❁ 2
Dormir sous de grosses couvertures par un temps frais était une occupation quotidienne que j'affectionnais tout particulièrement. Je n'aimais pas l'idée de sortir du lit, mais avoir passé huit heures au chaud me remontait un tant soit peu le moral, ce qui expliquait ma constante bonne humeur à la venue de l'automne et notamment de l'hiver. Ses nuits paisibles s'étalaient même un peu sur les premières semaines de printemps.
Ce matin, je me réveillai emmitouflé sous un drap. Toute cette liste imaginaire qui créait des arguments infaillibles quant aux avantages des nuits froides était entièrement cochée. La température était plutôt basse, j'étais au chaud et j'avais même émergé de mon sommeil naturellement, sans être dérangé par un insupportable radio-réveil.
Je ne pensais pas pouvoir autant aimer ouvrir les yeux de si bon matin. Avais-je peut-être exagéré en assurant que j'étais de bonne humeur auparavant, parce que rien n'était comparable à un réveil aux côtés de Jimin qui me caressait doucement les cheveux.
Mes paupières encore lourdes papillonnèrent quelques instants. J'avais le visage enfoui dans l'oreiller, si bien que je sentis premièrement cette agréable sensation par le toucher. Jimin glissait ses doigts à travers ma chevelure sans doute ébouriffée, s'attardant parfois sur des boucles qui apparaissaient sur les pointes. Il s'amusait souvent à les enrouler autour de son index.
J'aimais embrasser ses adorables joues et Jimin aimait maltraiter mes cheveux en tirant dessus, pour ensuite en prendre soin.
Pour les curieux, oui, cela en valait largement le coup.
Mon cœur, un peu trop paisible, accéléra ses battements lorsque je tournai la tête. Jimin était allongé sur le côté gauche de son lit, une jambe posée sur les miennes, en plus de sa petite main occupée à expulser l'anxiété qui le tourmentait.
Il était perdu dans ses pensées. J'avais bougé, pas lui, ses yeux fixant un point imaginaire. Je n'hésitai pas et me rapprochai, calant ma joue contre son oreiller pour que nous nous regardions. Jimin entrouvrit les lèvres et releva le menton.
« Hey. » murmurai-je.
La main de Jimin retomba sur le matelas et attrapa la perle de mon collier.
« Bonjour...
- Tu es réveillé depuis longtemps ?
- Moins d'une heure, je dirais.
- Tu n'arrives pas à te rendormir ? »
Jimin lâcha un soupir.
« J'ai peur qu'en fermant les yeux, tu disparaisses. »
Je fis semblant de réfléchir en fronçant les sourcils.
« Techniquement si tu fermes les yeux, tout devient noir puisque aucune lumière ne traverse ta rétine. Alors oui, c'est normal que je disparaisse. » répondis-je.
Jimin, outré, me frappa l'épaule.
« Arrête de te moquer de moi en faisant ton scientifique, marmonna-t-il. Mon Jungkook m'aurait déjà pris dans ses bras.
- Ah oui ?
- Il n'est pas du genre à m'embêter.
- C'est une passion qu'il a découvert récemment.
- Méchant.
- Viens là. »
Je passai un bras sous son cou et l'autre autour de son dos. Jimin n'opposa aucune résistance, au contraire, il serra mon t-shirt de ses petites mains, délaissant mon collier pour poser ses lèvres sur ma clavicule. Réceptif, je le serrai un peu plus fort contre moi et il ricana, apparemment fier de son effet.
« Je crois que... je vais mettre un peu de temps à réaliser. Même si tes gros biceps sont réalistes, j'ai encore du mal à y croire.
- Comment ça, gros ? » répétai-je en me détachant de lui.
Il abordait une expression malicieuse. Ses pommettes étaient rehaussées grâce à sa mignonne petite moue, il était à croquer, mais je devais résister.
« Oui, d'ailleurs je crois qu'ils ont pris de la masse depuis la dernière fois.
- Qu'est-ce que tu insinues par-là ? »
Jimin tira sur la couverture pour me recouvrir, ayant eu le temps de s'éloigner pour échapper mon courroux. J'entendis son rire résonner à travers la pièce et décidai de me lever après avoir fait la tête durant une longue minute. Jimin m'attendait, appuyé contre l'embrasure de la porte, l'air amusé. Je pestai en le voyant ainsi dévêtu et piochai le seul t-shirt disponible dans mon périmètre, abandonné sur le sol. Je le lui lançai et il le réceptionna sans problèmes. Il prit tout son temps pour l'enfiler et je patientai en observant ses cheveux.
Ses cheveux blonds, un peu ondulés. Cette couleur adoucissait les traits de son visage et la première image qui me vint à l'esprit fut celle d'un ange.
Il me tendit la main et je la lui pris sans hésiter. Il nous emmena dans sa cuisine et j'aperçus l'horloge, qui indiquait à peine neuf heures. Il était tôt, mais Jimin était en pleine forme. Sautillant pour atteindre les plus hauts placards, fourrant sa tête dans le réfrigérateur, ouvrant tous les tiroirs possibles, il semblait chercher quelque chose avec entrain.
« La salle de bain est à ta gauche, si tu veux. » m'indiqua-t-il en pointant la porte de la cuisine.
J'écoutais le maître de maison sans un mot et revins quelques minutes plus tard. Jimin déambulait toujours, sans que je sache pour quelle raison.
Finalement, il se tourna vers moi.
« Je n'ai rien pour le petit-déjeuner...
- Tu veux que j'aille faire les courses ? proposai-je automatiquement.
- Non, Jungkook. Je veux dire, je n'achète rien pour le petit-déjeuner. »
Je le reluquai sans gêne et Jimin se gratta la nuque.
« Je peux faire du riz ? reprit-il.
- Tu as intérêt à manger tout court.
- Je m'y mets tout de suite ! »
Il se précipita vers ses énormes provisions de sacs de riz. Je roulai des yeux en souriant et recherchai deux bols ainsi que des couverts, découvrant par cette occasion sa cuisine. Elle était modeste mais très moderne. Les appareils-ménagers que Jimin possédait étaient tous plus récents que les miens, et je l'avais remarqué dans sa salle de bain également.
Il avait une baignoire. J'étais jaloux.
Jimin me jetait des coups d'œil très peu discrets. Tout en surveillant le riz, je préparais une sauce que ma mère m'avait apprise quand j'étais petit et il m'observait faire. Lorsque nos regards se croisèrent, il m'offrit un énorme sourire et repartit installer les couverts sur la table basse de son salon, où il avait pour habitude de prendre son déjeuner et son dîner.
Je ne lui laissai pas le loisir de m'aider et remplis deux bols que je ramenai. Jimin voulut protester mais je le fis taire en tendant son petit-déjeuner. Il me remercia et attaqua sans ménagement son plat.
Il avait faim, ce qui ne m'étonna pas.
« Je suis meilleur pour faire des pancakes, lâchai-je en m'asseyant sur le canapé.
- Si j'achète les ingrédients, tu pourras essayer d'en faire.
- Opportuniste.
- J'admets. »
Son rire fit naître le mien et j'entamai maladroitement mon petit-déjeuner. J'avais beaucoup de mal à avaler des recettes salées le matin. Mes parents nous avaient habitués, mon frère et moi, aux bols de céréales et pancakes nappés de sirop d'érable. Ils avaient tous les deux grandis en Australie, alors en dépit d'être nés en Corée du Sud, ils n'avaient pas réellement suivi la coutume.
J'avais beau essayer, la texture du riz me paraissait pâteuse. Mon verre de lait me manqua soudainement.
« Tu n'aimes pas ? me questionna Jimin, qui avait terminé.
- Le matin, pas trop non.
- Tu mangeras plus au déjeuner. Un plat comme celui-ci, il faut en profiter. »
Je me demandais si Jimin se nourrissait correctement. Parfois il s'émerveillait tellement sur ce que je cuisinais que les doutes persistaient.
Je reposai le bol à peine entamé et m'enfonçai dans le canapé noir. La télévision était allumée et je m'en rendais finalement compte. Depuis quand fonctionnait-elle ?
Je m'apprêtais à poser la question à Jimin avant de remarquer qu'il me fixait.
« Compte tes doigts, dis-je subitement. Si tu comptes les dix, c'est ce que tu ne rêves pas. »
Je ne m'attendais pas à ce qu'il le fasse réellement. Néanmoins, Jimin se concentra immédiatement sur ses mains. Je vis ses yeux briller au fur et à mesure et avant que je ne puisse dire quoi que ce soit, il enroula ses bras autour de mon cou. Sous la force de son corps, je m'affalai de nouveau contre le dossier du canapé, alors que Jimin relâchait toute son anxiété, et peut-être la peur au fond de lui que tout cela n'était qu'un simple rêve.
Si j'avais su, je lui aurais dit de compter sur ses doigts dès le début. Il connaissait sans doute la technique, mais l'avait oubliée.
« Excuse-moi, je suis un idiot ! s'exclama-t-il. Je ne sais pas pourquoi je doutais autant, j'aurais dû t'accueillir à bras ouverts et j'ai dû te paraître tellement froid à la place, bon sang je suis désolé.
- Hey Jimin... tu n'as rien à t'excuser, vraiment. »
Jimin posa ses mains sur mes joues, un sourire tremblotant sur ses lèvres. Ses yeux si expressifs cherchaient silencieusement mon réconfort, que je lui apportais aussitôt en l'embrassant. Il s'agissait d'un chaste baiser, certes un peu salé, mais qui nous rassura tous les deux.
« Je t'ai tant surpris que ça ?
- Oui..., renifla-t-il. C'est à cause de tes gros biceps. »
J'effleurai sa peau au niveau de sa taille et l'air taquin de Jimin disparut d'emblée.
« Ne fais pas ça, je suis chatouilleux.
- Tu mérites de t'étouffer de rire.
- Ne portes-tu donc aucune considération à l'égard de celui qui fait battre ton cœur ? Je l'entends d'ici, il s'affole. » me nargua-t-il, sa main à présent déposée sur mon torse.
Jimin disait qu'il s'exprimait mal, cependant, je le trouvais étrangement éloquent lorsque l'audace prenait place.
« Tu deviens téméraire d'un coup, remarquai-je en caressant doucement ses cuisses dévêtues, qui entouraient mon bassin.
- Vraiment ? Tu n'as pas l'air contre, pourtant, rétorqua-t-il en se penchant vers moi.
- Je t'avoue qu'avant cette nuit, je n'avais jamais autant fait l'am--
- Chut ! » s'écria-t-il en plaquant sa paume contre ma bouche.
Les joues de Jimin s'empourprèrent dès lors. Parler de ce sujet le mettait dans tous ses états lorsque je poussais les insinuations un peu plus loin. Cela m'étonnait d'ailleurs, car j'étais le plus timide entre nous deux et Jimin n'était pas aussi pudique que moi. Pourtant, notre relation avait débuté de cette manière, c'était sans doute pour cette raison que ma langue se déliait toute seule sans aucune gêne. Et j'adorais l'embêter, également.
L'imagination de Jimin devait être débordante. Je me demandais ce à quoi il pouvait bien penser.
Il sentit mon sourire contre sa peau et retira sa main, en soufflant sur les mèches qui lui chatouillaient les cils.
« Timide ?
- N'importe quoi, réfuta-t-il en attrapant mon menton. C'est seulement toi, qui penses trop à moi.
- Tu es celui qui en redeman--
- Tais-toi. »
J'éclatai de rire.
« Je suis vexé d'ailleurs ! m'insurgeai-je. Comment tu as pu penser que cette nuit n'était qu'un rêve ? Après tout ce qu'on a passé ensemble !
- Ce soir je suis tout à toi, dit-il en replaçant une mèche de mes cheveux derrière l'oreille. Je n'oublierai pas, promis.
- Tu portes la situation en ta faveur, là.
- Mais pas du tout ! Je propose seulement un moyen de m'excuser, voilà tout. »
Ma lèvre inférieure se retroussa et Jimin m'enlaça tout en m'ébouriffant les cheveux.
Combiner son câlin et des caresses dans les cheveux : il était pardonné.
Nous gardâmes cette position un moment. Je parcourais son dos de lignes imaginaires et il s'amusait à me faire des tresses, sans pour autant les attacher. C'était réconfortant d'être simplement enlacés. Jimin était sans doute replongé dans ses pensées et moi, j'observais avec attention son salon. Je n'avais pas réellement eu le temps et l'envie de visiter la veille. À présent, confortablement installé, avec un petit humain pour me tenir chaud, je prenais plaisir à détailler la pièce. L'appartement n'était pas grand et la taille du salon en pâtissait. J'avais cependant l'impression que Jimin l'avait rendu plus spacieux grâce à la disposition des meubles et je me l'imaginais sans problème danser devant la télévision, une fois la table basse en verre déplacée contre la commode en bois. Le sol était gris, les murs clairs, mais je ne ressentais pas cette sensation de vide. De gros livres et des cassettes s'entassaient, des cadres photos décoraient chaque meuble, de minuscules cactus prenaient le soleil au bord de la fenêtre.
Ils venaient de Hoseok. J'en étais certain.
« Dis, Jungkook ? »
Jimin était revenu à la réalité.
« Quand est-ce que tu es arrivé ? Et comment es-tu entré ? »
Il se redressa en attendant ma réponse.
« Je suis entré grâce au code que Hoseok m'a donné et je suis arrivé à Séoul hier. »
Jimin se rembrunit.
« Hoseok ? Comment ça, Hoseok ?
- Hoseok m'a donné quelques conseils pour que je ne me perde pas ici, il m'a donné le code de ton entrée et m'a dit à quel étage tu habitais.
- Hoseok était au courant, résuma Jimin en plissant les paupières.
- Oui. »
Jimin tourna dramatiquement la tête sur le côté en croisant les bras.
« Hoseok était au courant que tu venais, répéta-t-il. Et pas moi.
- Oui.
- Je t'ai demandé une centaine de fois si tu comptais venir et tu m'as esquivé ! Hoseok est ton hyung préféré, n'est-ce pas ?
- Premièrement, tu n'es pas mon hyung, mais mon petit-ami tout petit.
- Je ne suis pas petit !
- Ensuite, la surprise aurait été gâchée. »
Jimin renifla outrageusement.
« Et si je n'étais pas chez moi ce soir ?
- Seokjin s'en est assuré. »
Sa mâchoire se décrocha suite à ma déclaration et je me retins de ne pas éclater de rire. Jimin se tourna vers la table basse où trônait le plat que Seokjin lui avait spécialement concocté et qu'il avait, semblait-il, savouré. Il ne restait plus une miette. Seule l'assiette avait survécu, abandonnée sur le coin.
« Il était aussi dans le coup ? s'indigna Jimin.
- Oui.
- Et si après avoir mangé, j'avais décidé de sortir ? rappliqua-t-il.
- Namjoon s'en est assuré. »
Vue la réaction de Jimin, je savais pourquoi sa télévision était allumée. C'était la preuve qu'il avait regardé le film culte qui passait sur la chaîne. Un film recommandé par Namjoon qui lui avait sorti cinq arguments d'une page chacun pour convaincre Jimin de le voir.
« Je me sens délaissé, Jungkook.
- Sweetie...
- Pas de sweetie qui tienne !
- Cette couleur de cheveux est très belle.
- N'essaye pas de te défiler.
- Je peux t'embrasser ?
- Il va te falloir bien plus que ça.
- Je peux te cuisiner de bons petits plats cette semaine et te donner beaucoup d'attention, commençai-je.
- Tu comptais déjà le faire, espèce d'homme au grand cœur.
- Tu as raison. »
Un éclair de malice illumina le regard de Jimin. Je haussai le sourcil, interrogateur et il me répondit simplement qu'il réfléchissait déjà à assouvir sa terrible vengeance sur ces hyung irrespectueux.
Il se pensait crédible, mais Jimin ne faisait peur à personne au fond. Je l'encourageai néanmoins d'une vive ardeur et il applaudit, tout content du terrible châtiment qu'il leur préparait.
***
Je ne pensais pas que Jimin mettrait son plan à exécution si rapidement.
Nous étions restés chez lui toute la journée. Après un long moment de câlins, parce que nous en avions terriblement besoin, nous nous étions tous les deux douchés puis habillés. J'avais par la suite expliqué à Jimin ce qu'il s'était passé ces dernières semaines, et malgré son air faussement vexé, il avait tout écouté.
J'étais arrivé à Busan il y a deux semaines. J'avais passé ce moment avec ma famille, dans la maison dans laquelle nous vivions quand j'étais petit. De nombreux souvenirs m'étaient remontés, contrairement à la fois où j'étais revenu pour mon service militaire. À l'époque, j'avais eu l'impression d'être dans un milieu totalement encadré par mon devoir, et l'environnement qui m'avait entouré ne m'avait pas déstabilisé. Dans ma tête, je n'étais pas réellement retourné dans mon pays natal. Je faisais simplement ce que je devais faire en tant que Coréen.
Cette fois-ci, c'était différent. J'étais à Busan de mon plein gré et j'avais pu me concentrer sur ce qui m'entourait. Mes parents avaient laissé ma chambre telle quelle, avec les jouets, mon petit lit, les dessins peints par mon frère et moi sur les murs craquelés par le temps. En attendant, j'avais dormi dans la chambre de mon hyung qui avait eu le temps de tout réhabiliter. Seungkwan travaillait à Busan, avait son appartement mais venait souvent voir les parents. J'avais été réellement heureux de les voir tous les trois.
J'étais très peu sorti, j'avais préféré discuter avec ma famille de tout et n'importe quoi. Rattraper le temps en racontant ma petite vie tranquille en Australie, qui paraissait leur manquer. Seungkwan s'était plutôt bien acclimaté, ce qui me faisait vraiment plaisir. Il ne regrettait pas son choix, même s'il m'avait affirmé qu'il y retournait pour les vacances, car une partie de lui appartenait à l'Australie.
Ses mots ne cessaient de me hanter depuis.
Durant mon récit, Jimin m'avait demandé si j'étais venu à Séoul pour leur rendre visite en plus du mariage de Hoseok et Sooyoung. Je lui avais rétorqué que je venais également m'installer pour étudier. Mes parents me prêtaient leur aide pour les papiers administratifs et m'avaient chargé de trouver un endroit où loger, proche de l'université qui avait m'accepté. Comme j'étais arrivé la veille, Jimin avait compris que je n'avais pas encore réservé de chambre d'hôtel et m'avait tout de suite proposé de rester chez lui le temps que je trouve quelque chose. Il avait sautillé sur place à son idée. J'étais gêné de m'imposer de la sorte, et d'un autre côté, soulagé d'être avec lui. Il était mon point de repère. Jimin m'avait répété que je ne le dérangeais pas, qu'il ne me laisserait pas aller autre part, alors j'avais accepté.
Seokjin l'avait deviné il y a un mois déjà. Il était certain que Jimin voudrait que je reste et il avait eu raison.
J'avais rangé mes affaires dans ses tiroirs. Jimin s'était dépêché de me faire de la place et m'avait observé plier mes t-shirts, couché sur son lit, en rigolant de mon trait un peu trop maniaque.
Je n'aimais pas quand c'était mal plié.
Une fois mes deux sacs vides, Jimin avait enroulé ses bras autour de ma taille pour que je ne bouge plus. Nous avions été séparés pendant plus de trente minutes et il craignait que je ne supporte guère ce déchirement qui pouvait s'avérer mortel pour moi.
Je voulais rattraper tout ce temps perdu. Pas seulement ces trente minutes, plutôt ces longs mois. Être auprès de Jimin, simplement à ses côtés, était déjà incroyable à mes yeux. J'imaginais terminer la soirée devant le canapé ou enroulé au chaud sous sa couette. Pourtant, Jimin en avait décidé autrement.
J'avais essayé de l'arrêter. Sauf que Jimin était têtu. Il avait beau être plus petit que moi, il était redoutable et ne se laissait clairement pas faire. Lorsqu'il avait quelque chose en tête, personne ne lui faisait changer d'avis. J'y étais presque parvenu d'ailleurs, mais Jimin avait dégainé une arme qui m'était encore inconnue : le chantage. Si je n'acceptais pas, Jimin ne me donnerait plus de papouilles.
Qui étais-je pour refuser ? J'étais faible et l'assumais.
Nous étions devant l'appartement de Namjoon. Jimin sonna. J'étais heureux de revoir Namjoon après tout ce temps, mais Jimin avait décidé de s'inviter sans le prévenir. Je n'aimais pas cette idée, je n'aimais pas déranger. Jimin non plus, à part fois-ci.
Ce minuscule démon m'utilisait pour se venger. Et je le laissais faire.
La porte s'ouvrit. Je me décalai pour mieux apercevoir Namjoon, qui fronça les sourcils avant de lever le regard. Je souris en le voyant sourire et Jimin s'interposa en râclant la gorge. Posté devant moi, il attrapa mon bras pour que je reste à ma place comme s'il était en mesure de me cacher.
Namjoon l'invita à rentrer et Jimin ne se fit pas prier.
« Bonsoir hyung ! Comment tu vas ?
- Bien et toi ? répondit Namjoon en rentrant dans son jeu. Quel bon vent t'amène ?
- Tu ne devineras jamais ! J'ai reçu un énorme colis hier soir, sur le palier de ma porte. »
L'énorme colis, c'était moi.
« Tu sais qui te l'a envoyé ?
- Honnêtement je suspecte plusieurs personnes de mon entourage en qui j'avais une totale confiance, mais là n'est pas le sujet, hyung ! J'ai décidé de venir te voir pour te le montrer, j'ai pensé que ça pouvait te faire plaisir. »
Jimin me tira à lui et je tombai nez à nez sur Namjoon.
« Regarde-moi cette bonne surprise !
- Salut hyung..., murmurai-je, à présent peu sûr de moi.
- Je suis content de te revoir, Jungkook. »
Namjoon portait une tenue avec des couleurs assorties et abordait la même coupe de cheveux, coupés courts, teintés d'un joli châtain foncé. Il n'avait pas changé.
Il ouvrit les bras et je n'hésitai pas. Des quatre, il était celui qui m'impressionnait le plus. Honnêtement, je m'attendais à un signe de tête de sa part, voire une tape amicale sur le dos, mais sûrement pas un câlin. Namjoon ne me serrait pas aussi fort que Jimin ou Hoseok, mais il était plus grand et c'était tout aussi réconfortant.
Il se détacha en gardant ses mains posées sur mes épaules.
« Plus les années passent plus tu mûris, clama-t-il.
- Pourquoi tu dis ça ? On ne se connaît que depuis un an...
- Je le sens. Tu vois pour Jimin, ça fait un certain temps qu'il reste au même stade.
- Alors je continuerai dans ce sens, promis hyung.
- Vous êtes tellement niais. »
Je me retournai vers Jimin, qui, les bras croisés, leva les yeux au ciel en disparaissant dans une autre pièce, l'expression néanmoins malicieuse sur le bout des lèvres.
Namjoon le suivit et me lança un coup d'œil pour que je l'imite. Chaussures retirées, nous entrâmes dans le salon, le canapé dès lors occupé par Jimin qui s'étirait en prenant toute la place. Namjoon ne s'en formalisa pas, sans doute habitué par ses caprices et s'assit dans le fauteuil d'en face. Je dégageai les jambes de Jimin en le menaçant de m'asseoir dessus et il me tira la langue avant de se redresser.
« Comment s'est déroulé ton voyage ? » me demanda Namjoon.
Jimin participait peu à la conversation, laissant Namjoon poser les questions sans lui couper la parole. Je ne savais pas ce qu'il avait en tête, mais j'étais certain qu'il ne s'arrêterait pas à là. Notre hyung devait s'en méfier, mais une fois de plus, ne s'en importait guère. Je lui racontais alors mes mésaventures à l'aéroport et le reste de mon séjour à Busan.
Il m'écoutait attentivement en commentant parfois. J'appréciais de plus en plus Namjoon. Discuter avec lui par le biais de lettres était bien, lui parler était mieux. Je comprenais pourquoi Jimin se tournait vers lui lorsque quelque chose n'allait pas, sa présence et ses paroles étaient apaisantes.
Jimin, désormais avachi sur mon torse, se redressa au moment où j'évoquais ma recherche de logement. Namjoon me lança un regard complice et posa son doigt sur sa bouche pour m'inciter à le laisser parler.
« Je viens de me souvenir, déclara Jimin en se tournant vers Namjoon. Tu cherches toujours un colocataire, hyung ? »
Il acquiesça.
« Tu serais le candidat idéal, Jungkook ! Namjoon-hyung cherche quelqu'un depuis un bon moment et ne trouve personne, je suis certain que ça te plairait.
- C'est une bonne idée, oui. »
Jimin plissa les paupières.
« Tu n'as pas l'air très enthousiaste... ou surpris.
- Mh, mh.
- Ne me dis pas que... »
Il pointa Namjoon de son petit index.
« Tu lui en as déjà parlé ?
- Oui, avoua Namjoon.
- Donc tu as refusé tous les autres en attendant la venue de Jungkook ?
- Oui et non. Ceux qui se sont présentés étaient tous trop jeunes de toute façon.
- Combien de choses me cachez-vous encore ?
- Rien, je te le promets, cutie. » dis-je en lui embrassant la joue.
Jimin feignit m'ignorer en fixant la télévision. Il était mignon.
« En tout cas Jungkook, la place est toujours libre, annonça Namjoon.
- Merci, hyung. Je vais en reparler avec mes parents, même si je ne pense pas chercher autre part. Je ne peux pas trouver mieux qu'ici.
- L'appartement te plaît au moins ? Il faut que tu t'y sentes bien surtout.
- Il est vraiment bien, je suis sûr que le reste aussi. En plus, le quartier n'est pas trop loin de l'université.
- Et de chez moi, ajouta Jimin.
- Et de chez mon copain. » répétai-je.
Jimin sourit.
L'ancien colocataire de Namjoon, avec qui il avait emménagé au début de leurs études, était parti pour s'installer avec sa femme. Depuis Namjoon payait le loyer seul, et malgré son salaire, il préférait partager l'appartement. De nombreux étudiants avaient déposé leur proposition mais il refusait de vivre avec quelqu'un de trop jeune. Il n'était pas à l'aise.
Nous avions en quelque sorte signé un accord grâce aux lettres que nous nous échangions et j'étais content que cela ce soit fait. L'idée de vivre avec Namjoon me rassurait.
« Et si vous restiez dîner pour fêter ton arrivée ? proposa Namjoon.
- Évidemment qu'on reste dîner, lança Jimin. C'était prévu. »
Namjoon rit de bon cœur.
« Je sais.
- Tu es sûr qu'on ne te dérange pas ? fis-je tout de même, en donnant un coup de coude à Jimin.
- Bien sûr que non. Jimin sait bien que je travaille à la maison demain.
- Arrête de me faire passer pour quelqu'un d'attentionné, je perds en crédibilité. »
Namjoon haussa les épaules et s'éclipsa en cuisine. Jimin souffla, marmonnant des mots que je ne compris pas et je lui volai un baiser. Je me reculai aussitôt, il tenta de me retenir mais je fus plus rapide. Il pesta en me traitant de méchant garçon.
Pour me faire pardonner, je lui lançai un autre baiser volant que Jimin fit semblant d'attraper.
◌ ◌ ◌ ◌ ◌
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro