Chapitre 9: Triple point de vue
Violet (enfin pas vraiment)
- J'arrive plus à respirer...
- Calme toi Nyna, CALME TOI!
Des larmes se mirent à couler sur les joues de la petite fille. La plus grande se prit la tête entre les mains, et reprit à voix basse.
- Écoute, je suis désolé, mais il faut vraiment que tu fasses moins de bruit. Il faut qu'on parte, tu comprends?
Un éclair d'impuissance passa dans ses yeux, et elle tourna la tête vers moi.
- Aides-moi! supplia-t-elle, je t'en prie...
Soudain, une énorme main l'agrippa par derrière. Elle hurla, se débattit.
- ANNA!
Je me réveillais en sursaut. A tâtons, je cherchais mon téléphone. Mes mains tremblaient tellement, que, lorsque je réussi enfin à attraper mon portable, comme toujours enfoui dans mon sac à main sous une couche de bordel, je dû m'y reprendre par trois fois avant de réussir à l'allumer. Onze heure, soit 18 heure à Tokyo. Mes tremblements ne diminuaient pas. Inspire, comptes jusqu'à 5, puis expire pendant 10 secondes, m'ordonnais-je. Je répétais l'opération plusieurs fois, jusqu'à ce que je sois totalement sereine. Non, c'était faux. Je ne serais jamais complètement calme, plus jamais. Je lançais mes jambes hors du lit. Le lila (alias Nick) s'étant volatilisé dès la sortie de l'aéroport, Kyô, Red et moi nous étions rendu à l'hôtel convenu. Je pensais avoir tenu le choc du décalage horaire, mais, visiblement, ce n'étais pas le cas. Mes jambes flageolèrent, et je me retint à une commode. Ce rêve...cela faisait longtemps qu'il n'avaient pas hanté mon sommeil. ça n'en était même pas un d'ailleurs. Plus comme un souvenir. Soudain, je fut prise de irrépressible envie de voir mes compagnons. Même cet abruti de Nick aurait fait l'affaire. Tout plutôt que de repenser à ça, cette angoisse, les chuchotements dans le noir, puis le black out.
J'ouvris brusquement la porte.
- Red!
Dans la pièce commune, personne. Je m'avançais de quelques pas.
- Kyô?
Toujours rien.
- Merde!
J'avais perdu leur trace. M allait être furieux. Ma mission était claire pourtant: ne jamais les quitter d'un regard, épier tous leurs déplacements, même pour aller aux toilettes. J'avais déjà failli à l'aéroport en laissant s'échapper Nick. Je pris mon téléphone et composai le numéro de M. Une bouffée de colère me submergea. Rien de tout ça ne se serait passer si cet idiot de Kyô n'avais pas piqué sa crise la nuit dernière. Le revoir lui, c'était la revoir elle. Les revoir toutes les deux. Leurs regard levés me suppliant de les aider. C'était me revoir moi, le monstre. La voix de Lize me sauva.
- Agent Violet?
- Lize? Où est M?
- En réunion, c'est quoi le problème?
C'était ça que j'adorais chez Lize: elle ne se cachais pas, elle assumait pleinement sa brutalité.
- Je les ai perdu. Tous les trois.
- Abrutie!
Qu'est-ce que je disais? Une femme charmante je vous dis.
- Je vais essayer de tracer leur téléphone, du moins ceux de Kyô et Nick. ça m'étonnerais que Red se laisse localiser grâce à ses coordonnées GPS.
- Pourquoi tu les a perdu?
J'hésitais, une fraction de seconde parce que sinon, Lize saurait que je lui mentais.
- Je me suis endormie à cause du décalage horaire (ce qui n'étais pas tout à fait faux).
Lize soupira, agacée, puis raccrocha. Je n'avais pas besoin qu'elle me dise de faire vite.
La menace était bien assez claire.
Agent Pink (ou un truc ayant Kyô pour nom)
Je jetais un coup d'œil à mon voisin. Étonnante coïncidence que, parmi les 42 millions ou presque habitants de la ville, ce soit sur lui que je sois tombé. Hasard ou destin, il était pile la personne dont j'avais besoin.
Après avoir quitté l'hôtel en douce, pendant que Violet ronflait allègrement dans son lit et que Red explorait la douche, j'avais erré une heure dans la ville, sans but précis, passant inconsciemment par les endroits que j'avais aimé dans le passé. Cela ne me ressemblais pas. Ma crise d'angoisse de la veille devait m'avoir plus affecté que je ne le pensais. A ce souvenir, la rage m'avait repris, plus forte qu'auparavant. Quel idiot, laisser transparaître une information aussi importante sur moi devant les autres. J'étais impardonnable, j'avais manqué à la règle la plus élémentaire du métier: ne jamais livrer aucune information personnelle. Passe encore si le renseignement est truqué. Mais, en l'occurrence, il ne l'était pas. Perdu dans mes pensées, mes pas m'avaient inconsciemment conduis devant le bâtiment. CE bâtiment. L'hôpital. J'avais hésité, puis j'étais entré. Je n'avais pas de rendez-vous, mais, en entendant le nom du patient, la femme m'avait immédiatement laissé passer. Cela m'avait amèrement fait sourire. Elle semblait me prendre en pitié.
On m'avait accompagné jusqu'à sa cellule. Debout, derrière le double vitrage, j'avais observé les pas lents de mon père, tournant en rond dans sa cage. L'infirmière m'avait demandé si je voulais lui parler. J'avais répondu que non. Trop de mauvais souvenirs étaient attachés à cette voix, SA voix. J'étais sorti. Et là, comme par miracle, alors que j'envisageais sérieusement d'aller vomir dans les toilettes publiques d'à côté, il était apparu. Shikamaru Ryuichi. Il avait tout de suite fait le lien entre l'endroit déprimant devant lequel je me tenais et ma mine de déterré. Il m'avait donc emmené boire un verre dans le bar où nous nous trouvions à présent. Une femme aux grosses lunettes noires et dotée d'une frange noire lui masquant la moitié du visage entra et s'assit à une table voisine. La voix moqueuse de Ryuichi, Ryu pour les intimes, me tira de mes pensées.
- Alors, le taf? Je croyais que tu bossais à l'étranger?
Un sourire amer se peignit sur mes lèvres.
- Eh bien, retour au bercail! Réjouis-toi, j'ai survécu à l'avion!
- T'as pris l'avion?!
Je pense que si nous n'avions pas été dans un bar, Ryu en aurait recraché son verre sur la table. Il me jeta un regard éloquent.
- Et ça va? D'aussi loin que je m'en souvienne, rien que la possibilité de monter dans un de ces engins de malheur te faisait vomir.
J'eus un petit rire sans joie.
- Bingo, t'es pas loin mec! J'ai fait la plus grosse crise d'angoisse de ma vie, et devant mes nouveaux coéquipiers pas moins que ça! Plus balourd tu fais pas!
Il réfléchit un instant, puis me répondit franchement.
- Tu sais, c'est pas bien grave. D'après ce que tu m'as raconté, au moins deux de tes "équipiers", n'ont pas l'air bien fute-fute, ils mettront ça sur le compte d'une phobie avancée des transports aériens.
- Pas l'air bien fute-fute hein? lui lançais-je avec un regard perçant, mais je ne t'ai pas encore mis au parfum, pas vrai ? Hier, Red, la jeune femme insolente aux allures de gamine, eh bien tu ne devineras jamais ce qu'elle a fait!
- Quoi? répliqua-t-il, pince sans rire, elle a égorgé son nounours préféré?
- Elle a buté un homme au couteau. J'ai vu l'arme et le sang sur ses mains de mes propres yeux.
La femme aux lunettes remua sur sa chaise, et Ryu poussa un long sifflement.
- Plutôt bien dégourdie la petite, c'est une vraie psychopathe ma parole!
- Tu vois pourquoi la donne a changé? Pareils en ce qui concerne Nick: il a filé en douce à l'aéroport sans qu'aucun de nous n'ai pu voir quoi que ce soit. Et je n'aime pas du tout Violet. Je ne sais pas où M l'a dégotée, mais elle me fait froid dans le dos.
- Eh bien, la poupée barbie dois être sacrément balèze pour impressionner quelqu'un comme toi.
- Non pas que j'ai jamais fait confiance à un de ces trois là, continuais-je, mais j'aime avoir un minimum de prise sur la situation, hors, là, je n'en ai aucune.
Ryu planta ses yeux dans les miens.
- Ecoute, d'entre nous tous, tu es le meilleur, ok? La situation ne t'échappera pas, la seule personne de vraiment sérieuse que tu as à gérer, c'est Violet. Bien que je ne doute pas des capacités des deux autres, je te pense assez habile pour les berner. De toute façon, on savait qu'il mettrait un des siens dans les rangs. Et pour ton père, l'avion, tout ça c'est dans le passé maintenant. Aller, viens, je t'emmène faire un tour!
Je souris, rasséréné. Ryu avait le don de me décharger en quelque mot, et c'était ce qui faisait de lui mon ami le plus proche. De loin, la dame aux lunettes continuait de nous observer.
Red ( la psychopathe?)
Je me faufilais dans les toilettes du bar, et ôtais l'affreuse perruque à frange qui m'entravait la vue. Les mains bien à plat sur le lavabo, je fixais mon reflet. Un sourire dur naquit sur mes lèvres, à la pensée de Ryu essayant de rassurer Kyô. Tu avais tord mon joli, songeais-je, personne n'a cru un instant que ce n'était qu'une phobie de l'avion! Seulement, aucun d'entre nous n'a pris la peine de creuser. Sauf moi! Je failli rire en repensant à quel point il avait été facile de berner le japonais. Un bruit de douche pour lui faire croire qu'il pouvait s'échapper, un peu de make-up, trois perruques différentes dans un sac, tout en en changeant régulièrement sur le chemin, et le tour était joué! Mais j'aurais pu tout aussi bien me passer de cette mascarade: Kyô était tellement distrait que je me serais baladée en clown avec une trompette à la main qu'il ne m'aurait pas remarquée. J'avais bien profité de cette distraction. Son subconscient prenant les devants, il m'avait conduite devant des endroits qui avaient manifestement de l'importance pour lui, et dont il n'aurait jamais osé s'approcher dans son état normal, avec son obsession pour le secret personnel. Quoiqu'il se serait peut-être laisser tenter, puisqu'il m'aurait pensé incapable de déchiffrer les idéogrammes japonais, ni même de comprendre la langue. Grave erreur mon cher Watson! Malheureusement pour lui, j'étais polyglotte, mes capacités incluant une compréhension parfaite des langues asiatiques en général -dont le chinois et son écriture-, ainsi que du russe, de l'anglais, de l'allemand, de l'espagnol et du portugais, ma faille résidant dans le hongrois et le suédois, deux langues où l'ont employait bien trop de consonnes à mon goût. Sa conversation avec le dénommée Ryu m'avait, par conséquent été aussi claire que du cristal, ainsi que la connaissance de tous les endroits où il était allé. Néanmoins, un détail m'avait, plus que tout autre, été crucial. En effet, je connaissait maintenant, le vrai nom de Kyô. Un peu plus tôt, il était entré dans un hôpital. Je ne l'avais pas tout de suite suivi, sachant que s'il allait voir un patient, je ne pourrais pas continuer mon chemin. Puis l'idée avait germé dans mon cerveau, et, après avoir sorti tout un baratin de première classe à la demoiselle d'accueil ("oui bonjour, je crois reconnaître un collègue de travail, je me fait donc du soucis sur sa santé, mais je ne sais pas vraiment si c'est lui, vous pouvez me dire son nom pour que je sois sûre?"), assorti de grands yeux de biche innocente, j'avais déniché mon info. Il avait gardé son vrai prénom. Kyô Asami. C'était son vrai nom.
Je retournais m'asseoir à ma place. J'avais ce que je voulais, il était inutile de le suivre plus longtemps. Il y avait la free Wi-Fi, je décidais donc de sortir mon ordinateur et de commencer les recherches tout de suite. Lorsque je ressorti, deux heures plus tard, du bar, j'étais soufflée, et de très mauvaise humeur. Si je m'étais écoutée à ce moment là, j'aurais fait la chasse à Kyô, et l'aurait scalpé sur place. Mais une part de ce que je savais dorénavant sur lui m'en aurait empêché.
Les yeux dans le vide, me laissant porter par la foule de Tokyo, je ne pouvais m'empêcher de me remémorer le nom de la section d'hôpital vers laquelle il s'était dirigé.
"Services psychiatriques"
Voilàààà! ça nous fait... 9 chapitres, presque 10, il est tard, et la fin chapitre laisse sûrement à désirer, désolé^^. On a finalement pénétré dans le tête de tout le monde maintenant!^^ Une idée sur ce qui s'est passé du côté de Kyô? On retrouve Nick dans le prochain chapitre!
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