Devinette. .
- Sasha, m'apostropha-t-il lentement, malgré le peu de temps que je t'enseigne le chant je suis persuadé que tu as très bien compris ce que je t'ai demandé.
- Euh.. Cafouillé-je, totalement affolée. Vous..vous voulez un..
- Donne-moi ce que tu as ! M'arrête-t-il brusquement.
Son haussement de ton me fait peur et sans pouvoir me contrôler je sursaute avant d'être prise de tremblements. Je bafouille des excuses tout en cherchant d'une main maladroite un feutre noire à pointe fine alors que Faustin est mal-à-l'aise ce qui m'angoisse encore plus. Pourtant, malgré la peur qui noue soudain mon ventre à la simple idée que je l'ai énervé avec mes questions idiotes, je lui offre un sourire tout en lui tendant le feutre en question. Mon sourire est maladroit, tremblant, effrayé, mais c'est un sourire quand même. J'y tenais. Je devais. Grand-frère m'avait appris à être aimable quoi qu'il arrivait.. Alors je devais sourire peu importe ce qu'il se passait !
Je ne vis pas les sourcils de Faustin se retrousser tristement vers le haut au moment où il me prend des mains le feutre. Je ne l'entendis pas soupirer non plus. Je le vis à peine dessiner sur l'un de ses doigts, habilement, rapidement. Il me montre son index gauche après quelques secondes à peine.
- Tu vois ce que c'est, Sasha ? M'interroge-t-il sans plus me quitter des yeux.
Moi, je perds mes mots, pensive.
Je me demandais quel était le but de sa petite démonstration, où voulait-il m'emmener et pourquoi maintenant. . ?
- Sasha ? M'appelle-t-il de nouveau.
Même si sa voix est plus douce, mes tremblements reprennent.
J'étais en train de l'ennuyer. . Je risquais de l'énerver si je continuais à me comporter ainsi ! Me réprimandé-je avant de murmurer :
- On dirait..une fille..qui pleure..
Faustin hocha la tête avant d'ajouter :
- C'est exactement ça. Laisse-moi un instant, s'il te plaît. ..
Je fis oui de la tête avant de l'observer curieusement malgré moi, dessiner autre chose sur son majeur gauche. J'essaye de deviner ce que c'est mais ce n'est que lorsqu'il me montrer ses deux doigts que je perçois ce que c'est :
- Et maintenant ? Me demande mon coach encore plus doucement.
Je lève le sourcil tandis que mes yeux s'embuent.
Mais qu'est-ce qu'il voulait dire par là ? Que voulait-il me faire passer comme message ? C'est moi la fille qui pleure ?
M'irrité-je un peu, énervée de l'image qu'avait Faustin de moi. Je ne représentais dont rien d'autre qu'une madeleine. . Ou peut-être était-ce vraiment ce que j'étais ? M'interrogé-je en faisant mon possible pour ne pas fondre en larmes comme me demandaient mes yeux.
- C'est.. Commencé-je d'une voix tremblante. Un garçon.. quelqu'un..qui console..la fille.. Bégayé-je avec peine.
Faustin hoche de nouveau de la tête :
- Nous sommes d'accord. Me met-il au courant. Ce geste est tout-à-fait normal : lorsque quelqu'un est triste, il faut le consoler jusqu'à ce qu'il se sente mieux. M'explique-t-il comme s'il m'expliquait l'intensité que je devrais avoir sur tel ou tel passage dans une chanson ; ça me perturbe. Cependant..
Il s'arrêta soudain, avant de plonger ses yeux perçants dans les miens et me supplier en joignant ses mains et fermant les yeux :
- Aurais-tu l'amabilité de prêter des crayons de couleurs à ton pauvre coach. . ? Et une feuille aussi.. ?
En temps normal j'aurais rougi ou ri.. Et Faustin le savait. Il était persuadé que j'allais réagir de la sorte sauf que..le cœur n'y était pas du tout. . Pensé-je tristement.
J'étais déjà attristée comme cela mais alors le fait qu'il veuille dessiner me rappelait douloureusement Edwin qui adorait lui aussi le dessin. .
Ne laissant rien paraître de cela - en tout cas j'espère car j'estimais avoir assez épuisé mon coach avec ma sensibilité - je lui assurai avec un petit sourire :
- Bien sûr, bien sûr.
Je ne mis pas longtemps à trouver ce qu'il me demandait et tendis le tout à Faustin qui avait décidément envie de jouer aux devinettes aujourd'hui sans même remarquer son regard soucieux à mon égard. Mais ce dernier aussi masque cela en arborant à son tour un sourire pour me dire :
- Ne regarde surtout pas ce que je fais! D'accord ?
Je l'observe, un peu décontenancée mais murmure finalement un petit " D'accord.. "
Peu convaincu, il fit la moue avant de me demander de fermer les yeux.
Là, mes lèvres se séparèrent tandis que j'allais lui faire part de mon désaccord mais il me devance vite en m'assurant :
- S'il te plaît, Sasha, c'est important..!
À cet instant précis j'ai juste envie d'exploser telle une cocotte minute. Envie de hurler, pleurer, renverser mon bureau, cogner mes poings contre le mur. . Je n'en pouvais plus de cette misérable vie. .
Aussi, lorsque je mis mes mains sur mes yeux ce ne fut pas dans le but de faire plaisir à mon cher et tendre coach mais tout simplement pour essayer de décompresser un peu. . Retarder de quelques instants, quelques heures, quelques semaines mon explosion. . Je devais tenir. . Pensé-je en entendant distinctement Faustin colorier. .
Mon esprit se vide peu à peu . .
Je repense à la disparition soudaine de mon frère.. à l'enquête de la police qui ne semblait pas avancer. . À mes sentiments partagés que j'avais à l'égard de cet étrange coach dont les charmants petits amis venaient de me briser. .
Un soupir m'échappa alors que Faustin ne s'arrêtait pas.
Avec tout ça je ne pensais même plus à la nouvelle chanson que je devrais chanter au live..
C'était quand même beaucoup plus important que le fouillis qui se déroulait à l'intérieur de moi ! Me répété-je à plusieurs reprises pour m'en convaincre..
- C'est bon ! S'exclame soudain Faustin.
J'ouvris lentement les yeux, légèrement déboussolée.
Je ne soutiens pas le regard insistant qu'a Faustin sur moi. . Il semble perdu dans ses pensées et pianotait nerveusement sur la feuille qu'il avait soigneusement retourné.
- Tu te souviens de ces deux-là ? M'interroge-t-il lentement après quelques instants en me remontrant ses deux doigts.
Je fis oui de la tête, trop à fleur de peau pour pouvoir dire quoi que ce soit.
Faustin reprend alors :
- Rassurer quelqu'un est très important. Le cajoler l'aide à se sentir mieux mais aussi à accepter qu'il est triste ce qui est essentiel pour que le poids exercé sur son cœur ne soit plus qu'un mauvais souvenir à oublier.
Je l'écoute sans trop le suivre. Je me noie dans ses explications en essayant de comprendre le possible message codé qu'il tentait peut-être de m'envoyer. Je ne le suis plus du tout quand il déclare :
- Mais tout cela n'est possible que si ça..
Il me regarda profondément dans les yeux.
- ..ne se déroule pas. Insiste-t-il en articulant bien ses derniers mots.
J'eus soudain la boule au ventre en comprenant qu'il parlait bel et bien de moi...
Je ne relevai même pas le talent et la rapidité qu'il avait pour dessiner ce " petit " dessin en aussi peu de temps et aussi bien tant j'étais angoissée. . Et ces détails-là ne faisaient que me rappeler encore et toujours mon grand-frère. .
Mais malgré tout le chamboulement qui opérait dans ma tête, comme j'avais si l'habitude de le faire, je feignai l'indifférence et affichai un sourire, faible, presqu'inexistant mais je le sentais et lui aussi! Alors à quoi bon s'inquiéter ? Et, pour assurer que j'allais bien je m'étonnai :
- Je ne savais pas que nous jouions aux devinettes. Je vais jouer plus sérieusement, je le promets.
Là, tandis que je reprenais lentement des couleurs, le visage de Faustin s'assombrissait à vue d'œil.
" Combien de temps va-t-elle encore m'assurer qu'elle va bien alors que ce n'est pas le cas.. ?! " Se désole le coach, à bout et culpabilisant.
Il eut soudain une autre idée.
Oui, il allait tenter une autre approche. Se persuada-t-il avant d'ouvrir la bouche.
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