Chapitre 1: Fuir la vérité c'est se fuir soi-même
kimchi-ma premier chapitre 1723 mots
Je cours... Balayant d'une main les branches qui se dressent sur mon passage, je m'enfonce le plus possible dans la forêt sans savoir où je vais.
Qu'est ce je fuis, vous vous demandez certainement ?
Je ne sais pas moi même... La vérité, ou ma conscience, ou lui... Peut être même les trois...
Tout ce qui m'importe est de m'éloigner... Mettre le plus de distance entre moi et la ville. La ville et mon crime...
Je suis rentrée dans une grande et somptueuse chambre de hôtel. Il avait le chic pour toujours montrer sa fortune... Il était là dos à moi; en train de ranger sa valise fraichement remplie. Il portait, comme d'habitude, une chemise blanche et un pantalon noir. Ses cheveux blonds étaient dans tous les sens en pétards.
Je souffle. J'ai un point de côté et les poumons en feu. Les branches me griffent les yeux, plusieurs fois, je chute, glissant sur le terrain mouillé. Mes muscles me lancent, je crois que ma cheville est tordue. Mais la peur est un sentiment bien plus fort que la douleur. C'est une émotion que presque tout le monde craint car on ne sait jamais comment on va réagir face à elle. On a peur d'avoir peur et ceci est un cercle vicieux qui peut très vite conduire à la folie. On ne peut ni l'imiter ni la reproduire. Une peur est unique et c'est ce qui la rend dangereuse.
Soudain, comme si il avait sentit mon regard brûlant sur sa nuque, il s'est retourné et m'a fixée, les yeux écarquillés.
- Cass... Cass... Cassiopée ? Qu'est ce que tu fais ici ?
J'entends les grondements de l'orage qui me paraissent soudain menaçants. Pourtant, d'aussi loin que je m'en souvienne, j'ai toujours aimé ces moments où le ciel se mettait en colère. Petite, je comparais les éclairs à des tâches de peinture qui apparaissaient et disparaissaient sur les nuages. J'adorais regarder la nature exprimer sa rage à coup de pinceaux... Sauf que je n'ai plus ni l'insouciance de mon enfance ni la sécurité de ma maison. Et cette ambiance semble beaucoup plus inquiétante, plus dangereuse...
Je n'ai rien répondu et suis rentrée en prenant soin de fermer la porte derrière moi.
- Salut Camille, ça fait longtemps n'est ce pas ?
- Très longtemps, en effet.. Mais l'âge ne semble pas avoir de prise sur vous ma chère, m'a-t-il complimenté, le regard fier.
- Contrairement à toi...
Je ne sais pas depuis combien de temps je cours ainsi. 15 min ? 1 heure ? Je ne sais pas ni où je vais ni où je suis. Peu m'importe à vrai dire. Je finis par m'arrêter près d'une paroi rocheuse. Un frisson descend le long de ma colonne vertébrale. Mes vêtements mouillés et déchirés me collent à la peau mais pas autant que mon crime.
Il n'a pas réagi à ma pique et m'a regardé déambuler dans la pièce. Je me suis approchée de lui, lui effleurant les épaules de mes doigts graciles.
- Comment va Lorenza ? lui ai-je demandé, innocemment
Je rentre dans une petite grotte non loin de là, une ancienne tanière sans doute. Je prends à peine le temps de vérifier qu'elle n'est pas habitée. Peut être espérais-je secrètement qu'un être quelconque abrège ma souffrance. Qu'il me soulage de ce poids qui me pèse sur le dos et m'oblige à courber la tête. Il y a une certaine ironie dans cette histoire, je n'ai jamais baissé le regard devant quelqu'un et voilà que je finis par m'incliner pour ma conscience. La vie a décidé qu'il était temps pour moi de ployer...
Il a difficilement avalé sa salive au nom de sa fille que je ne suis pas censé connaître...
- Tr... Très bien...
- Tant mieux... Elle a de la chance d'avoir un père comme toi... lui ai-je dit distraitement en lissant les plis de sa chemise.
- Qu'est ce que...
Je me laisse glisser le long de la pierre, accablé par le poids des souvenirs. Un à un, je retire mes vêtements trempés, et pas que par la pluie. Je les jette en dehors de la grotte avec autant de force que si je jetais mon crime.
Il ne finit pas sa phrase qu'il tomba sur le lit. Il me lança un regard affolé.
- Ah oui, que suis-je sotte... ai-je soupiré. J'ai oublié de te prévenir que j'avais malencontreusement laissé tomber une potion paralysante dans ton thé. Quelle étourdie, je suis...
Je pose mon regard sur les murs de la grotte. Du bout du doigt, je suis les contours irréguliers de la pierre. Je tente d'imaginer à quoi la nature a pensé en dessinant ces pics et bosses. Est ce un message destiné aux Hommes ? Ou aux personnes comme moi qui découvrent cette grotte par le plus grand des hasards ?
Il ne pouvait plus bouger, pourtant son regard exprimait sa stupeur...
- Pourquoi ? ai-je interprété. Cam, Cam, Cam... Ne te souviens-tu pas de la dernière fois que l'on s'est vu, toi et moi ?
J'admire un instant les reflets de la lune qui dansent sur la pierre. Comment la nature peut-elle offrir quelque chose d'aussi beau à la race aussi violente qu'est l'humain ? Peut-être croit-elle que la beauté peut nous sortir de cette dynamique... Peut-être pense-t-elle que les hommes méritent d'être sauvés... Eh bien si c'est cela, elle a tort. Les êtres humains sont cruels, dévastateurs et impitoyables. Quelle personne digne de ce nom inventerait des poisons aussi dévastateurs que ceux de Lacrymosa ? Quelle personne humaine forcerait quelqu'un d'autre à les avaler ? Car c'est bien ce que les habitants de ma ville ont fait... Ce que j'ai fait... La morsure du vent froid sur ma peau nue me ramène au temps présent... ou pas...
- Non ? Allons fais un effort... Je suis sûr que tu en es capable...l'ai-je encouragé, en faisant glisser mes mains le long de sa gorge.
Je saisis mon sac que j'avais abandonné dans un coin, le plus loin possible de moi... Je sors d'une main tremblante toutes les fioles. Je les étale devant moi. Je les contemple sans savoir quoi faire. Je voudrais les briser d'un simple geste et détruire ainsi tout ce qui me relie à ce qui c'est passé cette nuit. Mais quelque chose me retient. Quelque chose dont je ne connais pas le nom. Quelque chose que je n'ai jamais ressenti auparavant. Quelque chose suffisamment puissant pour me faire hésiter à supprimer toutes les preuves contre moi.
- Vraiment ? Rien ? Je suis déçue... Très déçue... Puis je me suis penchée pour lui chuchoter à l'oreille: Tu peux courir, tu peux disparaître et changer de nom, tu peux m'oublier et m'effacer de ton être, rien n'y changera, je te retrouverai toujours Camille Wenstreet... Et ce jour-ci, ce jour-là Cam, tu comprendras ton erreur... Je te le jure ! Voilà les derniers mots exacts que j'ai prononcé à ton égard.
Je regarde mes mains. J'ai toujours apprécié me vernir les ongles. Mais ça fait bien longtemps que j'ai d'autres sujets de préoccupation. On m'a toujours dit que j'avais de jolis doigts, bien proportionnés, délicats... Aujourd'hui, mes mains sont recouvertes de liquide carmin. J'ai beau les frotter sous les larmes du ciel, seul le sang part. Pas ma tristesse et encore moins la peur.
Sous ma main crispée sur sa chemise, j'ai senti son cœur s'affoler. Mais rien ne pouvait calmer ma rage et mon envie de vengeance.
- Tu m'as échappé 15 années... Bravo... C'est un record... Aucune personne n'a jamais réussi à me fuir aussi longtemps. Mais comme qui dirais, la chance tourne mon vieil ami...
Je contemple la pluie qui tombe comme si c'était un fait extraordinaire. Dans quelques heures, on découvrira le corps et personne ne me cherchera. Il n'y aura aucune enquête ni question. Le mort aura juste le droit à un enterrement tout ce qu'il y a de plus simple. La famille recevra peut être des mots gentils de la part de quelques personnes hypocrites et tout sera oublié. Car les gens sont habitués, les meurtres sont commun à Lacrymosa...
Comme il ne pouvait rien dire, j'ai poursuivis mon monologue, en le regardant dans les yeux, pour y voir l'effet de mes paroles.
- Tu n'as jamais pris la peine de me connaître. Je vais t'apprendre quelque chose: connaitre son ennemi est le seul moyen de le vaincre. Si tu t'étais penché sur mon passé, tu aurais su que j'ai été la meilleure Vengeresse que le roi ait connu. Puis j'ai ris. Le son froid et cruel a résonné dans la pièce... De toute façon, je ne sais pas pourquoi je te raconte tout ça, tu n'aura jamais l'occasion de t'en servir... Tant pis, il fallait réfléchir avant...Mais ne t'inquiète pas, je vais faire ça dans les règles de l'art...
Je suis fatiguée mais je ne veux pas dormir car je sais que dès lors que je fermerai les yeux, des images me reviendront, encore plus fortes...
Je me lève et commence à faire les cents pas pour me réchauffer.... Je continue ainsi jusqu'à ce que mes pieds, blessés par l'irrégularité de la pierre, me supplient de m'arrêter...
J'ai ensuite sorti de mon sac à main, une petite boîte en bois vernis noir. Le beau symbole des vengeresse était gravé au fer blanc sur le couvercle. Je l'ai posé sur le lit, afin que le jeune homme ait tout le loisir de voir ce qui l'attendait. Je l'ai ouverte en sifflotant. Une série de 12 fioles était alignées, le liquide reluisant. J'en ai saisis une, et l'ai tournée dans ma main...
Je lève le regard vers le fond de la grotte et je la vois. Toute belle dans sa robe blanche de mariée, elle illumine la caverne par sa beauté. Éphémère, comme l'Homme sur la Terre, unique comme chaque être. Cependant, contrairement aux humains qui durant leur courte existence vont détruire, elle, elle embellie son entourage le temps d'une simple journée. Belle le matin, flétrie le soir, pourtant tous ceux qui croisent sa route vont s'arrêter pour la regarder sachant très bien qu'ils ne la reverraient point. Du bout des doigts, je caresse les délicats pétales de sa robe, laissant des traces carmin sur son habit immaculé. Choquée par cette vue, je retire vivement mes doigts et recule. La rose blanche est devenue rose de sang...
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