Dans un état végétatif
Romi et Raphaël s'étaient isolés dans la forêt à quelques kilomètres à l'arrière de leur maison, Ernest se tenait à côté de la jeune femme, un air sérieux sur le visage. En face d'eux, à environ six pas de distance, se trouvait son copain portant à bout de bras une bougie allumée, emmitouflé dans une doudoune.
‑ Allez Ernest, concentre-toi, lança Romi.
Le garçon fixa la bougie. Il prit une inspiration, mit ses mains en coupe devant lui et souffla. Raphaël se prit une bourrasque en pleine figure, la bougie s'éteignit.
‑ Ce n'est toujours pas ça mais tu t'es amélioré, Raphaël n'a pas bougé cette fois-ci. On recommence !
Le jeune homme ralluma la bougie les doigts tremblants.
‑ C'est pas bientôt fini ? fit Raphaël. Je me gèle sur place avec tout ce vent.
Dans la poche du pantalon de Romi, son téléphone vibra. La jeune femme lut le SMS et regarda son copain avec un visage sérieux.
‑ Ça y est ? s'enquit-il. On peut y aller ?
Romi hocha la tête.
L'hôpital des chasseurs d'esprits était beau, moyennement grand et très moderne, Romi et Raphaël furent surprenamment bien accueillis. Ils montèrent deux étages et se dirigèrent vers l'aile droite du bâtiment, côté cour. Ils frappèrent à une porte et entrèrent dans une chambre. Debout, les bras croisés, Valens les salua. A côté se tenait sa mère, assis sur le lit, son père, et installé dans un fauteuil, le regard vide et le visage dénué d'émotions, se trouvait Damien.
‑ Il sort aujourd'hui, informa son frère.
Devant le silence qui allait s'installer, Raphaël demanda :
‑ Et donc ? Qu'est-ce qui va se passer ?
‑ Il ne peut pas se débrouiller seul, il ne peut pas vivre sans nous, il ne fait rien tant qu'on ne lui dit pas de le faire, tout est machinal.
K, qui était caché dans la capuche de Raphaël, sortit et se planta devant le visage de Damien.
‑ Comment... ? fit Isabelle.
‑ Tu arrives toujours à invoquer dans des endroits protégés, lança Valens.
‑ Ça fait un moment qu'il est caché là-dedans, dit Raphaël.
K désigna Damien et se tourna vers Romi.
‑ Je peux ?
La jeune femme regarda Valens qui haussa les épaules. C'est sa mère qui répondit :
‑ Il n'y a aucun risque ?
‑ Pas du tout, répondit l'esprit. Je vais voir s'il est proche ou loin, c'est ce que vous voulez savoir, non ? S'il a des chances de revenir rapidement ou au contraire, qu'il ne revienne jamais.
‑ Alors vas-y.
K entra dans Damien. Tout à coup, le jeune homme prit vie, il releva la tête et posa ses yeux sur Valens qui serra un peu plus ses bras autour de lui.
‑ Il n'a pas le même regard.
Effectivement, ses yeux bleus habituellement pénétrants étaient à présent espiègles et avaient les paupières légèrement tombantes, lui donnant un regard en amande. Damien sourit.
‑ Bien sûr, vous savez que je suis K, je n'ai pas besoin de me cacher.
Son sourire s'effaça et son regard se perdit dans le vide. Au bout de quelques secondes, il ajouta :
‑ Damien est toujours là, au fond, je le sens mais c'est minime.
‑ Ce qui veut dire ? demanda son père qui, jusqu'à présent, ne savait pas trop ce qu'il se passait.
‑ Qu'il peut revenir mais que ça risque de prendre du temps.
‑ Que s'est-il passé avant tout ça ? s'enquit Isabelle. C'était qui cet esprit ?
K fouilla dans les souvenirs de son hôte et fronça les sourcils.
‑ Peut-être... peut-être dans la maison de l'esprit du temps.
‑ Quoi ? s'exclama Raphaël. C'était il y a longtemps.
‑ Un esprit de là-bas, dans l'escalier... il a dû le posséder. Il ne s'en est pas rendu compte, d'ailleurs, il s'en est aperçu que très récemment, il a commencé à avoir des amnésies et quand il a compris ce qui se passait c'était trop tard, l'esprit s'est senti en danger et à réussi à prendre le contrôle. A partir de là, je n'ai pas de souvenirs. Vous avez besoin d'autre chose ? Je préfère ne pas rester trop longtemps pour ne pas bloquer Damien.
Ils secouèrent tous la tête et K sortit du corps du chasseur qui redevint inerte. Il y eut un silence, personne ne savait quoi dire ni quoi faire. C'est alors que Romi proposa :
‑ Si vous voulez, vous pouvez garder K.
Ils se tournèrent vers elle. Elle expliqua :
‑ Si Damien n'est pas capable de se débrouiller et qu'il y a urgence, K sera là pour assurer.
Valens regarda sa mère.
‑ C'est peut-être une bonne idée.
Isabelle hocha la tête.
‑ Alors c'est décidé, on fait comme ça jusqu'à ce que Damien se rétablisse.
K virevolta dans les airs, content de pouvoir posséder un humain régulièrement. Damien fut placé dans un fauteuil roulant et ils quittèrent tous définitivement la chambre d'hôpital. Dans le couloir, Romi attrapa Valens par sa veste, l'arrêtant dans son élan. Toute sa famille et Raphaël continuèrent leur chemin. Elle lui demanda :
‑ Toi aussi tu vois l'énergie qui est déployée par les chasseurs ?
‑ C'est-à-dire ?
‑ De la lumière quand un chasseur, ou moi-même, faisons quelque chose en particulier, comme invoquer un esprit, ou comme l'autre fois, dans la clairière avec Damien.
‑ Donc tu vois ça ? Je n'en ai jamais entendu parler.
‑ Ça m'aurait étonné...
‑ Tu vois l'énergie des esprits ?
‑ Non, seulement celle des humains.
‑ Et ça, tu le vois ?
Valens mit sa main entre eux. En quelques secondes celle-ci s'illumina. Romi haussa les sourcils.
‑ Vu ta réaction, c'est le cas.
‑ Qu'est-ce que tu as fait ?
Ils reprirent doucement leur marche dans le couloir.
‑ J'ai juste concentré mon énergie dans ma main.
Romi se tourna vers Valens, le jeune homme la regarda et haussa les sourcils. La jeune femme l'imita. Valens prit une inspiration.
‑ Tu ne sais pas faire ?
‑ Je ne savais pas que c'était possible.
‑ C'est pourtant la base pour les pentacles, pour certains sceaux et pour nos armes. En s'entraînant, de rares personnes arrivent à faire ce qu'ils veulent avec leur énergie. On raconte qu'il y a de nombreuses années, une femme a traversé toute une terre corrompue en canalisant son énergie dans ses pieds. Les jumeaux, par exemple, tu te souviens ? La haute famille qui était venue chez Victor le jour ou on a signé le contrat, ils sont les seuls à pouvoir connaître la puissance des humains en les touchant, tout comme le font les esprits, même si pour eux c'est instinctif. Vu ta puissance, je suis sûr que tu pourrais faire beaucoup de choses.
Ils rejoignirent Damien et sa famille et sortirent de l'hôpital. Le père du jeune homme installa avec difficulté son fils à l'arrière de leur voiture, la famille salua Romi et Raphaël et s'en allèrent.
Le jeune homme prit la main de sa copine dans la sienne. Romi haussa les épaules.
‑ Eh bien... Bonne année, je suppose.
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro