Le visage balayé par le vent, et les cheveux trempés, je courrais derrière ma mère, accélérant mes pas. Ce matin là, le ciel gris et menaçant avait lâché une vilaine pluie brusque. Ma génitrice ouvrit la porte du magasin luxueux conçues spécialement pour mariées et je la suivais.

Lisa, la jeune employée que l'on avait rencontré la dernière fois, vint nous accueillir chaleureusement.

« Madame Veronica vous attend dans son bureau. » informa-t-elle, en s'adressant à ma mère.

Ma mère avait prit rendez vous avec la demi-soeur de Tony, pour discuter du mariage et du choix de sa robe. Elle avait aussi l'intention de l'inviter, pensant que ce serait une bonne idée.

« Lisa? Tu m'aides à trouver une belle robe? »

Elle me fit un beau sourire avant de me faire signe de la rejoindre. Lisa était très mignonne. Grosses joues, tâches de rousseur, lèvres pulpeuses et un nez très fin. De petites barrettes ramenaient ses cheveux bruns en un chignon sophistiqué et bien rond. Elle faisait presque ma taille, sauf que moi je portais des bottines à talons..

Et oui, je suis petite, vous l'avez sûrement deviné.

Elle me guida vers un endroit de la boutique où se trouvaient plusieurs robes de différentes tailles et couleurs.

« Une couleur que vous aimez le plus? » demanda Lisa.

« Le bleu? Oh non non, le rouge.. »

La couleur qu'Harry préférait.

Lisa émit un rire discret avant de fouiller parmi les vêtements à la recherche d'une robe correspondant à la couleur que j'avais demandé. Je la contemplai choisir avec soin trois robes qu'elle allongea sur une table, afin que je puisse voir tous les détails. La première était longue à bretelles fines. Large au niveau des cuisses, la robe disposait d'une ceinture très chic en perles. La deuxième était d'un rouge vif, beaucoup plus courte que la deuxième; elle arrivait au dessus des genoux. Cette dernière était en soie et ses manches courtes en dentelle. Elle était moulante et ouverte au niveau du dos. Quant à la troisième, d'un rouge écarlate, elle était de la même taille que la deuxième et avait un large décolleté qui semblait offrir une vue bien généreuse sur la poitrine sauf si la propriétaire n'en possède point -moi, par exemple- cela pourrait être cause de déception de la part des hommes.

J'eus un coup de coeur pour la deuxième robe et Lisa m'apprit que le même modèle a été confectionné pour la fille d'Obama; Natacha.

La jeune brune reçut un appel téléphonique et s'excusa poliment avant de décrocher. Je me mis alors à examiner les robes du regard, même si j'avais déjà fait mon choix.

« Quoi? Tu n'es pas sérieux j'espère? Donc c'est fini entre nous? Oui, bien sûr... je comprends, c'est le choix de tes parents, tu n'as pas à te justifier...On a plus rien à se dire Jackson, le mieux est de ne plus se parler, au revoir, ne m'appelle plus je t'en supplie. »

Le visage de Lisa se décomposa. Toute la joie et la bonne humeur qu'elle dégageait fût remplacé en un instant par une déception profonde, que sa conversation téléphonique avec ce certain Jackson avait certainement engendré. Des larmes ne tardèrent pas à couler de ses beaux yeux noisettes, et c'est en la voyant dans cet état pénible que je lâchais tout ce que j'avais dans les mains pour la prendre dans mes bras.

« Est ce que tu veux en parler? » proposais-je à Lisa.

Après s'être assuré qu'aucun rendez vous n'a été prévu pour cette journée, Lisa s'assit sur un fauteuil et je m'installais près d'elle. Ses larmes n'avaient cessé de couler et son nez avait opté pour une couleur rougeâtre. Les quelques mots qu'elle avait échangé avec cet homme l'avait en quelques sortes brisée.

« C'était ton copain? » réussis-je à prononcer, ne sachant par quoi commencer la discussion.

« Mon ex, maintenant. »

« Je.. »

« Quelle conne je suis, à croire qu'il allait changer et qu'il parlerait à ses parents à propos de nous. Il m'a promis de tout leur dire, qu'il m'aimait et qu'il comptait faire sa vie avec moi et non avec sa fiancée que ses parents ont choisis pour lui. » Elle marqua une pause, se mordant la lèvre inférieur. « C'est vrai que, après tout, elle est belle, riche et médecin rien à voir avec la simple employée d'un magasin.»

Je fouillais dans mes poches, avant de lui tendre un mouchoir. La voir ainsi me déchirait le coeur et je ne savais comment réagir. La seule fois où j'ai été déçue à cause d'un homme remontait à la semaine dernière, à cause d'Harry. Pourtant, je lui avais pardonné. Je ne pouvais faire autrement. Je savais que ne plus le voir ou lui parler laisserait un vide en moi alors j'avais décidé de fermer les yeux et ne pas lui en vouloir. Nos situations étaient donc différentes, la sienne était beaucoup plus compliquée.

« Si je peux te donner un seul conseil c'est ne jamais t'attacher à un homme sans être sûre que lui aussi est attaché à toi. Nombreuses sont les promesses mais rares sont ceux qui les tiennent. »

Je lui pris la main, la caressant tendrement, essayant de la réconforter. Elle ne méritait pas ce qui venait de lui arriver et les derniers mots qu'elle avait prononcé captèrent mon attention.

Ne jamais s'attacher à un homme sans être sûre que lui aussi est attaché à toi.

La vraie question est: Comment le savoir?
Comment savoir si l'homme pour qui tu éprouves des sentiments indescriptibles est attaché à toi?

« Considère cette histoire comme une leçon à retenir et cette fin pour un nouveau départ. » dis-je. « Il ne mérite ni ton amour ni tes larmes, et si ça se trouve, c'est un véritable lâche. Je suis sûre que beaucoup d'hommes rêveraient de te parler. »

Elle sourit. Un simple sourire qui ne dura pas longtemps. Je savais qu'au fond elle avait envie de crier et se libérer de ce poids lourd, et que parler avec moi ne l'aiderait pas entièrement. Elle avait besoin d'être seule, pour pleurer à chaudes larmes, hurler ou même casser des choses.

Lisa se leva, avant de courir vers les toilettes. Elle avait envie de pleurer en cachette, sans que personne ne la voit et je la comprenais.
Pourtant, le "conseil" qu'elle m'avait donné avait créé tout un tas de questions dans ma tête, et des suppositions également. Je réalisai bêtement que j'étais la seule à fournir des efforts afin de m'approcher d'Harry, celle qui lui préparait ses muffins, qui l'attendait au café.. Je réagissais stupidement sans même savoir si l'attachement ou même l'admiration était réciproque, ne serait-ce qu'un peu. Certes, il était resté chez moi, mais c'était uniquement grâce à l'intervention de ma mère.

En y pensant durant un long moment, je fis un choix. M'éloigner d'Harry. Allait-il faire le premier pas? J'avais hâte de le savoir.

*******

Assise sur une chaise, je considérais les nombreuses activités des enfants qui jouaient à la marelle au parc, à travers la vitre malgré ce froid glacial. Le restaurant était calme et j'attendais silencieusement qu'Ashley apportait nos plats. Cette fois, décidées de ne pas faire de conneries et manger sainement, nous avions décidé de commander des plats cent pour cent végétariens. C'était donc un gratin de brocolis pour moi, et un risotto aux courgettes et champignons pour Ashley, le tout accompagné d'une tarte au citron que ma meilleure amie ne pouvait s'empêcher de commander. J'avais passé toute ma matinée à faire la tournée des magasins de la ville avec ma mère, que j'avais oublié de travailler pour mes examens qui s'approchaient à grands pas. À la maison, il m'était impossible d'étudier. Ma mère et Tony recevaient un wedding planner à la maison pour discuter de l'organisation du mariage qui aura lieu dans exactement six jours.

« C'est la dernière fois que je fais la queue! » se plaignit Ashley.

Elle déposa les deux plateaux contenant nos déjeuners avant de tirer une chaise et s'asseoir, lâchant un long soupir. Avec un crayon qui se trouvait sur la table, elle noua rapidement ses cheveux en un chignon avant d'ouvrir la boîte qui contenait la tarte au citron.

« Tu commences par le dessert ou c'est comment? »

Elle y goûta un morceau avant de fermer ses yeux, pour savourer ce moment de pur plaisir. En tout cas, c'est ce que je pensais..
Mais Ashley fit une grimace. La tarte n'était donc pas bonne.

« Très acide. » jugea-t-elle avant de s'attaquer à son risotto.

J'allumai mon pc portable et le connectait à la wi-fi, avant de déguster un bout de ma quiche. Une fois la connexion établie, je branchais mes écouteurs avant de lancer l'une des mes musiques préférées "The Beatles- A day in the life" et ouvrit une page vierge sur excel afin d'effectuer quelques calculs pour mon devoir de maths, et dresser des statistiques. Une opération qui me prit quinze minutes. Après avoir finis, je remarquai tristement que j'avais fini ma quiche, ce que je trouvais assez louche..

Ashley.

En effet, elle ne s'était pas gênée de prendre un gros morceau de ma tarte salée et le poser sur son assiette. Plongée dans l'un de ses romans qui se nommait "Geek love" d'une certaine Katherine Dunn, la jeune blonde semblait vivre dans une bulle imaginaire loin de tout, captivée par sa lecture, mais dès que je tendis ma main vers mon morceau de quiche, cette dernière me lança un regard terrifiant, tel un loup voulant défendre sa meute ou son territoire qui n'était d'autre que son assiette et ma quiche.

« C'est ma quiche! » m'écriai-je.

Elle en croqua un bout avant de déguster tout le reste en une fraction de secondes en m'adressant un sourire sadique.

« Ça t'apprendra de faire des muffins au chocolat et non aux raisins, tu savais que ce sont mes préférés! »

Il y'eut des moments comme celui là, où je commençais à douter sérieusement de l'âge de ma meilleure amie.

« Oh, mais ce n'était pas pour moi.. » Elle marqua une pause, imitant une expression boudeuse. « Pour monsieur Styles! Et quand tu es sortie des cours, c'était pour aller l'attendre quelque part?»

C'est fou à quel point elle pouvait deviner mes réactions et mes intentions sans même être avec moi.

« Résultat: Monsieur n'est pas venu.. Il a été viré du café. » continua-t-elle.

Je restai sans voix devant ce qu'elle venait de dire. Harry ne travaillait plus au café, mais comment savait-elle qu'il était viré?

« Oh tu sais je l'ai surpris à la bibliothèque ce jour là, il parlait à son père et lui a annoncé que son patron l'avait viré juste comme ça, sans raisons.. »

« Je.. je crois avoir compris. »

« Compris quoi? »

« Quand je sortais de la cafétéria, j'ai vu Zayn parler à un homme. Je pense que c'est le patron.. »

« Donc c'est..? »

« C'est Zayn qui a demandé au patron de virer Harry. » terminais-je sa phrase.