Jour 97 : le midi

Je passe clairement la plupart de mes nuits chez Louis, et mon père ne s'y est jamais opposé depuis qu'il a agressé ce dernier. Il a sans doute compris que je ne me détacherais pas aussi facilement de ce garçon qu'il n'aime pas.

Quand je rentre de cours de temps à autre afin de prendre des rechanges, il ne me pose aucune question quant à ma destination. Il la connaît, mais il se tait.

Il sait qu'il a commis une erreur, et il n'a jamais voulu m'expliquer son geste. Ce dernier était toujours prêt à tout pour que je m'intègre où que j'aille, alors à présent que j'ai un copain, comment peut-il se permettre de me forcer à le laisser tomber ? Il a compris qu'il ne pouvait rien dire, car il avait tort du début jusqu'à la fin. Même si cela me fait parfois culpabiliser, je reprends mes esprits en regardant la vérité en face :
ce n'est pas moi le problème, mais bien lui.

Je passe donc l'après-midi avec Louis, même si je le sens tracassé par quelque chose depuis quelques jours, j'essaye de lui changer les idées et de le faire parler, mais malgré mes nombreuses tentatives, il s'entête à garder le silence.

Quand je sors de la salle de bain après une bonne douche brûlante, la serviette encore sur la tête, je le surprends au téléphone devant la fenêtre du salon.

- D'accord... Je comprends. Non... Ne t'en fais pas, je vais trouver ça... Ne te justifie pas, cela ne devait être que temporaire de toute façon. Merci de m'avoir prévenue... Salut.

Quelque chose semble le contrarier car il est de nouveau tendu. Celui-ci fixe le paysage extérieur, la mâchoire serrée tenant toujours avec autant de crispation son téléphone dans sa main.

- Tu vas bien ? je lui demande, soucieuse.

Surpris, ce dernier se tourne vers moi et affiche un sourire innocent, comme si rien ne venait de se passer.

- Bien sûr ! Pourquoi ça n'irait pas alors que je suis avec toi ? me demande celui-ci en m'étreignant.

Encore une fois, il me ment, mais je préfère le terme cacher à mentir. Peut-être craint-il ma réaction sur ce qui le tracasse ou bien cela ne me concerne tout simplement pas ? Quoiqu'il en soit, je n'aime pas le voir aussi contrarié.

- C'était une question stupide... Au fait, j'avais oublié de te prévenir, mais ce soir mon père tient à ce que l'on fasse une soirée entre père et fille, donc je ne pourrais pas rester.

- Je comprends. Tu n'as pas besoin de mon approbation, Heavan. Je ne suis pas un de tes parents, tu sais.

- Oui, mais je n'allais pas partir comme une voleuse non plus, je lui souris pour le détendre un peu.

- Mmh, si tu avais tenté de le faire, je t'aurais rattrapé sur le champ, réplique celui-ci en retrouvant son légendaire air espiègle, et je t'aurais fait comprendre que tu m'as pas mal vexé, ajoute-t-il plus lentement le regard vibrant de désir, je dirais même, énormément.

Sans vraiment le vouloir, j'ai réussi à effacer ses pensées négatives. Le simple fait de m'imaginer passer le reste de l'après-midi collé à lui me comprime le cœur. Je n'ai pas envie de sortir dîner ce soir, mais j'accorde tout mon temps à Louis, alors je me dois d'accepter de passer rien qu'une soirée avec mon père. Disons que ce sera pour le remercier de me laisser vivre ma vie amoureuse comme bon me semble et avec qui je veux.

Louis a un don pour me procurer autant de sensations lorsqu'il me touche, à me faire sentir aussi vivante quand il me murmure un tas de choses à l'oreille. Il a cette capacité à me rendre dingue rien qu'en me regardant. Il est à la fois la tentation, mon petit péché mignon dont je n'arrive plus à me passer, mais il est aussi un garçon intègre et bienveillant en toute circonstance. Ce garçon est en tout point ce dont je pouvais rêver.

Alors qu'il dépose de légers baisers dans le creux de mon cou, il défait une des bretelles de mon haut afin de s'étendre sur mon épaule.

Je pourrais me perdre dans ce flot d'attentions et d'intimité, mais si je me laisse aller, je ne vais pas réussir à décoller de son antre. Or, il faut que je rentre chez moi pour me préparer avant de sortir.

- Louis, j'exhale un soupir tout en m'agrippant à lui, pas maintenant.

- Mmh ?

Je ne sais pas où donner de la tête, je devrais le repousser, mais une autre part de moi me demande pourquoi je devrais faire ça ?

N'écoutant que mon instinct, celui-ci rejoignant mon cœur, je m'engage dans un maelström d'émotions et de ressenti où nous perdons, lui et moi, le contrôle de nous-même.

Après tout, mon père pourra bien attendre un peu.