8 - Accueil désagréable
Salon Degermann, Reims, samedi 22 juin 1940, 21h00.
La musique cesse enfin dans mes oreilles et tout le monde arrête de danser, ainsi que Engel et moi, ses mains quittent mon corps et sa chaleur corporelle également. Je remets en place mes mèches rebelles derrières mes oreilles puis tente de m'éloigner de lui, à la recherche de Romain, de Paul ou de ma soeur.
Bien évidement, la main gantée de l'allemand attrape une dernière fois ma main endolorie, je cherche alors la raison pour laquelle il me garde encore avec lui.
-Je ne t'ai pas remercié pour ces danses fraülein, le blond dépose ses lèvres chaudes sur le dos de ma main douloureuse, tu devrais aller passer de l'eau fraîche dessus, pour ne pas que ça gonfle. Sans rien dire, je me retire en trottinant, ma main valide se dépose sur l'autre pour constater les dégâts faits par cet homme, je grimace légèrement.
-Rose !
-Louis ! Où est ma soeur ? M'inquiète-je en me rapprochant de lui et de sa soeur.
-Ne t'en fais pas, cet allemand qui vit chez vous a décidé de la ramener à votre demeure, il est partit accompagné de Romain. Je me détends immédiatement, Adeline est entre les mains de mon ami et de Karl, tout devrait bien aller pour elle.
Nous sommes maintenant rejoind par Paul ainsi que par Alice qui est très silencieuse, je me jette presque sur elle en prenant son visage entre mes mains, elle me regarde et sourit faiblement.
-Est-ce que ça va Alice ? Je suis terriblement désolée que tu aies eu à danser avec ce rustre, je sais de quoi il est capable !
-Ça va. C'est faux, ça ne va pas, je le vois.
-Tu veux bien m'accompagner aux toilettes ? Alice accepte bien évidement, une fois entrée dans les toilettes pour dames je passe immédiatement ma main sous l'eau froide, mon regard se reflète alors dans le miroir pour finir dans les iris noisettes de mon amie.
-Est-ce qu'il t'a touché ?
Elle hoche simplement la tête, comme si parler était trop dur pour elle. Je la comprends.
-Où ça ? Tu peux tout me dire Alice tu le sais ça ?
-Je.. je ne sais pas si il l'a fait exprès ou non, mais ses doigts ont couru sur.. ma hanche, puis sur ma taille, sur la naissance de ma poitrine également. Mais ce n'est pas ça le pire..
Je coupe l'eau pour me retourner vers elle, l'incitant à poursuivre, ce qu'elle fait. J'en profite aussu pour attraper un linge propre pour essuyer ma main humide.
-Je comprends l'allemand tu le sais et.. il m'a dit des choses horribles à l'oreille.. Il, il a dit que ce n'était pas finit, qu'il allait me retrouver pour finir.. tu penses qu'il sait, tu penses que les nazis savent que je suis juive ? Les larmes de mon amie en détresse a l'effet d'une lance qui se plante dans mon coeur, je m'approche doucement vers elle pour retirer les larmes qui perlent sur ses joues rosées.
-Non, bien-sûr que non Rebecca, c'est juste que ce Ackermann est un monstre, ne t'inquiètes pas je ne le laisserai pas te faire de mal, je te le promets. Elle se jette alors dans mes bras en sanglot, la brune ne se retient pas pour pleurer à chaude larme et je caresse doucement ses cheveux pour la rassurer.
Une fois Alice plus calme, nous voulons sortir d'ici cependant un bruit de serrure attire notre attention, une femme sort alors d'une des cabines de toilette pour nous observer. Mon coeur rate son second battement de la soirée. Elle nous a peut être entendu.
Je décide tout d'abord de la détailler, la première chose qui me frappe chez elle, c'est qu'elle n'est pas d'ici, je connais énormément de monde ici, et une aussi jolie jeune femme ne passe pas inaperçu. Ses cheveux sont sombres tout comme ses pupilles, contrastant avec son rouge à lèvre écarlate ainsi qu'avec son teint de porcelaine. Sa robe est majestueuse, assortie avec son sac à main et ses escarpins.
-Qui êtes-vous ? Je ne vous ai jamais vu par ici. Demande-je avec méfiance, en avançant d'un pas vers elle. Pour réponse, elle sourit tout d'abord avant d'ouvrir la bouche.
-Je me nomme Marie Delacourt, je viens du nord de la France, Lille plus précisément. Mais je suis en déplacement, à cause du général Rintenlberg. Mon étonnement est à son comble, qu'est ce que Engel vient faire dans cette histoire ?
-Le général ? Comment l'avez-vous rencontré ?
-C'est une drôle d'histoire, ricane doucement la jeune femme en avançant vers le robinet pour se laver les mains, il m'a en quelque sorte enlevé il y a quelques mois de cela, il m'a traîné jusqu'en Allemagne, mais nous sommes de retour depuis cinq jours en France, à mon plus grand bonheur.
Cinq jours ? Je ne peux m'empêcher de lui rire au nez, sûrement la fatigue qui me joue des tours. C'est à son tour d'être effarée.
-Pardonnez moi mais, ce n'est pas jolie de mentir, mademoiselle Delacourt.
-Comment ? Et qu'elles seraient mes intérêts à vous mentir ? De toute façon je suis attendue, alors au revoir mesdames. Et.. passez une agréable fin de soirée. Malgré sa politesse, elle me regarde étrangement, comme si j'étais folle, ça devrait plutôt être l'inverse !
Alice me lance un regard effrayé, je reprends mes esprits et attrape son bras pour la retourner vers moi. La dite Marie pose alors sa main sur mon bras et aborde un sourire qui se veut rassurant.
-Je ne dirai rien. Sans rien rajouter de plus, elle part. Je ne sais pas si elle dit vrai, mais cette femme ne m'a pas l'air bien dangereuse ou dérangée comme les allemands. Alors pour une fois, je lui accorde ma confiance sur ce point là.
-Rentrons Alice, il se fait tard.
[...]
Maison des Dumont, dimanche 23 juin 1940, 7h00.
Le lumière du soleil entre en contact avec mes paupières closes lorsque le rideau est tiré délicatement. Suite à cela, le matelas s'affaisse à quelques centimètres de moi et des doigts viennent caresser mon front pour déplacer les mèches qui s'y trouvait.
-Debout mes chéries, il est l'heure. J'ouvre alors les yeux pour rencontrer ceux de mon paternel, son regard est rassurant, je souris en le voyant puis décolle de ma soeur qui commence à émerger de son sommeil.
Je me redresse pour déposer un baiser sur la joue de mon père, il me le rend avant de se lever pour aller en direction de la seconde fenêtre de la chambre de ma soeur pour ouvrir les rideaux ainsi que la fenêtre, pour aérer la pièce avant de quitter cette dernière en fermant la porte derrière lui.
-Tu as bien dormi Adeline ? Mes pieds rencontrent le parquet froid réveillant mes sens, je lève les bras au dessus de ma tête pour étirer mes membres encore engourdis par la nuit puis me lève.
-Oui, merci d'avoir accepté, de dormir avec moi.
-C'est normal, souris-je en me retournant vers elle pour lui donner son élastique qu'elle cherchait sur le chevet à côté de son lit, comment tu te sens ? Et ton nez, ça va ?
-Merci, ne t'inquiètes pas, je me sens bien mieux qu'hier.. Lorsque je suis arrivée chez moi, hier, j'ai trouvé ma soeur dans les bras de Karl, elle était effondrée, il avait du mal à la calmer, elle qui a si peur des occupants venait de se faire humilier et frapper par l'un des leurs.
Le major l'a soigné avec Romain, avant que ce dernier ne parte en compagnie de Paul - qui m'a raccompagné gentillement jusqu'à chez moi. J'ai ensuite inspecté son nez, il n'y avait rien d'inquiétant, forte heureusement.
Ma soeur m'a ensuite demandé si je pouvais rester avec elle pour la nuit, encore sous le choque, j'ai bien évidement accepté, et puis, moi aussi, j'avais besoin de compagnie hier soir..
-Tu sais Rose, je ne l'ai pas insulté ce sergent, j'ai simplement refusé sa demande.
-Je le sais, j'ai déjà eu à faire avec cet, espèce de bougre. Murmure-je en sentant la haine que j'ai envers lui ressurgir. Avant de partir pour la salle d'eau, je passe par ma chambre pour ouvrir les fenêtres et récupérer une robe d'été, il a l'air de faire particulièrement bon aujourd'hui.
Il est déjà 7h30 lorsque je sors de la salle de bain pour aller préparer le petit déjeuner, en espérant que les allemands ne sont pas déjà descendus. Apparemment non, je trouve simplement mon père ainsi que ma soeur autour de la table. Je me mets alors à la tâche, Adeline me rejoint très vite.
-Je viens de dire à papa ce qu'il s'est passé avec le sergent Ackermann, il va en toucher deux mots au général. Chuchote-t-elle en sortant les verres.
-Tu as bien fait. Acquise-je en hochant la tête, ma soeur est fragile il faut que cette histoire soit réglée au plus vite et le dire à notre père était une sage décision. Des bruits de bottes font écho jusqu'à la cuisine et le major Boehmitz en sort, déjà prêt à partir.
-Bien le bonjour à vous monsieur, mesdemoiselles. Inutile de préparer quelque chose, merci, je vais déjeuner à la Kommandantur. Nous informe le blond en se tenant droit, les mains dans le dos. Karl fixe un instant Adeline, sûrement pour s'informer de son état ce matin.
-Bonjour à vous major, dites moi, où puis-je trouver votre supérieur, le général Rintenlberg ? Mon père pose sa tasse fumante ainsi que son journal du jour pour se lever en signe de politesse, mais également pour avoir des réponses.
-Il n'a pas dormi ici, vous pouvez le trouver à la Kommandantur, pourquoi donc ?
-Et bien, j'ai appris l'incident de la vieille, entre ce sergent et ma fille, j'aimerai réglé cette histoire au plus vite. Karl fronce les sourcils puis regarde à nouveau ma soeur, qui elle, fuit son regard en lui tournant le dos pour continuer à sortir les verres.
-Oh je vois, gut, alors vous pouvez vous rendre à l'accueil de la Kommandantur, avec votre fille, passez une bonne journée. Suite à ces dires, le major quitte notre demeure sans rien rajouter de plus.
-Dépêchez-vous de déjeuner, nous allons nous y rendre ce matin.
[...]
L'hôtel du Lion d'Or : La Kommandantur, dimanche 23 juin 1940, 9h00.
Face à la femme allemande qui travaille à l'accueil de la Kommandantur qui ne daigne pas lever les yeux vers nous, mon père toussotte en espérant enfin avoir son attention, elle lève les yeux vers nous et malgré qu'elle soit assise et nous debout, cette allemand nous regarde avec dédain, cherchant à nous prendre "de haut".
-J'aimerai voir le général Rintenlberg qui s'occupe de cette caserne.
-Il faut prendre rendez-vous. Après cette révélation, la femme répond au téléphone puis converse dans sa langue tout en prennant des notes sur une feuille vierge.
Mon paternel nous jette un regard relativement saoulé, cependant il ne s'énerve pas, dans n'importe qu'elle situation, je n'ai jamais vu mon père perdre le contrôle de lui même, c'est un homme d'une grande sagesse et qui possède un bon sens.
-Alors j'aimerai prendre rendez-vous avez lui. Soupir-t-il en posant ses mains sur le bureau pour tenter d'avoir un minimum d'attention de sa part.
Aucune réaction de sa part.
-Mademoiselle, s'il vous plaît je n'ai pas toute la journée devant moi, j'ai des choses à faire.
Elle raccroche, se lève puis donne le papier à un soldat allemand qui était posté à côté de son bureau, ils parlent un instant entre eux probablement de cet appel et de ce papier avant qu'il ne parte je ne sais où avec la feuille en question.
-Très bien alors je vais trouver son bureau tout seul. Cette phrase la fait enfin réagir.
-Vous n'avez pas l'autorisation de vous balader ici ! Sa voix m'insupporte tout comme son accent de malheur, mon père fait demi-tour pour lui faire face.
-Alors ayez l'amabilité de me faire escorter par l'un des soldats ici. Demande mon paternel en balayant la salle remplite d'occupants de son bras.
-Derrière vous. Je fronce les sourcils en me retournant, se moque-t-elle de nous ? Derrière nous, il y a la sortie, je m'avance à mon tour pour la fusiller du regard.
-C'est impolie ce que vous faites là, verpassen. Pour une fois, j'use du vocabulaire que m'a appris le major Karl, cela signifie mademoiselle. Elle hausse ses sourcils en me toisant du regard.
-Verschwindet ! Là pour le coup, je n'ai pas compris, néanmoins, c'était certainement pas une invitation à prendre le thé avec elle.
-Quelle amabilité de votre part. Ricane une voix germanique en arrivant à mes côtés, je me retourne vers lui mais au même moment, il rejete la fumée de sa cigarette, je ferme les yeux et me décale en toussant légèrement.
Quelle entrée, colonel Von Hohenhart..
-Oberst ? L'assurance qu'elle possédait il y a quelques instants a quitté son corps, coïncidence ?
-On en reparlera plus tard, il lance un regard noir à la femme de l'accueil puis se tourne vers nous avec un grand sourire, quel est votre problème monsieur, Dumont, si je ne me trompe.
-Effectivement, j'aimerai voir le général Rintenlberg, si cela est possible, monsieur ?
-Colonel. Colonel Von Hohenhart. Bien, veuillez me suivre dans ce cas. Mon père le remercie d'un hochement de tête et nous suivons Oliver à travers les interminables couloirs de l'hôtel du Lion d'Or, au bout d'un moment, nous arrivons devant une double porte que je reconnais très bien, gardée par un soldat armé. Que dis-je, ils sont tous armés de toute façon..
-Patientez un instant. Le colonel converse durant un petit moment avec le garde avant de toquer et d'entrer suite à un accord provenant de l'autre côté de la porte.
-Allez-y. L'allemand revient une minute après pour nous donner l'autorisation pour entrer dans le bureau du général. On le remercie encore une fois et mon père suivit de ma soeur entre. Je souffle un instant puis les suis.
-La famille Dumont réunit ! Je vous en prie, asseyez-vous.
Vais-je survivre ? Suite au prochain épisode..
❦ ~ ❦ ~ ❦ ~ ❦ ~ ❦
Fraülein : Demoiselle/Jeune fille (début du chapitre, par le Général Engel Rintenlberg)
Gut : Bien (milieu du chapitre, par le Major Karl Boehmitz)
Verpassen : Mademoiselle {titre} (fin du chapitre, par Rose Dumont)
Verschwindet : Dégagez (fin du chapitre, par l'allemande de l'accueil de la Kommandantur)
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro