Chapitre 1 - TAXI
ANGÈLE
Je vais signer un autographe à une fan, en la regardant dans les yeux et lui faire croire que je déborde d'assurance, ainsi elle fera la même chose plus tard elle se dira : ouais je vais foncer et tout déchirer, tant pis si j'y laisse des plumes. C'est fini.
Le spleen ne peut plus rien me faire. Je me casse d'ici et je pourchasse mes rêves. Je me marie avec mon crush que j'aurais piqué à ma meilleure amie et c'est fini. Ainsi va la vie. Je ne suis pas magicienne mais si l'on pouvait tout effacer et recommencer, on ferait de nouveau les mêmes bêtises, erreurs du passé.
Le spleen nous englouti nous sommes la génération effet papillon, petite chose grand conséquence. Les rois des burn out car l'on court après des chimères de perfection. On se prend la tête et on trébuche sur soi, on va pas vous dire que la vie est belle car on le sait déjà.
Ma journée est passée a une de ses vitesses, j'ai même pas mis le nez dehors ni me suis lavée. La batterie de mon portable est faible et je n'ai pas de quoi le recharger. A croire que ça n'arrive qu'à moi. Je voulais t'écrire des stories qui t'étais dédiées, j'sais pas dire pourquoi.
J'étais celle de tes rêves, celle que tu voulais marier, faut dire que ce fut bref. Tu m'embrasses puis tu me laisse. Genre romantisme express !
Chaque peine de cœur est différente. On prend juste goût un peu plus à la haine et on se déteste d'avoir trop aimé, souri, jouit. On s'en veut alors qu'au final on y est pour rien dans tout ça.
C'était pas le bon.
J'arrête pas de faire défiler les photos de nous sur mon téléphone. Je les supprime et ça me fais moins mal. La douleur diminue. Enfin quand ma corbeille est pleine, j'appuie sur le bouton "supprimer définitivement". Là je comprends qu'il n'y a plus de retour en arrière.
Regarde ce que tu m'as fait.
Ça y est je la tiens ma nouvelle chanson!
J'attache mes cheveux, lisse ma frange effilée et me met à mon piano, sur mon balcon.
Au fait, je m'appelle Angèle. Je suis belge et fière de l'être !
J'habite dans un petit immeuble à Bruxelles. C'est pas très grand. Mais suffisant pour moi. J'ai la place qu'il me faut. Tout le nécessaire pour vivre. Je paye mon loyer avec l'argent de mes concerts et compose des mélodies dans ma tête, que je ne chanterais jamais à voix haute car ce sont toutes des chansons déprimantes. Je chante la mélancolie soupoudrée d'un zeste d'amour.
Je repense à notre dispute dans ce taxi. C'était la fois de trop. On s'est disputée pour quoi au juste ?
Hmm
Je fais courir mes doigts sur le piano à queue, et chante un air de France Galle. Je regarde le soleil se coucher au loin derrière les immeubles. Une odeur de friture me monte aux narines tandis que j'entame le tout premier couplet de la 6e chanson de mon nouvel album. Je l'ai intitulé Taxi parce que c'est là où j'ai arrêté de t'aimer comme une dingue.
J'ai le sentiment de revivre cet instant quand je ferme les yeux. Je ne vois que ça. Que toi, que nous. Toi et ton sourire enjoliveur avec tes cheveux bruns lâchés. Mélangé à la buée et la pluie, ça te donnait un charme fou. Au final t'as tout gâché entre nous.
- Ce soir dans un taxi, par une dispute sans queue ni tête, la buée et la pluie se reflètent dans tes yeux fâchés. Si tu disparaîs demain, mon cœur se sera vidé. Et il me glissera des mains. Oh je sais que j'ai été trop loin. Première fois que je te vois... T'énerver.
La scène repasse en boucle dans ma tête. On se hurle dessus et je me prends la tête entre les mains, à bout de souffle. Je respire avec difficulté. J'étouffe même.
Je me revois ouvrir la portière du taxi et sortir du véhicule, tandis que tu continue ton chemin. Sans te me jeter un regard ni même me dévisager. Ça prouve que tu as changé. Je suis brisée. Et maintenant trempée par la pluie. Moi qui m'étais bien habillé et maquillée pour ce dîner. Je suis laide à présent. Tu m'as trompé, encore et encore. Ça ne s'arrêtera jamais. Tu me dis que tu m'aimes mais tu porte l'odeur d'une autre quand tu reviens à la maison le soir. Tu passes tes soirées au tel, j'existe pas. C'est à peine si tu me vois. Tu ne remarque même pas que j'ai pleuré. Tu ne me demande plus si j'ai passé une bonne journée. À croire que je compte pas.
Est-ce que tu as vu ma nouvelle coiffure ?
Bah ouais, même ça c'est trop demandé ! Faut croire que l'amour n'est pas parfait quand il est trop vrai.
Je fais de nouveau courir mes doigts sur mon piano et chante d'une voix très mélancolique :
- Qu'est-ce que tu m'as fait. Qu'est-ce que tu m'as fait. Qu'est-ce que tu m'as fait. Qu'est-ce que tu m'as fait. Avant toi c'était moins bien. Demain tu vas me manquer. C'est beau mais ça me rend dingue. Et je ne cesse de me demander.
Qu'est-ce que tu m'as fait ? Oui toi. Qu'est-ce que tu m'as fait ?
Je chante de plus en plus fort.
Tout Bruxelles m'entend. Il faut qu'il écoute ça. Même mon voisin au second palier. Je sais qu'il a des doutes sur sa femme.
C'est une chanson universelle sur le désamour. Je veux désamorcer des cœurs, réanimer l'étincelle dans leurs yeux. Oui. La passion. C'est beau même si c'est idéaliste. Rien n'est trop beau ou parfait quand on aime quelqu'un.
- Oh, avant toi c'était moins bien. Même si on veut décider. Quand la lumière s'éteint, on ne peut plus vraiment changer.
Je m'arrête là, le temps de reprendre mon souffle et de laisser couler mes larmes.
- Ce soir il est minuit.
Ton regard ombragé rejaillit dans ma mémoire.
J'arrive pas à l'oublier, lui non plus.
- Tes grands yeux noirs me font la tête. La buée et la pluie se collent à tes cheveux lâchés.
Je ne saurais dire combien de fois j'ai passer mes mains dans cette chevelure d'apparence si parfaite. J'étais accro à toi. Tu étais mon poison en réalité. Je savais que j'allais le regretter mais...
- Si tu disparais demain. Mon cœur ce sera vidé. Et il me glissera des mains. Je pense à ça quand je te vois fâchée. Et si je te prends la tête c'est que la mienne va exploser. Les autres, les traîtres. Depuis que ma vie est exposée. D'ailleurs je peux pas m'empêcher de composer comme exutoire. Racontant ma vie privée et puis ensuite de m'en vouloir.
Je me mords les lèvres, soucieuse. Quelques cheveux de ma franche me tombent dans les yeux, mais je ne fais rien pour les repousser. Je suis trop concentrée à terminer ce morceau.
- Qu'est-ce que tu m'as fait. Qu'est-ce que tu m'as fait. Qu'est-ce que tu m'as fait. Qu'est-ce que tu m'as fait.
Enfin les dernières paroles me viennent.
Je me lève de mon piano et regarde mon reflet dans la fenêtre du balcon. Il me renvoie mon image. Je suis triste.
Tu as encore fait couler mon mascara. Tu as réduit le si peu de confiance qu'il me restais.
Je lâche mon piano et m'accoude à la rembarde du balcon. Je regarde en bas. La vue vertigineuse me donne un second souffle. Alors je dis presque dans un chuchotement.
- Ce soir dans un taxi. Notre histoire m'a fait perdre la tête. J'aimerais te voir sourire. Pourquoi je me sens si bête. Et même si c'est fini. Si j'avais envie d'être honnête. Quand je te vois souffrir, j'aimerais guérir ta peine.
Je baisse la tête, comme en signe de remerciement et me fais applaudir de part et d'autres, par tous le voisinage, aux alentours et en bas. Je les embrasse tous du regard et souris bêtement à la France entière.
- Bravo Angèle ! Tu vas y arriver !
Le soleil ne brille plus.
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