20 - En public
L'hôtel du Lion d'Or : La Kommandantur, samedi 06 juillet 1940, 09h00.
Je vais finir par aménager une chambre dans le bureau du général Rintenlberg, j'y passes presque tout mon temps, ça en devient presque une habitude, quotidienne si il continu de me convoquer à tout vas.
Le pire dans tout ça, c'est que l'allemand demande à ses hommes de venir me chercher pour rien, hier encore il m'a fait venir pour me donner une lettre qu'il avait reçu ici, à la Kommandantur. Cependant, monsieur n'avait pas envie de l'ouvrir ici, alors il me l'a donné pour que je la ramène chez moi.
Uniquement pour cette fichue lettre, qui de plus, venait d'une certaine Hilda Imbach, j'avais très envie de l'ouvrir moi-même mais premièrement je ne parle pas allemand et deuxièmement, les représailles de Engel auraient certainement été douloureuses..
-As-tu réfléchi à la proposition ?
-Laquelle ? Soupire-je en me massant les tempes, j'ai un affreux mal de crâne aujourd'hui.
-Celle qui sauvera un homme ou une femme de la torture ? J'ouvre les yeux pour le regarder attentivement, il est très sérieux, et pour une fois, la colère ne remplit pas ses yeux clairs.
-Oui, j'ai réfléchi. Que voulez-vous, je déglutis durement avant de prononcer les mots interdits, une fellation ? Ou bien vous voulez que je m'offre à vous sans résistance ? Mon ton se veut détacher, néanmoins, au fond de moi, la panique est toujours présente, elle me ronge de l'intérieur, accompagnée par la fidèle culpabilité qui ne m'a toujours pas quitté.
-Tu commences à être à l'aise à ce que je vois. Mes paroles le font sourire.
-À vu de notre dernière proximité je me suis dis que la convenance n'était plus au rendez-vous. Siffle-je en le fusillant du regard avec haine, cependant je me reprends et baisse la tête pour ne pas le contrarier et souffrir une fois de plus.
-Oh Rose, ne me dis pas que tu m'en veux de t'avoir touché tout de même ? Après t'avoir vu avec ce chien de Romain, tu aurais préféré que je te frappe ?
-Je préfèrerai tout d'abord que vous arrêtiez de l'insulter général. Il est presque de ma famille. Ces derniers jours j'ai été obéissante non ? Alors faites moi ce plaisir et arrêter de l'appeler comme ça.
-Frauleïn, ne prends pas trop d'assurance comme ça, car à tout moment, je peux appeler le colonel Von Hohenhart et lui dire pour Alice, ou plutôt Rebecca. Le choc, cette fois-ci, se répand dans mon corps.
-Pourquoi spécialement lui ? Questionne-je d'une petite voix.
-Tout d'abord car c'est lui qui s'occupe des juifs, à la Gestapo. Et ensuite, car tu n'es pas sans savoir qu'il est intéressé par elle. Puisque le sergent Ackermann est partit, il ne reste plus que lui comme dernière solution. Explique le général Rintenlberg en se levant pour contourner son bureau et se placer devant moi, chose qu'il a l'habitude de faire pour l'intimider.
Et vous savez quoi ? Ça marche..
-Cela ne sera pas nécessaire. Revenons à notre discussion précédente. Qu'attendez-vous de moi pour que je puisse sauver ces habitants ? Je change de sujet de conversation pour ne pas le fâcher et faire dégénérer la situation, je n'ai vraiment pas besoin de ça en plus.
-On en reparlera ce soir veux-tu ? Car j'ai une annonce à faire à la grande place. Encore une fois, le nazi me fait attendre, car il sait que ça me fait perdre tous mes moyens, que ça me détruit de l'intérieur, il veut causer ma perte..
-Un discours ?
-Oui. Je n'avais pas encore annoncé officiellement que deux personnes seraient torturés à cause de cet anglais qu'ils couvrent tous. Grogne l'homme en se dirigeant vers la double porte.
Il n'a pas le temps de l'atteindre, ma main s'est déjà refermé sur son coude pour attirer son attention, et ça fonctionne car il se retourne avec une mine étonnée.
-Général, je vous en prie, dites que vous allez torturer une personne et non deux.. Je viens de vous dire que j'allais faire le nécessaire pour réparer mon erreur. Le supplie-je en lâchant son coude. L'allemand me fixe intensément avant de sourire.
-Très bien, tu as gagné.
Enfin un poid en moins.
[...]
Alentours de Reims, samedi 06 juillet 1940, 21h45.
Ce matin, tous les Rémois et Rémoise ont été convoqués à la grande place de la ville, par les allemands - enfin par le général Rintenlberg. Qui d'ailleurs était au côté de son frère, il a annoncé deux choses.
La première était déjà connue - ou presque - aux yeux de tous.
-Vous devez probablement être au courant de ce qu'il se passe dans votre propre ville, qui est désormais, je vous le rappelle, sous les ordres et le commandement du troisième Reich. Trois aviateurs britanniques se sont introduits sur notre territoire, ici même dans Reims. Un d'entre eux est mort et un autre a été capturé par la Gestapo. Cependant, si vous savez tous compter, vous aurez remarqué qu'il en manque un, cet homme est alors caché par l'un d'entre vous. Ce qui est fort regrettable voyez-vous car, chaque erreur ne doit pas rester impuni, c'est pour cela que nous avons pris la décision de punir tout le monde, puisque personne n'ose le dénoncer. Avait-il annoncé, dès que le 'dénoncer' était sortit de sa bouche, le général Engel avait posé les yeux sur moi, quelques instants, suffisamment pour me faire baisser les miens, il avait alors pousuit avec :
-Une personne, désormais, femme ou homme, de 18 à 65 ans, sera torturé chaque jour, jusqu'à ce que quelqu'un parle ou dénonce les personnes qui cache cet anglais. Lorsque l'allemand avait fini son discours, les citoyens qui n'étaient pas au courant de cette sentance s'étaient mis à parler entre eux, créant un brouhaha désagréable.
Tandis que moi, je souriais discrètement.
Il a enfin renoncé à torturer deux personnes. Néanmoins, mon sourire s'était vite estompé en me souvenant ce que je devais faire pour qu'il y remédie..
Alors me voilà en train de me promener dans les alentours de Reims, dans les bois, en réfléchissant à la tournure qu'à prise ma vie depuis l'arrivé des allemands. Depuis son arrivée, celui qui me fait ressentir autant de haine que d'admiration pour la puissance qu'il dégage, cette autorité qui me force à m'asservir corps et âme pour cet homme n'ayant aucune faiblesse.
Peut être que j'espère aussi m'éloigner de lui en venant ici ? Puisque chez moi, je suis sûre de le croiser, et j'appréhende ma partie du 'contrat' si on peut appeler ça comme ça. J'ai dis à mon père que je ne rentrerai pas trop tard, que je faisais juste une simple balade dans les bois.
Cependant, au plus le soleil se couche, au plus mon envie de rentrer dans ma demeure diminue, j'ai peur. J'ai même très peur de ce qu'il pourrait m'arriver. C'est tout de même grave de ne pas se sentir en sécurité dans sa propre maison tout de même, non ?
Un bruit attire mon attention mais je n'ai guère le temps de me retourner qu'un bras m'entoure la taille pour me maintenir fermement tandis qu'une main se dépose délicatement sur ma bouche pour étouffer mes cris.
-Du calme fraülein, ce n'est que moi. Sussure une voix germanique au creu de mon oreille droite, je cesse tous mouvements, pétrifiée.
-Ton père s'inquiété de ne pas te voir revenir, je me suis proposé pour venir te chercher. Poursuit-il en caressant ma joue de son pouce.
-Néanmoins, tu te doutes que je suis également ici pour te parler de quelque chose non ? Je me contente de hocher la tête, en signe d'acquisition puisque je ne peux pas parler, sa main gantée est toujours fermement posée sur mes lèvres.
-Bien. Tu me dois une faveur en échange d'un civil non torturé. Tu le sais et je le sais aussi. Cependant, je ne suis ni un violeur, ni un agresseur de première comme l'était Ackermann. Je prends tout de même en compte ton avis, tu comprends Rose ? Explique Engel Rintenlberg en caressant cette fois-ci mon ventre, non sensuellement, plus pour me rassurer qu'autre chose.
-C'est vrai que j'ai pu te laisser sous-entendre que j'allais prendre ce que je voulais sans te demander ton avis, mais je veux tout d'abord m'assurer que tu sois consentante. Il y a juste un point que je veux clarifier avec toi. Tu es à moi. Tu m'appartiens, ton corps comme tes pensées. Rose, je vais te laisser le choix, soit tu pars et tu clos notre pacte, soit tu restes et tu acceptes une bonne fois pour toute. Une seule fois Rose, tu as le droit d'accepter, mais c'est pour toujours que tu accepteras. À aucun moment, tu pourras revenir sur ta décision, d'avoir accepté de te livrer à moi, compris ? Encore une fois, je hoche la tête docilement. Me prend-t-il pour une idiote ? Il ne me force à rien mais si je refuse il me mènera la vie dure et dénoncera mon amie à la Gestapo..
Je ne peux qu'accepter.
Sa main se retire enfin de ma bouche et j'aspire une grande bouffée d'air, qui rentre enfin dans mes poumons car oui, j'avais arrêté de respirer sans m'en rendre compte. Cet homme m'angoisse tellement.
L'allemand me retourne vivement dans le but de me pousser doucement contre un arbre pour pouvoir me fixer sévèrement. J'ai l'impression que si je refuse, il sortira son arme pour me tirer une balle en pleine tête. En serait-il capable ? Sûrement que oui.
-Alors Rose ? Tu acceptes, ou tu pars ? Le nazi réitére sa question en se penchant vers moi, augmentant mon stress, ainsi que la vitesse de mon poul que je ressens jusqu'au bout de mes doigts.
-Vous savez très bien que.. Je suis violemment coupée par un sifflement strident qui me passe au dessus de la tête - ou plutôt de sa tête - et qui chute dans l'arbre au dessus de nous, je ferme automatiquement les yeux et me laisse emporter au sol par le général.
-Restes au sol Rose, ne bouges surtout pas. Chuchote-t-il d'une voix, inquiète ? Il songe les alentours d'un oeil mauvais tout en sortant son arme de son étui. On vient de nous tirer dessus ? Bon dieu mais qu'est ce qu'il se passe !
J'entends au loin des voix françaises, masculines, cependant je ne peux distinguer correctement ce qu'ils se disent à cause de la distance et surtout du sifflement qui n'en finit pas avec mes oreilles, comme un bourdonnement. Un second coup de feu est tiré cette fois ci par le général avant qu'il ne pose une main sur mon épaule.
-Contournes l'arbre Rose, maintenant, et cours en direction opposé, d'accord ? Son ton est dangereusement calme et il tente de capter mon regard en bougeant légèrement la tête.
-Rose, reprends toi, où nous allons nous faire tirer dessus. Ils pensent sûrement que tu collaborais avec moi. Ils ne vont pas hésiter une seule seconde à te tuer. Murmure-t-il durement en aggripant fermement ma mâchoire dans sa main gantée.
-O-oui.. Bégaye-je en clignant plusieurs fois des yeux tout en me frottant les oreilles, mes tympans étant encore douloureux.
-Fais ce que je t'ai dis, tout de suite. Sans plus attendre, je m'appuie d'une main contre l'arbre au gigantesque tronc puis le contourne sur mes genoux, un autre coup de feu me fait sursauter et je ferme les yeux quelques instants, si je cours et qu'une balle passe par ici ?
Ils vont faire de moi une cible, d'après le général Rintenlberg.
Le doute s'installe en moi mais il ne dure pas. Car j'entends le nazi me dire de déguerpir en vitesse, telle une machine je me relève la peur au ventre et cours en direction opposé des coups de feu, je cours si vite que je manque à plusieurs reprise de chuter au sol à cause des brindilles de bois que je rencontre.
Je m'arrête seulement au bout de cinq minutes, je pivote les talons tout en m'appuyant contre un arbre de taille moyenne, je tente de reprendre ma respiration. La course accumulée à l'angoisse m'ont fait perdre le souffle donnant cette respiration saccadée que je déteste tant.
Le temps me semble interminable, jusqu'à ce que je vois Engel revenir, arme en main, légèrement, inquiet ? Mais surtout en colère et blessé, du sang coule de son nez cependant rien de bien alarmant. Il s'arrête à environ dix mètres de moi, sûrement content de retrouver son jouet intacte.
-Qui etait-ce ?
Avant même que l'allemand ne puisse me répondre, un homme surgit de derrière moi en entourant bestialement mon cou de son bras et en pointant un pistolet à l'arrière de mon crâne, ma panique se décuple alors.
-Lâche là ! Rugit le général en pointant son arme sur nous, rassurez moi, il s'est tiré à la perfection ?
La mort.
C'est tout ce que à quoi je pense actuellement, je vais mourir, pour avoir été dans un bois avec un occupant, j'ai envie de pleurer mais les larmes ne viennent pas, je suis comme figée à travers le temps. La tension est palpable et mon coeur s'arrête à cette phrase :
-Toi, lâche ton arme le Fritz.
✑ ⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯
BOUM
(c'est tout ce que j'avais à dire)
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