Chapitre 74
Jour 78 : le matin
Une peur bleue me paralyse, et mon cœur, déjà en proie à une agitation intense, semble battre plus fort que jamais, comme s'il voulait s’échapper de ma poitrine. Une chaleur soudainement envahissante se répand sur mes joues et ma respiration devient précipitée, comme si l’air était devenu trop lourd à supporter.
La musique, encore assourdissante dans mes oreilles, me rend complètement déconnectée de la réalité. Lorsque je me retourne brusquement, mes yeux s'écarquillent, prise au dépourvu par ce geste inattendu.
Faites que ce ne soit pas Bill ! Depuis quelques jours, je sens son regard peser sur moi comme une menace silencieuse. Il me fixe, guettant le moment où il pourrait m’approcher, comme un prédateur attendant le bon moment pour fondre sur sa proie.
Pourtant, au lieu de la silhouette angoissante de Bill, mes yeux se posent sur ceux de Louis. Ce regard qui, sans le vouloir, égaye mes journées. Immédiatement, mon cœur cesse de tambouriner et trouve un rythme plus calme, plus sûr, un peu comme si tout s'apaisait dans ce simple échange visuel.
Je vois ses lèvres bouger, mais je n’entends pas ses mots. Un instant, je suis complètement perdue, absorbée par le tourbillon de mes pensées. Puis, la réalité me rattrape brusquement.
– Ah !
Je me souviens alors que mon casque est toujours en place, mes oreilles noyées dans la musique. L’idiote que je suis ! Un léger sourire se forme sur mes lèvres alors que je le retire précipitamment.
– Pardon, je n'ai pas entendu.
Louis éclate de rire, une lueur malicieuse dans le regard.
– Évidemment ! Vu ce que tu as collé sur tes oreilles, je ne m'attendais pas à ce que tu me voies. Et là, franchement, tu n’as aucune excuse.
– Non, c’est vrai. Mais avec le nombre de personnes qui se tiennent devant le portail, tu veux que je te repère comment, hein ?
– Pas faux. Allez, disons un point partout.
Un soulagement m’envahit, un poids que je n'avais pas réalisé porter disparaît. Rien n'a changé, il est toujours le Louis du week-end, et ça me rassure plus que je ne voudrais l’admettre.
– On rentre ?
Celui-ci tend la main vers moi, je la contemple un instant, hagard. Ce simple geste, si naturel pour lui, fait naître en moi un frisson familier. Je la prends. Le contact me fait presque oublier la réalité, il éveille des souvenirs d’hier et rend l’inquiétude du regard des autres encore plus lointaine.
Louis n’a jamais eu de problème avec l’idée de me toucher. C’est dans ces gestes simples que je perçois le contraste : les gestes plus intimes, ceux qui signifient quelque chose de plus fort, de plus... personnel, restent encore hors de portée pour lui. Ça semble le fruster, mais il ne devrait pas.
Nous nous dirigeons vers la salle de cours. Devant la porte, il n’y a personne. Je soupire intérieurement, soulagée de cette petite trêve.
– Pour être honnête, je pensais que tu cherchais à m’éviter.
Cette remarque me surprend. C'est l'inverse que je croyais.
– J’ai pensé exactement la même chose de ton côté.
– Eh bien, nous avons échappé à un malheureux quiproquo, finalement.
Louis ponctue sa phrase d’un rire désinvolte, une tonalité qui me fait sourire malgré tout. Quand il se met à plaisanter, tout prend une tournure légère, presque théâtrale.
– D’ailleurs, nous n’en avons pas vraiment parlé ce week-end, mais je tiens à te proposer des leçons de guitare. La dernière fois ça avait tourné au fiasco, alors....
Je réalise soudain que ce détail m’était complètement sorti de l’esprit, englouti dans la vague d’événements qui ont secoué ces derniers jours.
– Si tu insistes, je ne suis pas contre, répondis-je, mon enthousiasme revenant peu à peu, mais il va falloir trouver un endroit où ça ne risque pas d’être trop... compliqué.
– L'endroit, c’est déjà réglé. Tu n'as qu'à venir ici, et on ira dans la salle de répétition.
– Ça serait génial !
Je suis déjà transportée par l’idée de pouvoir m’y mettre sérieusement, mais surtout de pouvoir créer un lien unique avec lui à travers la musique.
L’excitation me gagne presque instantanément, et je remarque que Louis, amusé, laisse échapper un petit rire. Sauf qu'à cet instant, un groupe d’élèves arrive vers notre direction, alles ma bonne humeur s’effondre aussi soudainement qu’elle est apparue.
Louis remarque mon changement d’attitude et, en me murmurant à l’oreille, il me fait une promesse silencieuse.
– Ne fais pas attention à eux, tu sais, tu n’es plus toute seule. Nous sommes deux maintenant.
Des frissons me parcourt tout le corps. Ces mots me font chaud au cœur, bien plus que je ne voudrais l’admettre. Il est sérieux, ça ne fait aucun doute, il ne joue pas un rôle. Pas pour l’instant, en tout cas, du moins, je l’espère.
Alors que nous nous retrouvons entourés d'élèves curieux, parmi lesquels je reconnais Angel et Rosa, Louis m'entoure de son bras, m'attirant contre lui. Il se baisse un peu, m’enlaçant par la taille avec une facilité naturelle. Même si nos gestes attirent tous les regards, je m'efforce de garder mon attention concentrée sur lui. Son étreinte est si rassurante, si réconfortante, que tout le reste semble se dissoudre autour de nous.
Je me sens bien, là, à ses côtés. Bien plus que je n'aurais cru possible il y a quelques semaines.
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