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Chapitre 11 : Hoseok

« Un, deux, trois et quatre. Et un, deux, trois et quatre. Super, tu te débrouilles bien ! »

Un immense sourire au visage, Hoseok dictait les mouvements tandis que Jungkook les effectuait de son mieux. Les deux jeunes gens, vêtus d'un t-shirt ample et d'un jogging, avaient allumé la climatisation et mis le son de la musique aussi haut de possible pour en suivre le rythme.

Jungkook cherchait une salle où s'entraîner quand il avait croisé Hoseok en train de s'étirer, également en tenue pour danser. Lorsqu'ils s'étaient rendu compte qu'une des deux salles était déjà prise, il ne leur avait pas fallu une minute pour décider de travailler à deux. La pièce, de toute façon, s'avérait bien assez grande pour eux. Pourtant, alors que chacun imaginait s'occuper de son côté, ils s'étaient naturellement rapprochés et proposé de le faire ensemble.

Hoseok, parce qu'il exerçait souvent en tant que chorégraphe, avait aussitôt considéré le benjamin comme un de ses élèves, et après en avoir discuté, ils avaient choisi de s'atteler à quelques pas sur une chanson qu'ils connaissaient et aimaient tous les deux. Une fois d'accord, ils n'avaient pas attendu plus longtemps pour s'échauffer et entamer l'apprentissage. Hoseok passait l'essentiel de son temps à le regarder et à lui remontrer les mouvements au ralenti. Il dansait peu, mais il dansait avec une impressionnante souplesse.

Jungkook, malgré sa timidité, arborait un sourire délicat, reflet de celui de son aîné. Hoseok était quelqu'un qui l'avait marqué : si chacun ici paraissait agréable et bienveillant, Hoseok, lui, rayonnait. Son aura illuminait chaque pièce dans laquelle il entrait, et sa bonté irradiait. Jungkook se sentait rassuré auprès de lui.

La danse lui procurait un bien fou, le jeune garçon ne pouvait pas vivre sans ça, sans ressentir, sans que son corps s'agite selon la mesure. Il voyait cette même passion dévorer Hoseok, une passion qui le rendait heureux, qui lui soutirait un sourire immense et incapable de s'en aller. Comme aimanté, il souhaitait rester auprès de lui, il souhaitait apprendre de lui et, s'il ne le connaissait pas, d'emblée il songeait qu'il souhaitait lui ressembler.

Hoseok témoignait d'une façon de bouger exceptionnelle : ses mouvements, parfois hachés, exprimaient pourtant un talent inouï pour un style de danse que Jungkook admirait mais n'estimait pas maîtriser. Il voulait que son nouvel ami lui enseigne tout ce qu'il savait. Avide, il buvait les paroles de son professeur comme celles d'une incontestable autorité.

Après une courte heure de travail, ils s'effondrèrent d'un même mouvement. Hoseok ne remarqua qu'alors son bracelet allumé. Il se demanda depuis combien de temps le monde les observait, mais la question ne le tourmenta pas, du moins pas très longtemps : Jungkook se traîna jusqu'à se trouver installé auprès de lui, allongé sur le dos, les paupières closes.

« Jungkook ?

— Oui ?

— J'peux t'appeler Kook-ah ?

— J'peux t'appeler hyung ?

— Ça me va, approuva Hoseok.

— Ça me va aussi.

— Cool. »

Un sourire enfantin sur le visage, Jungkook se mordilla la lèvre et ouvrit un œil pour jeter un bref regard à son aîné. Chacun était couvert de transpiration (c'était surprenant, d'ailleurs, car le chorégraphe avait peu bougé), leur peau brillait sous la lumière naturelle du soleil qui filtrait par les fenêtres au-dessus du miroir. Épuisés mais loin d'être vaincus, ils se relevèrent quelques instants plus tard, avant que leurs muscles ne refroidissent.

« C'est reparti ? s'enquit Hoseok.

— Je suis prêt ! »

La mine réjouie devant l'enthousiasme de son cadet, Hoseok opina et remit en marche la musique.

Ils passèrent leur après-midi de cette manière : l'aîné enseigna pendant près de trois heures, après quoi ils allèrent récupérer des affaires propres et se rendirent à la salle de bains en discutant.

« J'ai besoin d'un bon bain, moi, déclara Hoseok. Vous me reverrez pas avant au moins une heure. Toi, t'es plutôt bain ou douche ?

— Plutôt douche. Je préfère aller vite, j'aimerais bien me reposer au jardin.

— D'acc, profite bien, à toute ! »

Jungkook opina, et chacun entra dans une cabine. Hoseok s'émerveilla devant la grande baignoire, sur le large bord de laquelle étaient installées plusieurs petites bouteilles de gel douche et de shampooing. Il y découvrit également des savons, ainsi que des pastilles pour un bain moussant.

Il regretta d'avoir pris une douche la veille. Désormais, il ne s'offrirait plus que des bains : s'il devait périr, autant s'en aller parfaitement relaxé, et il ne connaissait rien de mieux pour se relaxer qu'un moment de repos, plongé dans un bain chaud et enveloppé de la délicate odeur du gel douche.

Ainsi, lorsqu'il en sortit, l'heure du dîner était arrivée. Il se rendit à la cuisine où Yoongi – enfin Hoseok se souvenait à peu près du nom de chacun de ses concurrents – se trouvait déjà. Le jeune homme ne lui adressa pas un regard, il était occupé à cuir un peu de viande avec du riz qu'il faisait frire. Le fumet qui s'en dégageait mit aussitôt l'eau à la bouche du danseur qui se passa par réflexe la langue sur les lèvres.

« Hum, ça sent super bon ! On mange ensemble ? Je vais juste me faire un sandwich, ça ira vite !

— Comme tu veux. »

La réponse, quoique peu enthousiaste, tira un sourire à Hoseok qui se hâta de se concocter un dîner convenable pendant que l'autre terminait sa méticuleuse préparation. Ils finirent au même moment, de sorte qu'ils s'installèrent non pas à la table de la cuisine ou du salon, mais sur celle de la terrasse. Il faisait encore si beau, et le printemps s'avérait si doux ici : ne pas en profiter tiendrait du crime.

Depuis qu'il avait rejoint Yoongi, le bracelet de Hoseok n'avait toujours pas émis la moindre lumière.

« Alors, tu viens d'où ? s'enquit le plus jeune.

— Pourquoi ?

— Juste pour faire la conversation.

— Daegu, indiqua Yoongi après un haussement d'épaules.

— Oh, moi de Gwangju. Il paraît que Daegu a pris cher, ces dernières semaines, non ?

— Ouais...

— T'as des nouvelles de ta famille ?

— Non. »

Hoseok opina doucement et se tut, conscient d'avoir peut-être touché un point sensible. Il ferma les paupières avant de lever le visage au ciel dans un soupir.

« C'est compliqué, tout ça, hein ?

— Ouais... faut faire avec.

— Tu crois qu'on est où, exactement ? Je veux dire... il fait si bon, l'air est si pur, tout est si naturel.

— Je saurais pas dire. Le trajet était pourtant pas si long.

— On se croirait dans un autre monde, comme si on n'avait pas voyagé dans l'espace mais dans le temps.

— Toi, t'es le genre qui rêvait en classe devant les manuels d'histoire, hein ?

— Possible.

— Fais attention, Hoseok : parfois, l'histoire, on peut s'y perdre, elle peut rendre fou. Les regrets, la mélancolie... rêve pas d'un monde que t'as pas connu et que tu ne connaîtras que l'espace de quelques semaines. »

Son cadet opina doucement en même temps qu'un frémissement gênant courait le long de son échine.

Un ailleurs. Non, un avant. Le progrès allait de pair avec la décadence. L'un n'existait pas sans l'autre. Les contraires s'équilibraient. Mais l'équilibre qui en avait été bouleversé, c'était celui du monde. Aujourd'hui, l'unique moyen pour les masses de trouver un peu de réconfort, c'était de suivre minute par minute, seconde par seconde, le quotidien de sept condamnés à mort prêts à monter sur l'échafaud dès qu'ils en exprimeraient le désir.

Chacun ses occupations.

Son dîner terminé, le jeune homme proposa à son concurrent d'aller travailler un peu ensemble sur des paroles. Yoongi, cependant, refusa d'un geste. Il indiqua que pour le moment, il préférait travailler seul – il y était simplement habitué –, mais qu'ils pourraient prendre leur petit déjeuner tous les deux le lendemain. Parce qu'il avait craint que son aîné ne l'apprécie pas, Hoseok se sentit rassuré. Il opina et lui souhaita une bonne soirée avant de quitter la terrasse un bref instant. Il rapporta son assiette à la cuisine, après quoi il retourna à l'extérieur. Yoongi s'était volatilisé, l'autre ne s'en soucia pas : il rejoignit le garçon qui se trouvait assis sur la rive du lac, au loin. C'était Jungkook.

« Kook-ah ? »

L'appelé sursauta vivement ; il n'avait visiblement pas entendu son ami arriver.

« Oh, hyung ! Désolé, j'étais perdu dans mes pensées ! Tu viens ? C'est super apaisant ici ! »

Hoseok esquissa un sourire, ravi de voir le jeune homme lui adresser un geste enjoué pour l'inviter à s'installer auprès de lui. Il avait retiré ses baskets qu'il avait posées à ses côtés, et ses pieds dénudés trempaient dans l'eau.

Effectivement, ça paraissait reposant, comme environnement.

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