* TONES AND I • Never seen the rain *

‒Il pleut du torrent dehors ! crie mon petit ami.

‒Allez, on y va quand même, je lui devance et prends sa main.

Celle-ci est très froide, contrairement à la mienne. Je lui tire mais il ne bouge pas avec son corps de mollusque.

‒Allez, viens ! insisté-je.

‒Attends... Tu ne crois tout de même pas que je vais te raccompagner jusqu'à chez toi avec cette pluie diluvienne ?

Je retire ma petite main de la sienne et m'arrête dans mon élan.

‒Ne me dis surtout pas que tu vas me laisser partir seule comme ça !?

‒Je n'ai pas dit ça... Ce que je veux faire c'est qu'on devrait peut-être attendre que ça s'apaise un peu... Histoire de ne pas être trompé jusqu'aux os ! On n'a même pas de parapluies ni d'imperméables !

‒Ça ne va pas s'arrêter ! Mais tu n'as pas entendu la météo ou quoi ?! Ils ont dit qu'aujourd'hui il va pleuvoir toute la journée. Et dire que si tu avais une voiture, on n'aurait pas à faire toute cette scène !

‒Tu parles ! J'ai laissé ma moto à L.A., je te rappelle !

‒Mouais mouais...

‒Mais on va tomber malade si on y va maintenant !

‒Si tu tombes malade, je serai là pour te soigner, déclaré-je.

‒Et si tu tombes malade avec moi ?! Qui est-ce qui va te soigner !?

‒Toi...

‒Je ne serai même pas capable de me soigner moi-même. Comment veux-tu que je te soignerai...?

‒Je te soigne et après, c'est vice versa !

‒T'es tellement têtue toi...

Sans attendre quoi que ce soit, Seth se jette sur moi et m'embrasse. Prise par surprise, je ne réagis pas. Ma colère s'est dissipée en un rien de temps. C'est fou comment ce garçon arrive à me rendre aussi bipolaire en une fraction de seconde... À bout de souffle, nous nous détachons. Ses yeux verts sont magnifiques lorsqu'ils croisent les miens. Je ne peux m'empêcher de sourire dans ses bras.

‒Tu veux vraiment y aller là maintenant ? demande-t-il, me regardant droit dans les yeux.

Je hoche la tête. Il entrelace nos doigts avant de prendre un grand souffle. Il ouvre la porte de l'appartement et l'odeur fraîche de la terre humide dans les recoins du quartier recouvre mon nez. Seth a pris un sweat à capuche, il m'en a donné un à moi aussi. Et sérieusement... Son odeur se répand dans tout mon corps et bordel, j'aime cette sensation. Je sens l'odeur de mon petit copain, nihahahaha ! C'est la fiesta ! Je vais finir par devenir hystérique et pathétique si je continue... Une fois dehors, il me recouvre de ses deux grands bras et en un rien de temps, nous sommes trompés. La pluie tombe. Je sens ses muscles se contracter ; il essaie de me protéger. À ce moment précis, je ne voulais que le temps s'arrête. Il est là tout près de moi. Nos corps se frôlent de temps en temps et je n'ai qu'une seule envie : c'était qu'il m'embrasse... Putain... Ce garçon est tellement beau avec ses yeux verts perçants, ses cheveux frisés et trempés par la pluie, ses muscles évitant une goutte me tomber dessus. C'est là et seulement là que j'étais sûre d'une chose.

Je suis complètement tombée folle amoureuse de lui... Oui. Je l'aime, ce garçon. Il a beau être détestable, au fond de lui, il a un cœur en or. La vie n'a pas été tendre avec lui et il a du mal à faire confiance en quelqu'un. Et s'il s'avère qu'un jour de malheur, il me quittait... Tout une part de moi restera vide éternellement. Cette joie s'en ira avec lui. J'ai tellement peur de le perdre... J'ai peur de souffrir une seconde fois... Comme lorsque papa nous a quittés. Et je déteste ce sentiment.

‒Tu sais que tes cheveux sont beaux quand ils sont trempés ? Et tes yeux... Ils sont si brillants, dit-il du tac au tac tandis que je rougis malgré les gouttes sur mon visage.

*

Les examens sont finis, il y a trois semaines exactement. Comme convenu, ma mère est venue nous rendre visite durant la semaine des épreuves. Elle est restée seulement pendant cinq jours, elle ne devait pas laisser Nolan seul longtemps. Nous avons rattrapé les moments d'absence entre mère et fille. Vu que sa cuisine est la meilleure, Hosea lui a laissé cette corvée. Elle nous a énormément gâté, et spécialement Cullen comme l'autre fois durant son séjour. Grâce à ma mère, j'ai pu surmonter tout mon stress à passer mon premier examen universitaire. Je dois avouer que les épreuves n'étaient pas si difficiles que je les ai imaginées. Bien évidemment, il y en a celles qui l'étaient. Un des enseignants a mis un chapitre que la plupart de nous n'avait pas étudié... Je ne m'y suis pas du tout attendu que j'ai mis n'importe quoi sur ma feuille de copie. Je me rappelle encore la tête du professeur se moquer de notre réaction lors de l'examen... J'avais presque envie de rire ce jour-là ! Nous avions envie de lui taper la tête. Espérons que tu ne fasses pas de rattrapages, ma belle... Espérons. Les résultats des examens seront affichés dans quelque temps. Nos notes de ce semestre seront formées à partir de l'ensemble des unités d'enseignements (ou matières). Si un étudiant obtient trois unités en moyenne sur quatre, il sera automatiquement validé et il ne fera aucun rattrapage. Au cas contraire, il en fera obligatoirement, s'il veut être admis en deuxième année.

Durant ces nouvelles semaines, j'ai rencontré un nouvel ami. Il s'appelle Oliver. Il est très grand gaillard. Il a les cheveux blonds cendres que ceux de Jay. Il adore jouer au basket, d'ailleurs, c'est de cette façon qu'il mesure 1m 95. Il m'invite souvent à venir l'encourager et regarder son équipe jouer. J'assistais à quelques uns de ses matchs, heureusement que ma maison est près du terrain. Sinon, tu ne te casserais pas les pieds... Et il y a également l'autre fille que j'ai rencontrée lors de la prise de contact. Comment s'appelait-elle déjà ? Hum... Dylan. Elle participe aux matchs. Elle sait très bien jouer, j'aime bien les regarder. Oliver, plus connu sous le surnom d'Olly, habite à quelques ruelles du campus. Il prend le même chemin que moi quand il s'y rend. J'adore être en sa compagnie. Il est gentil, débrouillard et intelligent. Il a aussi un bon sens de l'esprit, il aime beaucoup les défis. J'avoue qu'il a beaucoup d'audace. Il fait preuve d'une sagesse incroyable. Malgré tout cela, il a ses propres défauts qu'on qualifierait de caractéristiques humaines. Il est très drôle, on ne le voit pas souvent se concentrer sur quelque chose. Il rit presque toute la journée. Même en regardant son visage, on y voit déjà l'hilarité gravée dessus. Je suis assez contente d'avoir pu rencontrer des amis comme ceux que j'ai. Jay, Mandy, Nila, Fiona, Scott, Olly et Tyler. Ils ont tous leurs propres personnalités. Qui aurait pu deviner que j'aurai plusieurs amis ici dans cette ville ?

*

‒Et Mandy ? demandé-je.

‒Elle n'a pas pu venir, répond Jay. Elle m'a dit qu'elle ne sera pas présente aujourd'hui... Je crois qu'elle a quelques choses d'important à régler.

‒Bien sûr. Et elle attend de moi que je lui prête mes cours après..., grogné-je.

Cette fille rate tous les cours. Elle sèche tout le temps et après, c'est moi qui me retrouve à tout lui expliquer ! Il y a des moments où je lui mens, prétendant que je n'y comprends rien à un chapitre juste pour qu'elle me laisse tranquille. Je l'adore mais des fois, elle en fait trop et je ne tolère pas cela. Ma gentillesse a une limite aussi.

‒Détends-toi, Pie, me calme Jay. Je lui donnerai les miens...

‒Comme si t'en avais, marmonné-je entre ma barbe invisible.

Ils sont tous pareils...

‒Les garçons, je m'en fous un peu s'ils sèchent les cours, dis-je. Mais et Nila ? Elle est où, elle aussi ?!

‒En revanche la concernant, j'en sais rien. Elle n'a pas répondu à mes textos depuis hier soir jusqu'au matin.

‒C'est bizarre... Ce n'est pas son genre de disparaître comme ça ! s'étonne Scott qui venait d'arriver.

‒Je ne suis sûr de rien mais je crois qu'elle a eu une dispute avec son petit ami, répond Jay.

‒Aïe..., couine Fiona en levant ses yeux vers nous.

‒La pauvre si c'est le cas, ajouté-je.

Nous ne sommes que quatre à étudier aujourd'hui dans notre groupe d'amis. Les autres sont absents. Aujourd'hui, les cours termineront plus tard. Nous avons trois unités, on a déjà eu nos premières rencontres avec les nouveaux enseignants. En parlant de professeurs, on a croisé notre professeur de psychopathologie. Il s'est ouvertement moqué lorsqu'on lui a expliqué notre surprise à propos du chapitre qu'il a ajouté à l'examen. Il s'est bien payé notre tête.

« Ce soir, il y a le fameux match de hockey de la ville contre Washington, a-t-il dit. Si notre équipe gagne à ce match, je vous promets de changer les points de ce chapitre en bonus pour tout le monde ! »

Sérieusement, quel genre d'enseignant peut plaisanter à ce point. Même si je ne regardais aucun match de hockey, je sais d'ores et déjà que notre équipe va perdre. S'il a fait ce pari, il sait déjà que l'autre équipe est imbattable ! Ceci dit, cela n'a pas enlevé mon envie de le trucider...

*

‒Je crois que je vais partir à la pause avant le commencement du deuxième cours...

Cette voix venait de la personne à côté de moi. Jay. Je le regarde étrangement.

‒Et pourquoi ça ?

-Je... Je crois que je ne me sens pas très bien.

‒Tu es malade ?

-Je ne sais pas trop... J'ai mal à la tête depuis une heure déjà.

‒Mais t'as pas dormi hier ou ça se passe comment ?

‒Oui... J'ai fêté l'anniversaire d'un de mes potes... On est resté jusqu'à minuit. Voilà pourquoi.

‒Gueule de bois ?

‒Ouais... Sûrement.

‒Ah... Je te conseille de partir alors.

‒Ouais, c'est ce que je vais faire.

*

Les cours sont terminés, précisément il y a deux minutes. Il est déjà très tard, aux alentours de 18 h 40. L'enseignante a tenu qu'on finisse un chapitre. De ce fait, nous avons dû rester plus tard. Nous étions en rogne contre elle parce qu'en plus de la nuit noire, il neige. Et dire que je n'ai rien qu'un manteau... Pas de voitures. Pas de parapluie, ni même un capuchon, nada. Je déteste définitivement ce professeur ! Je vais rentrer avec Scott vu que Jay est parti au début du deuxième cours. Il ne restait plus que moi, Fiona et Scott. C'était vraiment ennuyant, sans l'ambiance des autres, les cours ont été lents. J'arrivais à peine à me concentrer. Il y avait le brun qui me détendait un peu, il n'arrêtait pas de me taquiner. À la sortie du bâtiment, l'épaisseur de la neige qui tombe est assez conséquente. On ne voit presque rien. Quelques étudiants sont partis en courant, d'autres vont dans la direction du parking, et d'autres attendent sur le pas de la porte de l'amphi, comme nous. Je suis à présent à côté de mon ami. Fiona étant déjà partie avec une de ses camarades habitant dans son quartier. Il semble être captivé par le temps.

‒Je crois qu'on devrait partir maintenant..., proposé-je.

‒Quoi ?! Mais regarde, il neige trop abondamment ! On va attendre que ça s'apaise un peu.

‒Et si ça va s'empirer...? dis-je.

‒Non. Ça va s'atténuer et on y va après.

J'ai comme l'impression d'avoir déjà eu cette conversation...

‒Ça fait quelques minutes qu'on est resté planté là à attendre. Et ça n'a pas changé... Au contraire, on dirait qu'il neige encore plus.

‒Tu délires j'espère, Purpie ?! Aller et être gelé jusqu'aux os ! Ah non merci !

Il agit exactement comme... On dirait que nous reproduisons la même conversation qu'il y a eu ici, a un an auparavant. La colère monte en moi et sans l'attendre, je me mets à courir. Les bruits sonores de ses pas me font retourner. Il m'a suivi. De toute façon, il n'avait que le choix de me suivre ou de rester là sans moi. D'ailleurs, il n'habite pas mon quartier... Si j'avais encore de batterie sur mon téléphone, jamais je n'aurais à endurer ces embrouilles ! J'aurai appelé Hosea ou Cullen pour me chercher. Je regrette également d'avoir oublié mon argent, sinon je serai monté en taxi. À peine dix minutes que nous sommes frigorifiés. Et dire que chez moi à pieds, cela fait vingt minutes !

‒J'ai un cousin qui habite à quelques pas de ce chemin ! Et si on y allait juste le temps de prendre un souffle et d'emprunter un imper ou parapluie ! crie Scott.

Je réfléchis. Ce serait impoli mais j'ai besoin d'une pause là... Je suis gelée et mes vêtements sont couverts de neige. Je n'arrive même plus à respirer correctement à ce rythme.

‒Okay, je te suis ! dis-je.

On dévie la route vers une petite ruelle. Scott s'arrête devant un grand appartement. Nous y entrons ; les regards étranges des gens nous dévisagent..

‒Tu peux m'attendre ici. Je vais le chercher. Il n'est pas dans sa chambre.

Apparemment, c'est un logement exclusivement masculin. Des garçons me reluquent de la tête aux pieds, je me sens nue malgré mon grand manteau qui enveloppe mon corps. Je déteste cette sensation. Le brun arrive enfin avec un parapluie. Ah, ce n'est pas trop tôt ! Je le regarde. Oh le salop ! Il s'est permis de se changer alors que j'étais là à l'attendre !

‒Tu ne viens pas ? demandé-je, dégoûtée.

‒Non, je reste. Tu pourras rentrer seule ?

‒Je me débrouillerai très bien, merci.

‒Attends, je te raccompagne jusqu'à la porte.

Une fois sortie, il me lance un compliment qui me pince le cœur.

‒Au fait, t'as de beaux cheveux, une fois trempés !

Je ne lui réponds pas et cours vers ma maison. C'est définitif. Je déteste Scott.