Jaune
Simon aimait moyennement le jaune : parfum citron. Alors il continuait avec celui-là.
Simon préférait la nuit, la Lune et les étoiles que le jour, le Soleil et les nuages. La nuit, il y avait moins de monde ; moins d'enfants ; moins de regards gênés. La nuit, les taches sur le visage de Simon ne se voyaient plus vraiment : les ombres arrangeaient tout.
Simon ne savait pas pourquoi il avait des taches. Tout ce qu'il savait, c'était qu'il n'y pouvait rien, que c'était comme ça et pas autrement. Les gens appelaient ça taches de vin ; Simon lui, taches de sang. Parce que parfois, il rêvait que, ces taches, c'était le sang de quelqu'un qu'il avait tué. Mais il ne savait pas qui, pas quand, ni pourquoi : Simon n'avait plus de mémoire.
Les gens appelaient ça amnésie ; Simon, lui, faute. Il était persuadé que s'il ne se souvenait pas de sa vie d'avant la rue Voltaire, c'était parce qu'il avait fait quelque chose de si terrible, si effroyable qu'on l'avait banni et effacé la mémoire, pour qu'il ne revienne plus là-bas. Mais comme pour montrer qu'il était un monstre, on lui avait marqué ces taches rouges. Peut-être bien avec le sang de sa ou ses victimes, tiens.
Simon n'en savait rien. Mais il se sentait coupable. Coupable d'une chose qu'il ne pouvait qu'imaginer. Et il gardait bien ça pour lui, Simon. Les gens ne l'auraient que regardé plus bizarrement que d'habitude s'ils savaient ce qu'il y avait dans sa tête. Les taches suffisaient bien assez comme ça.
Simon n'arrivait jamais à oublier ses taches de sang, même la nuit. Pourtant, les ombres les cachaient. Mais après tout, les ombres ne peuvent pas complètement les faire disparaître, ces taches qui lui peignaient le visage.
Simon n'aimait que moyennement le jaune : c'était la couleur du Soleil. Celui qui éclairait son visage, qui trahissait les marques de sa faute. Si le Soleil n'existait pas rue Voltaire, Simon ne serait pas différent des autres passants.
Alors Simon mangeait ensuite le jaune.
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