7 - Danse avec le diable
Salon Degermann, Reims, samedi 22 juin 1940, 20h30.
Tous regardent avec appréhension et crainte la scène qui se déroule sous nos yeux, les musiciens ont arrêté de jouer, les danseurs d'un soir se sont reculés, les vieilles personnes autours des tables sont maintenant cloués dans un silence de mort, tout comme la salle d'ailleurs.
Ma soeur, morte de peur, se tient le nez d'une main et s'aide de l'autre pour reculer en rampant dans le but de s'éloigner du nazi qui était au dessus d'elle, et qui l'avait probablement frappé. L'homme en question est dos à nous, mais à son costume vert je reconnais ici un allemand.
Au bout d'un instant, je réagis enfin et m'avance d'un pas non assuré vers eux, tous les regards se dirigent alors vers moi, les Rémois me scrutent avec méfiance tandis que les allemands m'observent avec.. je sais pas trop, ils sont étranges.
Cependant, je n'ai pas le temps d'agir que dès que je suis au niveau de cet homme qu'un allemand intervient. Allemand que je connais très bien, il s'agit du Général Rintenlberg suivit de très prêt par le major Boehmitz qui regard fixement Adeline.
-Sergent Ackermann ! Puis-je savoir la raison de vos actes ! Il n'a l'air visiblement pas très satisfait du comportement de ce sergent qui, me dit vaguement quelque chose. Je me creuse un instant la tête en fronçant les sourcils.
Le dit sergent Ackermann se tourne alors dans notre direction, durant un instant ses pupilles plongent dans les miennes, et c'est alors que le souvenir de cette nuit me frappe de plein fouet, j'en recule même d'un pas, incontrôlé.
C'est ce monstre qui avait tenté de m'agresser le soir où j'avais eu rendez-vous avez Romain au bar de René. Deux de ses sbires me tenaient fermement pendant qu'il.. un haut le coeur me prend mais je le réprime. C'est aussi ce soir là que le général Engel m'a sauvé.
-Elle refuse de danser à moi, de façon impoli, elle a insulté moi, herr General, je suis permis de corriger à la manière moi.
-Und ist das, deine vorgehensweise ? S'emporte Karl en avançant en direction du sergent, tout en pointant ma soeur du doigt. Engel intercepte sa route en posant un main sur son torse.
-Peut être qu'il dit vrai. Poursuit le blond cette fois ci en me regardant droit dans les yeux, d'un calme à faire frémir la mort elle même, mon expression change. Qu'essaye-t-il de faire ? Il sait très bien que ma soeur est incapable de répondre à un allemand, tenterait-il de se venger de moi en passant par elle ? Il faut que j'intervienne et vite !
-C'est absurde ! Ma soeur n'oserait jamais faire une telle chose ! Je ne sais pas si c'est l'adrénaline qui me pousse à dire cela la tête haute, en défiant tout d'abord Ackermann du regard puis Engel, mais j'ai bien peur de ne pas finir cette soirée vivante.
-Elle a fait ça. Confirme encore une fois l'allemand d'un ton énervé, contre moi je suppose, sa mâchoire se contracte et ses poigs se resserrent, prêt à frapper.
-Et pourquoi l'aurait-elle fait ? Karl est bien décidé à prendre la défense de ma soeur qui est terrifiée et qui est maintenant accompagnée de Alice, agenouillée auprès d'elle en regardant l'hémorragie de son nez, dès que la guerre a débuté, Alice est venue me voir dans l'espoir d'acquérir de nouvelles compétences dans la médecine, elle voulait aider.
-Pour éviter d'avoir à danser avec ce.. cet homme, Paul s'interpose alors dans la conversation, elle a probablement dû lui faire comprendre qu'elle ne voulait pas danser avec lui, néanmoins, je connais Adeline depuis sa naissance, et je peux vous assurer, que jamais, ô grand jamais, elle n'oserait se permettre d'insulter quelqu'un ou de refuser distinctement les demandes ou avances de quelconque personne, elle est bien trop altruiste et aimable pour ce genre de chose. Tout est clair, sa façon de parler, de voir les choses, d'argumenter, de prendre part. Ça me rappelle très clairement la manière à Engel de s'exprimer.
Ce dernier tourne la tête vers mon ami et le détaille de haut en bas d'un air supérieur, il décide ensuite de s'avancer vers lui pour se poser juste devant Paul, qui ne baisse toujours pas la tête face à cet homme de caractère. Cela a pour conséquence d'attiser un peu plus la colère qui sommeil en Engel Rintenlberg.
-Puis-je savoir à qui ai-je l'honneur ? L'ironie du blond se traduit par un rictus amer.
-Paul Bernart, et vous, vous êtes le général Rintenlberg si je ne me trompe ?
-Effectivement. Alors d'après vos dires, Monsieur Bernart, la jeune Adeline ne voulait juste, pas danser avec le sergent Ackermann ?
-Oui, c'est ce que j'ai dis. Paul ne rompt à aucun moment le contact visuel avec le nazi, comme pour lui montrer que son aura, la puissance qu'il émet, ne fonctionne pas sur lui.
-Très bien. Alors avez-vous une autre cavalière pour lui, nous n'allons tout de même pas le laisser sur un échec, n'est ce pas ? Cette fois-ci, l'expression de Paul laisse place à l'incompréhension, tout comme la mienne. Pourquoi passe-t-il aussi vite à autre chose ? Ce n'est pas dans ses habitudes, et cela ne présage rien de bon.
Le général balaye alors les habitants de son regard clair, accompagné de son petit rictus qui ne rassure en rien les gens présents dans cette salle. Il s'éclaircit la voix pour parler un peu plus fort, dans le but que tout le comité l'entende convenablement.
-Mesdames, j'ai ici un de mes hommes qui s'ennuie en vous regardant danser depuis le début de ce bal, et qui aimerait être accompagné d'une cavalière pour assouvir ses envies, étrangement, le général insiste sur ce terme tout en me regardant également avec insistance, alors est-ce que l'une de vous voudrez se dévouer pour une danse ? Personne n'ose répondre, personne n'ose le regarder, personne n'ose bouger.
-Il serait fort regrettable de devoir forcer cette pauvre Adeline à accepter la demande du sergent. Il a dit ceci si bas, que seules les personnes autours de lui ont pu entendre, c'est à dire Paul, Karl, Adeline, Alice, le sergent et, moi.
Suite à cette bombe lâchée, ma soeur laisse couler ses larmes tandis que Karl converse durement dans sa langue avec son ami, il n'a pas l'air de s'entendre avec lui sur le dernier point. Mais Engel a l'air de calmer la situation en une seule phrase, Karl hoche simplement la tête et reprend son calme.
-Moi je veux bien. Avant même que je n'ai eu le temps de me proposer, elle l'a fait avant moi, et j'admire son courage pour ce que la brune vient de faire. Alice est maintenant debout, non sans appréhension, ses mains gantées tremblent légèrement.
-Parfait, vous êtes ?
-Alice Lambert, Monsieu..
-Je préfère général, c'est plus officiel voyez-vous. L'allemand sourit cette fois-ci de façon à détendre l'atmosphère devenue pesante, surtout pour mon amie.
-Oui, excusez moi, général. Se reprend-t-elle alors en baissant la tête une fois que l'homme est devant elle, il pose une main sur sa nuque, faisant sursauter ma pauvre Alice, elle aussi, a une peur bleue des occupants, surtout en sachant que c'est une juive. Il la guide alors jusqu'au sergent Ackermann, qui lui, parle un instant avec son supérieur, toujours dans leur langue germanique.
-Est-ce qu'il y aurait d'autres jeunes femmes et couples de danseurs pour accompagner notre nouveau duo de la soirée ? Alors, petit à petit, les couples passagers rejoignent la piste de danse, d'un pas sceptique, soutenant d'un sourire ou d'un regard rassurant la fille qui est entre les mains d'un démon. Certaines femmes osent alors danser avec des allemands, sans être vraiment rassurées. En tout, je compte six nazis sur la piste de danse.
L'orchestre recommence alors à jouer tout doucement une mélodie reposante, composée principalement de violon, de piano, de flûte et de harpe, ainsi qu'un petit fond de chant.
Mon attention se dirige maintenant vers ma soeur, qui est en train de se relever à l'aide du major Karl, ce dernier à l'air inquiet pour elle et lui donne un mouchoir en tissu. Je me dirige vers elle au pas de course pour savoir comment elle va cependant une poigne ferme intercepte mon bras pour m'amener dans l'exacte sens opposé.
-Mais qu'est ce que..
-Moi aussi, j'ai le droit à ma cavalière, pour assouvir mes désirs, non ? Sa main se dépose dans le creu de ma taille tandis que son autre main se dépose dans la mienne. Je remarque alors qu'il porte des gants en cuir, et heureusement d'ailleurs, sinon il verrait mon agoisse traduite par mes mains moites. Son odeur masculine et virile se répand tout autour de moi.
Je ne peux me défaire de l'emprise de Engel, car si je tente quoique ce soit, les représailles ne seraient pas vaines. Et même si je le voudrai, je n'arriverai pas à le repousser comme il se doit, car il m'écrase de cet aura étrange qui me fait perdre tous les moyens et m'intimide atrocement. Mais plutôt mourir que de lui avouer.
Je suis obligée de lever la tête pour l'observer de plus prêt, du moins, je garde mes yeux rivés sur ses lèvres, qui forment un sourire vainqueur, il est fier de lui. Je baisse alors la tête et ferme les yeux quelques instants pour reprendre mes esprits.
-Je ne suis pas votre marionette. Sa prise sur ma taille se fait plus forte et je grimace de douleur.
-Tiens donc, et tu es quoi alors ? Vexée, je me retiens de ne pas lui cracher des insultes, ou même de lui cracher au visage tout court.
-Je ne suis pas un objet, et certainement pas le vôtre non plu.. Cette fois ci je pousse un gémissement étouffée lorsque je sens ma main broyée dans la sienne et je tente de la retirer, en vain.
-Parles moi sur un autre ton fraülein, il serait regrettable de devoir sévir. Toujours se calme à faire pâlir la mort..
-S'il vous plaît, vous me faites mal.. Je me plains en tentant encore une fois de retirer ma pauvre main qui me fait souffrir, toujours sans réponse, il va finir par me casser un os..
-Pourquoi essayes-tu de m'éviter ? Est-ce à cause de l'incident de jeudi ? Tu attends peut être des excuses ? Tu sais j'étais très à nerf ce jour-ci alors..
-Je vous en prie général, ma main. Cette fois-ci, j'ose déposer mes iris humide dans les siens, lorsqu'il remarque des larmes naissantes au coin de mes yeux il relâche la pression qu'il exerçait sur ma main sans pour autant la lâcher.
-Peux-tu arrêter de me couper ? Merci bien, je te faisais savoir que ça ne sert à rien de m'en vouloir pour jeudi, j'ai certes, déposé les limites, néanmoins j'avais mes raisons.
-Vos raisons, un rire nerveux m'échappe, je veux bien les connaître, général.
-Cesses de me couper la parole Rose ! Je ne supporte pas ça. Je ne réponds pas, ne voulant pas attirer un peu plus son couroux, déjà qu'il m'a écrasé la main avec la seule force de ses doigts, je n'imagine même pas ce qu'il peut faire avec le reste de son corps.
Oserait-il frapper une femme avec ses poings ? Ou avec sa matraque ? Ou même user de son arme ?
-J'ai appris une mauvaise nouvelle, je n'étais pas vraiment moi même ce jour là. Reprend-t-il en me faisant tournoyer lentement, au même rythme qu'au soufflement de la flûte et au tremblement de la harpe qui résonnent dans la salle.
-Et cette nouvelle est-elle suffisante pour justifier vos actes ? Vous avez failli me tuer. Dis-je plus bas en plongeant mes prunelles dans les siennes, et pour la première fois depuis que je le connais, j'y perçois de la tristesse et de l'inquiétude. Mais cela ne dure qu'une seconde avant qu'il ne reprenne son éternel froideur.
-Oui, elle l'était et l'est toujours. Cependant je tenais à te dire, Rose, en aucun que n'ai souhaité te tuer, bien au contraire. Je décide de ne pas m'attarder là dessus, j'en serai sûrement plus durant les jours à venir.
-Et puis-je savoir qu'est ce qu'il vous a prit tout à l'heure ? Vous étiez soit déterminé à faire du mal à ma soeur blessée en la forçant à danser avec son ravisseur ou soit déterminé à me forcer la main, pour que je danse avec cet.. Bon dieu cessez de me broyer la main !
-Excuse toi. Je fronce les sourcils et déglutis.
-Veuillez m'excuser, général. Quelque chose me brûle soudainement la gorge, sûrement ma fierté que je viens de ravaler.
-C'était la dernière fois que je te mettais en garde Rose, la prochaine fois que tu me parles de cette façon tu passeras la nuit en ma compagnie, à la Kommandantur, dans les sous-sols bien évidement. Mon coeur rate un battement, plus il me met en garde, et plus j'ai l'impression que les gestes vont finir par confirmer les paroles.
-Très bien..
-Mais pour répondre à tes questions, Karl n'allait pas laisser Adeline entre les mains de ce porc, et moi, je n'allais pas non plus te laisser danser avec lui. Je te gardais, spécialement pour moi. Un sourire charmeur et un clin d'oeil discret accompagne ses dires tandis que je soupire et roule des yeux, d'exaspération. L'envie de lui demander combien de verre avait-il bu me chatouiller la gorge, cependant je me tus, par unique peur de finir ma nuit dans une cellule. Alors je m'abstiens à ceci :
-Sans vouloir vous offenser général, pourquoi avoir fait toute cette scène.
-J'apprécie énormément quand cette petite bouche parles correctement à son supérieur, sussure Engel à mon oreille et je ne peux réprimer un frisson, j'ai une réputation à garder, fraülein.
❝ ❞
Und ist das, deine vorgehensweise : Et c'est ça, ta manière/procédure (au début du chapitre, par le Major Karl Boehmitz)
Fraülein : Demoiselle/Jeune fille (fin du chapitre, par le Général Engel Rintenlberg)
BONNE CHANCE À CEUX QUI PASSENT LE BAC CETTE SEMAINE, COURAGE <3
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