Chapitre 11 - Univers et l'astre des désillusions
Alors qu'un tourbillon de lumière pure s'abattait sur les combattants, une silhouette s'effondra. Un cri déchira l'espace avant qu'une onde de choc générée par l'arrivée d'Univers n'envoient valser Jupiter, Neptune et Saturne quelques mètres plus loin.
Un silence de mort s'abattit.
Même Univers semblait retenir son souffle.
Drapée dans son éternelle robe multicolore, elle observa brièvement la scène. Aucune des neuf planètes n'osait bouger. Seul Pluton tâchait la tension qui flottait par des sanglots entrecoupés. Puis, l'arme meurtrière de Jupiter tomba dans un tumulte métallique et les genoux de sa propriétaire se dérobèrent. Les autres l'observèrent sans rien dire tandis que ses mains en coupe venait cacher son visage. Mars expira enfin. Une petite fille blonde la fixait, les larmes aux yeux.
Une couverture de plomb sur les épaules, Terre ne voyait plus. Quelques sons lui parvenaient, mais rien de concret. Malgré les aller-retour de ses paupières, la jeune femme ne distinguait plus qu'une couleur écarlate. Ses muscles tendus se relâchèrent progressivement. L'esprit de la jeune femme glissa sur un terrain cotonneux, là où tous les maux disparaissent, alors que son corps s'affaissait.
Et son cœur cessa de battre.
Univers vacilla, comme si la blessure mortelle de sa fille résonnait en elle. Soleil poussa un hurlement où Rage et Désespoir ne formait qu'un. Pendant ce temps, Jupiter se releva – sous les yeux dégoûtés de Mars – puis s'enfuit écrasée par la culpabilité. Cela ne pouvait pas être réel ! Et pourtant, Terre gisait paisible à présent, plongée dans un sommeil éternel.
Oh, Mercure aurait tellement voulu la réveiller...
Les minutes qui suivirent furent floues. Une torpeur saisit les filles d'Univers, qui sentaient peu à peu le contrôle de leurs moyens s'échapper.
Mais pour leur mère, cet instant fut parfaitement limpide. Limpide comme l'unique larme qui se fraya un passage sur sa peau. Une de ses fille avait assassiné sa sœur sous l'influence néfaste de son Étoile. Tout deux méritaient de ne plus exister. Ses doigts tressautèrent.
Dans une douleur sourde, des éclats de métal semblèrent perforer sa paume. Les morceaux formèrent une boule avant de s'allonger en une longue lame. L'arme ne possédait pas de poignée. De la même manière, la femme ne bénéficiait d'aucun rempart contre sa peine. Sa fille était morte !
Au loin, la planète de Terre se muait lentement en poussières...
À genoux devant le cadavre de sa cadette, Soleil effleura les cheveux qui s'étaient échappés de son lourd chignon. Elle paraissait si paisible, la main posée sur son torse ensanglanté. Il était la cause de son trépas, il le savait.
Ainsi, il se redressa, prêt à accepter sa punition. A cet instant, l'homme réalisa qu'il avait eu tort sur toute la ligne, avec un cœur si lourd qu'il l'aurait pu l'entraîner au fond d'un océan.
Il n'aurait jamais dû se rebeller contre sa Mère, Créatrice de toute choses.
Il n'aurait jamais dû embarquer ses sœurs dans cette chimère.
Il n'était que l'astre des désillusions, tiraillé par le regret de chacune de ses décisions. Chaque pas avait été le mauvais. Chaque pensée faussée. Chaque acte lourd de conséquence. Son utopie de liberté se pulvérisait, et chaque éclat blessait ceux qu'il aimait.
Soleil se retourna, face à Univers, tremblante de rage. Une grande lassitude l'envahit, tandis que les volutes bleutées de la tristesse se dessinèrent dans son esprit.
Enfin, il tendit ses main vers sa Mère.
— Pardonnez-moi, murmura-t-il sans avoir à qui il s'adressait.
La dernière chose qu'il vit fut les yeux écarquillés de Mercure. Aussi gris que l'éclair métallique qui lui ôta la vie.
Son enveloppe charnel bascula en arrière. La lumière de sa peau faiblit petit à petit, avant de disparaître.
Mercure plaqua ses mains sur la bouche, au bord des larmes. Elle savait que son frère devrait payer pour ses erreurs, mais elle ne pensait pas que cela serait aussi... réel. Mars l'entoura de ses bras en posant sa tête sur son épaule. Au fond d'elle même, elle ne regrettait guère la perte de Soleil. Cependant, la jeune femme rousse désirait apporter le plus de réconfort possible à sa nouvelle fille.
Vacillante, Vénus avait cessé de rire. Elle s'agenouilla près de son Étoile, se laissa choir à ses côtés. La brune à la robe safran ne bougeait plus, s'abandonnant aux bras du Néant.
Les Vents restés dans la demeure de Soleil dépérissèrent soudain.
Univers déposa sa lame désormais carmin entre les doigts de Soleil qu'elle avait enlacés. La haine qu'elle éprouvait pour son fils renégat s'était envolée : il avait payé, ils étaient quittes. La femme s'approcha de la fillette aux cheveux frisés.
— Tu as accompli ta mission Mercure, déclara-t-elle en caressant maternellement sa joue humide, je suis fière de toi.
La Créatrice regarda ses autres filles.
— Je suis fière de vous toutes.
— Et maintenant ? questionna Neptune, serrée contre Pluton. Vous allez nous séparer et nous laisser vivre sans étoile pour notre éclairer ?
— Non, sourit Univers, j'ai bien mieux à vous proposer.
Touchant le front de ses filles une à une, elle leur accorda le don de Téléportation tandis que l'astre solaire explosait au cœur du royaume.
☼
Leur Mère les emmèna dans un lieu inconnu. Mercure ouvrit les yeux à l'instar de ses sœurs. La fillette esquissa quelques pas sur une surface solide, mais meuble. Ses orteils s'enfonçaient dans un sable anthracite qui la chatouillait. Ses vêtements d'un argent resplendissant ondulait à cause du vent, débarrassé de toute souillure. À ses côtés Mars lui envoya un sourire, vêtue d'une robe propre elle aussi.
— Où sommes-nous ? s'enquit Saturne, dont la chevelure roux pâle était tripotée par une Uranus affolée.
— Sur une des nombreuses planètes orphelines qui parcourent les galaxies. Mais cet objet céleste est spécial... Il n'avait pas de propriétaire, explica Univers.
— « Avait » ? releva Neptune, les paupières plissées.
— Oui, cet endroit est le vôtre à présent, tout comme ce château qu'on voit au loin. Je vous promet que vous ne serez jamais séparées contre votre gré, et je vous laisse le droit de parcourir l'espace à votre guise, à la seule condition que vous ne partagez jamais votre don.
— C'est entendu, répondirent les sœurs après s'être concertées du regard.
Un croissant fendit le visage d'Univers, et un instant plus tard, elle s'évanouit dans des volutes de fumée.
— C'est chez nous ? s'écria Uranus innocemment.
— Maintenant, oui, répliqua Saturne, un rictus sincère sur ses lèvres.
Elles levèrent leur regard vers les bâtiments à l'horizon. Mélange de toutes les architectures, odeurs, couleurs de leurs maisons respectives, l'ensemble formait pourtant un tout homogène.
— On y va ? s'impatienta Pluton, d'ordinaire timide.
Le groupe avança curieux de découvrir les surprise de cet endroit.
— Comment s'appelle cette planète au fait ? commença Neptune.
— Aucune idée, Univers n'a rien dit à ce sujet, poursuivit Mars.
— On n'a qu'à laisser Mercure choisir, sans elle, nous ne serions pas ici... proposa la fille de Neptune d'une petite voix.
La petite blonde rougit, embarrassée par les prunelles sanguines, jaunes, bleu-vert, saphir et roses qui la fixaient avec bienveillance.
— Notre maison s'appellera Terre, trancha-t-elle doucement.
Toutes approuvèrent d'un hochement de tête peiné. Jamais la protégée d'Univers n'oublierait son sacrifice. Elle lui devait la vie...
De même, lorsqu'elles pénétrèrent dans le château multicolore, elle fondit en larmes. Dans l'entrée, on pouvait apercevoir le vieux canapé qui se trouvait autrefois chez Terre. Mercure serra contre elle un coussin vidé d'ouate avec émotion. Mars s'assit avec précaution. Les autres étaient partie à l'exploration des pièces du palais.
— Ça va ? s'informa la jeune femme à la frange.
— Elle me manque... répondit la petite fille.
— Je sais.
— Tu pense que son esprit existe encore quelque part ?
— Qui sait ? Si c'est le cas, elle veillera encore sur toi, chuchota Mars en esquissant un sourire.
— Toi aussi tu seras avec moi ?
— Pour toujours.
Uranus déboula soudain, surexcitée, suivie par une Neptune plus réservée.
— Venez voir ! On a trouvé un couloir avec toutes nos chambres à l'identique !
Mercure laissa Uranus lui montrer tous les corridors, les tours torsadées, les escaliers tortueux, les grandes salles lumineuses, les remparts aux reflets dorés, une volière où des oiseaux de métal flottaient dans les airs, libres. Malgré l'absence d'étoile assez proche pour les éclairer, on y voyait parfaitement : les murs produisaient eux-même un lumière différente selon les endroits.
Si Mars n'avait encore quelques réserves à propos d'Univers, elle était soulagée de l'issue de leur quête. Même si Terre rayonnait par son vide. Tout comme ses Vie et Mort, Phobos, Déimos. Elle espérait que la blonde parvienne à combler cet espace dans son cœur.
Ensuite, elles visitèrent les jardins, un parfum chargé envahit alors leur nez habitués à la poussière aride. Des fleurs aux pétales bleu glacier et aux bord ciselés parsemaient des buissons vermeil, au pieds d'immenses arbres ayant des rides sur leurs troncs.
Arrivées au bords d'un ruisseau d'eau parme, Mercure et Mars s'allongèrent dans l'herbe. Un sentiment de plénitude les envahit.
— Dis Maman, j'ai une question...
— Encore ? s'esclaffa la jeune femme aux cheveux de cuivre.
La fillette s'appuya sur son coude, une lueure malicieuse dans le regard, un sourire radieux aux lèvres.
— Et si on explorait l'espace ?
Ce fut au tour de Mars d'esquisser un rictus, dévoilant à peine ses dents.
— Quand tu veux.
Mercure se leva.
☼
Voilà avec du retard, le dernier chapitre de Royaume solaire !
Cette nouvelle compte 17 200 mots environ et m'a pris un an à écrire (en parallèle d'une autre histoire plus conséquente).
Je suis très fière de l'avoir terminée, c'est maintenant un fragment de mon enfance qui sera conservé. J'espère de tout cœur que cela vous aura plus.
Qu'avez-vous aimé ?
Ou pas mdr ?
Que pensez-vous de la fin ?
Aussi, j'hésite entre deux couvertures, laquelle préférez-vous ?
(L'actuelle)
Ou celle-ci :
Merci infiniment de votre lecture ! Sans vous, cette histoire ne serait qu'un astéroïde bien vide !
Au revoir !
- Cassandre
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