacieux et confortable. Cependant je ne vois pas un seul employé.

Je finis par quitter la salle et rejoins le grand hall clair au carrelage lustré de la maison avant de me diriger vers les escaliers centraux qui mènent aux étages. Je m'accroche à l'épaisse rampe en marbre sculpté et traîne ma valise encombrante derrière moi en la laissant buter contre toutes les marches comme une enfant capricieuse. 

Je pense à Dallas, « le monsieur des chevaux » comme j'avais l'habitude de le prénommer, petite. Je l'aimais bien, du haut de sa quarantaine il m'avait toujours paru bienveillant et puis, c'est lui qui m'a appris à monter Archibald et à m'en occuper. J'imagine qu'il ne doit plus être là maintenant. Tellement de choses ont changé.

C'est typiquement humain, quand on quitte un endroit, on s'attend toujours à retrouver les choses à l'exacte place où on les avait laissé, comme si le temps s'arrêterait de tourner la où on n'est plus. C'est absurde.

Je grimpe jusqu'au deuxième étage et traverse un long couloir strié de portes. J'ai un nouveau coup au cœur en découvrant les murs complètement nus. Avant, ils étaient recouverts de photos de vacances encadrées. 

Bon sang, arrête de penser à l'avant Lily ! L'avant ne t'apportera rien de bon ! 

En plus, je n'en veux pas le moins du monde à Chris pour avoir retiré ces cadres qui ne serviraient à rien d'autre qu'à faire illusion. 

Je sais exactement où aller comme si j'étais encore ici hier. Je tourne une fois à gauche puis deux fois à droite en me moquant intérieurement de cette maison ridiculement grande que j'adorais, enfant. Il me semble que la chambre à coucher de Chris est à l'extrême opposé de la mienne, dans l'autre aile. Je m'arrête devant ma porte et me fige en tendant la main vers le petit ruban rose noué autour de la poignée. C'est celui qui retenait mon chignon de ballerine pendant mes cours de danse. 

Un sourire stupéfait m'échappe lorsque mes yeux se posent sur la pancarte accrochée au panneau de bois : d'une écriture d'enfant que je reconnais facilement comme la mienne et au stylo violet à paillettes figure l'inscription : « défense d'entrer sauf si c'est Nathan". 

Les lettres se sont un peu effacées et les autocollants de papillons sont presque décollés mais j'éprouve un sentiment de soulagement en découvrant enfin une chose qui n'a pas bougé dans le domaine. Et je ne suis pas déçue en tournant la poignée et en poussant la porte.

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